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écrite pour un sujet de prix proposé par l'Académie de chirurgie. C'est dans cet opuscule de David qu'est consigné le premier exemple connu de résorption d'un abcès par congestion. Il s'agit, dans cette observation, d'une fille de 22 ans, atteinte, à la suite d'une chute, d'une affection des vertèbres lombaires suivie d'abcès ilio-fémoral. Après avoir peu à peu augmenté de volume, cet abcès resta quelques mois stationnaire, puis diminua par degrés et finit par disparaître, entièrement. Les autres accidents de la maladie cessèrent en même temps (1).

Quelques années plus tard, en 1793, Abernethy fit paraitre son mémoire sur les abcès par congestion de la partie inférieure du corps, abcès qu'il appelle lombaires, non pas, comme on l'a dit, parce qu'ils siégent souvent aux lombes, mais parce que le pus provient presque toujours des vertèbres lombaires. Abernethy ne se contenta pas, dans ce remarquable travail, de poser les principes encore suivis de nos jours pour l'ouverture de ces abcès; il n'oublia pas leur guérison par résorption. Il en cite deux cas observés, l'un chez une jeune fille de 14 ans, l'autre sur un homme âgé de plus de 30 ans. Le premier de ces abcès était situé à la cuisse, le second aux lombes. Il y avait gibbosité lombaire chez la jeune fille; la maladie des os était moins évidente dans le second cas (2).

Abernethy dit avoir vu plusieurs autres abcès semblables disparaître de la même manière, et quoiqu'il regarde cette heureuse issue comme peu commune, il établit, en règle générale, que la première indication à remplir dans le traitement de cette affection est de faire tous ses efforts pour obtenir l'absorption du pus.

L'illustre chirurgien anglais a reconnu, en outre, que dans certains cas, on obtient, après plusieurs ponctions suivies du retour de la collection purulente, une résorption qu'on n'avait pu déterminer auparavant, et il recommande de ne négliger, après chaque ponction, aucun des moyens capables de concourir à un résultat aussi avantageux.

Une des illustrations militaires de l'Empire, un chirurgien célèbre, qui eut l'honneur de siéger au sein de l'Académie des scien

(1) David, Dissertation sur les effets du mouvement et du repos dans les maladies chirurgicales, p. 113; Paris, 1779.

(2) Loc. cit.

ces, Larrey, a publié, en 1817, deux observations analogues à celles de David et d'Abernethy, qui lui étaient vraisemblablement inconnues. Les deux abcès résorbés occupaient la région dorsale; l'un des sujets était une demoiselle de 25 ans, l'autre un soldat de 23 ans (1).

Une autre lumière de l'Académie des sciences, Dupuytren, a également observé la résorption spontanée du pus des abcès symptomatiques après la guérison de l'affection vertébrale qui les produit. Cet éminent chirurgien a rapporté, dans ses leçons cliniques, l'histoire d'un jeune marchand mort de pneumonie plusieurs années après qu'il lui avait donné ses soins pour une affection du rachis, accompagnée d'abcès par congestion. On trouva, à l'autopsie, la lésion vertébrale guérie; l'abcès, réduit et même complétement effacé dans quelques points, contenait, au lieu de pus, une matière grasse, consistante, adipocireuse (2). M. Nélaton a rapporté un autre cas de guérison analogue, dont le sujet vit encore, et qui est également tiré de la pratique du chirurgien de l'Hôtel-Dieu (3).

On rencontre encore, dans des publications plus récentes, quelques faits épars de résorption d'abcès par congestion, tels que celui qui est rapporté par MM. Clairat et Morpurgo (4), celui de Hourmann (5), ceux de MM. A. Forget (6), Vilmot (7), F. Martin (8), Aran (9), etc. Enfin on a aussi, dans ces derniers temps, publié des cas d'abcès semblables résorbés aprés avoir été ponctionnés, comme dans quelques-unes des observations d'Abernethy (10).

