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(Pouyet et consorts-C. Delon.) Le 6 therm. an 13, le sieur Lissonde, commissionnaire à Bayonne,est chargé par le sieur Delon, négociant à Paris, d'acheter pour son compte des laines d'Espagne.-Il est ensuite invité à adresser ces laines aux sieurs Bérard et fils, banquiers à Paris, et à faire traite sur le sieur Bérard, pour le prix de ces laines. - Bérard apostille la lettre, et déclare adhérer à son contenu. Le commissionnaire Lissonde remplit littéralement sa commission. Il achète 36 balles de laines d'Espagne, de la maison Pouyet, pour le compte du sieur Delon: il adresse ces laines au sieur Bérard de Paris, puis il souscrit pour 36,034 fr. de lettres de change sur la maison Bérard, à ordre de la maison Pouyet.-Bérard prend livraison des laines et ne paie pas les traites: il fait faillite.Protêt. Il restait à exercer une action récursoire contre Delon; mais cette action ne fut intentée que plus d'un an après l'expiration du délai de quinzaine fixé par les art. 13 et 15, tit. 5. de l'ordonnance de 1673. En conséquence, Delon opposa la fin de non-recevoir et soutint qu'elle était d'autant plus favorable, qu'évidemment il y avait eu provision chez Bérard, et qu'il était possible que la provision eût disparu, à défaut par le porteur d'avoir dénoncé le protêt des traites.

19 mai 1807, jugement du tribunal de commerce, qui, vu que tout a été fait par ordre et pour compte de Delon, le condamne au paiement des 36,034 fr. de lettres de change.

Appel. Delon convenait qu'au fond il était passible de garantie; mais il soutenait que c'était à titre de tireur des lettres de change (ayant donné ordre de les tirer); et parce que le porteur avait négligé d'exercer son recours dans le délai prescrit à l'égard des tireurs, il concluait que son action récursoire était non recevable.

12 août 1807, arrêt par lequel la Cour d'appel de Paris a dit qu'il avait été mal jugé par le tribunal de commerce, et a accueilli la fin de nonrecevoir proposée par Delon: « Attendu qu'Antoine Delon doit être considéré comme tireur des lettres de change, puisqu'il a donné ordre de les tirer; mais qu'il y avait provision de la part dudit Delon, ainsi qu'il est justifié par les pièces de la cause; que, suivant l'ordonn. de 1673, les poursuites contre les tireurs et endosseurs doivent être faites dans la quinzaine de l'échéance des lettres de change, et que, dans l'espèce, elles n'ont été commencées qu'après plus d'une année révolue. >>

Pourvoi en cassation de la part de Pouyet et consorts, pour fausse interprétation et violation des art. 13 et 15 du tit. 5 de l'ordonn. de 1673. — La contestation se réduit, disaient-ils, à savoir quel est le sens du mot tireur. - Est-on tireur, parce qu'on donne l'ordre de tirer? Non, parce qu'il n'y a de tireur que le signataire des traites.... Delon achetait les laines, il en devait le prix: donc il était le payeur des traites faites en paiement de ce prix; Delon avait ordonné de faire traite sur Bérard; donc il avait promis de payer, ou faire payer: il était accepteur.

Code de commerce, est celui qui agit en son nom propre, ou sous un nom social, pour le compte d'un commettant; et le porteur ne peut agir contre le donneur d'ordre que comme représentant du tireur, comme subrogé à ses droits. C'est en considérant lé tireur sous cette dernière qualité, que la Cour de cassation a déclaré, par son arrêt du 19 déc. 1821, que le porteur n'avait pas d'action directe dérivant du contrat de change contre le donneur d'ordre, et que le contraire n'avait pu être décidé sans excès de

Le défendeur reproduisait les motifs de l'arrêt, et de plus il soutenait que sa décision ne portait que sur un fait.

M. Pons, substitut du procureur général, a pensé que la question était purement de droit, et qu'elle avait été décidée contrairement au vœu de l'ordonnance; qu'il y avait définition illégale du mot tireur : il a conclu à la cassation.

ARRÊT.

