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(Planté-C. Dubrana.)

20 mess. an 12, testament par lequel le sieur Laporte institue, par une même disposition, le sieur Planté et ses deux sœurs, tous trois neveux du testateur, « pour, est-il dit, faire et disposer de mon entière hérédité, après mon décès, par portions égales à leur volonté, en payant mes dettes, etc.>>

Après le décès du testateur, le sieur Planté et l'une de ses sœurs, la femme Dessoliés, se firent envoyer en possession de la totalité de la succession, encore qu'avant le décès du testateur, Antoinette Planté, l'une des trois légataires, fùt décédée. Mais un tiers de cette succession fut contesté aux légataires par le sieur Dubrana, héritier légitime du défunt, sur le fondement que le sieur Planté et sa sœur, la dame Dessoliés, n'avaient été institués que chacun pour un tiers de la succession; que le troisième tiers, légué à Antoinette Planté, décédée, devait appartenir à l'héritier légitime, par préférence aux légataires.

Ceux-ci répliquèrent que le troisième tiers leur appartenait, en vertu du droit d'accroissement, établi par l'article 1044 du Code civil; attendu que le legs de la totalité était fait conjointement, c'est-à-dire sans assignation de la part de chacun des colégataires dans la chose léguée.

Pour l'héritier légitime, on soutenait que le legs de la totalité n'était pas fait conjointement aux trois colégataires, puisqu'il y avait eu division des parts; en ce que le testateur avait dit qu'ils recueilleraient et jouiraient par portions égales.

20 janvier 1806, jugement du tribunal civil d'Agen, qui déclare y avoir lieu au droit d'accroissement.

Appel.Et le 3 mars 1806, arrêt de la Cour d'Agen qui infirme et déclare le sieur Dubrana seul investi

pendait celle de savoir si c'était les Dessoliés et Planté, ou Dubrana, qui devaient être envoyés en possession; et d'après les anciennes lois et leurs commentateurs, et notamment d'après Furgole, ceux à qui une même chose avait été léguée par égales portions, n'étaient conjoints que par les paroles; et l'accroissement n'avait pas lieu entre eux. Le Code civil a conservé les dispositions de l'ancien droit, en décidant par l'art. 1044, que l'accroissement n'a lieu que lorsque le legs est fait à plusieurs conjointement, et qu'il est fait conjointement, lorsque le testateur n'a pas assigné la part de chacun des colégataires dans la chose léguée; qu'ici le testateur a assigné la part des colégataires, puisqu'il veut qu'ils partagent par portions égales; qu'il n'y a donc pas lieu à accroissement; qu'une portion de la succession est devenue caduque, qu'elle appartient donc aux héritiers ab intestat, et que les légataires qui, s'ils avaient tous survécu au testateur, auraient été légataires universels, sont devenus légataires à titre universel; que d'après les dispositions du Code civil, ils doivent demander à l'héritier ab intestat la délivrance du legs; que c'était donc Dubrana, héritier ab intestat, qui devait être envoyé en possession, et non les Planté, qui ne sont que légataires à titre universel. »

POURVOI en cassation de la part des colégataires, pour contravention à l'art. 1044 du Code civil.

Les demandeurs faisaient observer que, dans l'espèce, il n'y avait eu qu'une seule et même disposition. Ils soutenaient ensuite que le testateur n'avait pas assigné la part de chacun des colégataires dans la chose léguée.

Toute la défense de Dubrana se réduisait, par contre, à soutenir qu'en ordonnant que les co

tions égales, le testateur avait assigné la part de chacun des colégataires, comme s'il avait dit et répété trois fois: Je donne à un tel de ines trois neveux, le tiers de tous mes biens.

