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obstacle à l'effet de sa plainte, une condamnation prononcée contre lui, par la Cour de Bruxelles, du 22 novembre 1862, pour entretien d'une concubine dans le domicile conjugal; - considérant que l'exception dont il s'agit est admissible et péremptoire; considérant qu'on soutient en vain que l'arrêt de la Cour de Bruxelles n'est pas exécutoire en France, et n'y a pas acquis l'autorité de la chose jugée; considérant que la question n'est pas une question d'exécution dudit arrêt, mais une question de constatation et de preuve ; —considérant que les décisions judiciaires rendues à l'étranger ont force probante en France, quant aux délits qu'elles constatent; — infirme.

Du 12 fév. 1863. C. de Paris, ch. corr. - M. de Gaujal, prés.

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ART. 7615.

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1o L'art 6 de la loi du 26 mai 1819, qui voulait que toute citation pour délit de presse contint des articulations de fait et la qualification du délit, a été abrogé par l'art. 27 du décret-loi du 17 février 1852, soumettant les poursuites aux formes et délais du Code d'instruction criminelle. Selon les art. 182 et 183 de ce Code, la citation appelant en police correctionnelle des conseillers municipaux, pour diffamation commise par eux conjointement, est valable si elle indique les circonstances de temps et de lieu avec les imputations reprochées, quoiqu'elle ne fasse pas connaître la part que chacun aurait prise à l'émission et à la propagation de ces imputations '.

2o De ce que les délibérations municipales qui lèsent des tiers peuvent étre l'objet d'un recours administratif et d'une annulation ou modification, il ne s'ensuit pas que les conseillers municipaux signataires ne puissent être poursuivis et jugés correctionnellement, pour les imputations diffamatoires qu'ils auraient émises dans une délibération formulée, de même que pour celles qu'ils se seraient permises dans la discussion préalable.

La commune de Brunet a pour maire le sieur Ailhaud et pour adjoint le sieur Gauthier. Leur administration a été très-vivement critiquée, en différentes circonstances, par le conseil municipal réuni, et même par des conseillers municipaux individuellement. Ce conseil avait été régulièrement assemblé, le 12 avril 1861, sous la présidence du sieur Pascal, conseiller premier inscrit au tableau, le maire et l'adjoint étant empêchés pour cause d'opposition d'intérêts, à l'effet de délibérer sur des procès de la commune contre certains habitants pour la revendication de terrains communaux. Dans sa délibération, réclamant l'emploi de quelques mesures nécessaires au soutien des droits de la commune, le conseil municipal a demandé la révocation du maire et de l'adjoint, auxquels il a imputé d'avoir eux-mêmes commis des usurpations et déserté les intérêts de la commune vis-à-vis des autres usurpateurs. Le maire et l'adjoint ont d'abord dénoncé ces imputations à l'autorité administrative supérieure, qui a prononcé la suppression de toutes les ex

1. Voy., dans ce sens, notre note sur l'art. 27 du décret de 1852 (J. cr., art. 5216), notre résumé de la circulaire du 27 mars suivant avec l'arrêt de rejet du 21 mai 1853 (J. cr., art. 5549) et celui du 17 août 1861 (J. cr., art. 7327).

pressions injurieuses non justifiées par l'intérêt communal. Puis, par citation du 6 février 4862, ils ont appelé en police correctionnelle pour diffamation tous les conseillers signataires de la délibération précitée. Ceux-ci ont soutenu, avant tout, que la citation était nulle pour défaut d'énonciation suffisante, et qu'il y avait incompétence de la juridiction correctionnelle pour connaître d'une délibération municipale.

JUGEMENT (Ailhaud et Gauthier C. Pascal, etc.).

