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tion n'est qu'un motif qui donnera ou enlèvera au fait poursuivi le caractère délictueux nécessaire pour une condamnation. Par exemple, dans une poursuite contre un voiturier pour refus de payer l'indemnité postale au maître de poste dont il n'employait pas les chevaux, si le prévenu a excipé de ce que le relais aurait été démonté, le jugement rendu ne fera chose jugée sur cette exception qu'à l'égard du fait poursuivi, et n'empêchera pas de la débattre encore dans une poursuite ultérieure pour d'autres contraventions postales, parce que l'exception n'a été jugée que dans ses rapports avec l'infraction alors poursuivie. (Rej. 18 janvier 1862; J. cr., art. 7494.) Que décider, pour l'abus de confiance, qui présuppose un contrat violė? La poursuite imputant le détournement d'une chose reçue à titre de mandat ou de dépôt, le prévenu a soutenu qu'un tel contrat n'était pas prouvé, ou bien que le contrat invoqué avait un tout autre caractère, et le juge l'a relaxé par un tel motif pourra-t-il y avoir poursuite nouvelle, pour détournements ultérieurs en violation du même contrat? Nous le pensons; et voici pourquoi. A la différence des procès civils, où le juge a mission de fixer les droits et obligations des parties litigantes, les poursuites afin de répression n'appellent le juge qu'à punir un fait déterminé, et la défense ne tend en réalité qu'à obtenir l'acquittement par tel ou tel motif: si le juge correctionnel doit préalablement s'expliquer sur le moyen justificatif, ce n'est pas pour déclarer un droit dans l'avenir, c'est seulement pour motiver la condamnation ou le relaxe.

Ce qui augmente la difficulté, pour les procès de contrefaçon, c'est que le breveté invoque une sorte de propriété en articulant une atteinte à son droit, que le prévenu conteste le droit privatif en se disculpant de la contrefaçon reprochée, que les questions de propriété ou de droit acquis par un brevet appartiennent à la juridiction civile et ne sont exceptionnellement attribuées au juge correctionnel qu'en ce qu'il a paru que le juge de l'action devait aussi juger l'exception. Malgré tout, des arrêts ont décidé que l'exception même de nullité, de déchéance ou d'absence de droit privatif, n'était jugée que dans la mesure ou les limites de l'action; et si la chambre criminelle a rendu un arrêt contraire, c'est en disant « qu'il ne s'agissait pas d'un élément du délit, mais d'une exception préjudicielle, autorisée par l'art. 46 de la loi du 5 juillet 1844. » (Voy. J. cr., art. 6382, 6447 et 6335.)

La question s'est présentée, pour le délit d'exercice de la médecine par un médecin étranger, non autorisé. Il y avait eu relaxe, par un arrêt fondé sur ce que l'autorisation exigée se trouvait dans une lettre ministérielle de telle date. Plus tard, le ministère public a poursuivi, à raison de l'exercice continué, en soutenant que la lettre ne contenait pas autorisation. Sa poursuite étant repoussée par l'exception de chose jugée, il s'est pourvu et a présenté l'argumentation suivante : « L'art. 360 n'est qu'une application de la règle générale qui fait de la chose jugée une vérité judiciaire, réputée irréfragable; mais l'art. 1351 C. civ. pose la limite de cette fiction légale, en restreignant son autorité

