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ceptation de la délégation; un fait de cette espèce, fùi-il constant, n'a pu constituer une obligation entre la dame Sevin et le sieur Collet : il n'en résulterait même pas que la dame Sevin eût connu la délégation. Le sieur Collet, comme tout autre, aurait pu lui payer ses intérêts pour Pont-Chalons;-Considérant que le procès-verbal d'ordre ouvert en première instance, énonce un acte produit par la régie (1), portant date du 2 déc. 1791; mais, quand l'acte représenté aujourd'hui serait le même qui fut produit devant le premier juge par la régie, ce que rien ne constate; et que l'on regarderait que, par cette circonstance la date en aurait été assurée dès cette époque, il serait toujours vrai qu'il n'aurait acquis cette fixité de date que depuis les poursuites en expropriation, et bien postérieurement à l'inscription; - Considérant que, quand on supposerait que l'acceptation de la délégation aurait pu s'opérer autrement que par un acte authentique, il serait toujours vrai que l'on ne pourrait pas prétendre que le sort du sieur Collet et de la dame Sevin aurait été irrévocablement fixé avant l'inscription, puisque, quand même cet acte sous seing privé aurait existé entre eux, soit à cette époque, soit à une époque plus reculée, ils auraient été maîtres de le cacher et de l'anéantir: d'où il résulte qu'on ne peut l'opposer sous ce premier rapport à des tiers créanciers; Considérant que l'acte d'acceptation de la délégation de 1783 dont le but devait être d'assurer le sort du sieur Collet et de la dame Sevin, et de procurer un titre à celle-ci sur celui-la, devait être connu des créanciers du sieur Collet par l'inscription de la dame Sevin, ainsi que l'exige la loi du 11 brum. an 7: ce qui n'a pas été fait. On ne peut donc prendre en considération cet acte; Considérant que l'inscription de la dame Sevin ne peut établir l'acceptation de la délégation de 1783: 1o l'inscription n'énonce pas d'acceptation de la délégation, mais seulement les actes de 1767 et 1783; 2o une inscription n'est qu'un acte conservatoire; elle ne peut servir de titre ni le remplacer; 3o elle ne peut constituer une obligation entre celui qui l'a requise et le prétendu débiteur; 4° celui qui s'inscrit peut toujours faire rayer son inscription; Considérant qu'il résulte de ce que dessus, que la délégation de 1783 n'a pas été acceptée, ou, au moins, que s'il y a eu acceptation, elle n'a aucun des caractères propres à faire titre contre les créanciers du sieur Collet, qui ne l'ont pas connue; et on ne peut la leur opposer...- La Cour déclare non valable l'inscription de la dame Sevin sur le sieur Collet. »

-

Pourvoi en cassation de la part de la dame Sevin pour violation des principes en matière d'inscription hypothécaire, et sur l'effet soit des stipulations en faveur des tiers, soit des délégations.

ARRÊT.

LA COUR;-Considérant que la Cour de Caen, en jugeant, 1° qu'une délégation imparfaite ou une indication de personne pour recevoir une somme déléguée, ne forme pas un titre de créance au profit de cette personne, tandis qu'elle n'a pas été acceptée par elle;

2o Que des actes sous signature privée, et sans que la date eut acquis aucune fixité, ne prouvaient point l'acceptation; 3° que l'inscription aux hypothèques ne peut tenir licu d'acceptation, parce que celle-ci doit la précéder pour former

(1) La dame Sevin avait été inscrite sur la liste des émigrés; c'est pourquoi la régie des domaines figure, dès le principe, dans l'instance d'ordre.

le titre nécessaire pour que l'inscription soit valable, n'est contrevenue à aucune loi, puisqu'il n'en est aucune qui détermine quels actes peuvent tenir lieu d'une acceptation qui n'a pas été faite d'une manière tout à la fois expresse et authentique ;-Rejette, etc.