M. Daniels, substitut, portant la parole, s'est exprimé en ces termes :

de droit de la succession Laporte, sauf aux légatai-légataires recueilleraient et jouiraient par porres à lui demander la délivrance du legs à eux fait: «attendu,que si les trois héritiers eussent été en vie à la mort de Laporte, le président du tribunal eût dû les envoyer en possession de l'hérédité, parce qu'ils auraient été légataires universels, et conséquemment, d'après les dispositions du Code civil, ils auraient été saisis, de plein droit, et n'auraient pas été tenus de demander la délivrance, puisqu'il n'y avait pas d'héritiers auxquels une quotité de biens fût réservée par la loi; mais l'un de ces légataires étant mort, il était question de décider si sa portion avait accru à son frère et à sa sœur, ou si elle était dévolue aux héritiers ab intestat, dès que, d'après le Code civil, l'institution du défunt était devenue caduque; et, de la solution de cette question, dé

ces différens points, ont peut-être enlevé aux anciennes règles et aux formules du droit romain, quelque chose de leur intérêt; et, pour l'utilité actuelle, il suffira de rappeler la distinction sur laquelle repose la décision de l'arrêt que nous recueillons ici, distinction qui a été maintes fois consacrée par la jurisprudence.-Suivant l'art. 1044 du Cod. civ., il y a ieu à accroissement au profit des légataires, dans le cas où le legs est fait à plusieurs conjointement; etle legs est réputé fait conjointement, lorsqu'il l'est par une seule et même disposition, et que le testateur n'a pas assigné la part de chacun des colégataires dans la chose léguée. Or, quand le testateur est-il ré

avoir ou n'avoir pas assigné la part de chaque légataire dans la chose léguée, alors qu'il a cependant indiqué la part qui, dans cette chose, appartiendrait à chaque colégataire? Pour résoudre la difficulté, les auteurs distinguent entre le cas où il y a assignation proprement dite d'une quote part, et le cas où il y a seulement déclaration de la part

<< On connaissait, dans les lois romaines, a-t-il. dit, deux espèces de droit d'accroissement: l'une se faisait par nécessité, potestate juris, comme il est dit dans la loi 13, § 2, ff., de hæred. instit., et indépendamment de toute conjonction entre les légataires; et l'autre dérivait de la conjonction entre les légataires. La première espèce d'accroissement avait lieu entre les héritiers du sang, appelés par la loi, soit en ligne directe, soit en ligne collatérale; elle avait également lieu dans

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qui doit régulièrement échoir à chaque légataire; en d'autres termes on distingue le cas où l'assignation se trouve dans la disposition de celui où elle est dans l'exécution. Dans le premier cas, l'assignation empêche qu'il n'y ait lieu à accroissement: dans le second, elle n'y fait pas obstacle. L'espèce de l'arrêt ci-dessus rapporté donne l'exemple d'une assignation dans l'exécution. Mais il y aurait assignation dans la disposition, et par suite la solution eût dû être tout autre si la disposition avait spécialement attribué à chacun des trois légataires un tiers de la chose léguée. V. Merlin, Répert., vo Accroissement, no 2; Toullier, tom. 5, n. 691; Duranton, t. 9, n. 504 et suiv.-V. au surplus, dans le sens de l'arrêt, Cass. 18 oct. 1809; 14 mars 1815. V. encore sur la distinction ci-dessus établie, Turin, 23 août 1808; Cass. 18 mai 1825; Toulouse, 31 juillet 1828, Cass. 19 janvier 1830, 18 décembre 1832; Aix, 14 décembre 1833; Paris, 22 juin 1833,

Ja délation d'hérédité par testament, par institution ou substitution directe. Lorsqu'il s'agissait de la succession testamentaire, le droit d'accroissement était fondé sur la maxime: Nemo pro parte testatus, pro parte intestatus potest decedere. En matière de succession légale, il reposait sur le principe suivant lequel l'hérédité représente une seule et unique personne. De là la maxime de droit: Hæres succedit in universum jus defuncti, vel in re, vel sallem in spe. Et ces règles de l'ancien droit ont été confirmées par la lui unique, § 10, au Code, de caducis tollendis. —L'art. 786 du Code civil les a maintenues pour la succession légitime.- La part du renonçant, y est-il dit, accroît à ses cohéritiers.-En est-il de même de la succession testamentaire ? Le droit d'accroissement a-t-il lieu entre cohéritiers testamentaires, depuis comme avant la publication du Code, indépendamment de toute conjonction? On pourrait dire que les règles établies par les art. 1044 et 1045 du Code civil, ne sont applicables qu'aux légataires à titre particulier.-A peine le législateur a-t-il déclaré dans l'art. 1043, pour les héritiers, comme pour les légataires à titre particulier, que la disposition testamentaire sera caduque, lorsque L'HÉRITIER institué ou le légataire la répudiera ou se trouvera incapable de la recueillir, qu'il passe, dans l'article suivant, au droit d'accroissement.

