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bien connue de Hansard. C'est un ouvrage considérable, mais très incomplet sur certains points, et qui ne nous donne que peu d'indications sur le rôle joué par les grands acteurs de l'histoire d'Angleterre. Le premier volume va de la création du parlement à la fin du règne de Jacques Ier. Le règne de Charles Ier jusqu'à la bataille d'Edgehill remplit le second volume. Le troisième est consacré à la république et à l'avènement de Charles II. Les volumes III et IV contiennent les règnes des deux derniers Stuarts, le volume V celui du roi Guillaume III et le volume VI celui de la reine Anne.

L'ouvrage continue ainsi jusqu'au volume XII, qui se termine à l'année 1743, et là nous trouvons une grande lacune, qui tient aux ordres sévères donnés par la chambre des communes pour l'exclusion absolue des étrangers de ses séances, pendant un laps de temps qui s'étendit jusqu'en 1773. En résumé, cette compilation fort utile nous laisse dans l'ignorance de beaucoup de faits et de discours du plus haut intérêt; c'est une sorte de croquis, de linéament de l'histoire parlementaire, mais sans couleur et sans vie, un simple procèsverbal.

Lord Brougham raconte à ce sujet qu'un jour on parlait devant Pitt des chefs-d'œuvre perdus; l'un disait qu'il désirerait retrouver quelques livres de Tite-Live, un autre penchait pour Tacite, un troisième pour quelque tragédie latine « Moi, dit Pitt, je voudrais retrouver un discours de Bolingbroke. »

Au reste, il ne faut pas s'exagérer l'importance de cette perte; l'opinion des Anglais sur les discours parlementaires est en général celle de Fox qu'ils sont faits, non pour être lus, mais pour être entendus.

L'exemple de Sheridan, de Windham et de Burke, qui les écrivaient à l'avance, est une exception qui ne semble pas, en Angleterre, devoir être encouragée. On dit que William Pitt ne corrigea que deux discours dans toute sa vie celui sur l'Union (de l'Angleterre et de l'Irlande), et un autre sur le rejet des offres de Napoléon Bonaparte en 1800. C'est ce dernier dont parle lord Campbell, dans son autobiographie, en le proclamant le plus beau qu'il eût jamais entendu.

Mais si les orateurs, à titre individuel, brillent peu dans l'Histoire parlementaire, par contre elle est pleine de harangues des rois, des chanceliers, des gardes des sceaux, pour la plupart d'une redoutable longueur. Un lord Keeper est indiqué comme ayant parlé trois heures, et d'un autre il est dit que les secrétaires n'ont pas été capables de reproduire son éloquence fleurie (his ornate oration).

En reproduisant cette dernière réflexion il convient de remarquer que les anciens procès-verbaux ne mentionnent nulle part ce qu'on peut appeler le reportage parlementaire pour les discussions proprement

dites; les faits sont indiqués sommairement, ainsi que les votes, et çà et là quelques harangues (en résumé) des speakers et des évêques : rien de plus. Tout, à cette époque, reste obscur pour le détail des débats, et c'est seulement avec le règne d'Élisabeth que nous entrons en pleine lumière; car c'est alors que le Journal de tous les Parlements de cette reine, publié par sir Simonds d'Ewes, nous donne pour la première fois un tableau clair et complet des travaux des deux chambres.

Cet ouvrage commence par un récit circonstancié de l'ouverture du premier parlement de la Reine Vierge, et nous voyons que la cérémonie n'a guère changé depuis cette époque. Notons cependant comme détails peu connus, même en Angleterre, qu'à la droite de la reine était placé un trône pour le Roi des Écossais, lorsqu'il assistait au parlement, et que l'abbé de Westminster siégea pour la dernière fois dans ce parlement; que sir Nicolas Bacon prononça un long discours après lequel on procéda à l'élection du speaker ou Bouche commune (Common Mouth) de la chambre. Dès cette époque on avait établi la pratique de voter les lois en première et seconde lecture et celle d'avoir une discussion sur la fixation de l'ordre du jour; enfin, comme analogie avec ce qui se passe de nos jours, citons l'exemple d'un speaker rappelant vivement à la question un orateur qui s'en écartait.

