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d'autre part, qu'ordre soit donné au Vali d'empêcher toute vexation à l'égard des villages où aucun trouble ou aucune tentative de soulèvement n'auraient été signalés.

Il est évident qu'un sévère contrôle administratif, financier et judiciaire serait le seul moyen de faire rentrer un peu de calme moral et de bien-être matériel chez ces pópulations si durement éprouvées, mais il est douteux que cette fois-ci encore ces réformes si désirées et tant attendues sortent des délibérations de la Commission actuellement réunie au Grand Vizariat.

Edmond BAPSг.

N° 23.

M. Bonnardet, Gérant de l'Agence et Consulat général de France à Sofia,

à M. Delcassé, Ministre des Affaires étrangères.

Sofia, le 13 août 1902.

Le Congrès macédonien s'est ouvert dimanche dernier; l'action du Gouvernement s'est exercée pour maintenir ces réunions sur le terrain pacifique et les empêcher de dégénérer en manifestations révolutionnaires. Les fonctionnaires ont été prévenus qu'ils ne pourraient y assister comme délégués sous peine de révocation immédiate.

Dès les premières séances l'antagonisme s'est révélé entre les partisans du Comité directeur actuel et ceux de Boris Sarafof. Le Comité a réussi à faire élire, mais à une petite majorité seulement, un bureau qui lui est dévoué. Il a refusé d'admettre au Congrès 33 délégués élus par les Comités qui ne sont pas reconnus. Ces délégués ont été aussitôt réunis par Boris Sarafof, ont voté des protestations et pris la décision d'assister quand même aux réunions du Congrès.

Les journaux de ce matin constatent ces dissentiments et exhortent les délégués à la conciliation. Il est bien certain que, si cette division continuait, les Comités seraient bientôt réduits à l'impuissance et leur œuvre en Macédoine compromise.

Le Comité a fait publier dernièrement une brochure qui a été adressée à toutes les Agences diplomatiques et qui contient un exposé de la situation de la Macédoine et le programme des réformes proposées par le Comité. Ce programme se résume ainsi : « La Macédoine aux Macédoniens ». Il est bien certain que ce que veut le Comité c'est la Macédoine aux Bulgares. Mais, sachant que les Bulgares ont la majorité dans la province, il ne préconise pas, comme les Grecs ou les Serbes, un partage immédiat. Il ne redoute pas pour la Macédoine une période d'autonomie qui permettrait à la nationalité bulgare d'affirmer sa prépondérance et ne constituerait qu'une étape dans la voie de l'annexion à la Bulgarie.

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N° 24.

M. Bonnardet, Gérant l'Agence et Consulat général de France, à Sofia,

à M. Delcassé, Ministre des Affaires étrangères.

Sofia, le 27 août 1902. Dès les premières séances du Congrès macédonien unc scission s'était faite entre les partisans du Comité actuel et ceux de Boris Sarafof.

La discorde s'est accentuée après la réélection du Comité directeur actuel. Les partisans de Boris Sorafof ont quitté le Congrès et se sont réunis aux Délégués auxquels les Comités actuels n'avaient pas voulu reconnaître un mandat régulier. Ils ont formé un Congrès dissident qui a élu un nouveau Comité directeur avec un certain Stanicheff comme Président. Mais Boris Sarafof reste l'âme de ce nouveau groupement.

La scission est donc complète. Il y a aujourd'hui deux Comités macédoniens : un Comité modéré, sous la présidence du docteur Michaïlowski et du général Zontcheff; un Comité à tendances plus révolutionnaires, sous la direction occulte de Boris Sarafof. Ce dernier Comité semble le plus nombreux.

Les deux Congrès ont clos leurs séances dimanche dernier. Il ne semble pas qu'une besogne bien sérieuse y ait été faite. Les nouveaux Comités Sarafoffistes ont recommencé auprès de certains négociants de la ville leurs tentatives d'extorsion d'argent. Les journaux annoncent également qu'une bande de 60 Macédoniens, armés chacun de deux fusils, qui avaient quitté Sofia pour pénétrer en Macédoine, vient d'être arrêtée sur les pentes du Vitosch. Les personnes qui la composaient ont été emprisonnées.

N° 25

BONNARDET.

M. Constans, Ambassadeur de la République française à Constantinople,

à M. Delcassé, Ministre des Affaires étrangères.

Péra, le 6 octobre 1902.

La situation ne s'est pas améliorée en Macédoine depuis le dernier rapport relatif à cette région, que l'Ambassade a adressé au Département, sous la date du 29 juillet.

