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On est souvent conduit à des expressions qui contiennent tant de termes et de facteurs, que les substitutions numériques y sont impraticables. C'est ce qui a lieu dans les questions de probabilité, lorsque l'on considère un grand nombre d'événemens. Cependant, il importe alors d'avoir la valeur numérique des formules, pour connaître avec quelle probabilité, les résultats que les événemens développent en se multipliant, sont indiqués. Il importe surtout d'avoir la loi suivant laquelle cette probabilité approche sans cesse de la certitude qu'elle finirait par atteindre, si le nombre des événemens devenait infini. Pour y parvenir, je considérai que les intégrales définies de différentielles multipliées par des facteurs élevés à de grandes puissances, donnaient, par l'intégration, des formules composées d'un grand nombre de termes et de facteurs. Cette remarque me fit naître l'idée de transformer dans de semblables intégrales, les expressions compliquées de l'analyse, et les intégrales des équations aux différences. J'ai rempli cet objet, par une méthode qui donne à la fois, la fonction comprise sous le signe intégral, et les limites de l'intégration. Elle offre cela de remarquable, savoir que cette fonction est la fonction même génératrice des expressions et des équations proposées ; ce qui rattache cette méthode à la théorie des fonctions génératrices dont elle est ainsi le complément. Il ne s'agissait plus ensuite, que de réduire l'intégrale définie, en série convergente. C'est ce que j'ai obtenu par un procédé qui fait converger la série, avec d'autant plus de rapidité, que la formule qu'elle représente est plus compliquée; en sorte qu'il est d'autant plus exact, qu'il devient plus nécessaire. Le plus souvent, la série a pour facteur, la racine carrée du rapport de la circonférence au diamètre : quelque

fois, elle dépend d'autres transcendantes dont le nombre est infini.

Une remarque importante qui tient à la grande généralité de l'Analyse, et qui permet d'étendre cette méthode aux formules et aux équations à différences, que la théorie des probabilités présente le plus fréquemment, est que les séries auxquelles on parvient en supposant réelles et positives, les limites des intégrales définies, ont également lieu dans le cas où l'équation qui détermine ces limites, n'a que des racines négatives ou imaginaires. Ces passages du positif au négatif, et du réel à l'imaginaire, dont j'ai le premier fait usage, m'ont conduit encore aux valeurs de plusieurs intégrales définies singulières, que j'ai ensuite démontrées directement. On peut donc considérer ces passages, comme un moyen de découverte, pareil à l'induction et à l'analogie employées depuis long-temps par les géomètres, d'abord avec une extrême réserve, ensuite avec une entière confiance; un grand nombre d'exemples en ayant justifié l'emploi. Cependant il est toujours nécessaire de confirmer par des démonstrations directes, les résultats obtenus par ces divers moyens.

J'ai nommé Calcul des fonctions génératrices, l'ensemble des méthodes précédentes ce calcul sert de fondement à l'ouvrage que j'ai publié sous ce titre, Théorie analytique des Probabilités. Il se rattache à l'idée simple d'indiquer les multiplications répétées d'une quantité par elle-même, ou ses puissances entières et positives, en écrivant vers le haut de la lettre qui l'exprime, les nombres qui marquent les degrés de ces puissances. Cette notation employée par Descartes dans sa Géométrie, et généralement adoptée depuis la publication de cet important ouvrage, est peu de chose,

surtout quand on la compare à la théorie des courbes et des fonctions variables, par laquelle ce grand Géomètre a posé les fondemens des calculs modernes. Mais la langue de l'Analyse, la plus parfaite de toutes, étant par elle-même, un puissant instrument de découvertes; ses notations, lorsqu'elles sont nécessaires et heureusement imaginées, sont autant de germes de nouveaux calculs. C'est ce que cet exemple rend sensible.