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LE TRIBUNAL; sur l'exception préjudicielle résultant de la nullité de la citation donnée aux prévenus: attendu que la citation signifiée le 6 février dernier à la requète des sieurs Ailhaud, maire, et Gauthier, adjoint de la commune de Brunet, aux nommés Pascal, Salvagi et consorts, conseillers municipaux de la même commune, constate et qualifie suffisamment les faits sur lesquels les prévenus auront à se défendre; qu'elle indique les propos outrageants, injuricux et diffamatoires qui auraient été tenus par eux contre les plaignants; qu'elle mentionne en outre les lieux dans lesquels lesdits propos ont été proférés et en détermine implicitement l'époque, en indiquant la date la plus éloignée, qui est celle du 12 avril 1861; attendu que ces énonciations sont assez précises pour faire déclarer valable la citation dont il s'agit, mème en lui faisant application des dispositions rigoureuses de l'art. 6 de la loi de 1819; attendu que la jurisprudence la plus récente, d'accord avec la circulaire de M. le garde des sceaux, en date du 27 mars 1852, a reconnu que l'art. 27 du décret du 17 février 1852 avait abrogé l'art. 6 précité, et avait replacé les citations en matière de presse sons les dispositions moins absolues de l'art. 183 C. inst. cr.; qu'en conséquence la citation du 6 février, qui n'aurait pu être annulée pour défaut d'énonciations précises sous l'empire de la loi de 1819, doit à fortiori ètre déclarée valable sous la législation aujourd'hui en vigueur; sur la compétence: - attendu que la compétence du tribunal n'a été déclinée que sur deux chefs de la citation : 1° la délibération du conseil municipal de Brunet, du 12 avril 1861; 2° les propos qui auraient été tenus à cette occasion dans la salle du conseil; qu'avant de se prononcer sur ces questions, il est indispensable de connaitre par la déposition des témoins la gravité des propos qui ont été proférés, la part qui en revient à chacun des prévenus, et s'ils ont été tenus pendant la délibération ou en dehors de la discussion, soit avant l'ouverture, soit après la clôture de la séance; qu'il est de l'intérêt de toutes les parties et de la bonne administration de la justice de ne pas séparer le jugement de la compétence sur les deux chefs, de celui qui statuera sur les propos diffamatoires pour lesquels la juri liction du tribunal n'est pas contest.e; rejette comme mal fondée l'exception.....

Du 8 mars 1862. Trib. corr. de Digne.

ARRÊT.

- M. Clappier, prés.

LA COUR; attendu, quant au déclinatoire proposé, qu'aux termes de l'art. 60 du décret des 14-22 décembre 1789, tout citoyen qui se croit personnellement lésé par quelque acte du conseil municipal ne peut qu'e poser ses sujets de plainte à l'autorité administrative supérieure, chargée d'y faire droit s'il y a lieu, après vérification des faits; attendu que cette disposition, conforme aux principes généraux en matière de séparation des pouvoirs administratif et judiciaire, s'oppose à ce que le conseil municipal de Brv et

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puisse être poursuivi devant les tribunaux correctionnels à raison de la délibér ration par lui régulièrement prise le 12 avril 1861 dans une de ses séances non publiques; que si les membres du conseil municipal ne jouissent point ' de l'immunité accordée par l'art. 24 de la loi du 17 mai 1819 aux membres du corps législatif, si les discours qui se prononcent au sein de ce conseil sont attaquables en justice, ce n'est jamais qu'en tant qu'ils constituent des faits individuels susceptibles d'être prouvés, nonobstant le huis-clos de la séance, et que la poursuite n'atteint pas les actes mèmes du conseil municipal; attendu que, dans l'espèce, c'est le conseil municipal de Brunet tout entier, en la personne des 10 membres composant la réunion du 12 avril 1861, qui est poursuivi correctionnellement à raison de ce qu'il a écrit dans la délibération prise et de ce qu'il a dit dans le secret de la délibération préalable; que, dès lors, les plaignants avaient fait tout ce qu'ils pouvaient et devaient faire en adressant leur plainte à l'autorité administrative, qui a ordonné la suppression des expressions injurieuses et autres non justifiées par les exigences de l'affaire au point de vue de l'intérêt matériel de la commune; d'où il suit que le tribunal correctionnel de Digne n'a été compétemment investi que du chef de la plainte relatif aux propos injurieux et diffamatoires tenus ailleurs, hors des fonctions municipales; qu'il ne reste donc plus qu'à examiner si, quant à ce second chef, la citation est suffisamment libellée; attendu, à cet égard, que l'art. 183 C. inst. cr., qui règle la forme des citations en matière correctionnelle, impose à la partie civile l'obligation d'articuler les faits sur lesquels est fondée la poursuite, et qu'on ne saurait voir un suffisant accomplissement de cette obligation essentielle dans la citation introductive de l'instance actuelle, où l'on ne précise assez ni le temps ni le lieu où auraient été tenus les propos incriminés, ni la part qu'aurait prise à cette propagation chacun des dits prévenus, puisque la citation, donnée plus de 9 mois après la délibération du 12 avril 1861, se borne à dire que les propos ont été par eux publiquement répandus et propagés dans la commune de Brunet et tout le canton de Valensolés; qu'il n'est guère possible d'admettre que tant de prévenus aient été en état de se défendre sur des faits si vaguement énoncés; attendu qu'il résulte de tout ce qui précède : 1° que le tribunal de Digne était incompétent pour statner sur le premier chef de la plainte et qu'il ne devait pas renvoyer, comme il l'a fait, après l'instruction du fond, l'examen d'une incompétence qui ressortait des propres termes de la plainte; 2° que la nullité de la citation lui interdisait de s'occuper du second chef.