LA COUR; Vu les art. 13 et 15, tit. 5 de l'ordonn. de 1673;-Et attendu que cette ordonnance ne considère comme tireur d'une lettre de change que celui qui mande à un tiers domicilié dans une autre ville, d'en payer le montant, et qui la signe en cette qualité; et qu'elle n'autorise pas à placer sur la même ligne celui qui a donné ordre de la tirer, et ne l'a pas signée, quel que soit d'ailleurs le motif qui l'a déterminé à donner cet ordre;-Attendu que Lissonde a seul signé, comme tireur, les lettres de change dont il s'agit; et que, si Antoine Delon a donné ordre de les tirer, il ne les a pas signées, et n'a, sans doute, donné cet ordre que comme ayant commandé à Bérard et fils l'achat et l'envoi des laines en question, dont ces lettres représentaient la valeur; - Attendu, d'ailleurs, que ces lettres de change tirées sur Bérard et fils, ne le sont que pour être par eux passées en compte avec Antoine Delon; et qu'en cet état, ce dernier devait être plutôt regardé comme accepteur de ces lettres par l'intermédiaire de Bérard et fils, ou du moins comme accepteur avec eux; Attendu, enfin, qu'en assimilant, dans de semblables circonstances, Antoine Delon à un tireur, et lui appliquant par suite la disposition des articles ci-dessus cités, l'arrêt attaqué a fait non-seulement une fausse application de ces articles, mais encore les a violés, puisqu'il en a étendu l'effet à un cas non prévu, non écrit dans la loi à laquelle il a ainsi ajouté ;-Par ces motifs,-Casse. Du 16 août 1809.-Sect. civ.-Prés., M. Muraire.-Rapp., M. Babille. Concl., M. Pons, subst.-P., MM. Jousselin et Cochu.

ÉVOCATION. - SAISIE.

DÉPENS. Une Cour d'appel peut, après avoir infirmé un jugement, connaître de la validité d'une saisie faite faute de paiement des dépens adjugés par son arrêt infirmatif, même relativement au garant de la partie condamnée. (Cod. procéd., art. 472.)

(Bourgouin-C. N.)—ARRÊT.

LA COUR; - Attendu qu'aux termes de l'art. 472 du Code de procédure civile, si le jugement est infirmé, l'exécution appartient à la Cour d'appel qui a prononcé, et que l'appelé en garantie est tenu de procéder devant le tribunal où est pendante la cause principale;-Rejette, etc. Du 16 août 1809. Sect. req.

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EMIGRÉ. MORT CIVILE. VENTE. Les émigrés ont pu vendre et exercer l'action en paiement du prix dérivant du contrat

pouvoir et contravention aux art. 118, 140 et 142 du Code de comm. Telle est aussi l'opinion de Favard de Langlade, v° Lettre de change, sect. 1re, 3, no 3, et de Persil, de la Lettre de change, sur l'art. 115, no 5.-V. néanmoins en sens contraire, une consultation délibérée, dans l'espèce de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 19 déc. 1821, par MM. Pardessus et Locré, et insérée au recueil de M. Sirey, tom, 19. 2. 263 et suiv,

de vente.-En général, l'émigré mort civilement était bien incapable des contrats du droit civil, mais non de ceux qui, tels que la vente, ont leur source dans le droit des gens. (Cod. civ., art. 25, anal.) (1) (Gauthier-C. Brivazac de Beaumont.)-ARRÊT.

LA COUR; Considérant que la mort civile n'interdit aux individus qui en sont frappés, que l'exercice des droits et actions qui dérivent du droit civil; qu'aucune loi expresse, avant la promulgation du Code civil, ne privait ces individus des droits et actions qui dérivent du droit des gens; Considérant que la vente étant un contrat du droit des gens, l'action en paiement du juste prix résultant de ce contrat dérive nécessairement du même droit des gens; Considérant qu'à l'époque de la vente dont il s'agit, comme à l'époque de l'action en rescision, le vendeur était inscrit sur la liste des émigrés, sans que Considérant l'objet vendu ait été séquestré;

