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responsabilité incombe au législateur de 1832, qui a généralisé le pouvoir d'accorder le bénéfice des circonstances atténuantes, et aux tribunaux investis de ce pouvoir, qui n'en usent qu'autant que le débat devant eux et leur conscience éclairée en révèlent et font sentir l'utilité pour la justice. On ne saurait songer à retirer aux tribunaux et aux cours impériales, surtout après les innovations récentes, le pouvoir d'admettre des circonstances atténuantes en faveur du prévenu condamné pour la première fois; et il serait difficile d'exiger l'indication expresse des circonstances motivant une atténuation, comme on exige des motifs déduits sur les questions principales: ce serait méconnaître les puissantes considérations qui ont fait introduire et approuver l'extension du système de Fart. 463 C. pén., ou bien vouloir une chose à peu près impossible dans l'application, du moins la plupart du temps et alors que l'atténuation est commandée par les impressions du débat 19.

S'il faut de nouveaux moyens d'intimidation, ce n'est pas de la part du législateur vis-à-vis de tout individu pouvant tomber dans une pre

19. «Le projet a introduit dans les affaires de grand criminel la faculté d'atténuation que l'art. 463 C. pén. ouvre pour les matières correctionnelles. Les avantages de l'adoucissement des peines, autorisé par l'art. 463, sont universellement reconnus... Une pareille latitude n'est que justice... L'inflexibilité dans la fixation des peines enferme dans des limites trop étroites des faits qui ne se ressemblent que par le nom et diffèrent par leur essence. La conscience se révolte contre cette assimilation, le juge s'habitue à faire peu de cas de sa sincérité et se réfugie dans des fictions, c'est-à-dire dans des mensonges; il se parjure de peur d'ètre cruel... Quant à la déclaration des circonstances, atténuantes, l'atténuation ne portera pas sur tel ou tel fait particulier, elle sera généralé et résultera de l'impression qui aura été produite par l'ensemble des débats...» (Exposé des motifs, sur l'art. 341 C. inst. cr. revisé). << Les lois pénales résument et incriminent, sous un même nom, tous les faits qui ont entre eux une ressemblance extérieure et matérielle; ainsi, pour elles, toute soustraction frauduleuse est un vol, tout homicide volontaire est un meurtre. Elles classent et qualifient les actes elles ne peuvent classer et qualifier les agents; elles sont forcées de négliger et méconnaître toutes ces nuances morales qui, au jugement de la conscience, placent à de si grandes distances des faits punis de la même peine et appelés du même nom... L'extension des circonstances atténuantes à tous les cas a obtenu dans les Cours royales, dont les observations ont été communiqués à votre commission par M. le garde des sceaux, un assentiment presque unanime.» (Rapport à la Chambre des députés.)

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« Le droit de tenir compte, dans toutes les accusations, des circonstances atténuantes et de rectifier ainsi les inconvénients d'une classification générale, a reçu l'approbation de votre commission.» (Rapport à la Chambre des pairs.) «Tout en laissant au Code pénal ses règles conservatrices de l'intérêt public et en développant les germes qu'il contenait d'ailleurs, l'art. 463 donne à notre législation une portée plus philosophique, un caractère général qui la rapproche davantage des théories de Rossi, du système de la justice morale. — J'applaudis, pour ma part, à cette innovation du législateur de 1832. C'est assez dire que je ne suis pas de ceux qui condannent la disposition nouvelle à cause de l'abus que le jury, plus particulièrement, leur semble faire trop souvent de ses pouvoirs. Je blâme les erreurs et les abus dans lesquels les tribunaux correctionnels tombent eux-mêmes trop fréquemment; mais je ne saurais proscrire pour ces erreurs un système qui permet à l'action publique autant de loyauté que d'énergie, un système qui relève le juge en faisant appel à son intelligence et aux sentiments les plus élevés de son âme. » (Discours de M. l'avocat général Greffier.)

mière faute, ou de la part du juge qui condamne et en infligeant au coupable une peine sévère pour qu'il ne soit pas tenté de récidiver; car un pareil mode serait parfois injuste, sans fortifier peut-être l'avertissement que le délinquant reçoit d'une première condamnation : c'est par un ensemble de dispositions législatives et réglementaires, acquérant une grande publicité et avertissant les condamnés que, s'ils ne tiennent pas compte de l'indulgence et des conseils dont le juge et les agents d'exécution ont voulu les faire profiter, tout nouveau délit sera puni de telle peine plus grave, calculée eu égard à la gravité relative du nouveau délit, sans atténuation facultative pour cause indéterminée. Mais une pareille œuvre est difficile, et il est peu de criminalistes qui aient essayé d'en poser les fondements: nous ne pouvons donner ici qu'un aperçu des innovations possibles, avant d'arriver à l'examen d'une question qui devrait en tous cas avoir sa solution dans la loi.