Wallis qui, dans son ouvrage intitulé Arithmetica infinitorum, l'un de ceux qui ont le plus contribué aux progrès de l'Analyse, s'est attaché spécialement à suivre le fil de l'induction et de l'analogie, considéra que si l'on divise l'exposant d'une lettre, par deux, trois, etc., le quotient sera suivant la notation cartésienne, et lorsque la division est possible, l'exposant de la racine carrée, cubique, etc., de la quantité que représente la lettre élevée à l'exposant dividende. En étendant, par analogie, ce résultat au cas où la division n'est pas possible, il considéra une quantité élevée à un exposant fractionnaire, comme la racine du degré indiqué par le dénominateur de cette fraction, de la quantité élevée à la puissance indiquée par le numérateur. Il observa ensuite, que suivant la notation cartésienne, la multiplication de deux puissances d'une même lettre, revient à ajouter leurs exposans, et que leur division revient à soustraire l'exposant de la puissance diviseur, de celui de la puissance dividende, lorsque le second de ces exposans surpasse le premier. Wallis étendit ce résultat au cas où le premier exposant égale ou surpasse le second; ce qui rend la différence nulle ou négative. Il supposa donc qu'un exposant négatif indique l'unité divisée par la quantité élevée au même exposant pris positivement. Ces remarques le con

duisirent à intégrer généralement les différentielles monomes; d'où il conclut les intégrales définies d'un genre particulier de différentielles binomes dont l'exposant est un nombre entier positif. En observant ensuite la loi des nombres qui expriment ces intégrales, une série d'interpolations et d'inductions heureuses où l'on aperçoit le germe du calcul des intégrales définies, qui a tant exercé les géomètres, et l'une des bases de ma nouvelle Théorie des Probabilités, lui donna le rapport de la surface du cercle au carré de son diamètre, exprimé par un produit infini qui, lorsqu'on l'arrête, resserre ce rapport dans des limites de plus en plus rapprochées ; résultat l'un des plus singuliers de l'Analyse. Mais il est remarquable que Wallis qui avait si bien considéré les exposans fractionnaires des puissances radicales, ait continué de noter ces puissances, comme on l'avait fait avant lui. Newton, si je ne me trompe, employa, le premier, dans ses Lettres à Oldembourg, lanotation de ces puissances, par des exposans fractionnaires. En comparant par la voie de l'induction dont Wallis avait fait un si bel usage, les exposans des puissances du binome, avec les coefficiens des termes de son développement, dans le cas où cet exposant est entier et positif, il détermina la loi de ces coefficiens, et il l'étendit par analogie, aux puissances fractionnaires et négatives. Ces divers résultats fondés sur la notation de Descartes, montrent son influence sur les progrès de l'Analyse. Elle a encore l'avantage de donner l'idée la plus simple et la plus juste des logarithmes qui ne sont, en effet, que les exposans d'une grandeur dont les puissances, en croissant par degrés infiniment petits, peuvent représenter tous les nombres.

Mais l'extension la plus importante que cette notation,

ait reçue, est celle des exposans variables; ce qui constitue le calcul exponentiel, l'une des branches les plus fécondes de l'Analyse moderne. Leibnitz a indiqué, le premier, les transcendantes à exposans variables, et par-là, il a complété le système des élémens dont une fonction finie peut être composée; car toute fonction finie, explicite d'une variable, se réduit, en dernière analyse, à des grandeurs simples, combinées par voie d'addition, de soustraction, de multiplication et de division, et élevées à des puissances constantes ou variables. Les racines des équations formées de ces élémens, sont des fonctions implicites de la variable. C'est ainsi qu'une variable ayant pour logarithme, l'exposant de la puissance qui lui est égale dans la série des puissances du nombre dont le logarithme hyperbolique est l'unité, le logarithme d'une variable en est une fonction implicite.

Leibnitz imagina de donner à sa caractéristique différentielle les mêmes exposans qu'aux grandeurs; mais alors, ces exposans, au lieu d'indiquer les multiplications répétées d'une même grandeur, indiquent les différentiations répétées d'une même fonction. Cette extension nouvelle de la notation cartésienne, conduisit Leibnitz à l'analogie des puissances positives avec les différentielles, et des puissances négatives avec les intégrales. Lagrange a suivi cette analogie singulière, dans tous ses développemens; et par une suite d'inductions, qui peut être regardée comme une des plus belles applications que l'on ait faites de la méthode d'induction, il est parvenu à des formules générales aussi curieuses qu'utiles, sur les transformations des différences et des intégrales les unes dans les autres, lorsque les variables ont des accroissemens finis divers, et lorsque ces accroissemens sont infiniment petits. Mais il n'en a point donné

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