à ce qui a fait l'objet du jugement. Or, l'objet du jugement, en matière criminelle, n'est pas de reconnaître ou de déclarer des droits ou des facultés. Cette attribution ne saurait appartenir, dans la matière qui nous occupe, qu'aux autorités administratives ou universitaires. Gardienne de l'ordre public, la juridiction criminelle n'est instituée que pour juger les infractions; elle ne connaît que des actes, qu'elle proclame innocents ou coupables. Sans doute, pour prononcer l'innocence ou la culpabilité de ces actes, elle est obligée d'apprécier des circonstances de fait et des questions de droit, d'examiner des documents; mais cette appréciation et cet examen, elle ne les fait que relativement à l'acte même qu'elle est chargée d'innocenter ou de punir, pour fixer les caractères légaux de cet acte, qui est en définitive le seul objet réel de son jugement. Un tribunal correctionnel qui se croirait chargé de déclarer des droits ou des facultés d'une manière absolue, se substituerait évidemment à une autre autorité, et commettrait un excès de pouvoir. Il suit de là que la force de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de l'acte même sur lequel le jugement est intervenu, mais non à l'égard de la qualité qu'il a fallu apprécier à l'occasion de cet acte. Suivant l'arrêt de la Cour de Grenoble, « le respect dû à la chose jugée ne << permet pas d'imprimer aux documents qui ont servi de motifs au « premier arrêt d'acquittement, un autre caractère que celui qui leur a «< été reconnu par ce même arrêt, ni d'y rattacher des conséquences « différentes. » Ainsi, ce n'est pas seulement l'acquittement de G... sur les faits de 1836 que la chose jugée devrait faire respecter; ce sont encore les motifs mêmes de cette décision qu'elle aurait l'effet de rendre à toujours irrefragables. Mais cette doctrine est contraire à la jurisprudence la mieux établie. Il est incontestable que la chose jugée ne réside que dans ce qui a fait l'objet du dispositif du jugement, et jamais dans ses motifs. Elle est de plus inadmissible aux yeux de la raison; car une erreur échappée au juge deviendrait une source de maux incalculables. Commise au préjudice du prévenu, elle l'atteindrait dans sa capacité, le ferait déchoir de l'exercice de ses droits les plus précieux, et le frapperait d'une mort civile partielle. Favorable au prévenu, elle serait pour lui un brevet indéfini d'impunité; elle revêtirait un charlatan du titre légitime de médecin, lui donnerait diplòme pour ruiner la santé publique, sans qu'aucun document qui aurait fait plus tard découvrir son imposture, pût servir à rien pour arrêter le ravage de son ignorance! >> Malgré ces raisons, il y a eu rejet, sans autres motifs que ceux-ci : « Attendu que l'arrêt du 21 décembre 1836, par lequel la Cour royale de Grenoble a acquitté Gavarini d'exercice illégal de la médecine et de la chirurgie, est fondé sur ce que la lettre du Ministre de l'intérieur au préfet de l'Allier, du 27 juillet 1832, contient autorisation en faveur dudit Gavarini; qu'en cet état, la nouvelle poursuite intentée contre lui pour exercice illégal de la médecine pendant les années 1857, 1838 et 1839, a pu être écartée par l'autorité de la chose jugée, et qu'en le décidant ainsi, l'arrêt attaqué n'a fait qu'une juste

application de l'art. 360 C. instr. cr. » (Rej. 18 avr. 4899.) Cette solution nous paraît fort contestable; et nous comprenons que M. F. Hélie l'ait critiquée en disant qu'il s'agissait d'un fait nouveau; que si ce fait était identique au premier, il pouvait y avoir même raison de décider, mais que les juges n'étaient pas enchaînés par le jugement précédent; qu'il y avait bien décision sur la question, mais non chose jugée sur le fait; que l'art. 360 était donc inapplicable, comme l'art. 1350 C. N. (t. 3, p. 592.) Nous arrivons ainsi à notre question spéciale. Y a-t-il chose jugée quant à la surveillance, pour ou contre le militaire condamné? On ne saurait trouver une décision interprétative, qui s'identifierait avec le jugement de condamnation prononcé par le conseil de guerre, ni dans le jugement ou l'arrêt relaxant le condamné sur la prévention de rupture de ban, ni dans l'arrêt de cassation proclamant que la réclusion infligée par un tribunal militaire entraîne surveillance. Ce dernier arrêt n'a interprété que la loi, pour fixer les principes ou la jurisprudence; quant à l'arrêt de relaxe, adoptant une interprétation contraire, s'il l'a appliquée à la situation du condamné prévenu d'infraction au ban de surveillance, ce n'est du moins que relativement au fait qui était alors poursuivi. Celui-ci, nous dit-on, a jugé en fait comme en droit que le réclusionnaire poursuivi et relaxé n'était pas soumis à la surveillance. Mais, outre que c'est surtout en thèse que cette interprétation a eu lieu, elle n'a été qu'un motif de relaxe et n'est pas formulée en dispositif, de telle sorte que l'acquittement n'a été prononcé que pour fait antérieur. Décider qu'il y a chose jugée même sur la question de surveillance pour l'avenir, ce serait donner aux motifs sur une question de principe, émis seulement pour justifier le jugement d'un fait, la valeur d'une disposition réglementaire sur tous les délits de même nature qui viendraient à être commis, ce qui violerait manifestement les règles fondamentales de la justice répressive ainsi que celles des jugements sur faits accomplis.