Du 21 fév. 1810.-Sect. civ.-Prés., M. Muraire.-Rapp., M. Gandon.-Concl., M. Jourde, subst.-Pl., MM. Godard et Guichard.

EXPLOIT.-PARLANT A.

Du 25 fév. 1810 (aff. Maury). —V. cet arrêt à la date du 15 du même mois.

RENTE FÉODALE.-MÉLANGE.-ABOLITION. Lorsqu'une vente de biens emphyteosés a été faite par l'emphyteote,moyennant un certain prix et en outre sous la condition que l'acquéreur servira la rente féodale imposée par le maître de la directe, l'acquéreur ne peut. se dispenser de payer le prix convenu, sous le prétexte que le contrat rappelant une rente féodale, renferme par cela seul un mélange de féodal et de foncier qui emporte l'abolition du tout. (L. 17 juill. 1793, art. 2;. Décret du 2 oct. 1793.) (2)

(Forgeret et Peynot-C. Giraud.)

Le sieur Louis Simon, demeurant à la CôteSt-André, possédait cinq cent trente-trois seterées de bois dans la forêt de Monnai, près Beaurepaire, qui lui avaient été albergées (ou données à emphytéose) par acte du 19 mai 1779, par le sieur Desparre, sous une redevance d'un quintal de blé par chaque seterée, avec réserve de lods et ventes et autres droits seigneuriaux. Il céda au sieur Armand Giraud huit seterées de ce bois, par acte du 20 sept. 1784, pour le prix de 576 fr., payables dans deux ans, et sous la condition de supporter, à raison desdites huit seterées, la redevance et les droits seigneuriaux dus au sieur Desparre. Giraud n'ayant pas acquitté le prix de cette vente, les sieurs Forgeret et Peynot, héritiers pour un huitième du sieur Simon, du chef de leurs épouses, ont fait assigner Augustin Giraud, fils et héritier d'Armand Giraud, devant le juge de paix de Saint-Pérès, en paiement de leur part sur lesdits 576 fr. portés en l'acte du 20 sept. 1784.-Augustin Giraud prétendit que cet acte contenant une énonciation de droits féodaux supprimés, toutes les obligations qui y étaient renfermées étaient également supprimées, comme étant entachées de féodalité.

Le juge de paix de Saint-Pérès a rejeté cette exception, et a condamné Giraud au paiement. Sur l'appel de ce jugement, le tribunal de Valence l'a réformé, et a relaxé Giraud des demandes formées contre lui, se fondant sur les lois et les décrets impériaux qui ont déclaré comprises dans la suppression les obligations purement foncières qui se trouvaient renfermées dans des actes d'inféodation ou d'acensement.

Pourvoi en cassation pour fausse application du décret du 2 oct. 1793, et violation de l'art. 2 de la loi du 17 juill. même année.-M. Lecoutour, subst. du proc. gén., a établi que les lois invoquées ne pouvaient s'appliquer à des prix de vente d'un immeuble précédemment chargé de droits seigneuriaux.-Conclusions à la cassation. ARRÊT.

LA COUR;-Vu les art. 1er et 2 de la loi du 17 juill.1793, et le déc. d'ordre du jour du 2 oct.même

(2) V. en ce sens, Cass. 4 vent. an 9, et les arrêts nombreux en sens divers, ainsi que les autorités qu sont citées dans les observations qui accompagnen cet arrêt.

