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bilité du mensonge des témoins, probabilité quatre-vingtquatorze fois au moins, plus grande que la précédente. On voit par là, combien la probabilité du mensonge des témoins diminue, quand le fait qu'ils attestent est moins probable en lui-même. En effet, on conçoit qu'alors l'accord des témoins, lorsqu'ils trompent, devient plus difficile, à moins qu'ils ne s'entendent, ce que nous ne supposons pas ici.

Dans le cas précédent où l'urne ne renfermant que deux numéros, la probabilité à priori du fait attesté est; la probabilité résultante des témoignages, est le produit des véracités des témoins, divisé par ce produit ajouté à celui des probabilités respectives de leur men

songe.

Il nous reste à considérer l'influence du temps sur' la probabilité des faits transmis par une chaîne traditionnelle de témoins. Il est clair que cette probabilité doit diminuer à mesure que la chaîne se prolonge. Si le fait n'a aucune probabilité par lui-même, tel que la sortie d'un n° d'une urne qui en renferme une infinité, celle qu'il acquiert par les témoignages, décroît suivant le produit continu de la véracité des témoins. Si le fait a, par lui-même, une probabilité; si, par exemple, ce fait est la sortie du no 2 d'une urne qui en renferme un nombre fini, et dont il est certain qu'on a extrait un seul numéro, ce que la chaîne traditionnelle ajoute à cette probabilité décroît suivant un produit continu, dont le premier facteur est le rapport du nombre des numéros de l'urne moins un, à ce même nombre, et dont chaque autre facteur est la véracité de chaque té– moin, diminuée du rapport de la probabilité de son mensonge, au nombre des numéros de l'urne moins un ; en sorte que la limite de la probabilité du fait, est celle de

ce fait considérée à priori ou indépendamment des témoignages, probabilité égale à l'unité divisée par le nombre des numéros de l'urne.

L'action du temps affaiblit done, sans cesse, la probabilité des faits historiques, comme elle altère les monumens les plus durables. On peut, à la vérité, la ralentir en multipliant et conservant les témoignages et les monumens qui les étayent. L'imprimerie offre, pour cet objet, un grand moyen malheureusement inconnu des anciens. Malgré les avantages infinis qu'elle procure, les révolutions physiques et morales dont la surface de ce globe sera toujours agitée, finiront, en se joignant à l'effet inévitable du temps, par rendre douteux, après des milliers d'années, les faits historiques aujourd'hui les plus certains.

Craig a essayé de soumettre au calcul l'affaiblissement graduel des preuves de la religion chrétienne : en supposant que le monde doit finir à l'époque où elle cessera d'être probable, il trouve que cela doit arriver 1454 ans après le moment où il écrit. Mais son analyse est aussi fautive, que son hypothèse sur la durée du monde est bizarre.

Des choix et des décisions des assemblées.

La probabilité des décisions d'une assemblée dépend de la pluralité des voix, des lumières et de l'impartialité des membres qui la composent. Tant de passions et d'intérêts particuliers y mêlent si souvent leur influence, qu'il est impossible de soumettre au calcul cette probabilité. Il y a cependant quelques résultats généraux dictés par le simple bon sens, et que le calcul confirme. Si, par exemple, l'assemblée est très-peu éclairée sur

l'objet soumis à sa décision; si cet objét exige des consi→ dérations délicates, ou si la vérité sur ce point est con traire à des préjugés reçus, en sorte qu'il y ait plus d'un contre un à parier que chaque votant s'en écartera, alors la décision de la majorité sera probablement mauvaise, et la crainte à cet égard sera d'autant plus fondée, que l'assemblée sera plus nombreuse. Il importe donc à la chose publique, que les assemblées n'aient à prononcer que sur des objets à la portée du plus grand nombre : il lui importe que l'instruction soit généralement répandue, et que de bons ouvrages fondés sur la raison et sur l'expérience, éclairent ceux qui sont appelés à décider du sort de leurs semblables ou à les gouverner, et les prémunissent d'avance contre les faux aperçus et les préventions de l'ignorance. Les savans ont de fréquentes occasions de remarquer que les premiers aperçus trompent souvent, et que le vrai n'est pas toujours vraisemblable.