Lorsqu'il y a poursuite pour un fait nouveau, le juge correctionnel doit avoir l'appréciation entière de ce fait et des autres éléments du délit, hors le cas d'un jugement irrévocable sur une question préjudicielle. Il ne saurait être tenu d'absoudre un fait qu'il trouverait prévu par une loi pénale, pas plus que de punir un fait qu'il ne jugerait point punissable. Son indépendance, dans ce cas comme dans les autres, est la garantie d'une bonne justice, aussi bien pour le prévenu que pour la vindicte publique. On n'admettrait sans doute pas qu'un prévenu de rupture de ban dût nécessairement être condamné, par cela seul que tel ou tel juge l'aurait déjà considéré comme étant en surveillance. On ne doit pas davantage admettre qu'un réclusionnaire libéré ait acquis le droit d'échapper indéfiniment à la surveillance dérivant de sa condamnation, dès qu'un tribunal avait pensé que cette peine accessoire n'était pas pour lui dans la loi. La question est encore à juger, en cas d'infraction et poursuite nouvelles; et si le juge fait erreur, il pourra y avoir recours.

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1° Une ordonnance de juge d'instruction ne peut être arguée d'incompétence qu'autant qu'il y a eu déclinatoire méconnu.

2o La poursuite en adultère d'une femme, dans le cas même où il y a un enfant désavoué, est indépendante du jugement de l'action en désaveu, leque ne saurait étre réputé préjudiciel.

ARRÊT (De Siry).

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LA COUR; sur le moyen tiré de la violation de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810 pour défant de motifs, et fondé sur ce que l'arrêt ne répond pas aux conclusions spéciales prises devant la Cour impériale par la femme Siry, et tendant à démontrer qu'à défaut de représentation de l'ordonnance de nonlieu, en date du 28 juillet 1860, rien ne constatant que cette ordonnance a été rendue faute de charges nouvelles, les nouvelles poursuites n'ont pu rendre au juge d'instruction des pouvoirs dont il s'était irrévocablement dessaisi : — Vu les art. 135 et 539 C. inst. cr.; - attendu qu'il résulte de la combinaison de ces deux articles que les prévenus ne peuvent former opposition aux ordonnances des juges d'instruction pour cause d'incompétence, qu'autant que ce moyen aurait fait l'objet d'un déclinatoire devant ce juge; attendu que, dans ce cas meme, la loi n'autorise que le recours devant la Cour impériale, sanf s'il y a lieu, à se pourvoir en cassation contre l'arrêt de la Cour impériale; — attendu que la femme Siry n'avait formé aucun déclinatoire d'incompétence devant le juge d'instruction chargé de l'instruction qui a été suivie de l'ordonnance de non-lieu du 28 juillet 1860; attendu, dès lors, que la Cour impériale, se fondant sur la non-recevabilité de l'opposition de la femme Siry pour l'en débouter, n'avait plus à s'occuper des conclusions tendant à la justifier au fond; — attendu, en outre, que la Cour impériale, constatant, en fait, que l'instruction de 1861 avait été reprise sur charges nouvelles, a, par cela mème, reconnu, au moins indirectement, que l'ordonnance de non-lieu n'était pas motivée sur une exception qui lui eût donné un caractère irrévocable; altendu, dès lors, que le moyen tiré du défaut de motifs n'est fondé ni en droit ni en fait;sur le moyen tiré de la fausse application de l'art. 539 C. inst. cr. et de la violation de l'art. 327 C. N., et basé sur l'incompétence du juge d'instruction aussi longtemps que la question d'état de l'enfant attribué à la dame Siry n'aurait pas été jugée par les tribunaux civils; attendu que ce moyen