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Admonitions ou avertissements. Dans l'ancien droit, le jugement de condamnation se terminait ordinairement par cette formule : « lui faisons défense de récidiver, sous plus griève peine. » Une menace ainsi faite serait peu compatible avec le principe fondamental suivant lequel les jugements sont pour le passé, tandis que l'avenir est du domaine de la la législation, et probablement elle n'aurait pas plus d'efficacité que dans les anciens jugements. La loi du 25 frim. an viu, qui faisait descendre au rang de simples délits des faits auparavant réputés crimes, aggravait la peine pour le cas de récidive de l'un de ces délits (art. 15), et ajoutait «< la lecture du présent article sera faite aux condamnés lors de la prononciation du jugement de police correctionnelle. » Sans doute il y aurait plus, dans cette forme, que l'avertissement fictif ou présumé qui résulte du fait seul de la condamnation; mais une simple lecture, qui aurait lieu toujours ou dont la constatation serait de style, n'ajouterait guère à l'efficacité de l'avertissement plus énergique qui se trouve dans la condamnation elle-même. Le Code pénal de Sardaigne, art. 54, a placé au rang des peines accessoires, pour certains délits, l'admonition, qui comprend l'avertissement par le juge au délinquant condamné <«< qu'en cas de récidive, il encourra la peine plus forte établie par la loi. » Il n'est pas démontré que cela ait empêché beaucoup de récidives.

- Le Code pénal de Bavière fait plus, en émettant là disposition suivante, art. 146: « Tout condamné pour crime, après avoir subi sa peine, tout détenu pénal, avant sa mise en liberté définitive, devra être instruit, d'une manière précise et énergique, des conséquences légales qu'il doit s'attendre à subir, à la première rechute dans son crime primitif » (voy. le texte et le commentaire officiel, traduits par M. Vatel, p. 102 et 333). Ce mode d'avertissement, que M. Bonneville a proposé de prescrire lé– gislativement avec les précédents 20, a sans doute son utilité; mais ce n'est pas dans la loi pénale qu'il doit être inscrit et organisé : c'est une

20. Des diverses institutions complémentaires du régime pénitentiaire, par M. Bonneville, p. 308-322.

des nombreuses et différentes mesures qui, appartenant au régime pénitentiaire, doivent faire l'objet d'une institution spéciale avec règlements d'exécution. Jusqu'ici donc, il n'y a qu'une idée, bonne en elle-même et à cause de son but, mais dont il faut trouver et développer les moyens pratiques d'application. Quoi qu'il en soit, pour rassurer la société en montrant que ses défenseurs cherchent à prévenir autant que possible les récidives, et pour tenter un moyen qui pourrait contribuer plus ou moins au résultat des mesures à adopter, il serait bon de prescrire des avertissements sérieux sur l'aggravation pour récidive (qui serait mieux calculée dans une loi nouvelle), lesquels seraient absolument obligatoires, dans le cas de vol notamment, et seraient donnés par le juge prononçant une première condamnation, par le jugement lui-même en termes exprès, par le ministère public lors de l'exécution, et par l'administration des prisons lors de la libération.