A partir du règne de Jacques Ier, nous trouvons une nouvelle source d'informations: 1° les Parliamentary Debates of 1610, imprimés d'après un manuscrit du British Museum par M. Gardner pour la Camden Society; l'éditeur nous apprend que les discours ont été transcrits évidemment d'après les notes prises par un membre du parlement en séance, ce qui leur donne plus d'authenticité; 2° les Débats de la Chambre des Lords en 1621, publiés également par la Camden Society; ils nous donnent in extenso les discussions sur la disgrâce du chancelier Bacon, sur la loi des monopoles, etc., et ces débats, quel que fut le mode de leur publication, paraissent avoir excité le plus vif intérêt dans le public. On peut en dire autant des débats sur la Liberté de la parole à la chambre des communes en 1621. Plus tard nous trouvons dans de nombreux recueils un grand nombre de discours des hommes célèbres du temps, notamment sous le Long Parlement, qui faisait imprimer par ordre de la chambre les discours de ses orateurs, mais seulement des orateurs agréables, car, pour les autres, ils apprenaient à leurs dépens les inconvénients d'une trop libre opposition témoin sir E. Dering et lord Denbigh.

L'Histoire parlementaire est assez incomplète pour le xvir siècle, mais on peut y ajouter comme documents à consulter plusieurs publications récentes, telles que le Journal de sir R. Knigthey, celui de lord Crewe, les notes sur les Débats du Long Parlement par sir R. Verney,

qui sont d'une grande valeur pour les années 1640, 1641 et 1642. Elles sont écrites au crayon sur des feuilles de papier ministre, pliées de façon à pouvoir être placées commodément sur les genoux, mais elles paraissent avoir été rédigées avec une grande difficulté et comme si le rédacteur avait été constamment interrompu dans son travail. De plus, après la date où sir E. Dering eut été expulsé de la chambre et envoyé à la Tour pour avoir publié ses discours, on voit les notes du manuscrit Varney devenir plus brèves, et ne mentionner que rarement le nom des orateurs. C'était de la prudence et d'ailleurs cette pratique de prendre des notes était ouvertement blâmée par la chambre des communes; Burton, qui nous a laissé des documents nombreux sur le Parlement du Protecteur, nous le rappelle en ces termes : « A une certaine époque, dit-il, on faillit ordonner des mesures contre moi à l'occasion de mes notes, parce que j'agissais expressément en cela contre les ordres de la chambre, et M. le Sollicitor Ellis se crut obligé une fois de les déchirer en pleine séance devant ses collègues. » La raison donnée de cette susceptibilité est assez curieuse c'est que l'on ôte la liberté et la franchise du langage aux députés, en leur faisant craindre, de la publicité au dehors, certaines conséquences fâcheuses. Quoi qu'il en soit, nous relevons la première mention d'un reportage sténographique au parlement anglais, à l'occasion de la tentative bien connue de Charles Ier pour arrêter les cinq membres du parlement, dans une poésie du temps:

You must take special cure that you let in
No Bracygraphy men to take notes.

Il paraît que ce jour-là le roi, entré en séance, fit prier Rushworth, alors Clerk assistant, de lui apporter le procès-verbal qu'il venait d'écrire, et le secrétaire hésitant : « Je ne vous demande pas, reprit brusquement le roi, de me montrer ce qu'a dit un autre membre de la chambre, mais ce que j'ai dit moi-même. » Alors Rushworth, en présence du roi, transcrivit de ses caractères (nous dirions aujourd'hui de sa sténographie) les paroles royales, qui furent aussitôt envoyées à l'imprimerie.

Pour le Long Parlement et celui de Cromwell, nous avons déjà cité le Journal de sir Simonds d'Ewes, auquel il faut joindre celui de Burton, publié seulement en 1828. Carlyle, qui a souvent cité le premier, paraît faire moins de cas du second, peut-être parce qu'il ne partageait pas ses passions politiques. Il semble cependant que Burton ne manquait pas d'humour; quelques traits sont à citer dans son journal. Celui-ci par exemple: Un membre demanda un soir, évidemment par lapsus linguæ, que l'on donnât à Son Altesse (Cromwell)

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a rope (une corde), au lieu d'une robe. Une autre fois, beaucoup de membres s'étant absentés à la fois pour aller revoir leurs familles à la campagne, une motion fut déposée pour donner le droit aux députés d'avoir leurs femmes avec eux à la ville et d'assurer ainsi leur assiduité. Burton rapporte aussi qu'un Standing Order, un règlement, fùt établi portant que tout membre ne prenant pas place en entrant à la chambre ou quittant sa place en troublant la séance, ou parlant tout haut pendant une discussion, aurait à payer une amende de un shilling, que le Clerk assistant devrait percevoir à la sortie. Le journal de Burton nous conduit jusqu'à la Restauration, et c'est alors que l'on voit le premier essai d'une sorte de collection méthodique et suivie des débats parlementaires. Ce sont les recueils de Timberlake pour la chambre des lords de 1660 à 1742 et de Chandler pour la chambre des communes. Après 1742, on y constate une grande lacune jusqu'à ce qu'Almon, en 1766, commence à publier les débats des chambres de 1742 à 1780.