Il est difficile de connaître et même de définir le vœu d'une assemblée, au milieu de la variété des opinions de ses membres. Essayons de donner sur cela, quelques règles, en considérant les deux cas les plus ordinaires, l'élection entre plusieurs candidats, et celle entre plusieurs propositions relatives au même objet.

Lorsqu'une assemblée doit choisir entre plusieurs candidats qui se présentent pour une ou plusieurs places du même genre, ce qui paraît le plus simple est de faire écrire à chaque votant sur un billet, les noms de tous les candidats, suivant l'ordre du mérite qu'il leur attribue. En supposant qu'il les classe de bonne foi, l'inspection de ces billets fera connaître les résultats des élections, de quelque manière que les candidats soient comparés entre eux; en sorte que de nouvelles élections

ne peuvent apprendre rien de plus à cet égard. Il s'agit présentement d'en conclure l'ordre de préférence que les billets établissent entre les candidats. Imaginons que l'on donne à chaque électeur, une urne qui contienne une infinité de boules au moyen desquelles il puisse nuancer tous les degrés de mérite des candidats: concevons encore qu'il tire de son urne, un nombre de boules proportionnel au mérite de chaque candidat, et supposons ce nombre écrit sur un billet, à côté du nom du candidat. Il est clair qu'en faisant une somme de tous les nombres relatifs à chaque candidat sur chaque billet, celui de tous les candidats qui aura la plus grande somme, sera le candidat que l'assemblée préfère; et qu'en général, l'ordre de préférence des candidats, sera celui des sommes relatives à chacun d'eux. Mais les

billets ne marquent point le nombre des boules que chaque électeur donne aux candidats : ils indiquent seulemenf que le premier premier en a plus que le second, le second plus que le troisième, et ainsi de suite. En supposant donc au premier, sur un billet donné, un nombre quelconque de boules, toutes les combinaisons des nombres inférieurs, qui remplissent les conditions précédentes, sont également admissibles, et l'on aura le nombre de boules, relatif à chaque candidat, en faisant une somme de tous les nombres que chaque combinaison lui donne, et en la divisant par le nombre entier des combinaisons. Une analyse fort simple fait voir que les nombres qu'il faut écrire sur chaque billet à côté du dernier nom, de l'avant-dernier, etc., sont proportionnels aux termes de la progression arithmétique 1, 2, 3, etc. En écrivant donc ainsi, sur chaque billet, les termes de cette progression, et ajoutant les termes relatifs à chaque candidat sur ces billets, les diverses sommes indi

queront par leur grandeur, l'ordre de préférence qui doit être établi entre les candidats. Tel est le mode d'élection, qu'indique la Théorie des Probabilités. Sans doute, il serait le meilleur, si chaque électeur inscrivait sur son billet les noms des candidats, dans l'ordre du mérite qu'il leur attribue. Mais les intérêts particuliers et beaucoup de considérations étrangères au mérite, doivent troubler cet ordre, et faire placer quelquefois au dernier rang, le candidat le plus redoutable à celui que l'on préfère; ce qui donne trop d'avantage aux candidats d'un médiocre mérite. Aussi l'expérience a-t-elle fait abandonner ce mode d'élection, dans les établissemens qui l'avaient adopté.

L'élection à la majorité absolue des suffrages réunit à la certitude de n'admettre aucun des candidats que cette majorité rejette, l'avantage d'exprimer, le plus souvent, le vœu de l'assemblée. Elle coincide toujours avec le mode précédent, lorsqu'il n'y a que deux candidats. A la vérité, elle expose à l'inconvénient de rendre les élections interminables. Mais l'expérience a fait voir que cet inconvénient est nul, et que le désir général de mettre fin aux élections, réunit bientôt la majorité des suffrages sur un des candidats.

Le choix entre plusieurs propositions relatives au même objet, semble devoir être assujéti aux mêmes règles, que l'élection entre plusieurs candidats. Mais il existe entre ces deux cas, cette différence, savoir, que le mérite d'un candidat n'exclut point celui de ses concurrens; au lieu que si les propositions entre lesquelles il faut choisir sont contraires, la vérité de l'une exclut la vérité des autres. Voici comme on doit alors envisager la question.

Donnons à chaque votant, une urne qui renferme

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