<«<lci il ne parle plus de l'héritier institué; il p'emploie que le mot légataire.—Il y aura lieu à accroissement au profit des LÉGATAIRES, y estil dit, dans le cas où le legs sera fait à plusieurs conjointement.-N'est-il pas probable que son intention était de ne comprendre dans la disposition de cet article, que les légataires à titre particulier, par cela seul qu'il ajoute dans le même article: Le legs sera réputé fait conjointement, lorsqu'il le sera par une seule et même disposition, et que le testateur n'aura pas assigné la part de chacun des colégataires dans LA CHOSE LÉGUÉE ! N'est-il pas inusité de désigner la totalité d'une succession par le nom chose léguée ?-Comment voudrait-on, dans le système contraire, résoudre la question suivante? Le testateur qui avait quatre frères, les instituait ses héritiers universels, par portions égales, à la charge par eux de payer différens legs qu'il venait de faire à titre particulier. L'un des cohéritiers renonce à la succession; appartiendra-t-elle aux enfans du renonçant? Ce serait dire qu'on peut représenter une personne vivante,contre les dispositions de l'art. 744 du Code civ. Il paraît donc qu'il n'y a lieu à accroissement qu'en faveur des légataires à titre particulier. - Mais ces argumens sont plus spécieux que solides. Il nous paraît constant, dans le système du Code civ., que le droit d'accroissement est régi par les mêmes principes, n'importe qu'il s'agisse d'en appliquer les effets aux héritiers universels ou aux légataires à titre particulier.-La loi comprend les uns comme les autres sous la dénomination générale de légataires; et s'il est vrai de dire que les dispositions testamentaires sont, ou universelles, ou à titre universel, ou à titre particulier, il n'est pas moins vrai que toutes ces dispositions sont comprises sous la dé. nomination de legs.-Ainsi, en ordonnant, par l'art. 1044, qu'il y aura lieu à accroissement au profit des légataires, dans le cas où le legs sera fait à plusieurs conjointement, le législateur a voulu appliquer le même principe aux institutions d'héritier qu'aux legs à titre particulier ; par ces mots, la chose léguée, on doit entendre la totalité d'une succession ou une quote-part,

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aussi bien que tout autre objet particulier; et d'après cela, rien n'est plus facile que de répondre à la question que nous venons de proposer. Lorsque le testateur qui avait quatre frères les a institués par portions égales, et que l'un d'eux renonce à la succession, la portion vacante ap partenait aux autres, non pas en vertu d'un droit d'accroissement, mais parce qu'ils sont les héritiers légitimes du défunt, comme elle leur appartiendrait également, quand même le testateur n'aurait pas disposé en leur faveur. Il n'y a, sous ce rapport, aucune différence entre les légataires et les héritiers. Nous aurons donc à examiner le sens de l'art. 1044, pour en appliquer ensuite les dispositions à l'espèce.-On distinguait dans l'ancien droit romain, trois sortes de conjonctions: la 1re était la conjonction verbale; la 2o était par les paroles et la chose; la 3o, par la chose seulement.