Mesures pénitentiaires. — Très-certainement, après les institutions moralisatrices qui sont dans les vœux de tous, l'amélioration du régime pénitentiaire des prisons, de celles surtout où sont détenus les condamnés expiant un premier délit, serait le plus efficace moyen d'amender ces coupables et de prévenir beaucoup de récidives: c'est la préoccu◄ pation constante des magistrats et autres fonctionnaires qui voudraient arrêter les progrès du mal 21. Mais là se trouvent les plus grandes difficultés d'exécution, et chacune des propositions secondaires qui surgissent serait, isolément du moins, sans efficacité marquée. Il faut donc un ensemble de mesures méditées, et expérimentées quelque part. D'excellentes observations à cet égard se trouvent dans les rapports que M. le prési dent Bérenger, chargé par l'Académie des scientes morales et politiques d'étudier à nouveau ces graves problèmes, a faits et publiés en 1855; mais on pourrait développer utilement les mesures par lui proposées, en prenant pour modèles certains établissements pénitentiaires. Par exemple, M. Bérenger cite la maison de la Roquette et son système cellulaire, comme ayant donné de bons résultats : or, nous savons que les libérés de cette maison donnent encore un tiers de récidivistes (33 sur 100), tandis que ceux de la colonie de Mettray n'en donnent guère plus du dixième (14 sur 400). - Les grâces ou commutations de peine s'accordent de préférence aux détenus paraissant à peu près amendés : c'est un excellent encouragement, qui devrait faire espérer la diminution des récidives. On a proposé d'introduire dans nos lois le système des libérations préparatoires, qui aurait pour contre-partie une détention supplémentaire à titre disciplinaire pour les détenus non amendés; de soumettre les récidivistes à un régime plus rigoureux de détention et à de plus fortes retenues sur le produit de leur travail; de doubler vis-à-vis d'eux les

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21. Des moyens propres généraliser en France le système pénitentiaire, par M. Bérenger (1837). Du système pénitentiaire, par M. Aylies. De la répression pénale, de ses formes et de ses effets, mesures à prendre pour opérer la réforme des prisons, rapports faits à l'Académie des sciences morales et politiques, par M. Berenger (185, t. 2, p. 202 et suiv.).

délais avant l'expiration desquels ne pourra être formée une demande en réhabilitation 22. La première proposition demanderait de profondes réformes, qui ne pourraient aller jusquà prolonger la durée des peines expiées; la seconde a aussi ses difficultés ou objections; et la dernière n'aurait pas beaucoup d'efficacité contre les récidives. Néanmoins, il y a des essais à faire, et ce doit être un sujet d'étude. Un projet de loi sur les prisons a déjà été préparé, présenté en 1840 à la Chambre des députés, adopté par elle avec modifications en 1844, soumis à la Cour de cassation et aux Cours d'appel, examiné par une commission de la Chambre des pairs en 1847; et il y a eu de nouveaux projets produits en 1854 à l'Assemblée nationale, qui les a renvoyés au conseil d'État. Tous les travaux préparatoires peuvent être consultés avec fruit: ce serait le moment d'en extraire les réformes approuvées, qui seraient compatibles avec nos institutions, et d'y ajouter ceux des moyens complémentaires déjà indiqués qu'on jugerait aussi praticables.

Aggravation forcée de la peine encourue. Ainsi que l'ont dit M. Rossi, MM. Chauveau et Hélie, M. Bonneville et d'autres criminalistes, la récidive est une circonstance augmentant la culpabilité de l'agent et autorisant une aggravation de peine. Rigoureusement, le législateur pourrait soumettre le délinquant en récidive à une aggravation fixe, par exemple au maximum ordinaire et même à une peine supérieure, sans laisser au juge la faculté de détruire cette fixation légale au moyen d'une déclaration de circonstances atténuantes. Mais doit-il aller jusque-là, en substituant par avance et absolument son appréciation à celle que le juge ferait plus justement pour chaque prévenu? C'est la thèse développée par M. Bonneville et par M. l'avocat général de Gaujal 23. Nous recon