--

que celui qui a le droit de vendre, a conséquemment eu le droit d'exiger le prix; Considérant que Jean Gauthier, pour se maintenir dans la propriété de l'objet vendu, ayant lui-même excipé de la faculté de vendre qu'avait le sieur Brivazac de Beaumont, quoique porté sur la liste des émigrés (sauf le droit du fisc), parce que la vente est un contrat du droit des gens, s'est rendu non recevable à lui contester l'action en paiement, résultant du même contrat et dérivant du même droit des gens; qu'ainsi, en rejetant la fin de non-recevoir, résultant de l'inscription dudit Brivazac de Beaumont sur la liste des émigrés, l'arrêt attaqué n'a violé aucune loi; - Rejette, etc.

-

Du 17 août 1809. Sect. req. Prés., M. Henrion. Rapp., M. Lasaudade. Concl., M. Merlin, proc. gén.- Pl., M. Guichard.

TRIBUNAL DE POLICE.-MINISTÈRE PUBLIC.

-CONCLUSIONS.-COMPÉTENCE.

Le tribunal de police, saisi d'un délit d'injures, par citation de la partie lésée, doit statuer, d'après le résultat de l'instruction, sur l'action publique et sur l'action civile, encore bien que le commissaire de police, remplissant les fonctions du ministère public, ait refusé de donner ses réquisitions pour la condamnation ou l'acquittement (2). Le ministère public, partie intégrante et nécessaire d'un tribunal de police, est suffisamment mis en action par la citation de la partie lésée: il ne peut se dispenser de conclure dans l'intérêt de la société. Le tribunal de police, régulièrement saisi d'une contravention qui rentre dans ses attributions, ne peut se dépouiller de son caractère et se constituer en tribunal de paix, pour ne statuer que sur les réparations civiles.

(Desponey.)

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LA COUR; Vu l'art. 456, no 6, du Code des délits et des peines;-Vu aussi l'art. 153 du même Code; Et attendu que, d'après cet art. 153, le tribunal de police est légalement saisi d'un délit qui rentre dans ses attributions, par la simple citation donnée à la requête de la partie lésée ;

Que le ministère public, partie intégrante et

(1) V. conf., Cass. 28 frim. an 13, et la note. V. aussi les conclusions de Merlin dans cette affaire, Quest. de droit, vo Mort civile, § 3.

(2) V. Cass. 25 avril 1806; Merlin, Quest. de droit,

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Que, si ce magistrat a illégalement refusé de donner les réquisitions pour la condamnation ou 'pour l'acquittement, il a été mis en demeure de le faire; et que, dès lors, quelle qu'ait été sa réponse, il avait été satisfait au vou de l'art. 162 du Code cité; et que, dès lors, aussi le tribunal de police devait prononcer son jugement, d'après le résultat de l'instruction, et sur l'action publique et sur l'action civile;

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Que le tribunal de police, néanmoins, loin de suivre cette marche, s'est permis de se dépouiller du caractère dont il était investi par la loi et par la citation de la partie plaignante, et encore par la présence du ministère public; et s'est constitué en tribunal de paix, pour ne statuer que sur les réparations civiles; Que, par cette abdication de son caractère, et par cette transformation de la juridiction de police en une juridiction inconciliable avec la citation qui l'avait saisi, et la présence du ministère public, agent de l'autorité publique, ce tribunal à commis un excès de pouvoir; Casse, etc.

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Du 17 août 1809. - Sect. crim.. Prés., M. Barris. Rapp., M. Delacoste. Concl., M. Giraud, subst.

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Le bâtiment construit à la distance prohibée par la loi d'une forêt de l'Etat, et qui n'est ni une dépendance ni un accessoire d'une ancienne habitation, doit être considéré comme une maison nouvellement bâtie, et cette construction constitue la contravention prévue par l'art. 18, tit. 27 de l'ordonn. de 1669.) (3)

(Forêts C. Biard.)

ARRET (après délib. en ch. du cons.).