Le vilayet de Monastir est toujours le plus troublé et l'agitation encouragée par l'intelligence de la répression n'épargne pas les vilayets voisins. C'est là ce qui ressort des dépêches récemment parvenues à l'Ambassade de nos Agents à Monastir, à Salonique et à Uskub.

A Monastir même, et dans des villages peu éloignés, les Turcs ont répondu en massacrant plusieurs chrétiens, aux meurtres dont avaient été victimes deux gardes-champêtres et un intendant de ferine musulmans tués par des bulgares. D'autre part, le tribunal criminel de Monastir juge sans cesse et sans discernement condamne un grand nombre de Bulgares. Ailleurs, près de

Kastoria, le pays a été troublé par la lutte de deux groupes d'insurgés dont les chefs divergeaient d'opinion. Du côté de Perlépé, on signalait vers le 17 septembre, l'apparition de deux bandes insurrectionnelles comprenant une centaines d'individus parmi lesquels une vingtaine seraient venus directement de Bulgarie. Des troupes ont été dirigées vers les régions où l'on espérait trouver les rebelles. Jusqu'à présent, leurs tentatives sont restées infructueuses.

En somme, le Comité révolutionnaire reste toujours très actif. Il ne se laisse pas décourager par les condamnations que subissent ses partisans et réprime de la façon la plus énergique les trahisons qui viennent à se produire parmi eux. Dernièrement, l'un des insurgés arrêtés s'étant sauvé par ses dénoncialions a été peu après massacré par les camarades de ceux qu'il avait trahis. La semaine dernière, l'ordre a été donné d'appeler les rédifs à Janina, à Derida et à Monastir. On attendrait aussi des troupes d'Asie pour occuper le vilayet. Il semble donc que le Gouvernement soit disposé à procéder énergiquement à la répression de l'insurrection.

CONSTANS.

N° 26

M. Bonnardet, Gérant l'Agence et Consulat général de France à Sofia,

à M. Delcassé, Ministre des Affaires étrangères.

Sofia, le 7 octobre 1902.

Le 28 septembre dernier, au moment où allaient commencer les fêtes commémoratives de Chipka, des nouvelles assez inquiétantes sont arrivées de Macédoine. S'il fallait en croire les journaux bulgares, le vilayet entier de Monastir serait soulevé, les lignes ferrées et télégraphiques coupées, les troupes turques menacées par les bandes bulgares à la tête desquelles serait revenu le colonel Iankoff. Ces nouvelles sont fort exagérées. Au cours de la dernière conversation que j'ai eue avec lui, M. Daneff a démenti leur caractère alarmant. Suivant le Président du Conseil, il s'agit seulement d'une agitation créée par quelques bandes insurrectionnelles. Les Turcs en auront raison facilement à condition toutefois de ne pas se livrer à de sanglantes représailles qui transformeraient rapidement en insurgés les habitants paisibles. Des renseignements que j'ai recueillis auprès de personnes très mêlées au mouvement macédonien, il résulte également que ces tentatives insurrectionnelles ne peuvent prendre une grande extension, les comités intérieurs de la Macédoine étant à l'heure actuelle opposée à tout soulèvement.

La division qui s'est introduite dans les comités macédoniens s'est manifestée à cette occasion. Le Président des comités Sarafof a envoyé à lous les comités adhérents une circulaire indiquant que le mouvement n'était pas sérieux, que tous ses partisans devaient s'abstenir d'y prendre part et de le soutenir directement ou indirectement. Le Comité Michaïlowski, au contraire, essaye de créer une agitation dans le public. Il fait afficher les nouvelles qu'il reçoit de Macédoine el convoque des meetings. Mais, même au sein de ce

Comité, l'entente n'est pas parfaite. Un des membres les plus anciens vient de donner sa démission pour protester contre les tentatives actuelles et aussi contre la conduite du colonel Iankoff : ce dernier, avant de partir pour la Macédoine, se serait engagé par écrit devant le Comité Michaïlowski à ne provoquer aucun soulèvement et, par conséquent, n'aurait pas tenu ses serments. Il y a donc entre les Macédoniens un manque d'entente complet : la grande majorité trouve le moment mal choisi; et, en effet, la saison actuelle est trop rapprochée de l'hiver et de la première tombée de neige pour que l'insurrection puisse s'étendre, durer et amener une intervention des Puissances. Il est bien difficile d'expliquer l'action du colonel Iankoff d'autant plus que les caisses du Comité sont vides et que pourtant les hommes composant ses bandes touchent une solde.