année; Attendu que l'acte du 20 sept. 1784, dont les héritiers Simon demandent l'exécution, n'est qu'une cession ou une vente à prix fixe d'un fonds grevé d'une redevance féodale précédemnient établie envers un ci-devant seigneur ;-Que cet acte ne contient ni une inféodation, ni un acensement, ni l'établissement d'aucun droit seigneurial;-Que, jusqu'à la suppression des droits féodaux, les emphyteotes qui vendaient les fonds grevés de droits seigneuriaux, étaient obligés d'en faire mention dans l'acte;-Que, si l'on étendait à de pareils actes les lois et les décrets qui ont prononcé la suppression des redevances mélangées de féodalité, il n'est aucun acte de vente de bien roturier, passé dans les pays où tous les biens étaient chargés de quelque droit seigneurial, qui ne fût compris dans la suppression; Que le décret du 2 oct. 1793, qui comprend dans la suppression les redevances foncières qui se trouvent établies par des actes contenant concession primitive de fonds à titre d'inféodation ou d'acensement, ne peut s'appliquer à un acte qui ne contient l'établissement d'aucun droit seigneurial;-Que le décret impérial du 23 avril 1807 n'a rien ajouté aux suppressions portées par les lois de 1793, et que sa disposition s'applique à des redevances qui étaient renfermées dans un titre constitutif de droits féodaux; d'où il suit qu'en déclarant que le prix de la vente porté par l'acte susdit, du 20 sept. 1784, se trouve compris dans la suppression prononcée par les lois susdites, le

(1) V. Teste-Lebeau, Dictionn. d'enregistrement, vo Prescription, no 6.

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C'est une disposition particulière d'un acte que la relation que l'on y rencontre d'un autre acte non enregistré.-En conséquence, il y a prescription acquise, aux termes de l'art. 61 de la loi du 22 frim. an 7, de l'amende encourue par le notaire qui a fait cette relation, si la régie n'a pas exercé contre lui des poursuites dans l'espace de deux ans, à partir de l'enregistrement de l'acte qui la contient (1).

(Enregistrement-C. Barthès.)

Du 26 fév. 1810.-Sect. req.-Rapp., M. Carnot.-Concl., M. Lecoutour, subst. LETTRE DE CHANGE.-ÉCHÉANCE.-PRÉ–

SENTATION.

Sous l'empire de l'ord.de 1673, le porteur de lettres de change payables à vue ou à un certain temps de vue, n'avait pas de délai fatal pour en faire la présentation, pourvu qu'il les présentat au paiement avant cinq ans. (Cod. comm., art. 130 et 160, anal.) (2)

tirée, ne l'ayant point fait protester faute d'acceptation, ni faute de paiement, ni intenté son action (2) C'était là un point controversé sous l'empire en garantie contre François, le tireur d'icelle, dans de l'ordonn. de 1673. « La question est de savoir, les deux mois et vingt-quatre jours, et n'ayant même disait Savary, à l'occasion d'une lettre de change à intenté l'action que six ans et demi après la date de huit jours de vue, tirée de Paris sur Lyon (Parfait la lettre, est non recevable en cette action, etc. »>— négociant, éd. de 1770, tom. 2, p. 154), dans quel C'était aussi la doctrine de Dupuis de la Serra, qui, temps les porteurs de lettres, tirées payables à qua- dans son Art des lettres de change, part. 3, sect. 1, tre, cinq, huit ou quinze jours de vue, les doivent ch. 6, disait : « Puisque le contrat de change est faire accepter ou protester faute d'acceptation: car, pour l'utilité de chacun des contractans, il ne faut jusqu'à présent, une semblable question ne s'est pas que l'un des deux ait toute l'utilité et toute la point encore agitée; il n'y a point de déclaration du liberté, et que l'autre soit exposé à toute la perte, roi, ni d'arrêt qui l'aient réglée. Or, après les ob- sans aucune liberté. Or, il est constant que si le servations ci-dessus faites, on jugera bien que ce porteur n'avait aucune obligation de présenter la doit être en peu de temps, puisqu'en matière de lettre dans un temps convenable, il aurait toute l'ulettres de change, les diligences doivent être faites tilité, parce qu'il recevrait quand bon lui sembleen peu de jours, pour éviter les abus qui se pour- rait s'il voyait une augmentation prochaine de raient commettre par les porteurs de lettres, au pré-monnaie, il se hâterait; s'il voyait une diminution, judice des tireurs et donneurs d'ordres, comme nous voyons dans l'affaire en question; ainsi le soussigné estime qu'il faut que le temps soit proportionné, eu égard à la distance des lieux d'où les lettres sont tirées, de même que l'ordonnance de 1673, tit. 5, art. 13, a réglé les temps que ceux qui auront tiré ou endossé les lettres doivent être poursuivis en garantie. »Savary fait ensuite un calcul du temps qui, d'après cette base, lui paraissait suffisant pour que le porteur de la traite sur Lyon eût pu la présenter; il fixe ce temps à deux mois et vingt-quatre jours, et il ajoute: «Il y aurait de l'injustice si l'on ne bornait et si l'on ne limitait pas le temps aux porteurs de lettres, pour faire leurs diligences, et qu'il fùt en leur pouvoir de garder trois, quatre, six mois, un an et cinq ou six ans, une lettre de change, soit par négligence, soit pour favoriser celui sur qui elle est tirée ou autrement, et ensuite retourner sur le tireur, lui demander la somme mentionnée en la lettre. Cet abus ne serait pas tolérable, puisqu'il porterait un notable préjudice, et il n'y aurait point de sûreté dans le commerce de la banque et du change; ce qui serait contre la droite raison, sur quoi la justice et l'équité sont fondées. Par toutes les raisons ci-dessus alléguées, le soussigné estime que Jacques, au profit duquel la lettre de change en question est