LA COUR; Vu l'art. 18, tit. 27, ordonn. de 1669; -Vu l'avis du conseil d'Etat, approuvé par S. M. l'empereur et roi, le 22 brum. an 14;

Attendu que le bâtiment construit par Pierre Biard, à la distance prohibée par la loi de la forêt impériale de Conches, depuis la publication de l'avis du conseil d'Etat du 22 brum. an 14, ne pouvait être considéré que comme une maison nouvellement bâtie en contravention aux dispositions de l'ordonnance et de l'avis du conseil d'Etat précités, puisque ce bâtiment ne devait, sous aucun rapport, être réputé une dépendance et un accessoire de l'ancienne habitation dudit Biard; -- Que la preuve en a été plus particulièrement acquise par le plan topographique contradictoirement levé en exécution de l'arrêt interlocutoire de la Cour, du 2 juin dernier, puisqu'il résulte de ce plan; 1° que les anciens bâtimens sont situés sur un terrain dont la propriété ancienne n'est point contestée audit Biard, tandis que la nouvelle construction est située sur un terrain litigieux réclamé par l'administration fo

vo Injures, S 4; Favard de Langlade, eod. verb., S 4, no 4.

(3) V. Merlin, Répert., vo Forêts, no 3, et l'art. 153 du Code forestier.

restière, comme ayant été usurpé sur la forêt impériale; 2o que les anciens bâtimens sont à la distance de cinquante mètres de la forêt, tandis que la nouvelle construction n'en est distante que de six mètres, et ne s'en trouve séparée que par la route de Calais, sur la largeur de laquelle il a même été empiété par les bâtisses; 3° que les anciens bâtimens forment une enceinte fermée par une partie de mur et par une palissade, tandis que la nouvelle construction est hors de cette enceinte, et même au delà des terres labourables et à chanvre qui composent l'ancienne propriété du prévenu; Attendu que la conséquence nécessaire de ces faits attestés au procès par l'inspecteur forestier, et qu'en cas de doute la Cour de justice criminelle pouvait aisément vérifier, est que Pierre Biard, se trouvant en contravention formelle à la loi, devait être condamné à toutes les peines exprimées dans l'art. 18, tit. 27 de l'ordonnance de 1669; Que, dès lors, en confirmant le jugement du tribunal correctionnel d'Evreux, du 23 sept. 1808, qui avait renvoyé le prévenu de l'action intentée contre lui, la Cour de justice criminelle du département de l'Eure a violé le susdit art. 18 et l'avis du conseil d'Etat du 22 brum. an 14; - Casse, etc.

Du 18 août 1809. Sect. crim. Guieu. Concl., M. Giraud.

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Rapp., M.

DÉLIT RURAL.-PRESCRIPTION. En matière de délits ruraux, il suffit, pour interrompre la prescription, que le juge de paix ait dressé dans le mois procès-verbal du délit qui lui a été dénoncé, que des experts en aient estimé le préjudice et que des témoins aient été entendus: il n'est pas nécessaire que la citation ait été donnée dans ce délai. (L. 28 sept.-6 oct. 1791, sect. 7, art. 8.) (1)

(Dodino.)-ARRÊT.

LA COUR ; Vu l'art. 8, tit. 1er, sect. 7o, de la loi du 28 sept. 1791, ainsi conçu : « La poursuite des délits ruraux sera faite, au plus tard, dans le délai d'un mois, soit par les parties lésées, soit par le procureur de la commune ou ses substituts, s'il y en a, soit par des hommes commis à cet effet par la municipalité, faute de quoi il n'y a plus lieu à poursuite; »-Attendu qu'on doit entendre par poursuites tous les actes qui sont faits en justice par les personnes que la loi autorise, et dont le but est de parvenir à constater un délit, à en connaître et à en faire punir l'auteur;-Que, dans l'hypothèse, les poursuites avaient été commencées dans le délai d'un mois, puisque le juge de paix avait dressé procès-verbal du délit qui lui avait été dénoncé; que des experts en avaient estimé la valeur, et qu'un grand nombre de témoins avait été entendu ;Que c'est une erreur de la part de la Cour de justice criminelle du département de Montenotte, d'avoir fait seulement commencer les poursuites à la date de l'assignation donnée au prévenu, lorsque le plus souvent cette assignation ne peut avoir lieu qu'en conséquence des poursuites qu'il a fallu faire antérieurement pour connaître l'auteur du délit; -Que ce système, qui réduirait infiniment le délai utile pour réprimer les délits ruraux, en assurerait l'impunité toutes les fois que le coupable aurait pris quelque précaution pour se cacher, et se trouve d'ailleurs en opposition, soit avec l'esprit du législateur, soit avec les termes dont il s'est servi;