Du 22. mai 1862.

LA COUR;

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sur le 1er moyen, pris de la fausse application de l'art. 60 de la loi du 14 décembre 1789: vu l'art. 60 de la loi du 14 décembre 1789; vu aussi les art. 13, 16 et 21 de la loi du 17 mai 1819;-attendu que si l'art. 60 de la loi du 14 décembre 1789 ouvre un recours administratif aux citoyens qui croient être personnellement lésés par quelques actes du corps municipal, il n'en résulte pas que ces actes ne puissent être judiciairement poursuivis, s'ils constituent des délits ou des contraventions; que notamment les discours qui ont précédé ou suivi une délibération du conseil municipal peuvent, s'ils sont injurieux ou diffamatoires, donner lieu à une poursuite; qu'il appartient sans doute aux tribunaux de concilier, dans l'appréciation qu'ils font de ces discours, la liberté de discussion avec le respect dû à l'honneur et à la considération des personnes; mais que l'art. 21 de la loi du 17 mai 1819 a établi en

faveur des chambres législatives une immunité exceptionnelle qui ne peut être étendue aux séances des conseils municipaux;

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que si l'art. 29 de la loi du 18 juillet 1837 a déclaré que les séances de ces conseils ne seraient pas publiques, il ne s'ensuit pas qu'il soit interdit de rechercher dans les dépositions de leurs membres les preuves des délits commis dans leur sein; que si les propos incriminés n'ont pas été proférés publiquement, il en résulte seulement qu'ils peuvent être assimilés aux injures verbales qui, aux termes des art. 376 et 471, no 11, C. pén., sont passibles de peines de police; – qu'à la vérité il est nécessaire, pour que la poursuite puisse être légalement suivie, que les faits incriminés soient individuellement imputés à chacun des membres du conseil qui les ont commis; mais que la plainte a pu se borner à imputer à chacun des membres du conseil présents les mêmes propos diffamatoires, en laissant à l'instruction à faire la part de responsabilité qui incombe à chacun de ses membres; que, dès lors, l'arrêt attaqué, en déclarant que le tribunal correctionnel de Digne n'avait été compétemment investi que du chef de la plainte relatif aux propos injurieux et diffamatoires tenus en dehors des séances du conseil et des fonctions municipales, a fait une fausse application de l'art. 60 de la loi du 14 décembre 1789 et violé les règles de la compétence; sur le 2e moyen, fondé sur la violation de l'art. 183 C. inst. cr.:-attendu que l'art. 6 de la loi du 26 mai 1819 a été implicitement abrogé par l'art. 27 du décret du 17 février 1852, qui dispose que les poursuites en matière de délits de presse auront lieu dans les formes et délais prescrits par le Code d'instruction criminelle; que l'art. 183 de ce Code se borne à prescrire que la citation énoncera les faits et tiendra lieu de plainte; que, dans l'espèce, la citation expose les faits injurieux et diffamatoires commis, soit dans le sein du conseil, soit en dehors du lieu de ses séances, qu'elle impute à chacun des membres présents de cette assemblée; qu'elle satisfait donc au vœu de la loi; d'où il suit qu'en prononçant sa nullité pour insuffisance de l'énonciation des faits, l'arrèt attaqué a commis une violation des art. précités; casse.

Du 22 janv. 1863. C. de cass. - M. F. Hélie, rapp.