il retarderait; il aurait toute la liberté, et le tireur serait exposé à toutes les pertes, quoiqu'il n'eût aucune liberté, puisqu'il est certain qu'il n'est pas en son pouvoir de ne pas payer la lettre de change, et s'exempter des dommagesintérêts si la lettre de change est protestée lorsqu'il en a reçu la valeur, ou que la lettre est passée au pouvoir d'un tiers. Par conséquent, pour que l'utilité soit respective, il faut que l'obligation soit réciproque; et, puisque le tireur est obligé de payer la lettre de change, lorsque le paiement lui en sera demandé, il faut que le porteur soit obligé aussi de faire demander le paiement dans un temps convenable.-Et, pour déterminer le temps convenable, le public aurait besoin d'un règlement; cependant c'est aux juges à l'arbitrer, et l'on croit qu'équitablement si la lettre a été donnée à une personne pour son voyage, on peut doubler les journées du chemin; que si c'est dans le commerce, l'on peut doubler les ordinaires, etc. >>

Néanmoins, l'ordonn. de 1673 était loin de consacrer cette doctrine. Elle y paraissait même absolument contraire. L'art. 4 du tit. 5 portait en effet, que: «Les porteurs de lettres qui auront été acceptées, ou dont le paiement échet à jour certain, sont tenus de les faire payer ou protester dans les dix

(Ve et fils Bory-C. héritiers Lombard.) ARRET (après délib. en ch. du cons.). LA COUR;-Vules art. 4 et 16, tit. 5,del'ord de comm. de 1673; Considérant que l'ordonn. de commerce, en fixant, par l'article précité, le délai pendant lequel doit être fait le protét, établit en même temps le point de départ, pour supputer ce délai, par une règle commune aux lettres payables à certain temps de vue, et à celles dont l'échéance est à jour certain; et que les unes comme les autres doivent être protestées dans dix jours après celui de l'échéance;-Considérant que, pour les lettres payables à vue, il ne peut y avoir d'échéance avant la présentation, tout comme il ne pourrait y avoir d'échéance pour les lettres à jour certain avant l'arrivée du jour indiqué; que, par conséquent, le législateur, en ne faisant courir le délai du protêt que du jour de l'échéance, n'a eu aucun égard au temps antérieur à la présentation;-Considérant qu'il s'agit au procès de lettres de change conçues payables à trois mois de vue, sans aucun délai déterminé pour la présentation;-Considérant que le porteur de ces lettres les a fait protester régulièrement, conformément au délai convenu de trois mois de vue; que ce protêt a été fait longtemps avant la prescription des cinq années établie par l'art. 21 de l'ordonnance, et seulement après un délai de trois ans et deux mois, à partir de la date des lettres de change;-Considérant qu'il est constant au procès qu'il n'y avait pas provision dans les mains du payeur, à l'époque où ces lettres furent légalement présentées et protestées;

