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quel l'Amérique était peu connue, et d'après M. Klaproth, l'identité de l'Amérique et du Fou-sang, il se privait de ses meilleurs argumens, et ne pouvait fixer aucune date précise pour ces migrations.

Nous espérons, s'il lit ce court Mémoire, qu'il rendra plus de justice à la vérité des aperçus du célèbre M. de Guignes, sinologue profond, dans les travaux duquel M. Klaproth avait puisé une grande partie de sa science, et que, pour cela même, celui ci n'aurait pas dû tant décrier!!

Nous avons voulu, dans ce succinct extrait de nos vastes travaux sur l'Amérique, rendre justice à ce docte et modeste auteur de l'Histoire des Huns. Comme lui aussi, de méprisables coteries nous oppriment; mais nous espérons qu'un jour, peut-être, on rendra plus de justice à des recherches qui ont consumé nos plus belles années.

Le cher de PARAVEY.

Août 1843.

APPENDICE.

RELATION DU PAYS DE FOU-SANG,

Faite par un prêtre Bouddhique nommé Hoei-chin au 5° siècle de notre ère, et extraite des grandes Annales de la Chine.

(Avertissement de M. Klaproth ).

Le célèbre de Guignes, ayant trouvé dans les livres chinois la description d'un pays situé à une grande distance à l'orient de la Chine, à ce qu'il lui sembla, crut que cette contrée, nommée Fou-sang, pouvait bien être une partie de l'Amérique. Il a exposé cette opinion dans un mémoire lu à l'académie des inscriptions et belles-lettres, et intitulé Recherches sur les navigations des Chinois du côté de l'Amérique, et sur plusieurs peuples situés à l'extrémité orientale de l'Asie'.

Il faut d'abord observer que ce titre est inexact. Il ne s'agit nullement dans l'original chinois que de Guignes a eu devant les yeux d'une navigation entreprise par les Chinois au Fou-sang; mais, comme on verra plus bas, il est simplement question d'une notice de ce pays donnée par un religieux qui en était originaire et qui était venu en Chine. Cette notice se trouve dans la partie des grandes Annales de la Chine intitulée Nan-szu, ou Histoire du midi. Après la destruction de la dynastie de Tsin, en 420 de J.-C., la Chine fut pleine de troubles, dont il résulta l'établissement de deux empires, l'un dans

'Voyez Mémoires de l'Académie royale des inscriplions el belles-lettres, vol. xxvii, p. 505 à 525.

2 Ce sont les Nian eul-szu, ou les 22 historiens, dont les ouvrages forment une collection de plus de 600 volumes chinois, et qu'il ne faut pas confondre avec les Annales intitulées Thoung-kian-kang-mou, qu'on connaît en Europe par le maigre extrait que le P. Mailla en a donné en 12 volumes in-4°.

les provinces septentrionales, l'autre dans celles du midi. Ce dernier a été successivement gouverné, de 420 jusqu'en 589, par les quatre dynasties des Soung, des Thsi, des Liang et des Tchhin. L'histoire de ces deux empires a été rédigée par Li-yan-tcheou, qui vivait vers le commencement du 7e siècle. Voici ce qu'il dit du Fou-sang'.

« Dans la première des années young-yuan, du règne de Fi-ti » de la dynastie de Thsi, un cha-men (ou prêtre bouddhique), » nommé Hoeï-chin, arriva du pays de Fou-sang à King-tcheou'; » il raconte ce qui suit :

» Le Fou-sang est à 20,000 li à l'est du pays de Ta-han, et éga»lement à l'orient de la Chine. Dans cette contrée, il croît beaucoup » d'arbres appelés Fou-sang3, dont les feuilles ressemblent à celles » du Thoung (Bignonia tomentosa), et les premiers rejetons à ceux » du bambou. Les gens du pays les mangent. Le fruit est rouge et a » la forme d'une poire. On prépare l'écorce de cet arbre comme du » chanvre, et on en fait des toiles et des habits. On en fabrique » aussi des étoffes à fleurs. Les planches du bois servent à la cons

1 Le célèbre Ma-touan-lin, si estimé par M. Rémusat, a aussi donné cette relation dans son Wen-hien-long-kao avec de légères variantes, et c'est là que M. De Guignes l'a traduite; elle se trouve également répétée, dans la célèbre encyclopédie chinoise, intitulée Youen-kien-louy-han, où nous l'avons trouvée à Londres en 1830; et dans le Pian-y-lien, ou géographie des peuples étrangers; et tous ces ouvrages, fort estimés, existent à Paris.

2

(Note de M. de Paravey). King-tcheou est une ville du premier ordre, située sur la gauche du grand Kiang dans la province actuelle de Hou-pe. Cette date répond d'ailleurs à l'an 499 de J.-C.

› Fou-sang, en chinois et selon la prononciation japonaise, Fouts-sók, est l'arbrisseau que nous nommons Hisbiscus rosa chinensis. —Voir ces Caractères dans la Dissert. de M. de Paravey, ci-dessus, p. 102.

M. de Paravey, à leur égard, fait observer encore, que le P. Gonçalves, dans son Dict. portugais-chinois, fort estimé, traduit ce nom Fou-sang par Papoula cornuda, ou aussi Argemone du Mexique. Ce savant missionnaire y voyait donc une plante ou un arbuste d'Amérique ; et cette seule observation pourrait prouver que le Fou-sang propre répondait à quelque partie du Mexique.