«Le droit nouveau, réglé et expliqué par la loi unique, $ 10 et 11, au Code, de caducis tollendis, n'admet que deux sortes de conjonctions capables de produire le droit d'accroissement entre légataires, la vraie conjonction re et verbis, lorsque deux ou plusieurs personnes sont appelées par une seule et même disposition, pour recueillir le même legs sans que les portions fussent assignées par le testateur; et la conjonction par la chose seulement, qui arrive lorsque deux personnes sont appelées à la même liberalité, par un discours séparé, que la loi romaine appelle disjonction.-Le Code a simplifié cette doctrine; elle se réduit aujourd'hui à quelques règles faciles à saisir.-La première: comme sous le droit romain, surtout depuis la loi unique, au Code, de caducis tollendis, la conjonction purement verbale, ne produisait pas le droit d'accroissement; il en est de même suivant les dispositions du Code civil.-Le droit d'accroissement n'a donc lieu ni entre cohéritiers, ni entre colégataires à titre particulier, lorsque le testateur a assigné la part à chacun; par exemple, je lègue à tel, tel et tel, et par tiers à chacun, la maison qui m'appartient;-La seconde : la conjonction par la chose seulement, que les Romains appelaient disjonction, neproduit le droit d'accroissement que dans un seul cas, c'est-à-dire lorsque la chose léguée n'est pas susceptible d'être divisée sans détérioration.-Telle était, avant la publication du Code civil, l'opinion de quelques auteurs (réfutée, dans les principes du droit romain, par Ricard, dans son Traité des donations, part. 3, no 518, et par Furgole, dans son Traité des testamens, ch. 9, no 43 ), et telle est aujourd'hui la disposition de l'art. 1045 du Code civil.-Enfin, la troisième règle est que le droit d'accroissement a lieu ( n'importe que la chose léguée soit ou ne soit pas susceptible d'être divisée sans détérioration), toutes les fois que le legs a été fait à deux ou plusieurs personnes, par une seule el même disposition, et que le testateur n'a pas assigné la part de chacun des colégataires dans la chose léguée; ce que l'on appelle, dans le droit romain, conjonction par les paroles et la chose, conjunctio mixta, conjunctio re et verbis. - Tels sont, ce nous semble, les principes adoptés par le Code civil.-M. de Maleville, dans son analyse de la discussion du Code civil, sur l'art. 1045, les exprime en très peu de mots.-« L'accroissement, dit-il, aura lieu inter conjunctos re et verbis. Il n'aura pas lieu inter conjunctos verbis tantum, ni même inter conjunctos re tantum, excepté que la chose léguée ne soit impartageable.» Telle est aussi la doctrine de M. Grentet, dans son Traité des donations.

«Or, quelle est l'espèce de conjonction par la

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quelle le sieur Laporte avait appelé son neveu et
ses nièces? Cette conjonction est-elle purement
verbale ou mixte? suffit-elle pour donner lieu
au droit d'accroissement entre cohéritiers?
Tous les auteurs qui ont traité la matière des
conjonctions, font à cet égard une distinction
très facile à saisir.-La conjonction est purement
verbale, lorsque le testateur fait mention des
parts dans l'institution même, lorsqu'il n'ap-
pelle chacun des légataires qu'à telle ou telle
portion. C'est au contraire une conjonction mixte,
lorsqu'il appelle d'abord tous les héritiers indi-
stinctement à la totalité, et qu'il ne fait mention
des parts que dans l'exécution, puisqu'alors il ne
fait qu'appliquer la règle de droit, qui détermine
les effets d'une conjonction mixte. CONCURSU
PARTES FACIUNT.»-Et sur ce point, M. le sub-
stitut citait Furgole, Traité des testamens, ch.
9, § 15; Cujas, dans son commentaire sur le
titre du Digeste de legatis, et Ricard, Traité
des Donations, 3o part., ch. 4, sect. 3, no 471.
-« Cette distinction, ajoutait M. Daniels, est
fondée sur la nature des choses. On ne peut sup-
poser que la loi ait voulu interdire au testateur
de parler d'un partage, à peine d'exclusion de
tout droit d'accroissement. Quel serait le motif
de cette différence? Nous n'en connaissons au-
cun. Mais lorsque, par l'effet même de l'institu-
tion, chacun n'est appelé qu'à une portion de la
succession, alors, dans ce cas seulement, il y a
'un motif raisonnable d'exclure le droit d'accrois-
sement.-Ici le testateur a d'abord institué pour
ses héritiers généraux et universels, son neveu
et ses deux nièces ; c'est la disposition du testa-
ment: elle est complète, rien ne lui manque,
elle renferme évidemment une conjonction mixte
re et verbis. Le sieur Laporte a ensuite ajouté :
Pour par eux jouir, faire et disposer de mon
entière hérédité, après mon décès, par portions
égales, à leur volonté.-Cette clause accessoire
ne se rapporte qu'à l'exécution de la disposition.
-Le testateur veut que son neveu et ses deux
nièces jouissent de son entière hérédité après
son décès; voilà encore une conjonction, par
paroles et par la chose, une conjonction mixte.
Il ajoute bien que ses héritiers institués parta-
geront sa succession par égales portions; mais
il n'a entendu ni pu entendre que ceux des héri-
tiers qui lui survivraient; c'est de ceux-ci qu'il
parle en effet, lorsqu'il veut qu'ils partagent
entre eux la succession entière, et que le partage
soit fait par égales portions. Cette déclaration,
loin d'exclure le droit d'accroissement, le con-
firme. Elle ne veut pas dire que le testateur ap-
pelle le sieur Planté à un tiers de son hérédité,
et la dame Dessoliès à un autre tiers; l'institu-
tion précède: elle a pour objet la totalité de la
succession. Chacun des appelés est qualifié par
le testateur lui-même, son héritier général et
universel; le surplus ne regarde que l'exécution
du testament. Le testateur ne dit pas même que
les héritiers qu'il vient d'instituer, et qui lui
survivraient, n'auront chacun qu'un tiers: il dit
seulement que ces héritiers jouiront, après son
décès, de son entière hérédité par portions
égales; il explique, par conséquent, la manière
de procéder un jour au partage de sa succession;
et il nous semble que ce n'est pas assigner dans
la partie dispositive, la part de chacun des colé-
gataires dans la chose léguée.-Il est même sou-
vent nécessaire que le testateur s'explique sur la