(1) V. conf., Cass. 28 déc. 1809; Legraverend,

Leg. orim., . 78; Merlin, Quest, vo Délits

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Un maire qui plaide sans autorisation est, au cas d'insuccès, passible des dépens en nom personnel, encore qu'il apparaisse que le procès intéressait la commune (2). L'autorisation doit être spéciale.-Ainsi, une autorisation pour plaider sur une question de propriété, serait insuffisante pour plaider sur des voies de fait ultérieures.

(Levaillant-C. Dupont et compagnie.)

La demoiselle Bonne Levaillant faisait creuser des fossés autour d'un terrain qui lui appartenait, quand elle en fut empêchée violemment par Dupont, qui, assisté de Chrétien et Rousselin, expulsa ses ouvriers et détruisit ses fossés. -Sur la demande en répression de cette voie de fait, et en réparation de dommage avec indemnité de 50 fr., portée en la justice de paix des lieux, et dirigée personnellement contre Dupont, Chrétien et Rousselin, ceux-ci excipèrent d'une litispendance pour raison de ce terrain, devant la préfecture, et conclurent à un sursis, jusqu'à ce que l'administration eût prononcé.Un jugement prononça ce sursis.-Dès lors, et depuis le 17 mess. an 13, existait, à l'insu des parties, un arrêté qui, sur la pétition de Dupont, en sa qualité de maire, à fin de disposer de ce terrain, et sur l'opposition de la demoiselle Levaillant, comme en ayant la propriété et la possession, avait renvoyé les parties devant les tribunaux, parce qu'il s'agissait d'une question de propriété, et avait autorisé le maire à y comparaitre. Sur la représentation de cet arrêté, le juge de paix se ressaisit du litige, et admit, par jugement du 14 janv. 1806, la demoiselle Levaillant à la preuve des faits de possession, sauf la preuve contraire. Elle se disposait à faire entendre ses témoins, quand Dupont, qui, en qualité de maire, avait fait prendre, par le conseil municipal de sa commune, une délibération à cet effet, déclara se désister de toutes poursuites; mais, comme cette délibération n'avait pas été autorisée par l'autorité supérieure, et qu'elle ne contenait point d'ailleurs offre de la réparation du dommage, la demoiselle Levaillant demanda l'adjudication de ses conclusions, et conclut expressément à ce que Dupont et consorts fussent condamnés personnellement en des dommages et intérêts et aux dépens, comme ayant agi arbitrairement et comme personnes privées.-Alors Dupont et consorts demandèrent délai suffisant pour faire régulariser le désistement et la reconnaissance de la propriété et de la possession de la demoiselle Levaillant; et ils obtinrent, le 10 avril suivant, jugement qui leur accorda délai jusqu'au 10 mai.-Dans la vue d'obvier à toute surprise, la demoiselle Levaillant présenta de suite à l'administration une pétition dans laquelle elle lui détailla l'objet du procès: l'administration n'avait pas encore prononcé, quand arriva le 10 mai, jour auquel le juge de paix rendit son jugement définitif, par lequel, s'appuyant notamment sur la voie de fait, et sur le défaut d'aucune autorisation à Dupont, de plaider comme maire, il le condamna ainsi que ses consorts, en

ruraux, $3;-En sens contr., Cass. 2 mess.an 13. (2) V. en ce sens, Paris, 9 déc. 1825.