s'applique aux faits qui se seraient passés en 1855, et qui n'ont fait l'objet que de l'instruction terminée par l'ordonnance de non-lieu du 28 juillet 1860, et non de ceux sur lesquels l'instruction a été reprise et qui se seraient passés en 1857; — attendu que, la femme Siry n'ayant pas proposé de déclinatoire d'incompétence devant le juge d'instruction, et étant, par suite, non recevable dans son opposition à l'ordonnance du juge, il lui appartenait seulement de faire valoir le moyen devant le juge qui aurait eu à statuer sur le fond, s'il n'y avait éu renvoi devant une juridiction criminelle; - attendu que, l'ordonnance ayant décidé qu'il n'y avait lieu à suivre, la femme Siry était encore, sous ce rapport, irrecevable à attaquer cet acte judiciaire, qui ne lui portait aucun préjudice; attendu, en outre, que la Cour impériale a décidé, au fond, que les renseignements que pouvait renfermer l'instruction sur la nais sance d'un enfant en Algérie et sur le recel de cet enfant étaient sans autorité

sur la question d'état, puisque ces renseignements se rapportaient à l'action en adultère dirigée contre la femme Siry devant la juridiction correctionnelle, lequel délit pouvait exister en dehors de la naissance de cet enfant, et qu'au surplus l'instruction à laquelle cette poursuite avait donné lieu, s'étant terminée par une ordonnance de non-lieu, n'a pu porter préjudice à la femme Siry; attendu qu'en déclarant, par suite, que le juge était compétent et que la femme Siry n'avait même pas intérêt à contester cette compétence, l'arrêt n'a violé ni l'art. 327 C. N., ni l'art. 539 C. inst. cr.; — attendu, en effet, qu'il n'y a lieu à l'application de l'art. 327 C. N. qu'autant que la poursuite criminelle a pour objet le crime de suppression d'état; - que, dans l'espèce, la poursuite criminelle avait pour objet le délit d'adultère imputé à la femme Siry, délit dont les caractères constitutifs peuvent exister en dehors de ceux qui constitueraient le crime de suppression d'état; - que, dans le cas même de poursuites pour crime de suppression d'état, il n'en résultait pas l'incompétence du juge d'instruction, mais seulement qu'il y aurait eu lieu à surseoir sur cette poursuite, jusqu'au jugement sur la question d'état; - rejette. Du 3 juillet. 1862. M. V. Foucher, rapp.

C. de cass.

ABUS DE CONFIANCE.

ART. 7549.

COMMIS. PREUVE DE MANDAT OU DÉPÔT.

Dans une accusation de détournement par un commis au préjudice de son patron, la qualité prouvée d'employé dispense d'établir par écrit le mandat ou le depot dont la violation constitue le crime; et le juge ne peut écarter les conclusions afin de réparations civiles, en se fondant sur le défaut de preuve écrite.

ARRÊT (Demory C. fe Audigé).

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LA COUR; en ce qui touche le moyen fondé sur la fausse application des art. 1341 et 1985 C. N., en ce que l'arrèt attaqué aurait débonté Demo y de ses fins et conclusions, sur le motif qu'il n'apportait à leur appui ni preuve écrite, ni commencement de preuve par écrit; attendu, en fait, qu'il appert des conclusions prises par la femme Audigé pour décliner la compétence de la juridiction correctionnelle, du jugement correctionnel rendu conformément à ces conclusions, le 13 juillet 1861, de l'arrèt confirmatif rendu par la Cour impériale de Poitiers, chambre des appels de police correctionnelle, le 29 août suivant, de l'arrêt de la chambre des mises en accusation de ladite Cour, et enfin, des questions posées au jury, que la femme Audigé aurait agi, dans les faits à elle reprochés, en qualité de commis de Demory; que le jury, après avoir résolu négativement les questions principales, ne s'est point expliqué sur la circonstance aggravante résultant de cette position de commis; que, dès lors, la femme Audigé défendait, en cette qualité, devant la Cour d'assises, jugeant au civil; que ladite qualité n'a été ni contestée par elle, ni déniée par le juge; qu'elle était donc un des éléments de fait dont le juge avait à faire état pour déterminer les règles de droit sous l'empire desquelles il avait à apprécier les prétentions des parties; - et attendu que la qualité de commis et les actes qui en sont la suite n'ont pas besoin d'ètre prouvés par écrit; que la confiance générale et nécessaire qui s'établit entre le patrou et son employé rend inapplicables les règles du mandat ordinaire; d'où il suit que l'arrêt attaqué a violé, en les appliquant faussement, les dispositions des articles ci-dessus visés; casse.

Du 18 juillet 1862. C. de cass.

M. Nouguier, rapp.

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