(1) Cette décision est conforme à l'opinion générale des jurisconsultes. V. Mayer de Chassat, Comment. du Code civ., t. 1er, p. 126, qui invoque l'autorité de Francke, Comment. ad Pandect, in

maniere de partager sa succession. Il nomme, par exemple, pour ses héritiers universels, le mari, la femme et un tiers; ne faut-il pas qu'il se prononce sur la question de savoir si le mari et la femme seront réputés dans le partage pour une seule et même personne, ou si chacun d'eux aura, dans la succession, une portion égale à celle de leur cohéritier? Or, comment est-il possible de prévenir cette difficulté, sans parler de la part que chacun aura dans la succession? Et il ne serait pas permis au testateur de s'expliquer sur un point aussi essentiel pour l'exécution de sa volonté, et pour la tranquillité de ses héritiers, sans qu'il déroge au droit d'accroissement! Il n'y aurait donc plus moyen de parler du partage, sans que le testateur se place dans l'alternative d'exclure le droit d'accroissement, ou de substituer vulgairement ses héritiers les uns aux autres? Ce serait dire que deux causes absolument identiques ne produisent pas le même effet.-Le Code civil, comme le droit commun, en adoptant en principe qu'il y aura lieu à accroissement au profit des légataires, dans le cas où le legs sera fait à plusieurs conjointement, reconnaît cependant comme règle invariable, la maxime: Concursu partes faciunt. On ne peut soutenir qu'il suffit de parler de cette maxime dans un testament pour exclure le droit d'accroissement.-Il nous paraît donc bien constant que la portion devenue vacante par le prédécès de la demoiselle Antoinette Planté, appartient à ses cohéritiers testamentaires, et que l'arrêt qui a adjugé cette portion à l'héritier légitime a violé l'art. 1044 du Code civ.»-Conclusions à la cassation.

ARRÊT (après délib. en ch. du cons.).

LA COUR;-Vu l'art. 1044 du Code civil;— Considérant que les trois frères et sœurs Planté sont, par une seule et même disposition institués héritiers universels de Laporte, pour disposer de son entière hérédité;-Que cette institution conjonctive n'a point été dénaturée ni altérée par l'addition des mots pour jouir et disposer de ladite hérédité par égales portions, que cette expression n'annonce d'aucune manière que le testateur ait fait des parts et ait assigné une quote à chacun des héritiers qu'il instituait; mais, au contraire, qu'en les instituant tous, ses héritiers universels, il voulait que sa succession fût partagée également entre ceux qui profiteraient de l'institution, d'où il suit que, dans l'espèce, il y a lieu à l'accroissement, et que l'arrêt qui a décidé le contraire a contrevenu à l'art. 1044 du Code civil;-Casse, etc.

