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actions. La quatrième, que la philosophie moderne avec tous ses efforts est loin d'atteindre à la hauteur des spéculations augustiniennes, et que c'est, par conséquent, vers celles-ci qu'il faut se tourner pour l'avancement de la science.

Le point essentiel de cette idéologie, c'est de bien distinguer le sensible de l'intelligible, la part que l'on doit faire aux sens de celle qui revient à l'intelligence. « Les uns en accordant tout aux sens, sont tombés dans l'Epicuréisme, le matérialisme et l'athéisme, et ainsi, en niant Dieu, ont nié le principe de la création. Les autres, en faisant attention à l'intelligence seulement, ont abouti au fatalisme et au panthéisme et, par la négation des substances créées, ont aussi, de nouveau, nié le principe de la création (1). Or, cette disdinction essentielle est, au jugement de S. Augustin, strictement observée par les Platoniciens: Hi vero, quos merito ceteris anteponimus, discreverunt ea, quæ mente conspiciuntur, ab iis quæ sensibus attinguntur : nec sensibus adimentes quod possunt, nee eis dantes ultra quam possunt. Lumen autem mentium esse dixerunt ad discenda omnia eumdem ipsum Deum, a quo facta sunt omnia (2).

D'où l'on voit clairement que S. Augustin adopte l'idéologie de Platon, la corrigeant où elle pèche et la complétant où elle fait défaut.

Mais on objectera peut-être que S. Thomas est opposé à S. Augustin. Rien n'est plus faux, dit l'auteur de la dissertation. S. Thomas se montre sans doute l'adversaire de la philosophie de Platon, comme elle fut exposée par Aristote, mais il proclame aussi, à chaque pas, n'avoir rien à opposer à l'idéologie de S. Augustin, dont il fut à coup sûr le plus fidèle disciple.

Ces choses exposées, le R. P. Vercelone déplore « que tes philosophes catholiques, par un regrettable oubli de S. Augustin et de S. Thomas, aient remis en vogue et favorisé si longtemps et avec si peu de raison la lutte païenne entre l'idéologie de Platon et celle d'Aristote (1). » L'auteur ajoute toutefois, que le désaccord n'est point dans les choses, mais uniquement dans la manière de les considérer. « Les ontologistes catholiques et les psychologistes également catholiques soutiennent une même chose, de deux côtés opposés; mais il semble aux uns, que ce qu'ils veulent et défendent tous, soit mal compris et encore moins bien défini des autres. Tous sont d'accord à ne regarder comme bonne que la théorie qui maintient la distinction fondamentale entre Dieu et ses créatures, qui sauvegarde, d'une part, la connoissance de Dieu, et de l'autre, celle

(4) Page 17.
(2) L. c., c. 7.
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des créatures, et qui ne compromet ni la réalité de la nature divine, principe de toute autre réalité, ni celle de la créature elle-même, sans laquelle réalité, le principe n'existe plus lui-même comme tel, et la science est ruinée de fond en comble. Sur cela tous sont d'accord. Mais quand ils en viennent à formuler une théorie qui puisse produire ce beau résultat, ils se divisent les uns ne voient plus que la grande vérité universelle qui brille aux yeux de leur esprit, et les autres que la foule des êtres créés que leur font connaître leurs sens internes et externes (1). »

L'auteur finit par rappeler et inculquer qu'il est temps désormais pour les deux écoles d'en venir à un accord parfait. «L'heure de recommencer la philosophie est passée. C'est dans les sources autorisées de la tradition qu'il faut la puiser. La paix si désirée dep us longtemps, existe déjà, depuis plus longtemps encore. Entre S. Augustin et S. Thomas, son plus fidèle disciple, il n'y a pas de désaccord sur l'idéologie, non, mais simplement diversité de méthode, d'exposition et de langage. C'est par un dessein spécial de la divine Provideuce que l'école catholique a deux fois restauré la philosophie par deux voies opposées, en allant d'abord de l'entendement aux sens et puis des sens à l'entendement. C'est une honte de nommer avec mépris le Platonisme, alors que notre gloire est d'avoir un Platon catholique, comme c'est aussi manquer de respect à la raison de se laisser emporter en reproches contre Aristote, alors qu'un Aristote catholique a rempli l'Eglise de la renommée de sa sagesse (2). C'est au nom de ces grands et bienheureux docteurs que je demande la paix si vivement et si justement désirée (5).

