Sivut kuvina
PDF
ePub

valeurs de x supérieures à x; cette intégrale étant prise depuis x égal à X, jusqu'à la dernière extrémité de la courbe. En ajoutant ce désavantage au précédent, la somme sera le désavantage attaché au choix de X. Ce choix doit être déterminé par la condition que ce désavantage soit un minimum; et un calcul fort simple montre que pour cela, X doit être l'abscisse dont l'ordonnée divise la courbe en deux parties égales, en sorte qu'il est aussi probable que la vraie valeur de x tombe en-deçà qu'au-delà de X.

Des géomètres célèbres ont choisi pour X, la valeur de x la plus probable, et par conséquent celle qui correspond à la plus grande ordonnée de la courbe; mais la valeur précédente me paraît être évidemment celle que la théorie des probabilités indique.

Des illusions dans l'estimation des Probabilités.

L'esprit a ses illusions, comme le sens de la vue; et de même que le toucher corrige celles-ci, la réflexion et le calcul corrigent les premières. La probabilité fondée sur une expérience journalière, ou exagérée par la crainte et par l'espérance, nous frappe plus qu'une probabilité supérieure, mais qui n'est qu'un simple résultat du calcul. Ainsi nous ne craignons point, pour de faibles avantages, d'exposer notre vie à des dangers beaucoup moins invraisemblables que la sortie d'un quine à la loterie de France; et cependant personne ne voudrait se procurer les mêmes avantages, avec la certitude de perdre la vie, si ce quine arrivait.

Nos passions, nos préjugés et les opinions dominantes, en exagérant les probabilités qui leur sont favo

rables, et en atténuant les probabilités contraires, sont des sources abondantes d'illusions dangereuses.

Les maux présens et la cause qui les fait naître, nous affectent beaucoup plus, que le souvenir des maux produits par la cause contraire : ils nous enpêchent d'apprécier avec justesse, les inconvéniens des uns et des autres, et la probabilité des moyens propres à nous en préserver. C'est ce qui porte alternativement vers le despotisme et vers l'anarchie, les peuples sortis de l'état de repos dans lequel ils ne rentrent jamais qu'après de longues et cruelles agitations.

Cette impression vive que nous recevons de la présence des événemens, et qui nous laisse à peine remarquer les événemens contraires observés par d'autres, est une cause principale d'erreur, dont on ne peut trop se garantir.

C'est principalement au jeu, qu'une foule d'illusions entretient l'espérance et la soutient contre les chances défavorables. La plupart de ceux qui mettent aux loteries, ne savent pas combien de chances sont à leur avantage, combien leur sont contraires. Ils n'envisagent que la possibilité, pour une mise légère, de gagner une somme considérable; et les projets que leur imagination enfante, exagèrent à leurs yeux la probabilité de l'obtenir le pauvre surtout, excité par le désir d'un meilleur sort, expose à ce jeu son nécessaire, en s'attachant aux combinaisons les plus défavorables, qui lui promettent un grand bénéfice. Tous seraient sans doute effrayés du nombre immense des mises perdues, s'ils pouvaient les connaître; mais on prend soin, au contraire, de donner aux gains, une grande publicité qui devient une nouvelle cause d'excitation à ce jeu funeste.

:

Lorsqu'à la loterie de France, un numéro n'est pas

sorti depuis long-temps, la foule s'empresse de le couvrir de mises. Elle juge que le numéro resté long-temps sans sortir, doit, au prochain tirage, sortir de préférence aux autres. Une erreur aussi commune me paraît tenir à une illusion par laquelle on se reporte involontairement à l'origine des événemens. Il est, par exemple, très-peu vraisemblable qu'au jeu de croix ou pile, on amenera croix dix fois de suite. Cette invraisemblance qui nous frappe encore, lorsqu'il est arrivé neuf fois, nous porte à croire qu'au dixième coup pile arrivera. Cependant le passé, en indiquant dans la pièce une plus grande pente pour croix que pour pile, rend le premier de ces événemens, plus probable que l'autre : il augmente, comme on l'a vu, la probabilité d'amener croix au coup suivant. Une illusion semblable persuade à beaucoup de monde, que l'on peut gagner sûrement à la loterie, en plaçant chaque fois, sur un même numéro jusqu'à sa sortie, une mise dont le produit surpasse la somme de toutes les mises. Mais quand même de semblables spéculations ne seraient pas souvent arrêtées par l'impossibilité de les soutenir, elles ne diminueraient point le désavantage mathématique des spéculateurs, et elles accroîtraient leur désavantage moral, puisqu'à chaque tirage, ils exposeraient une plus grande partie de leur fortune.