Toutefois, le Comité Michaïlowski a pris prétexte de ces événements pour convoquer vendredi dernier un meeting macédonien à Sofia. On y a voté la résolution d'inviter le gouvernement à demander énergiquement aux grandes Puissances d'améliorer le sort des chrétiens conformément à l'article 23 du traité de Berlin.

BONNARDET.

N° 27.

M. Delcassé, Ministre des Affaires étrangères,

à M. Constans, Ambassadeur de la République française à Constantinople.

Paris, le 14 octobre 1902.

Les renseignements que m'a apportés votre dépêche du 6 de ce mois, sur la situation en Macédoine, et notamment dans le vilayet de Monastir, ne pouvaient manquer de retenir mon attention.

Les détails que vous donnez sur le mode de répression suivi par les autorités turques ont ravivé les craintes que je vous exposais à la date du 13 avril dernier, et que, d'accord avec le comte Lamsdorff, je vous avais invité à signaler à la Sublime Porte.

Dans ces conditions je vous prie de renouveler avec plus de force les conseils de modération que nous avons déjà donnés.

C'est dans un esprit analogue que le Ministre de Grèce à Paris est venu nous entretenir des préoccupations qu'inspirait à son Gouvernement la situation actuelle en Macédoine. La Grèce, d'après M. Delyanni, comprend qu'à l'heure actuelle certaines revendications risqueraient d'être vaines: aussi estelle prête à accepter sincèrement le maintien du « statu quo » en Macédoine, où elle compte tant de ses enfants, pourvu que la Turquie consente à Y réaliser effectivement les réformes sans lesquelles l'agitation révolutionnaire ne saurait prendre fin

Nous ne saurions trop engager la Sublime Porte, dans son propre intérêt, à s'attacher sans plus de retard à la réalisation de ces réformes.

DELCASSÉ.

N° 28.

M. Steeg, Consul de France à Salonique,

à M. Delcassé, Ministre des Affaires étrangères.

Salonique, le 15 octobre 1902.

Il semble démontré qu'une forte concentration de bandes insurgées bulgares s'est opérée pendant les premiers jours de ce mois dans les cazas de Petritch, Melnik, Djoumaa-Balio et Raslog. Dans dix-sept villages de cette région la population mâle tout entière se serait jointe aux révolutionnaires. On aurait même arboré dans quelques localités un étendard vert el rouge, aux couleurs de la Macédoine indépendante.

Le fait est que des forces insurgées considérables se sont emparées du défilé de Cresna entre Melnick et Djoumaa-Balia. Un agent de la dette publique, un percepteur des dîmes et trois gendarmes ont été massacrés dans un poste situé à l'entrée du défilé. Un détachement de troupes qui s'y est engagé a été, assure-t-on, presque entièrement détruit; il paraît certain que 70 blessés turcs ont été, à la suite de cet engagement, transportés dans les hôpitaux de Serrès.

Il y a trois jours, le défilé de Cresna était encore aux mains des insurgés; le Vali de Salonique qui m'avait alors nié le fait a déclaré hier à mon drogman que les communications entre Melnik et Djoumaa-Balia venaient d'être rétablies. Il semble qu'en dehors de la rencontre de Cresna il s'en soit produit une autre aussi fâcheuse pour les Turcs; un détachement de 50 hommes cerné par des insurgés en nombre de beaucoup supérieur se serait perdu el aurait été relâché après avoir dû abandonner ses armes, ses munitions el mème ses chaussures.

Les autorités lurques font régner le plus profond mystère sur tout ce qui se passe dans la vallée de la Strouma. Mais il leur sera certainement difficile de s'emparer des insurgés qui s'appuient, d'une part, aux montagnes de Malesch et, de l'autre, au puissant massif du Pirin Dagh qui, pendant plusieurs mois de l'année 1896, a fourni un refuge inexpugnable à deux ou trois cents révolutionnaires. STEEG.

N° 29

M. Constans, Ambassadeur de la République française à Constantinople,

à M. Delcassé, Ministre des Affaires étrangères.

Péra, le 18 octobre 1902.

Le sultan m'a entrelenu hier de lui-même des événements qui se déroulent dans la Macédoine afin, m'a-t-il dit, que je puisse en rendre compte à Volre Excellence. Il ne m'a pas paru y attacher une très grande importance; il s'est seulement plaint de l'exagération des nouvelles publiées à cet égard par les journaux européens et m'a dit qu'il allait promulguer une amnistie dont il entendait faire bénéficier les rebelles qui se soumettraient aux autorités. Une

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