Toutefois il est reconnu que la première tentative d'un véritable compte rendu régulier et authentique appartient à Cave, l'éditeur du Gentleman's Magazine, en 1731. D'autres publications du même genre parurent vers la même époque; mais, grâce sans doute à la collaboration bien connue du célèbre Johnson, les comptes rendus du Gentleman's Magazine ont conservé jusqu'à nos jours la plus grande autorité. Ils n'ont d'ailleurs rien d'uniforme ni de méthodique; tantôt les discours y sont donnés in extenso, tantôt en abrégé, ou même avec cette brève indication dans telle discussion, les principaux orateurs furent tels et tels pour et tels et tels contre. Comme on avait édicté des mesures rigoureuses en 1735 contre les reporters, on échappait ou on croyait échapper aux sévérités de la loi en donnant des noms classiques aux orateurs, ou en mettant comme rubrique à l'article Cham· bres: Débats dans une Société nouvellement établie, ou encore : Débats dans le Sénat de la Grande Lilliput, etc. Mais ces artifices étaient trop transparents, personne ne s'y trompait, et ils n'empêchaient pas les éditeurs d'être soumis de temps en temps à l'amende et à la prison. L'histoire des conflits entre le parlement et la presse, notamment de 1738 à 1771, a été si bien faite par lord Farnboroug, MM. Lecky et Bourne qu'il n'y a pas lieu d'y insister de nouveau. Rapportons cependant un mot de Georges II qui, lisant un discours apocryphe placé dans sa bouche par un de ces Magazines, déclarait hautement que ce discours était beaucoup plus sensé que le véritable, qui avait été rédigé par ses ministres.

Mais si de sévères mesures étaient constamment demandées et obtenues contre la presse, quelques voix s'élevaient aussi pour les com

battre; en 1738, quand le speaker Onslow appela l'attention de la chambre des communes contre l'audace de la presse : « Je me demande, répliqua sir W. Wyndham, si le peuple n'a pas le droit de savoir ce que font ses représentants? », et, en 1771, M. T. Townshend avertit franchement la chambre qu'elle se rendait ridicule par de pareilles frayeurs de la publicité. Nous savons enfin, lors même que les étrangers étaient bannis sans exception des séances, que plusieurs membres fournissaient des notes aux éditeurs des journaux. C'est ainsi, par exemple, que les discours de lord Chatham étaient rédigés pour le Gentleman's Magazine, par sir Philip Francis et M. Boyd.

Cave, l'éditeur de ce journal, semble avoir pris grand soin de l'exactitude de ses publications : il envoyait des épreuves aux orateurs et les recevait même chez lui assez souvent. Au début, ses procédés d'infor mation directe étaient originaux, mais bien élémentaires. Il avait deux ou trois agents placés en différents points de la chambre, qui cherchaient à retenir par cœur, le mieux possible, ce qu'ils entendaient, et qui couraient ensuite le faire transcrire dans un café voisin par un rédacteur. Le plus célèbre de ces rédacteurs était, nous l'avons dit, le fameux docteur Johnson, qui écrivit surtout dans le journal de 1740 à 1743.

Malgré ces sources de renseignements officieux, il y a pourtant une période de l'histoire d'Angleterre pour laquelle les renseignements nous manquent presque entièrement : c'est celle des sessions de 1768 à 1774, appelées ordinairement le Parlement unreported, parce que l'exclusion des étrangers y fut absolue. Chaque soir, dès que le speaker montait au fauteuil, un membre demandait qu'on épiât les étrangers, et aussitôt la galerie du public était évacuée. Néanmoins nous avons sur cette époque des notes étendues de sir H. Cavendish, qui s'excuse franchement de n'être pas complet, à cause « du désordre de certaines discussions, des applaudissements prématurés, et de la fréquence des mots hear! hear! (écoutez, écoutez) qui empêchaient souvent de bien entendre ». Mais bientôt, sous la pression de l'opinion publique, la presse fut admise de nouveau, officieusement du moins, à reproduire les débats des chambres; en 1784, Horace Walpole, écrivant à sir H. Mann, pouvait lui dire avec vérité : « Les débats parlementaires sont maintenant publiés avec tant de détails dans les journaux, que je n'ai pas besoin de vous en envoyer des extraits. » Cependant la tribune des étrangers ne contenait pas encore de places spéciales pour les journalistes, qui étaient chassés comme les autres personnes quand le speaker jugeait bon de faire siéger les communes en séance secrète.

En France, les choses se passèrent plus correctement et plus libéralement dès le début du régime parlementaire. On se souvient que l'As

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