J'ai vu des hommes désirant ardemment d'avoir un fils, n'apprendre qu'avec peine les naissances des garçons dans le mois où ils allaient devenir pères. S'imaginant que le rapport de ces naissances à celles des filles, devait être le même à la fin de chaque mois, ils jugeaient les que garçons déjà nés rendaient plus probables, les naissances prochaines des filles. Ainsi l'extraction d'une boule blanche, d'une urne qui renferme un nombre

limité de boules blanches et de boules noires, accroît la probabilité d'extraire une boule noire, au tirage suivant. Mais cela cesse d'avoir lieu, quand le nombre des boules de l'urne est illimité, comme on doit le supposer, pour assimiler ce cas à celui des naissances. Si dans le cours d'un mois, il était né beaucoup plus de garçons que de filles, on pourrait soupçonner que vers le temps de leur conception, une cause générale a favorisé les conceptions masculines; ce qui rendrait la naissance prochaine d'un garçon, plus probable. Les événemens irréguliers de la nature ne sont pas exactement comparables à la sortie des numéros d'une loterie dans laquelle tous les numéros sont mêlés à chaque tirage, de manière à rendre les chances de leur sortie, parfaitement égales. La fréquence d'un de ces événemens semble indiquer une cause un peu durable qui le favorise, ce qui augmente la probabilité de son prochain retour; et sa répétition long-temps prolongée, telle qu'une longue suite de jours pluvieux, peut développer des causes inconnues de son changement; en sorte qu'à chaque événement attendu, nous ne sommes point, comme à chaque tirage d'une loterie, ramenés au même état d'indécision sur ce qui doit arriver. Mais à mesure que l'on multiplie les observations de ces événemens, la comparaison de leurs résultats avec ceux des loteries devient plus exacte.

Par une illusion contraire aux précédentes, on cherche dans les tirages passés de la loterie de France, les numéros le plus souvent sortis, pour en former des combinaisons sur lesquelles on croit placer sa mise avec avantage. Mais vu la manière dont le mélange des numéros se fait à cette loterie, le passé ne doit avoir sur l'avenir, aucune influence. Les sorties plus fréquentes d'un numéro ne sont que des anomalies du hasard :

j'en ai soumis plusieurs au calcul, et j'ai constamment trouvé qu'elles étaient renfermées dans des limites que la, supposition d'une égale possibilité de sortie de tous les numéros, permet d'admettre sans invraisemblance. Dans une longue série d'événemens du même genre, les seules chances du hasard doivent quelquefois offrir ces veines singulières de bonheur ou de malheur, que la plupart des joueurs ne manquent pas d'attribuer à une sorte de fatalité. Il arrive souvent dans les jeux qui dépendent à la fois du hasard et de l'habileté des joueurs, que celui qui perd, troublé par sa perte, cherche à la réparer par des coups hasardeux qu'il éviterait dans une autre situation il aggrave ainsi son propre malheur, et il en prolonge la durée. C'est cependant alors, que la prudence devient nécessaire, et qu'il importe de se convaincre que le désavantage moral attaché aux chances défavorables, s'accroît par le malheur même.

:

Le sentiment par lequel l'homme s'est placé longtemps au centre de l'univers, en se considérant comme l'objet spécial des soins de la nature, porte chaque individu à se faire le centre d'une sphère plus ou moins étendue, et à croire que le hasard a pour lui des préférences. Soutenus par cette opinion, les joueurs exposent souvent des sommes considérables, à des jeux dont ils savent que les chances leur sont contraires. Dans la conduite de la vie, une semblable opinion peut quelquefois avoir des avantages; mais le plus souvent, elle conduit à des entreprises funestes. Ici, comme en tout, les illusions sont dangereuses, et la vérité seule est généralement utile.

Un des grands avantages du calcul des probabilités, est d'apprendre à se défier des premiers aperçus. Comme on reconnaît qu'ils trompent souvent, lorsqu'on peut

« EdellinenJatka »