>>truction des maisons, car dans ce pays il n'y a ni villes, ni habi» tations murées. Les habitans ont une écriture et fabriquent du papier avec l'écorce du Fou-sang. Ils n'ont ni armes ni troupes, >> et ne font pas la guerre. D'après les lois du royaume, il y a une prison méridionale et une septentrionale. Ceux qui ont commis des

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>> fautes peu graves sont envoyés dans la méridionale, mais les grands criminels sont relégués dans la septentrionale. Ceux qui >> peuvent recevoir leur grâce sont envoyés à la première, ceux au

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» contraire auxquels on ne veut pas l'accorder sont détenus dans la

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prison du nord '. Les hommes et les femmes qui se trouvent dans >> celle-ci peuvent se marier ensemble. Les enfans mâles qui naissent >> de ces réunions sont vendus comme esclaves à l'âge de 8 ans, les » filles à l'âge de 9 ans. Jamais les criminels qui y sont enfermés » n'en sortent vivans. Quand un homme d'un rang supérieur com>> met un crime, le peuple se rassemble en grand nombre, s'assied » vis-à-vis du criminel placé dans une fosse, se régale d'un banquet, » et prend congé de lui comme d'un mourant". Puis on l'entoure » de cendres. Pour un délit peu grave, le criminel est puni seul ; mais, pour un grand crime, le coupable, ses fils et les petits-fils » sont punis; enfin, pour les plus grands méfaits, ses descendans, jusqu'à la 7 génération, sont enveloppés dans son châtiment '.

>>

» Le nom du roi du pays est Y-khi (ou Yit-khi); les grands de » la première classe sont appelés Toui-lou, ceux de la seconde les » petits Toui-lou, et ceux de la troisième Na-tu-cha. Quand le roi » sort, il est accompagné de tambours et de cors. Il change la couleur de ses habits à différentes époques; dans les années du cycle kia

"

• De Guignes a assez mal rendu ce passage de cette manière: Les plus coupables sont mis dans la prison du nord, et transférés ensuite dans celle du midi, s'ils obtiennent leur grâce; autrement ils sont condamnés à rester pendant toute leur vie dans la première..

'De Guignes traduit ces derniers mots par « on le juge ensuite. »

3 Ces lois pénales sont celles que l'on a suivies de tout tems en Chine et dans les pays de l'Asie qui ont dépendu de la Chine. (De Par.)

4 De Guignes a mal lu Y-chi,

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»ety', ils sont bleus; dans les années ping et ting', rouges; dans » les années ou et ki3, jaunes; dans les années keng et sin, blancs; >> enfin dans celles qui ont les caractères jin et kouei 5, ils sont noirs 6. » Les bœufs ont de longues cornes, sur lesquelles on charge des » fardeaux qui pèsent jusqu'à 20 ho (à 120 livres chinoises). On se »sert dans ce pays de chars attelés de bœufs, de chevaux et de cerfs?. » On y nourrit les cerfs comme on élève les bœufs en Chine; on fait » du fromage avec le lait des femelles. On y trouve une espèce de

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poire rouge qui se conserve pendant toute l'année. Il y a aussi beau

» coup de vignes; le fer manque, mais on y rencontre du cuivre;

Les années 1, 11, 21, 31, 41 et 51 du cycle de 60 ans portent le caractère

kia; les années 2, 12, 22, 32, 42 et 52 ont le caractère y.

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Ping, 3, 13, 23, 33, 43 et 53; ling, 4, 14, 24, 34, 44 et 54.

'Ou, 5, 15, 25, 35, 45 et 55; ki, 6, 16, 26, 36, 46 et 56.

Keng, 7, 17, 27, 37, 47 et 57; sin, 8, 18, 28, 38, 48 et 58.,

5 Jin, 9, 19, 29, 39, 49 et 59; kouei, 10, 20, 30, 40, 50 et 60.

6 M. Klaproth reconnaît donc ici l'existence au Fou-sang, du cycle de 60 ans des Chinois; mais le recueil du P. Souciet montre qu'il existe aussi aux Indes; et dans le Journal asiatique de Paris, M. de Paravey a niontré qu'il commençait dans l'Inde et en Chine précisément en la même année. Les Bouddhistes de l'Inde ou'du nord de l'Asie-Centrale avaient donc pu le porter dès lors au pays de Fou-sang, en Amérique et au Mexique. (De Par.)

'Dans l'Inde, on le sait, ce sont surtout les bœufs qu'on attelle aux chars, et, au Kamchatka, ce sont les rennes, espèce de cerfs, qui tirent les traineaux. (De Par.)

8 De Guignes traduit: « Les habitans élèvent des biches comme en Chine, et ils en tirent du beurre. •

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9 Il y a dans l'original To-Phou-thao. De Guignes ayant décomposé le mot Phou-lhao, traduit: On y trouve une grande quantité de glayeuls et de pêches. Cependant le mot Phou seul ne signifie jamais glayeul, c'est le nom des joncs et autres espèces de roseaux de marais, dont on se sert pour faire des nattes. Thao est en effet le nom de la pêche, mais le mot composé Phou lao signifie en chinois la vigne. A présent il s'écrit avec d'autres caractères, mais ceux employés ici sont l'ancienne orthographe du tems des Han, qui a prévalu jusqu'au 10 siècle de notre ère. La vigne n'est pas une plante originaire de la Chine, les grains en ont été importés par le célèbre

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