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Nous ne pouvons qu'applaudir à ce souhait si louable du savant auteur. Il n'est que l'aspiration d'une âme noble et animée du zèle le plus saint pour la cause de la vérité et de la religion. Mais nous aurions désiré que le R. P. Vercellone eut indiqué, d'une manière plus précise, les moyens nécessaires pour atteindre un si grand bien. La fin, tous la veulent; on n'est en désaccord que sur les moyens. Or, en pratique, les moyens sont l'essentiel. Voici le seul qu'il propose les ontologistes, dit-il, doivent davantage considérer les créatures, et laisser ainsi aux sens ce qui leur revient, non adimentes sensibus id quod possunt; et les psychologistes, de leur côté, doivent veiller à mieux sauver l'intelligibilité des choses, et à ne pas accorder aux sens des forces qu'ils n'ont pas, non dantes sensibus, ultra id quod possuut. »

Mais cette règle, bien que très-sage en elle-même, nous semble néanmoins absolument trop indéterminée, trop vague; puisque c'est

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précisément sur la part qu'il faut faire aux sens et sur celle qu'il faut accorder à l'entendement que roule la controverse. Il seroit donc utile, nous semble-t-il, de proposer une règle plus précise et mieux déterminée. Le désir de la paix, souhaitée de tous, nous engage à présenter les deux moyens suivants: Et d'abord, c'est de prendre sans doute St-Augustin pour guide, mais tel qu'il est interprété et commenté par St-Thomas. C'est là une précaution très rationnelle. On pourroit en effet mal comprendre la doctrine de St-Augustin. La chose s'est vue, pour les jansénistes dans la question de la grâce, et, pour ne pas sortir de notre sujet, pour Malebranche même en fait d'idéologie. D'un autre côté, nous savons que sous tous rapports St-Thomas fut le plus fidèle disciple de St-Augustin; l'auteur lui-même en fait très-sagement la remarque. Où donc trouver un guide plus sûr pour découvrir le sens des écrits de ce grand docteur de l'Eglise? Cet accord fait, il n'y aurait plus aucune difficulté à concéder aux ontologistes que la lumière divine est celle quo illustratur anima, et que l'âme connoit les choses dans les raisons éternelles de l'intelligence divine elle-même: -pourvu toutefois que cela fùt compris à la manière de St-Thomas, qui a soin de distinguer, en faisant remarquer que St-Augustin ne l'entend pas tanquam in objecto cognitio, sed tanquam in cognitionis principio, sunt si dicamus quod in sole videntur ea quæ videntur per solem, c'est-à-dire qu'il ne faut pas le prendre dans le sens que la lumière de Dieu lui-même éclaire notre esprit, ou que les raisons éternelles soient directement aperçues en elles-mêmes, mais dans ce sens que nos idées sont le reflet des raisons éternelles elles-mêmes et que la lumière dont Dieu a doué notre esprit est une participation par ressemblance de la lumière incrée elle-même. Et en effet, pourquoi seroit-il plus nécessaire pour sauver la distinction essentielle entre les sens et l'intelligence, d'attribuer à celle-ci la perception immédiate d'un objet divin, qu'il ne l'est, pour maintenir intacte la distinction entre le corps et l'esprit, d'accorder à celui-ci une existence divine? Et ne suffit-il pas pour cela que, l'entendement se distingue des sens par l'immatérialité de sa puissance cognitive, comme l'esprit se distingue du corps par l'immatérialité de sa substance.

Que s'il arrivoit à quelqu'un de vouloir expliquer St-Thomas par St-Augustin, il faut avouer que ce seroit là singuliérement renverser l'ordre, en faisant de l'interprête l'interprèté et vice-versa de l'interprété l'interprête.

L'autre moyen de conciliation que nous approuverions, concerne la synthèse idéologique qui part du principe de la création pour descendre à toutes les branches de la science. Ce seroit d'entendre cette synthèse, du procédé réflexe et complétif de la science, et non du procédé spontané et initial, qui, à coup sûr, est analytique. C'est en effet en partant des créatures que nous parvenons jusqu'à Dieu.

Et Dieu une fois connu, nous partons de lui, comme du principe suprème de tout ordre réel, idéal et moral, pour perfectionner la connoissance antérieure déjà acquise, et faire entrer chaque chose dans son ordre respectif (1) Deo cognito, repererunt ubi esset causu constitute universitatis et lux percipiendæ veritatis et fons bibendæ felicitatis. De la détermination de ces trois principes, jaillira la lumière qui se répandra sur tout ce qui concerne l'homme et fournira la science des choses dans leur ordre respectif.

Sans doute, ici encore les ontologistes ont raison. Mais on n'arrive à ce point, qu'aprés avoir déjà acquis la connoissance de Dieu, Deo cognito. Or, comment parvient-on à cette connoissance ? Est-ce par intuition ou vision immédiate? En aucune façon. En cela, on est forcé de reconnoitre avec les scholastiques que pareille connoissance ne s'obtient en cette vie que par voie de raisonnement, en concluant de l'existence des créatures celle du Créateur. Naturalis mentis humanæ intuitus, pondere corruptibilis corporis aggravatus, in prima veritatis luce ex qua omnia sunt facile cognoscibilia, defigi non potest, unde oportet quod secundum naturalem Cognitionis progressum ratio a posterioribus in priora deveniat et a creaturis in Deum (2).