Du 19 oct. 1808.-Sect. civ.-Prés., M. Viellart. Rapp., M. Gandon. · Concl. conf., M. Daniels, subst.-Pl., MM. Duprat et Mailhe.

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avant les avis du conseil d'Etat des 10 brum. | an 14 et 15 nov.-12 déc. 1806, il y a lieu à restitution.

(Régie de l'enregist.-C. Chaudurié.) Le 8 mess. an 13, fut présenté à l'enregistre ment, par le sieur Chaudurié, un acte de vente d'immeuble, passé devant notaire à l'île de France, pour le prix de 16,920 piastres; le receveur perçut 1,106 fr. 5 cent. de droit proportionnel, se croyant autorisé par la loi du 22 frim. an 7.-Mais par avis du conseil d'Etat, approuvés le 10 brum. an 14, et le 12 déc. 1806, il a été décidé que les actes notariés passés aux colonies sont passibles simplement d'un droit fixe. -Sur le fondement de ces deux avis du conseil d'Etat, action en restitution du droit proportionnel, de la part du sieur Chaudurié. 19 juin 1807, jugement du tribunal civil de Lorient qui ordonne la restitution.

Pourvoi en cassation, de la part de la régie, prétendant que des avis du conseil d'Etat postérieurs à la loi du 22 frim. an 7, ne pouvaient autoriser la restitution de droits perçus en conformité de cette loi.

ARRET (après délib. en ch. du cons.).. LA COUR; Attendu qu'en décidant que l'acte dont il s'agit n'était passible que d'un droit fixe, le jugement attaqué s'est conformé aux dispositions de la loi du 22 frim. an 7, et à l'interprétation donnée à cette loi par les avis du conseil d'Etat, approuvés par sa majesté le 10 brum. an 14 et le 12 déc. 1806;-Rejette, etc. Du 19 oct. 1808. Sect. civ.-Prés., M. Viellart.-Rapp., M. Zangiacomi.-Concl., M. Jourde, subst.

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2o BOISSONS.-CONGÉ.-DÉBITANT.-BAIL. 1o En matière de droits réunis, un procès-verbal ne fait pas foi jusqu'à inscription de faux, des déclarations qui, au lieu d'avoir été constatées le jour même, ne l'ont été que le lendemain au moment où le prévenu rétractait ses aveux, comme lui ayant été arrachés par la violence.

2o Les boissons trouvées, en conformité d'un congé délivré sous le nom d'un particulier, dans une cave appartenant à un débitant, et qu'il prétend avoir donnée à bail, ne peuvent pas être réputées la propriété de ce débitant, par cela seul qu'il ne justifie pas d'un bail authentique. Le simple particulier qui prend d'un débitant une cave à location, n'est pas tenu de passer un bail authentique. Il appartient aux Cours de justice criminelle de déclarer souverainement, sous ce rapport, si les indices et présomptions sont suffisans pour caractériser la fraude.

(Beardi et Lamberti.)-ARRÊT. LA COUR;-Considérant que les déclarations faites par le sieur Beardi n'ont pas été consignées

(1) Ainsi jugé le 19 sept. 1807 (aff. Chiralde), et le 8 août 1808 (aff. Germano).-V. Merlin, Rép., vo Port franc, n. 5.

(2) Selon les lois romaines, on appelait définitive la sentence qui terminait la contestation principale, litem dirimens per condemnationem vel absolutionem (dit Boehmer, en son introduction au Droit du Dig., sur le liv. 42, tit. 1er).-La décision rendue sur un incident était alors qualifiée interlocutoire.... interlocutoria est quæ articulum in lile principali incidentem definit (ibid).-Toutefois on distinguait l'interlocutoire pur de l'in oire mixte, portant

dans un procès-verbal, au moment et le jour même où elles ont été faites; que ces déclarations ont eu lieu, en effet, le 7 déc. 1808, tandis que le procès-verbal des employés qui en ont rendu compte, n'a été dressé que le lendemain 8 déc., époque à laquelle le sieur Beardi a rétracté ces déclarations, sous prétexte qu'elles lui avaient été arrachées par la violence; que par conséquent, le réclamant n'est pas fondé à invoquer, dans ces circonstances, les dispositions de la loi qui veut que les procès-verbaux fassent foi, jusqu'à inscription de faux;