jours après celui de l'échéance. » Ainsi le législateur s'occupant des lettres de change à échéance fixe, donnait des règles sur le délai de la présentation et du protêt. C'était le cas de tracer des règles à part pour la présentation et le protêt des lettres de change à vue, si le législateur n'avait pas entendu comprendre dans la règle générale les questions de garantie qui s'y rattachaient. Aussi, dans le silence de la loi, l'opinion commune avait-elle adopté ce dernier système. En effet, Pothier, tout en regrettant qu'il y ait, sous ce rapport, lacune dans la loi, et en indiquant qu'il paraîtrait équitable que le porteur d'une lettre de change payable à vue fùt tenu de la présenter, et protester dans un temps qui serait laissé à l'arbitrage du juge, Pothier ajoute: «Néanmoins plusieurs négocians, très éclairés et très expérimentés, m'ont assuré que, suivant le sentiment commun, le protêt de ces lettres était valable, pourvu qu'il fût fait dans les cinq ans. » V. Contr. de change, no 143. Tel était aussi l'avis de Jousse, Commentaire sur l'article cité de l'ordonn., no 3, et celui de Merlin, Rép., vo Protet, § 3, no 7, et il fut consacré par un arrêt solennel de 1693, rapporté par Augeard dans le tome premier de son recueil.

Cette opinion avait prévalu, et l'arrêt que nous recueillons ici n'avait pu que s'y conformer. Mais les inconvéniens et les dangers cités par Savary et Dupuis de la Serra, étaient trop évidens pour qu'ils ne dussent pas provoquer l'attention du législateur. Ils n'ont pas échappé aux rédacteurs du Code de commerce qui, pour les faire cesser, a imposé au porteur, sous peine de perdre son recours sur les endosseurs, et même sur le tireur s'il a fait provision, l'obligation d'exiger le paiement de lettres de change soit à vue, soit à un ou plusieurs jours ou mois, ou usances de vue, ou de les faire protester dans un délai déterminé en raison des distances.-V. l'art. 160 et les motifs sur lesquels il est fondé, dans l'Esprit du Code de commerce, par Locré, t.1er, p.500.

(1) L'art. 313 du Code de commerce, qui déclare négociable par la voie de l'endossement l'acte de pret à la grosse s'il est à ordre, est une innovation

que la preuve en résulte notamment de la déclaration faite par le sieur David dans sa réponse au protêt;-Considérant que, dès lors, le porteur desdites lettres se trouvait précisément dans le cas prévu par l'art. 16 précité, qui lui accordait formellement un recours en garantie contre le tireur; d'où il suit qu'en le déclarant non recevable dans ce recours, sur le motif que le protêt n'avait pas été fait dans un délai antérieur à la présentation, lorsque la loi ne prescrivait point de semblable délai, la Cour d'appel a commis un véritable excès de pouvoir, et, par suite, une contravention évidente à l'art. 16, de l'ord. de comm. de 1673;-Casse, etc.

Du 27 fév. 1810.-Sect. civ.-Prés., M. Liborel.-Rapp., M. Genevois.-Concl., M. Lecoutour, subst.-Pl., MM. Sirey, et Perignon.

CONTRAT A LA GROSSE.-ORDRE.-ENDOS

SEMENT.-EXCEPTION.

Un acte de prêt à la grosse peut être négocié par la voie de l'endossement, s'il est dit payable au porteur. C'est en réalité comme s'il était littéralement à ordre. (Cod. comm., art. 313.) (1)

On ne peut opposer au tiers porteur de bonne foi d'un contrat à la grosse, aucune des exceptions qui auraient pu être proposées contre le cédant.