Mais, quelle que soit l'importance de tous les faits que je viens de rappeler, ils sont regardés généralement comme des événements

(1) Larrey, Mém. de chir. milit., t. IV, p. 374.

(2) Dupuytren; Leçons de clin. chirurg., t. 1, p. 532.

(3) Nélaton, Pathologie chirurgicale, t. II, p. 94.

(4) Cas d'abcès par congestion, avec carie de la colonne vertébrale, guéri par les moxas et la compression; Paris, 1839.

(5) Dict. de méd. en 30 vol., art. Abcès par congestion, t. 1; 1832.

(6) Bulletin de thérapeutique, t. XXI, p. 41; 1841.

(7) Dict. de méd., loc. cit.

(8) Bullet. de la Soc. méd.-prat., dans l'Union méd. du 27 décembre 1853. (9) Bullet. de la Soc. méd. des hôpit., 1856, et Archives gén. de méd., août 1856.

(10) Rapport sur les traitements orthopédiques de M. J. Guérin à l'hôpital des Enfants; Paris, 1818.

fortuits, très-rares, tout à fait exceptionnels, et l'on n'en tient presque aucun compte lorsque l'on pose les indications qu'il convient de remplir dans la thérapeutique des abcès par congestion. Malgré les conseils judicieux d'Abernethy, de Larrey, de Dupuytren, on paraît avoir oublié que l'art peut intervenir avec fruit pour provoquer la résorption de ces abcès avant leur ouverture, et les écrits les plus justement estimés gardent un silence complet à l'égard de la méthode curative fondée sur la possibilité de déterminer de prime abord cette résorption.

L'objet de mon travail est de remplir cette lacune, en montrant : 1o Que la guérison par absorption du pus est ici beaucoup plus fréquente qu'on ne le croit ;

2o Que la méthode qui consiste à activer cette absorption doit être tirée de l'abandon où on l'a laissée, et qu'il faut lui rendre, dans la pratique, le rang que lui assigne sa supériorité sur toutes les autres méthodes.

Nul, je suppose, né contestera cette supériorité d'un mode de traitement guérissant les abcès par congestion sans les ouvrir, sur les méthodes qui exigent l'ouverture de ces abcès. Je ne veux point exagérer les dangers de cette ouverture; nous ne sommes plus à l'époque où on la croyait constamment fatale. Le temps a réformé l'arrêt de mort prononcé naguère par Boyer, dans les cas de ce genre, en dépit des guérisons d'abcès fistuleux déjà observées par David, Abernethy et d'autres. Mais il n'en est pas moins vrai que, même avec la méthode sous-cutanée d'Abernethy, perfectionnée par les modernes, un abcès par congestion ouvert fait toujours courir au malade des chances plus ou moins fàcheuses, qui n'existent point tant que l'abcès reste fermé. Aucun danger ne s'attache, au contraire, à la guérison par absorption; chacun sait que, dans ce cas, le passage du pus dans le sang, d'où il est éliminé par diverses excrétions, n'a aucune espèce d'inconvénient; qu'on n'observe jamais alors rien qui ressemble aux accidents terribles attribués à la résorption du pus dans certaines phlébites ou quand ce fluide est altéré par le contact de l'air.

On ne pense donc pas à nier les avantages évidents de ce mode de guérison; mais on le croit à peu près impossible à produire, et négligeant cette ancre de salut comme trop incertaine, on s'adresse

sur-le-champ aux autres méthodes, ou on temporise en laissant agir la nature.

Les faits que j'ai eu occasion d'observer m'ont démontré que la résorption des abcès symptomatiques du mal vertébral, loin d'être chose rare, est un événement assez commun dans certaines conditions qu'il importe de connaître; car c'est sur elles que sont basées les probabilités de cet heureux événement, ainsi que les indications qui doivent diriger la conduite du médecin.

