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bilités successives des joueurs, en allant des nombres les plus petits aux suivans. Cette méthode est limitée au cas de deux joueurs celle de Fermat, fondée sur les combinaisons, s'étend à un nombre quelconque de joueurs. Pascal crut d'abord qu'elle était, comme la sienne, restreinte à deux joueurs; ce qui établit entre eux une discussion à la fin de laquelle Pascal reconnut la généralité de la méthode de Fermat.

Huygens réunit les divers problèmes que l'on avait déjà résolus, et en ajouta de nouveaux, dans un petit Traité, le premier qui ait paru sur cette matière, et qui a pour titre, De Ratiociniis in ludo aleæ. Plusieurs géomètres s'en occupèrent ensuite: Hudde, le grand pensionnaire Witt en Hollande, et Halley en Angleterre, appliquèrent le calcul aux probabilités de la vie humaine; et Halley publia, pour cet objet, la première table de mortalité. Vers le même temps, Jacques Bernoulli proposa aux géomètres, divers problèmes de probabilité dont il donna depuis des solutions. Enfin il composa son bel ouvrage intitulé, Ars conjectandi, qui ne parut que sept aus après sa mort arrivée en 1706. La science des probabilités est beaucoup plus approfondie dans cet ouvrage, que dans celui d'Huygens l'auteur y donne une théorie générale des combinaisons et des suites, et l'applique à plusieurs questions difficiles, concernant les hasards. Cet ouvrage est encore remarquable par la justesse et la finesse des vues, par l'emploi de la formule du binôme dans ce genre de questions, et par la démonstration de ce théorème, savoir, qu'en multipliant indéfiniment les observations et les expériences, le rapport des événemens de diverses natures, approche de celui de leurs possibilités respectives, dans des limites dont l'intervalle se resserre de plus en plus à mesure qu'ils se multiplient, et devient moindre qu'aucune quantité assignable. Ce théorème est très-utile pour reconnaître, par les observations, les lois et les causes des phénomènes. Bernoulli attachait, avec raison, une grande importance à sa démonstration qu'il dit avoir méditée pendant vingt années.

Dans l'intervalle de la mort de Jacques Bernoulli à la publication de son ouvrage, Montmort et Moivre firent paraître deux traités sur le calcul des probabilités. Celui de Montmort a pour titre, Essai sur les Jeux de hasard, il contient de nombreuses applications de ce calcul, aux divers jeux. L'auteur y a joint, dans la seconde édition, quelques lettres dans lesquelles Nicolas Bernoulli donne des solutions ingénieuses de plusieurs problèmes difficiles. Le traité de Moivre, postérieur à celui de Montmort, parut d'abord dans les Transactions Philosophiques de l'année 1711. Ensuite l'auteur le publia séparément, et il l'a perfectionné successivement dans les trois éditions qu'il en a données. Cet ouvrage est principalement fondé sur la formule du binôme, et les problèmes qu'il contient, ont, ainsi que leurs solutions, une grande généralité. Mais ce qui le distingue, est la théorie des suites récurrentes et leur usage dans ces matières. Cette théorie est l'intégration des équations linéaires aux différences finies à coefficiens constans, intégration ·à laquelle Moivre parvient d'une manière très-heureuse.

Moivre a repris, dans son ouvrage, le théorème de Jacques Bernoulli sur la probabilité des résultats déterminés par un grand nombre d'observations. Il ne se contente pas de faire voir, comme Bernoulli, que le rapport des événemens qui doivent arriver, approche sans cesse de celui de leurs possibilités respectives; il donne de plus une expression élégante et simple de la probabilité que la différence de ces deux rapports est contenue dans des limites données. Pour cela, il détermine le rapport du plus grand terme du développement d'une puissance très-élevée du binôme, à la somme de tous ses termes; et le logarithme hyperbolique de l'excès de ce terme, sur les termes qui en sont très-voisins. Le plus grand terme étant alors le produit d'un nombre considérable de facteurs, son calcul numérique devient impraticable. Pour l'obtenir par une approximation convergente, Moivre fait usage d'un théorème de Stirling sur le terme moyen du binôme élevé à une haute puissance, théorème remarquable, surtout en ce qu'il introduit

la racine carrée du rapport de la circonférence au rayon, dans une expression qui semble devoir être étrangère à cette transcendante. Aussi Moivre fut-il extrêmement frappé de ce résultat que Stirling avait déduit de l'expression de la circonférence en produits infinis, expression à laquelle Wallis était parvenu par une singulière analyse qui contient le germe de la théorie si curieuse et si utile des intégrales définies.