leur nom personnel, à la réparation du dommage, en trois francs de dommages et intérêts, et aux dépens.-Peu après, et le 7 juin suivant, l'administration s'expliqua, et déclara que le procès, n'ayant eu lieu que par les voies de fait réitérées de Dupont, était étranger à la commune, qui ne devait pas en supporter les frais, que l'autorisation donnée le 17 mess. an 13 ne pouvait, ni dans le fait, ni dans son intention, s'appliquer à ces voies de fait; et qu'au surplus, la délibération prise par le conseil municipal ne pouvait, vu son irrégularité, mettre Dupont à l'abri de ces frais qui ne devaient regarder que lui. -Tel était l'état du procès, quand Dupont et consorts appelèrent du jugement, en ce qu'il les avait condamnés personnellement à des dépens qui ne devaient être, selon eux, à la charge que de la commune.-De son côté, la demoiselle Levaillant invoqua l'arrêté, et le produisit même pour faire maintenir cette condamnation personnelle.

Mais intervint, le 16 juill. 1807, jugement du tribunal de première instance de Caen, qui, regardant, au contraire, le procès comme intéressant exclusivement la commune, laquelle, en cas de réussite, en aurait seule profité, et ne trouvant même pas qu'il fût établi aucune voie de fait personnelle de la part de Dupont. qui, d'ailleurs, était autorisé à plaider par l'arrêté du 17 mess. an 13, infirma le jugement dont était appel, et déchargea Dupont et consorts de la condamnation aux dépens.

Pourvoi en cassation.

ARRÊT.

LA COUR; Vu les art. 4 et 15 de la loi du 28 pluv. an 8; Attendu que l'autorisation du 17 mess. an 13 dont se prévaut Dupont, et sur laquelle s'appuie le jugement attaqué, n'est point applicable à l'espèce, puisqu'elle est uniquement relative à une question de propriété, et qu'il s'agit ici de voies de fait survenues même depuis cette autorisation; et que si Dupont avait demandé une autorisation à l'effet de suivre, comme maire, et au nom de sa commune, le procès intenté personnellement contre lui pour la répression de ces voies de fait, il ne l'aurait pas évidemment obtenue, puisque la même autorité qui lui avait donné celle ci-dessus, avait déclaré depuis, et dans un arrêté du 7 juin 1806, qu'elle n'avait pu ni voulu lui donner, le 17 mess., une autorisation à l'effet de commettre de pareilles entreprises;-Attendu que de ce défaut d'autorisation, et surtout de la déclaration por tée en ce dernier arrêté de 1806, il résulte que, soit lors des voies de fait dont il s'agit, soit lors du procès qui en a été la suite, Dupont n'aurait agi et plaidé que comme simple particulier et

(1) Les effets de la déclaration de command ne sont pas déduits de la supposition d'un mandat; cette supposition même pourrait fréquemment conduire à des résultats que la théorie de la déclaration de command n'admet pas; l'erreur de Dumoulin sur ce point, et l'inexactitude des conséquences qu'il en avait tirées, a été démontrée par les feudistes postérieurs et rejetée par la jurisprudence des parlemens. La faculté d'élire un ami, dérive de celle propre au droit français, d'agir pour un autre, en s'engageant soi-même, faculté expressément consacrée par l'art. 1120 du C. civ. C'est de la même source que découlent les engagemens du porté fort, dont on ne doit pas davantage chercher la base ou l'explication dans le droit romain; introduites dans nos usages par des causes particulières à nos institutions, ces formes de procéder n'ont été jusqu'à présent réglées que par la loi du 16 oct. 1791, qui, suivant M. Merlin, Rép.,

non comme maire; et qu'ainsi il devait, en succombant, supporter en son propre et privé nom les dépens auxquels avait donné lieu ce procès; d'où il suit qu'en le déchargeant, ainsi que Chrétien et Rousselin, de cette condamnation personnelle comme s'il avait agi et plaidé en qualité de maire, encore bien qu'il ne fût aucunement autorisé, le jugement attaqué a violé les articles ci-dessus cités de la loi du 28 pluv. an 8; -Par ces motifs,-Casse, etc.

Du 21 août 1809.-Sect. civ.-Prés., M. Muraire.-Rapp., M. Bastide.-Concl., M. Thuriot, subst.-Pl., MM. Grappe et Guichard.

COMMAND (DÉCLARATION DE).- ELECTIONS

SUCCESSIVES.

