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VIIe Principe.

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qui renferme un million de numéros, nous semble un événement ordinaire; parce que comparant individuellement les numéros, les uns aux autres, sans les partager en classes, nous n'avons aucune raison de croire que l'un d'eux sortira plutôt que les autres.

De ce qui précède, nous devons généralement conclure que plus un fait est extraordinaire, plus il a besoin d'être appuyé de fortes preuves. Car ceux qui l'attestent, pouvant ou tromper, ou avoir été trompés, ces deux causes sont d'autant plus probables que la réalité du fait l'est moins en elle-même. C'est ce que l'on verra particulièrement, lorsque nous parlerons de la probabilité des témoignages.

La probabilité d'un événement futur est la somme des produits de la probabilité de chaque cause, tirée de l'événement observé, par la probabilité que cette cause existant, l'événement futur aura lieu. L'exemple suivant éclaircira ce principe.

Imaginons une urne qui ne renferme que deux boules dont chacune soit ou blanche, ou noire. On extrait une de ces boules, que l'on remet ensuite dans l'urne, pour procéder à un nouveau tirage. Supposons que dans les deux premiers tirages, on ait amené des boules blanches; on demande la probabilité d'amener encore une boule blanche au troisième tirage.

On ne peut faire ici que ces deux hypothèses; ou l'une des boules est blanche, et l'autre, noire; ou toutes deux sont blanches. Dans la première hypothèse, la probabilité de l'événement observé est; elle est l'unité ou la certitude dans la seconde. Ainsi, en regardant ces hypothèses, comme autant de causes, on aura par le sixième principe, et pour leurs probabilités respectives. Or si la première hypothèse a lieu, la probabilité d'extraire une boule blanche au troisième tirage est ; elle égale l'unité, dans la seconde hypothèse : en multipliant ces dernières probabilités, par celles des hypothèses correspondantes, la somme des produits, ou la probabilité d'extraire une boule blanche au troisième tirage. Quand la probabilité d'un événement simple est inconnue, on peut lui supposer également toutes les valeurs depuis zéro jusqu'à l'unité. La probabilité de chacune de ces hypothèses, tirée de l'événement observé, est par le sixième principe, une fraction dont

sera

le numérateur est la probabilité de l'événement dans cette hypothèse, et dont le dénominateur est la somme des probabilités semblables relatives à toutes les hypotheses. Ainsi la probabilité que la possibilité de l'événement est comprise dans des limites données, est la somme des fractions comprises dans ces limites. Maintenant, si l'on multiplie chaque fraction, par la probabilité de l'événement futur, déterminée dans l'hypothèse correspondante; la somme des produits relatifs à toutes les hypothèses sera par le septième principe, la probabilité de l'événement futur, tirée de l'événement observé. On trouve ainsi qu'un événement étant arrivé de suite, un nombre quelconque de fois; la probabilité qu'il arrivera encore la fois suivante, est égale à ce nombre augmenté de l'unité, divisé par le même nombre augmenté de deux unités. En faisant, par exemple, remonter la plus ancienne époque de l'histoire, à cinq mille ans, ou à 1826213 jours, et le soleil s'étant levé constamment dans cet intervalle, à chaque révolution de vingt-quatre heures; il y a 1826214 à parier contre un, qu'il se levera encore demain. Mais ce nombre est incomparablement plus fort pour celui qui connaissant par l'ensemble des phénomènes, le principe régulateur des jours et des saisons, voit que rien dans le moment actuel, ne peut en arrêter le cours.

Buffon, dans son Arithmétique politique, calcule différemment la probabilité précédente. Il suppose qu'elle ne diffère de l'unité, que d'une fraction dont le numérateur est l'unité, et dont le dénominateur est le nombre deux élevé à une puissance égale au nombre des jours écoulés depuis l'époque. Mais la vraie manière de remonter des événemens passés, à la probabilité des causes et des événemens futurs, était inconnue à cet illustre écrivain.

De l'Espérance.

La probabilité des événemens sert à déterminer l'espérance ou la crainte des personnes intéressées à leur existence. Le mot espérance a diverses acceptions: il exprime généralement l'avantage de celui qui attend un bien quelconque, dans des suppositions qui ne sont que probables. Cet avantage, dans la théorie des ha

VIII Principe.

IXe Principe,

sards, est le produit de la somme espérée, par la probabilité de l'obtenir : c'est la somme partielle qui doit revenir, lorsqu'on ne veut point courir les risques de l'événement, en supposant que la répartition se fasse proportionnellement aux probabilités. Cette répartition est la seule équitable, lorsqu'on fait abstraction de toutes circonstances étrangères; parce qu'avec un égal degré de probabilité, on a un droit égal sur la somme espérée. Nous nommerons cet avantage, espérance mathématique.

Lorsqu'il dépend de plusieurs événemens; on l'obtient, en prenant la somme des produits de la probabilité de chaque événement, par le bien attaché à son arrivée.

Appliquons ce principe à des exemples. Supposons qu'au jeu de croix et pile, Paul reçoive deux francs, s'il amène croix au premier coup, et cinq francs, s'il ne l'amène qu'au second. En multipliant deux francs, par la probabilité du premier cas, et cinq francs, par la probabilité du second cas; la somme des produits, ou deux francs et un quart sera l'avantage de Paul. C'est la somme qu'il doit donner d'avance à celui qui lui fait cet avantage; car pour l'égalité du jeu, la mise doit être égale à l'avantage qu'il procure.