Considérant qu'il a été reconnu que le sieur Beardi était porteur d'un congé régulier; que la Cour, dont l'arrêt est attaqué, en déclarant que les indices et les présomptions étaient insuffisans pour caractériser la fraude, a usé du droit qu'elle avait d'apprécier ces indices et ces présomptions;

Considérant enfin que la Cour dont l'arrêt est attaqué, en déclarant que le sieur Beardi, simple particulier non débitant, n'était pas tenu, en prenant du sieur Lamberti une cave à location, de passer un bail authentique, n'a violé aucune loi; -Rejette, etc.

Du 20 oct. 1808.-Sect. crim.-Prés. d'âge M. Vermeil.-Rapp., M. Vergès.-Concl. M. Lecoutour, subst.

PROCÈS-VERBAL.-CONTRIB. INDIRECTES.

surtout d'après la réserve faite par les juges.

Mautor, au contraire, faisait observer qu'après l'enquête ordonnée et faite, il était impossible aux juges de rejeter les témoignages établis par cette enquête, sur le fondement que la preuve testimoniale n'était pas admissible dans l'espèce; qu'aucune réserve ne pouvait ôter son effet à une décision véritablement définitive.-M. Jourde, subst. du proc. gén., a pensé que l'arrêt dénoncé avait beaucoup plus prononcé sur l'interprétation d'un acte que sur le sens de la loi; pour quoi il a conclu au rejet.

(Bloche-C. Mautor.) Mautor, domestique du sieur Bloche, après la mort de son maître, épousa la veuve; puis il produisit des actes par lesquels le défunt aurait aliéné partie de ses biens à son profit.-Les héritiers Bloche attaquent ces actes comme viciés de dol et de fraude; ils demandent à prouver les faits qui établissent ce dol et cette fraude.-Mautor soutient que la preuve par témoins ne peut être admise contre les actes authentiques, attendu que foi leur est due jusqu'à inscription de faux.-10 messidor an 13, jugement qui autorise les héritiers Bloche à prouver par témoins les faits articulés ;-« Attendu que les juges ne peuvent s'environner de trop de lumières; qu'il y aurait de la légèreté à écarter la preuve offerte, et à juger trop précipitamment. » Le jugement ajoute avant faire droit, et toutes choses tenant au principal.

Appel de la part de Mautor. Mais les héritiers Bloche opposent une fin de non-recevoir, prise de ce que ce jugement n'étant pas définitif, l'appel n'en était pas recevable, quant à présent, aux termes de l'art. 6 de la loi du 3 brum. an 2. 22 janv. 1806, arrêt de la Cour d'appel de Caen, qui, rejetant la fin de non-recevoir, déclare l'appel recevable, « Attendu que Mautor ayant soutenu que la preuve offerte par les héritiers Bloche était inadmissible, le tribunal de première instance avait eu à prononcer préalablement sur une exception péremptoire; qu'il ne pouvait admettre la preuve vocale, sans rejeter sans retour cette exception; et qu'ainsi le jugement qui admettait la preuve par témoins, et par conséquent rejetait l'exception péremptoire, était définitif et irrévocable.»>