L'acquéreur désigné comme command par l'adjudicataire, ne peut indiquer lui-même un autre command, encore que les deux commands successifs soient désignés dans les vingt-quatre heures (1).

(L'enregistrement-C. Lachaize.)— ARRÊT. LA COUR ; Vu la loi du 16 oct. 1791, et l'art. 11 de celle du 26 vend. an 7; Attendu que, par cette disposition, le législateur n'a fait que fixer le délai dans lequel les adjudicataires devaient faire leur déclaration de command, s'en rapportant, pour le surplus, aux termes des lois précédentes; Attendu que ces lois précédentes, et notamment celle précitée du 16 oct. 1791, n'ont dit nulle part que, l'adjudicataire sous réserve de command ayant fait sa déclaration, l'acquéreur par lui désigné et acceptant pourrait encore se réserver même faculté de command, et affranchir la revente qu'il pourrait faire de son acquisition du droit proportionnel établi par la loi;-Attendu que, si les abus dont les défendeurs ont excipé (2), ont réellement existé, ils doivent être réprimés; - Casse, etc.

Du 22 août 1809. Sect. civ.- Prés., M. Liborel. - Rapp., M. Sieyes. Concl., M. Thuriot, subst.

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Jugement du tribunal civil de Toulon qui rejette la demande en séparation de biens formée par la dame Sicard, contre son mari.- Celle-ci

vo Vente, S3, ne créa pas de nouveaux principes, mais sanctionna les règles admises sur la matière.Ainsi, le command se trouve avoir acquis au moyen de la déclaration, contenant réserve de l'élire, en vertu du principe qui permet de stipuler pour autrui quand on s'engage soi-même; mais cette faculté ne s'étend pas au delà du tiers désigné, parce que la loi qui l'a créée l'a limitée à celui-ci.—V. au reste le développement des principes ci-dessus dans le Traité des droits d'enregistrement de MM. Championnière et Rigaud, t. 2, no 1915 à 1937. **

(2) Les défendeurs alléguaient qu'il était d'usage constant, depuis la loi du 22 frim. an 7, d'admettre les secondes élections ou déclarations de command.

(3), anal, en ce sens, Paris, 1er mess. an 12, et la note,

intente alors une action en séparation de corps. -Le sieur Sicard oppose que la demande en séparation de biens ayant été tentée inutilement, il n'est plus possible de former celle en séparation de corps, par la raison que celle-ci, entraînant de droit celle-là, c'est, sous une autre forme, remettre en question ce qui a été jugé.

Le 16 août 1807, jugement du tribunal civil de Toulon qui, par ce motif, rejette aussi la demande en séparation de corps.

Appel successif de ces deux jugemens.

9 fév. 1809, arrêt de la Cour d'Aix qui, les annulant, prononce avant tout la séparation de biens, et sur la demande en séparation de corps:

«Attendu que la femme qui a eu le ménagement d'attendre le résultat d'une action moins fâcheuse; qui ne s'est déterminée à employer le remède extrême de la séparation de corps qu'à défaut de tout autre, n'est pas pour cela non recevable à l'intenter; » Admet l'appelante à prouver les excès, sévices ou injures graves alléguées par elle. La preuve étant faite, un arrêt du 1er mai 1809, prononce la séparation de corps.

Pourvoi en cassation de la part du sieur Sicard. Il soutenait que la dot n'était pas en péril, et conséquemment que rien ne justifiait la séparation de biens prononcée par l'arrêt du 9 fév.- En second lieu, il prétendait que l'épouse qui a pu demander la séparation de corps dans un temps où elle s'est contentée de demander la séparation de biens, a, par cela même, renoncé à la première de ces deux actions.

ARRÊT.

LA COUR;-Attendu qu'aux termes de l'art. 1443 du Code civ., la séparation de biens peut être poursuivie par la femme dont la dot est mise en péril, et lorsque le désordre des affaires du mari donne lieu de craindre que les biens de celui-ci ne soient pas suffisans pour remplir les droits et reprises de la femme; que la Cour d'appel a jugé, d'après les faits et circonstances de la cause, que la dot de l'épouse était en péril; - Attendu que la demande en séparation de biens n'est point un obstacle à la séparation de corps; -Rejette, etc.