Si Paul reçoit deux francs, en amenant croix au premier coup, et cinq francs en l'amenant au second coup, soit qu'il l'ait ou non, amené au premier; alors la probabilité d'amener croix au second coup, étant ; en multipliant deux francs et cinq francs par ¦, la somme de ces produits, donnera trois francs et demi pour l'avantage de Paul, et par conséquent pour sa mise au jeu,

Dans une série d'événemens probables, dont les uns produisent un bien, et les autres, une perte; on aura l'avantage qui en résulte, en faisant une somme des produits de la probabilité de chaque événement favorable, par le bien qu'il procure; et en retranchant de cette somme, celle des produits de la probabilité de chaque événement défavorable, par la perte qui y est attachée. Si la seconde somme l'emporte sur la première, le bénéfice devient perte, et l'espérance se change en crainte.

On doit toujours, dans la conduite de la vie, faire ensorte d'égaler au moins, le produit du bien que l'on espère, par sa probabilité, au produit semblable relatif à la perte. Mais il est nécessaire pour

y parvenir, d'apprécier exactement, les avantages, les pertes, et leurs probabilités respectives. Il faut pour cela, une grande justesse d'esprit, un tact délicat, et une grande expérience des choses: il faut savoir se garantir des préjugés, des illusions de la crainte et de l'espérance, et de ces fausses idées de fortune et de bonheur, dont la plupart des hommes bercent leur amour-propre.

L'application des principes précédens, à la question suivante, a beaucoup exercé les géomètres. Paul joue à croix et pile, avec la condition de recevoir, deux francs, s'il amène croix au premier coup; quatre francs, s'il ne l'amène qu'au second; huit francs, s'il ne l'amène qu'au troisième, et ainsi de suite. Sa mise au jeu, doit être par le huitième principe, égale au nombre des coups; ensorte que si la partie continue à l'infini, la mise doit être infinie. Cependant, aucun homme raisonnable ne voudrait exposer à ce jeu, une somme même modique, cinquante francs, par exemple. D'où vient cette différence entre le résultat du calcul, et l'indication du sens commun? On reconnut bientôt, qu'elle tenait à ce que l'avantage moral qu'un bien nous procure, n'est pas proportionnel à ce bien, et qu'il dépend de mille circonstances souvent très-difficiles à définir, mais dont la plus générale et la plus importante est celle de la fortune. En effet, il est visible qu'un franc a beaucoup plus de prix pour celui qui n'en a que cent, que pour un millionnaire. On doit donc dans le bien espéré, distinguer sa valeur absolue, de sa valeur relative. Celle-ci se règle sur les motifs qui le font desirer; au lieu que la première en est indépendante. On ne peut pas donner de principe général, pour apprécier cette valeur relative. En voici cependant un proposé par Daniel Bernoulli, et qui peut servir dans beaucoup de cas. La valeur relative d'une xe Principe. somme infiniment petite, est égale à sa valeur absolue divisée par le bien total de la personne intéressée. Cela suppose que tout homme a un bien quelconque dont la valeur ne peut jamais être supposée nulle. En effet, celui même qui ne possède rien, donne toujours à son existence, une valeur au moins égale à ce qui lui est rigoureusement nécessaire pour vivre.

Si l'on applique l'analyse, au principe que nous venons d'exposer; on obtient la règle suivante.

En désignant par l'unité, la partie de la fortune d'un individu, indépendante de ses expectatives; si l'on détermine les diverses valeurs que cette fortune peut recevoir en vertu de ces expectatives, et leurs probabilités; le produit de ces valeurs élevées respectivement aux puissances indiquées par ces probabilités, sera la fortune physique qui procurerait à l'individu, le même avantage moral qu'il reçoit de la partie de sa fortune, prise pour unité, et de ses expectatives; en retranchant donc l'unité, de ce produit; la différence sera l'accroissement de la fortune physique, dû aux expectatives: nous nommerons cet accroissement, esperance morale. Il est facile de voir qu'elle coïncide avec l'espérance mathématique, lorsque la fortune prise pour unité, devient infinie par rapport aux variations qu'elle reçoit des expectatives. Mais lorsque ces variations sont une partie sensible de cette unité, les deux espérances peuvent différer très-sensiblement entre elles.

Cette règle conduit à des résultats conformes aux indications du sens commun, que l'on peut à ce moyen, apprécier avec quelqu'exactitude. Ainsi dans la question précédente, on trouve que si la fortune de Paul est de deux cents francs, il ne doit pas raisonnablement mettre au jeu plus de neuf francs. La même règle conduit encore à répartir le danger, sur plusieurs parties d'un bien que l'on espère, plutôt que d'exposer ce bien tout entier au même danger. Il en résulte pareillement, qu'au jeu le plus égal, la perte est toujours relativement plus grande que le gain; car le produit de la fortune prise pour unité, augmentée du gain et élevée à une puissance égale à la probabilité du gain, par cette unité diminuée de la perte, et élevée à une puissance égale à la probabilité de la perte, est toujours moindre que la fortune du joueur avant sa mise au jeu. En supposant par exemple, cette fortune, de cent francs, et que le joueur en expose cinquante au jeu de croix et pile; sa fortune après sa mise au jeu, peut être en vertu de son expectative, ou de cent cinquante francs, ou seulement de cinquante; la probabilité de chacun de ces deux cas est; cette fortune est donc par la règle précédente, égale à la racine carrée du produit de cent cinquante, par cinquante; elle est ainsi réduite à quatre-vingt-sept francs, c'est-à-dire que cette dernière somme

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