Avec cette simple distinction, à savoir que l'ordre voulu par les ontologistes doit s'entendre de la science réflexe et parfaite, et l'ordre voulu par les scholastiques, du développement direct et spontané de la connoissance, de la science imparfaite, encore à son début, il nous semble qu'on pourroit facilement réunir entre eux les dissidents, pour peu qu'on voulut y mettre de modération. Et je ne pense pas que les ontologistes puissent faire grande difficulté. Car enfin tout en voulant la vision immédiate des archétypes divins comme principe de notre connoissance, ils ne soutiennent cependant pas que l'esprit s'y arrête comme sur son unique objet, mais ils disent que nous partons de là pour former tous les conceps universaux et que nous nous servons ensuite de ceux-ci pour considérer les créatures dans leur propre être, et que de celles-ci on remonte à Dieu. Or, puisque les créatures sont elles-mêmes les copies des archétypes divins, quelle difficulté sérieuse pourroit-il y avoir à admettre que l'esprit dirigé vers elles, puisse par la senle vertu cognitive dont Dieu l'a doué, et sans nul besoin de la vision de l'être divin, en déduire ces mêmes concepts universaux ? Est-ce que, par

(4) Quod autem Augustinus non sic intellexerit omnia cognosci in rationibus æternis vel in incommutabili veritate, quasi ipsæ rationes æternæ videantur, patet per hoc quod ipse dicit in libro 8322 (q. 66 a medio) quod rationalis anima non omnis et quacumque, sed quæ sancta et pura fuerit asseritur illi visioni (scilicet rationum æternum) esse idonea sicut sunt animæ beatorum S. Thom. summa th. 1 p. q. 84, a. 5.

(2) S. Thomas, opusc. 70 super Boethium.

hasard, la copie qu'on fait d'une chose en ayant devant soi l'original, ne peut pas s'obtenir, si l'on n'a devant les yeux qu'une image qui lui ressemble parfaitement. Et la copie dont nous parlons, c'est-àdire, nos idées, par la même qu'elle répond à l'image c'est-à-dire, à l'être intime des choses, ne doit-elle pas être nécessairement conforme à l'original, qui n'est rien d'autre que les archétypes divins? L'essentiel c'est que l'image ressemble parfaitement à l'original, et que la reproduction qui en est faite, soit d'un bon artiste. Or, qui pourroit avancer que les créatures ne répondent point parfaitement dans leur être aux archetypes divins, ou bien encore que la vertu cognitive dont Dieu a orné notre esprit soit insuffisante à reproduire ces idées ?

Nous ignorons jusqu'à quel point notre manière de voir peut obte nir l'assentiment des ontologistes.

Mais, à notre avis, c'est à coup sûr, l'unique voie pour parvenir au but, à l'union.

NÉCROLOGE LIÉGEOIS POUR 1860,

Par M. U. C. Liége 1860, un vol. de 88 pages.

Le 10 volume du Nécrologe liégeois, qui vient de paroître, renferme plusieurs notices, écrites dans un style sobre et clair, présentant les faits avec une remarquable exactitude, et conservant toujours une juste et sage mesure entre l'exagération de l'éloge et les rigueurs étroites de la critique; parmi ces notices biographiques on remarque celles de Fuss, professeur à l'université de Liége, de Denis Sotiau, de Materne secrétaire général du ministère des affaires étrangères, auteur d'une tragédie imitée de Schiller, sur Jeanne d'Arc.

Un supplément renferme la biographie de l'abbé Louis né le 11 septembre 1801 au hameau de Bernoville d'une famille de pauvres paysans et décédé à Paris le 11 février 1856; M. le chanoine Congnet de Soissons a fourni à l'auteur la plupart des détails de la notice suivante :

"

Après avoir terminé ses études au Collège de St-Quentin, sous la direction de l'abbé Lefin, mort depuis chanoine de la cathédrale de Soissons, Louis entra au Séminaire diocésain, où il reçut la tonsure le 21 mars 1818, et les ordres mineurs le 25 décembre 1820,

» M. Lesueur, directeur du petit Séminaire de Soissons, ayant pu apprécier le mérite et l'aptitude du jeune prêtre, le fit nommer professeur à cet établissement. Louis s'acquitta avec succès de cette tâche et s'appliqua avec une ardeur extrême à l'étude des langues

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