Ce qui fait croire à la rareté de cette guérison par absorption, c'est que beaucoup d'abcès profonds ne sont pas reconnus; ils se développent, croissent, s'arrêtent, disparaissent, sans qu'on se soit douté de leur existence ni des périodes qu'ils ont parcourues. Depuis que je me suis fait une loi d'explorer attentivement les fosses iliaques dans tous les cas de mal vertébral sans exception, il m'est souvent arrivé de découvrir des abcès auxquels on n'avait pas songé, et plusieurs fois ces abcès ont disparu par résorption avant d'avoir acquis un volume qui les rendit apparents à tous les yeux.

Quant aux abcès plus accessibles à la vue et au toucher, il est probable que leur résorption se verrait plus souvent, si l'on se pressait moins de les ouvrir.

Les conditions qui paraissent présider à la production du phénomène dont je m'occupe agissent tantôt en diminuant la sécrétion du pus, tantôt en augmentant son absorption.

Que l'affection osseuse, par exemple, soit suspendue dans sa marche, qu'elle tende à la guérison, le pus formé sera moins abondant, et l'absorption venant à l'emporter sur la sécrétion, l'abcès pourra disparaître peu à peu.

Que d'un autre côté, la sécrétion restant la même, il se manifeste dans l'économie une révolution soudaine, ayant pour effet d'accroître la vitesse de la circulation, d'augmenter les produits des excrétions, de donner plus d'intensité à l'endosmose intérieure, à celle des parois de l'abcès en particulier, la résorption pourra également s'accomplir; l'abcès pourra même ne pas se renouveler malgré la persistance de la sécrétion purulente, parce que le pus sera emporté à mesure qu'il sera produit.

L'observation confirme ces idées a priori. C'est surtout quand

le mal vertébral tire à sa fin, quand le vide de la destruction osseuse est sur le point d'être comblé par la substance nouvelle, que les abcès, s'il en existe, sont peu à peu résorbés. Cette résorption coïncide, dans d'autres cas, avec une grande amélioration de l'état général, avec une révolution favorable de l'organisme, telle qu'on en voit à l'époque de la puberté, chez les jeunes filles, ou par l'effet des grandes influences hygiéniques, du changement d'habitation, de nourriture, de climat, etc., ou bien encore à la suite de l'action des bains de mer, des eaux thermales, de l'hydrothérapie. Les maladies aiguës accidentelles, fébriles, qui aggravent ordinairement le mal par la débilité qu'elles laissent à leur suite, lui impriment, au contraire, quelquefois une marche avantageuse, et, par l'activité momentanée qu'elles donnent à la circulation, par les modifications qu'elles entraînent dans d'autres fonctions, favorisent l'absorption du pus et la guérison de l'abcès.

Quelle que soit la cause qui détermine ou favorise l'absorption du pus, celle-ci est souvent accompagnée d'une plus grande abondance de certaines excrétions, notamment de l'excrétion urinaire.

L'âge, la constitution des sujets, le siége, l'étendue de la collection purulente, exercent une influence marquée sur la facilité de la résorption.

On sait que cette heureuse terminaison, de même que la guérison du mal vertébral lui-même, est plus fréquente chez les enfants; mais ce serait une erreur de la croire propre à cet âge. Les faits de David, d'Abernethy, de Larrey, etc., que j'ai cités plus haut, prouvent qu'on l'observe également chez l'adulte.

Une constitution détériorée, cachectique, laisse peu de chances de résorption; ce mode de guérison est plus à espérer dans les conditions contraires.

Les abcès profonds, recouverts d'une grande épaisseur de parties molles, se résorbent plus souvent que les autres. Lorsque le pus est arrivé immédiatement sous la peau, qu'il la distend dans une plus ou moins grande étendue, il est rare que les téguments amincis ne finissent pas par s'enflammer, par s'ulcérer dans un point, avant que l'absorption ait pu avoir lieu.

Le volume considérable de la tumeur rend naturellement, toutes choses égales d'ailleurs, sa résorption plus lente et plus difficile. C'est ainsi que les abcès par congestion qui ont envahi la plus

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