22. Bonneville, loc. cit., p. 200 et suiv., 665 et 695.

23. Selon M. Bonneville, p. 278 et suiv., la révision de 1832 qui abaissait le taux des peines devait du moins les rendre certaines; l'admission des circonstances atténuantes, même en cas de récidive, a été une modification fatale; les récidivistes sont persuadés que l'aggravation pour récidive sera annihiléé au moyen de l'atténuation permise. Il faut changer une pareille loi, l'aggravation forcée envers les récidivistes est de nécessité pour l'intimidation préventive et la répression; elle doit même avoir lieu au point de vue de la justice distributive. Dans son discours de rentrée, M. l'avocat général de Gaujal a généralisé le système des peines fixes, en soutenant indistinctement que les juges ne devraient pas avoir la faculté de réduire la peine au-dessous du minimum fixé par la disposition applicable, parce que, a-t-il dit, « il n'y a pas d'intimidation possible si le méfait ne place le malfaiteur sous le coup d'une répression certaine et proportionnée au crime ou au délit. » Mais sa conclusion a limité aux cas de récidive la réforme proposée, qu'il a justifiée ainsi : «< II semble excessif de laisser aux tribunaux la faculté d'accorder aux récidivistes le bénéfice des circonstances atténuantes. Par elle-même, la récidive est une cause d'indignité exceptionnelle, et en présence de l'abus que les tribunaux font chaque jour de l'art. 463 C. pén., on peut dire que les art. 56, 57 et 58 ont perdu toute autorité. Restituer à la loi son autorité et fixer de justes limites au pouvoir exceptionnel mis entre les mains du juge, ce serait faire une réforme utile. Non-seulement elle aurait pour effet d'amoindrir un mal social devenu redoutable et l'accroissement incessant des récidives, mais elle serait conforme aux meilleures données de la science pénale et ferait entre la loi et le juge un partage de pouvoirs plus prudent et plus judicieux. »

naissons volontiers que la société serait mieux défendue, ou la vindicte publique plus satisfaite; mais la justice morale perdrait beaucoup à l'adoption d'un système qui, empêchant toujours le juge de peser et considérer la gravité relative d'une seconde faute, l'obligerait parfois à prononcer une peine excessive pour un délit léger. Néanmoins, il ne serait peut-être pas impossible de concilier ou à peu près les deux intérêts opposés, dont le premier commande impérieusement les mesures propres à assurer la défense sociale, fussent-elles plus sévères que ne le voudrait la justice seule. En revisant les dispositions du Code pénal sur la récidive, et en établissant un système complet dans lequel seraient prévus tous les cas à régler législativement, on pourrait proportionner l'aggravation au degré de faute présumé d'après la récidive, la rendre obligatoire pour la réitération de certains crimes ou délits, tels que vols et escroqueries, et surtout vis-à-vis des récidivistes l'ayant encourue à nouveau; réserver enfin la faculté d'atténuation, selon l'appréciation du juge, pour les cas que la loi n'aurait pas voulu régler elle-même, lesquels seraient assez rares pour que l'atténuation trouvât un motif palpable dans cette considération qu'on serait en dehors de toute définition légale ou juridique. Mais alors il faudrait une loi sur la récidive, qui comblât les lacunes existantes.

Révision des art. 56-58 C. pén. - Ces dispositions sont incomplètes et peuvent paraître insuffisantes. La première, prévoyant la récidive de crime, semble n'avoir d'autre objet que de fixer la peine du crime nouveau d'après celle qui serait applicable sans la récidive. La seconde, qui prévoit le cas de délit après condamnation pour crime, se borne à édicter le maximum de la peine ordinaire, avec faculté pour le juge de l'élever jusqu'au double. La troisième autorise la même aggravation, pour la récidive de délit après condamnation à un emprisonnement de plus d'une année, sans limiter le pouvoir d'atténuation conféré au juge par l'art. 463, si ce n'est pour la surveillance, qui n'est pas le meilleur moyen d'amendement des condamnés. Aucune d'elles ne se préoccupe de la récidive réitérée, qui est si fréquente aujourd'hui et qui peut mériter une nouvelle aggravation comme l'enseignait Farinacius, disant : Gravius multò puniendus est qui ter delinquit, quàm qui bis. D'un autre côté, aucune disposition de nos codes ne tient compte du long intervalle qui existerait entre la première infraction et la seconde, tandis que c'est à considérer selon les criminalistes et plusieurs lois spéciales.

A part les théories qui ont déjà été discutées et les questions d'application sur lesquelles il y a controverse ou jurisprudence, on peut se demander si la gradation opérée par le code est parfaite, et surtout s'il ne faudrait pas prévoir les récidives réitérées pour obvier autant que possible au mal actuel. Nous n'admettrions pas le système du Code pénal de 4794, qui, au lieu d'élever la peine du second crime, disposait qu'elle serait subie et qu'ensuite le condamné serait transféré pour le reste de sa vie au lieu fixé pour la déportation des malfaiteurs; et nous repousserions même celui du Code pénal de la Louisianne, qui, pour le cas

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