Plusieurs savans, parmi lesquels on doit distinguer Deparcieux, Kersseboom, Wargentin, Dupré de Saint-Maure, Simpson, Sussmilch, Messène, Moheau, Price, Baili et Duvillard, ont réuni un grand nombre de données précieuses, sur la population, les naissances, les mariages et la mortalité. Ils ont donné des formules et des tables relatives aux rentes viagères, aux tontines, aux assurances, etc. Mais, dans cette courte notice, je ne puis qu'indiquer ces travaux utiles, pour m'attacher aux idées originales. De ce uombre, est la distinction des espérances mathématique et morale, et le principe ingénieux que Daniel Bernoulli a donné pour soumettre celle-ci à l'analyse. Telle est encore l'application heureuse qu'il a faite du calcul des probabilités, à l'inoculation. On doit surtout placer au nombre de ces idées originales, la considération directe des possibilités des événemens, tirées des événemens observés. Jacques Bernoulli et Moivre supposaient ces possi bilités connues; et ils cherchaient la probabilité que le résultat des expériences à faire, approchera de plus en plus de les représenter. Bayes, dans les Transactions Philosophiques de l'année 1763, a cherché directement la probabilité que les possibilités indiquées par des expériences déjà faites, sont comprises dans des limites données; et il y est parvenu d'une manière fine et très-ingénieuse, quoiqu'un peu embarrassée. Cet objet se rattache à la théorie de la probabilité des causes et des événemens futurs, conclue des événemens observés s; théorie dont j'exposai, quelques années après, les principes, avec la remarque de l'influence des inégalités qui peuvent exister entre les chances que l'on suppose égales. Quoique l'on

ignore quels sont les événemens simples que ces inégalités favorisent, cependant cette ignorance même accroît souvent la probabilité des événemens composés.

En généralisant l'Analyse et les problèmes concernant les probabilités, je fus conduit au calcul des différences finies partielles que Lagrange a traité depuis, par une méthode fort simple, et dont il a fait d'élégantes applications à ce genre de problèmes. La théorie des fonctions génératrices, que je donnai vers le même temps, comprend ces objets parmi ceux qu'elle embrasse, et s'adapte d'elle-même et avec la plus grande géné ralité, aux questions de probabilité les plus difficiles. Elle détermine encore par des approximations très-convergentes, les valeurs des fonctions composées d'un grand nombre de termes et de facteurs; et en faisant voir que la racine carrée du rapport de la circonférence au rayon entre le plus souvent dans ces valeurs, elle montre qu'une infinité d'autres transcendantes peuvent s'y introduire.

On a encore soumis au calcul des probabilités les témoignages, les votes et les décisions des assemblées électorales et délibérantes, et les jugemens des tribunaux. Tant de passions, d'intérêts divers et de circonstances compliquent les questions relatives à ces objets, qu'elles sont presque toujours insolubles. Mais la solution de problèmes plus simples, et qui ont avec elles beaucoup d'analogie, peut souvent répandre sur ces questions difficiles et importantes, de grandes lumières que la sûreté du calcul rend toujours préférables aux raisonnemens les plus spécieux.

L'une des plus intéressantes applications du calcul des probabilités, concerne les milieux qu'il faut choisir entre les résultats des observations. Plusieurs géomètres s'en sont occupés; et Lagrange a publié, dans les Mémoires de Turin, une belle méthode pour déterminer ces milieux, quand la loi des erreurs des observations est connue. J'ai donné pour le même objet, une méthode fondée sur un artifice singulier qui peut être employé avec avantage dans d'autres questions d'analyse, et

qui en permettant d'étendre indéfiniment dans tout le cours d'un long calcul, des fonctions qui doivent être limitées par la nature du problème, indique les modifications que chaque terme du résultat final doit recevoir en vertu de ces limitations. On a vu, précédemment, que chaque observation fournit une équation de condition, du premier degré, qui peut toujours être disposée de manière que tous ses termes soient dans le premier membre, le second étant zéro. L'usage de ces équa tions est une des causes principales de la grande précision de nos tables astronomiques, parce que l'on a pu ainsi faire concourir un nombre immense d'excellentes observations, à la fixation de leurs élémens. Lorsqu'il n'y a qu'un seul élément à déterminer, Côtes avait prescrit de préparer les équations de condition, de sorte que le coefficient de l'élément inconnu fût positif dans chacune d'elles; et d'ajouter ensuite toutes ces équations, pour former une équation finale d'où l'on tire la valeur de cet élément. La règle de Côtes fut suivie par tous les calculateurs. Mais quand il fallait déterminer plusieurs élémens, on n'avait aucune règle fixe pour combiner les équations de condition, de manière à obtenir les équations finales nécessaires seulement, on choisissait, pour chaque élément, les observations les plus propres à le déterminer. Ce fut pour obvier à ces tâtonnemens, que MM. Legendre et Gauss imaginèrent d'ajouter les carrés des premiers membres des équations de condition, et d'en rendre la somme un minimum, en y faisant varier chaque élément inconnu : par ce moyen, on obtient directement autant d'équations finales, qu'il y a d'élémens. Mais les valeurs déterminées par ces équations, méritentelles la préférence sur toutes celles que l'on peut obtenir par d'autres moyens? C'est ce que le calcul des probabilités pouvait seul apprendre. Je l'appliquai donc à cet objet important, et je parvins par une analyse délicate, à une règle qui renferme la précédente, et qui réunit à l'avantage de donner, par un procédé régulier, les élémens cherchés, celui de les faire sortir avec le plus d'évidence, de l'ensemble des observations, et d'en

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