Du 23 août 1809.-Sect. req.-Prés., M. Henrion-Rapp.,M.Lasaudade. Concl.,M.Jourde,

subst.

DISTRIBUTION PAR CONTRIBUTION.
COMPÉTENCE.

Lorsque plusieurs saisies-arrêts exercées contre le même débiteur au nom des mêmes créanciers, ont donné lieu à des demandes en distribution de deniers devant deux tribunaux différens, la distribution doit être attribuée au tribunal le premier saisi, exclusivement à l'autre (1)

(Duchatenet C. Lacherat.)

Il s'est agi de distribuer par contribution, des deniers saisis au préjudice du sieur Duchatenet, domicilié à Paris. En conséquence, un procèsverbal d'ordre a été ouvert le 9 janv. 1807, au greffe du tribunal de première instance de cette ville. Plusieurs créanciers ont produit leurs titres, et l'ordre était près d'être achevé, lorsque, au mois de décembre 1808, le sieur Lacherat, également domicilié à Paris, obtient une ordonnance du juge de Riberac, département de la Dordogne, en vertu de laquelle il provoque, devant le tribu

(1) V. conf., Carré, Lois de la proc. civ., sur l'art. 658, t. 2, quest. 2170; Thomine-Desmazures, Commentaire sur le Code de procéd., t. 2, no 732.

(2) C'est là un point hors de toute controverse;

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1° PAPIER-MONNAIE.-Vente.-RÉDUCTION 2o CONTRAT.-INTERPRÉTATION. 30 CASSATION.-MOYEN NOUVEAU. 1°Lorsque le vendeur d'un immeuble a déclaré qu'il était dans l'intention de ne faire payer par son acheteur les assignats à lui restant dus du prix de vente, que sur le pied de leur valeur réduite selon l'échelle de dépréciation, il est ensuite irrecevable, si le paiement a été ainsi fixé par la justice, à se plaindre de ce que l'estimation de l'immeuble dont parle l'art. 2 de la loi du 16 niv. 20 Lorsque les juges ont donné à une convenan 6 n'a pas été ordonnée. tion une interprétation contraire au vœu de la loi, la partie est non recevable à s'en plaindre, si, en cela, ces juges n'ont fait qu'adopter le système qu'elle soutenait ellemême.

3°On n'est pas recevable à présenter devant la Cour de cassation un moyen qui n'a été proposé ni en première instance, ni en appel (2).

(Bertaut-C. Faucau.)

La demoiselle Faucau devait au sieur Bertaut une somme de 23,800 liv., pour restant du prix d'un immeuble à elle vendu le 23 sept. 1793.-II paraît que, par le contrat de vente, il était dit, qu'au cas qu'il y eût lieu à distribution des deniers, le prix de la vente resterait dans les mains de l'acquéreur jusqu'après le jugement de distribution, et qu'il n'en paierait pas d'intérêt.-Les lettres de ratification furent scellées, à la charge de sept oppositions: la demoiselle Faucau dénonça les sept oppositions au sieur Bertaut; puis elle obtint jugement qui ordonna la consignation; finalement elle consigna, le 14 vend. an 4, une somme de 24,652 liv. 7 sous assignats, pour capital, etc.

Par exploit du 2 mai 1806, le sieur Bertaut a prétendu que la consignation était irrégulière, comme contraire à la convention expresse, attendu que la demoiselle Faucau, par les termes de son contrat, avait été constituée dépositaire ou séquestre jusqu'au jugement de distribution; puis, il a pris des conclusions tendantes à ce que la demoiselle Faucau fût condamnée seulement à le rembourser en papier-monnaie au taux de l'échelle de dépréciation, selon la valeur que les as

il n'y a exception que pour le cas où le moyen nouvellement proposé intéresse l'ordre public. V. Cass. 7 juin 1810. V. aussi Jurisp. du XIXe siècle, vo Cassalion, nos 109, 110, 138 et suiv.

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