OBSERVATIONS.- La loi du 14 décembre 1789, constituant les municipalités, a dit, art. 60: « Si un citoyen croit être personnellement lésé par quelque acte du pouvoir municipal, il pourra exposer ses sujets de plainte à l'administration ou au directoire du département, qui y fera droit sur l'avis de l'administration du district, qui sera chargée de vérifier les faits. Cela permet bien à la personne se trouvant attaquée dans une délibération municipale, qu'il y ait ou non délit vis-à-vis d'elle, de recourir au préfet et d'obtenir, après vérification par le sous-préfet ou autre délégué, l'annulation ou la suppression de l'acte ou des expressions reconnues diffamatoires. S'ensuit-il que la diffamation ne puisse être, en outre, poursuivie correctionnellement? Ce serait une conséquence de la disposition de loi précitée, aussi bien que du principe de la séparation des pouvoirs administratif et judiciaire, suivant la jurisprudence du Conseil d'État, qui a voulu donner aux corps administratifs délibérants une garantie analogue à l'immunité dont jouissent les chambres législatives, et qui va jusqu'à autoriser la revendication par voie de conflit des poursuites en diffamation exercées contre des conseillers municipaux (Voy. ordonn. 12 fév. 1842; J. cr., art. 3024). Mais, ainsi que

nous l'avons démontré en recueillant et critiquant cette décision, il y a là extension arbitraire de la disposition de loi invoquée, comme du principe qui défend aux tribunaux de censurer les actes administratifs, et on ne saurait justifier par une raison d'analogie l'immunité qui permettrait à un conseil municipal de diffamer quelqu'un sans autre résultat possible qu'une annulation administrative de sa délibération. Aussi la Cour de cassation, à laquelle appartient l'examen des poursuites correctionnelles ou des questions de compétence qui en dérivent, n'a-t-elle jamais admis l'exception d'incompétence tirée de ce que la délibération diffamatoire ne donnerait lieu qu'à une répression administrative. Dans un arrêt du 22 août 1840 (J. cr., art. 2753), elle a considéré « que si l'art. 24 de la loi du 17 mai 1819 consacre une exception (aux règles sur la répression des outrages) en faveur des membres des deux assemblées législatives, cette exception ne saurait être étendue au delà de ses limites; que la liberté de discussion des corps municipaux n'exclut pas la répression des actes ou paroles qui en constituent l'abus et non le légitime usage. » Par son arrêt du 17 mai 1845 (J. cr., art. 3897), elle a proclamé «< que la répression des délits qui peuvent être commis dans l'intérieur des conseils municipaux ne peut, sous aucun rapport, être considérée comme une atteinte à l'indépendance du pouvoir administratif; qu'elle n'est point incompatible avec la liberté de discussion qui doit régner dans ces assemblées, pour lesquelles aucune loi n'a fait ce que l'art. 21 de la loi du 17 mai 1819 a fait pour les deux chambres; que l'art. 29 de la loi du 18 juillet 1837, en décidant que les séances des conseils municipaux ne seraient pas publiques, n'a pas Interdit de rechercher dans les dépositions de leurs membres la preuve des délits commis dans leur sein. » Enfin, les arrêts des 25 juillet et 30 novembre 1861 (J. cr., art. 7326 et 7321) ont pris soin de déclarer qu'aucune immunité n'existe pour les conseillers municipaux à raison des outrages qu'ils se permettraient; que seulement le juge doit apprécier les imputations et « concilier la liberté des discussions légales avec le respect dû à l'honneur et à la considération des personnes. » Dans ses conclusions contraires au pourvoi qu'a accueilli l'arrêt ci-dessus, M. l'avocat général Charrins objectait qu'il s'agissait spécialement d'une délibération formulée, que les opinions ont pu être divisées, et que rien n'indique quels membres ont formé la majorité pour les imputations exprimées; qu'il faut distinguer cet acte administratif collectif des propos qui auraient été tenus avant ou depuis, et même de ceux qui se seraient abusivement produits pendant la discussion; que la voie ouverte pour une répression administrative semble devoir exclure la poursuite correctionnelle, après annulation ou modification de l'acte administratif. L'arrêt répond avec raison que les caractères du délit existent, que la poursuite est autorisée, qu'il n'y a plus qu'à apprécier les circonstances et la responsabilité de chacun, qu'il n'y a donc ni incompétence ni empiétement sur le pouvoir administratif.

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