POURVOI en cassation, pour contravention prétendue à l'art. 6 de la loi du 3 brum. an 2, ainsi conçu: « On ne pourra appeler d'aucun jugement préparatoire pendant le cours de l'instruction, et les parties seront obligées d'attendre le jugement définitif. »-Les heritiers Bloche ont soutenu que le jugement du 10 mess. an 13 ne contenait aucune espèce de décision ni expresse, ni virtuelle; que tout était réparable en définitive, par la décision à intervenir sur la contestation principale, Code de proc., il introduisit un tout autre système. -Selon ce Code, un jugement est préparatoire quand il est purement d'instruction; quand il ne fait que disposer la contestation à recevoir jugement; quand il ne juge ni ne préjuge rien (art. 452 du Cod. de proc.). Un jugement est interlocutoire quand il préjuge le fond (ibid.).—Un jugement est définitif, lorsqu'il décide, ou la contestation principale ou un incident; lorsque, sur le point réservé, les juges se lient d'une manière irrévocable (ibid.). Voici, à présent, quelles difficultés offrit l'exécution de la loi du 3 brumaire an 2, et qui se retrouvent les mêmes sous l'empire du Code. On disputa longtemps sur le sens du mot définitif: on ne voulait accorder cette qualification qu'au jugement qui termine la contestation principale.-Mais enfin ce fut un point hors de toute controverse, qu'un jugement est définitif lorsqu'il décide une contestation incidente ou une question préjudicielle. Comme aussi on disputa longtemps sur la nature des jugemens où l'on trouvait à la fois la décision d'un incident, et une ordonnance d'instruction: d'une part on disait que le jugement était préparatoire, puisqu'il tendait à instruire les juges; d'autre part, on disait que le jugement était définitif, puisqu'il décidait un point controversé; mais enfin on reconnut généralement qu'un jugement peut être tout à la fois définitif et préparatoire sous différens rapports, et que les parties doivent se pourvoir, soit contre le chefconte

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ARRÊT.

LA COUR;-Attendu que la Cour d'appel, en reconnaissant que le jugement du tribunal du Pont-l'Evêque du 22 mess. an 13 était définitif et irrévocable, et en déclarant, en conséquence, que l'appel en était recevable, n'a point contrevenu à l'art. 6 de la loi du 3 brum. an 2;Rejette, etc.

Du 24 oct. 1808.-Sect. civ.-Prés., M. Liborel.-Concl., M. Jourde, subst.

BAIL A FERME. GARANTIE.- PRESCRIP

TION.

L'art. 142 de l'ordonnance de 1629, qui déclarait le prix des baux prescrit par cinq ans, n'empêchait pas que le fermier ne demeurât garant pendant trente ans de la valeur réelle des effets qu'il avait donnés en paiement de ses fermages (1).

(Domaines-C. Pellizati.)

Pellizati avait pris à ferme, en l'an 3, pour le terme d'une année, un domaine national au prix de 2,600 liv. en assignats.-Il donna en paiement trois récépissés de blé et de fourrages portant la somme de 1,727 livres ainsi il restait à payer 873 livres dont Pellizati demanda la réduction, en vertu de la loi du 6 mess. an 6, réduction que l'administration centrale de laVendée opéra, par son arrêté du 26 germ. an 7, et les 873 livres furent réduites à 418 francs que Pellizati paya et dont il reçut une quittance pour solde, le 27

flor. an 7.

Mais, par arrêté du 18 germ. an 11, le gouvernement ordonna la révision de tous les bons

selon

nant décision, soit contre l'ord.d'instruction, qu'il est prescrit à l'égard des jugemens définitifs ou préparatoires (V. Cass. 11 brum, an 11).-Une difficulté plus sérieuse, c'est de savoir quand il y a ou n'y a pas décision ou jugement définitif, dans un jugement qui présente en toutes lettres une ordonnance d'instruction, sans exprimer positivement la décision d'aucun point controversé. Il peut arriver que cette ordonnance d'instruction soit la conséquence d'une décision non exprimée, tellement qu'il y ait décision virtuelle.-Maís à quel signe reconnaît-on cette décision virtuelle? La jurisprudence paraît avoir admis que lorsque la voie d'instruction a été ordonnée après contestation, le jugement n'est pas simplement préparatoire, mais définitif en cette partie, ou pour parler le langage du Code de procédure, interlocutoire (V. Cass. 16 fév. 1807; 16 mai 1809; 29 mai 1827). L'arrêt ci-dessus rapporté, juge de plus que le jugement ne perd pas son caractère définitif ou interlocutoire, par cela seul que les juges auraient réservé les droits des parties au fond, ce qui est juste; parce que la nature du jugement doit résulter, non de la qualification qui lui est donnée, mais de son but et de ses effets.

(1) V. Merlin, Quest. de droit, vo Prescription, § 16, n. 2.-Il en devrait être de même sous le Code civil, dont l'art.2277 prononce la même prescription de cinq ans pour le prix des baux.

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