(Bouten.-C. Van-Lerins.)

Le capitaine Bouten ayant à faire à Amsterdam une expédition pour France, emprunta 7,000 florins de Hollande des sieurs Gerrit Scholten.

législative, ou plutôt c'est la consécration par la loi d'un fait qui s'était établi dans les usages du commerce maritime. L'ordonnance de 1673 ne s'était point expliquée sur les contrats de prêts à la grosse à ordre; mais ils étaient admis dans la pratique, et l'intérèt du commerce demandait que cet usage fùt adopté. C'était le vœu des auteurs qui avaient traité de ces matières. V. Emérigon, édit. de M. Boulay-Paty, t. 2, p. 553. C'est là ce qui a été consacré par l'art. 313 du Code de commerce. Mais la loi nouvelle n'a pas ajouté aux anciens usages. Or, les contrats à la grosse n'étaient transmissibles par la voie de l'endossement, que lorsqu'ils étaient stipulés payables à l'ordre du donneur. (V. Emérigon, ibid.) C'est aussi ce qui est exprimé par le Code de commerce. Ainsi quand l'acte n'est pas à ordre, c'est une créance ordinaire qui ne peut être cédée que dans la forme du transport, lequel n'a d'effet, à l'égard du débiteur, que par la signification qu'on lui en fait, ou par son acceptation. (Code civ., art. 1690.) On (avait bien voulu d'abord, au conseil d'Etat, que tout acte de prèt à la grosse fùt négociable de plein droit, s'il n'y avait convention contraire. Mais on préféra faire dépendre ce caractère de la forme extérieure, sur aquelle les parties ne pouvaient se tromper, plutôt que de laisser aux contractans le soin de le lui enlever, en ajoutant une stipulation qu'ils pouvaient oublier, et qui, si elle eût été ajoutée par un acte séparé, aurait pu induire les tiers en erreur. (V. Locré, Esp. du Code de comm., liv.2, tit.9, art.313.)

Mais, ainsi que le décide l'arrêt ci-dessus, la stipulation de l'ordre ne résulte pas seulement de l'emploi de ce terme. Il suffit que l'ordre soit virtuellement exprimé, et que le débiteur fasse nettement connaître que son intention est de considérer son engagement comme s'il avait été pris, non-seulement envers le créancier primitif, mais encore envers tout autre porteur du contrat. Or, cette condition est aussi pleinement remplie lorsque le débiteur a énoncé l'obligation de payer au porteur, que si le contrat eût été fait expressément à ordre. V. Conf., Pardessus, Cours de droit commercial, no 899.

-Il est dit dans l'acte de prêt, 1o que c'est pour l'utilité et le service du navire la Jeune Catherine, ce qui constituait un contrat à la grosse aventure (311, Code comm.);

2° Que le capitaine Bouten s'engage de payer, trois jours après son arrivée dans le port, les 7,000 flor. au prêteur ou au porteur legitime du contrat, avec 7 pour 100 de prime ou d'intérêts. -Peu de jours après son arrivée à Anvers. le capitaine Bouter. fut recherché pour le paiement des 7,000 flor. portés au contrat a la grosse... à la requête du sieur Van-Lerins; négociant à Anvers, porteur du contrat à la grosse, en vertu d'un endossement. Il soutint que le contrat n'étant pas à ordre, la propriété n'avait pu être transférée par la voie de l'endossement, et que le sieur Van-Lerins ne devait être considéré que comme un fondé de pouvoirs, auquel étaient opposables toutes les exceptions qui pouvaient être proposées contre le prêteur.

23 août 1808, jugement du tribunal de commerce d'Anvers qui, attendu que l'engagement n'est pas à ordre, déclare le sieur Van-Lerins non recevable.

Appel par le sieur Van-Lerins.-Il oppose, 1° qu'étant payable au porteur ou au prêteur, l'effet est à ordre dans le sens de l'art. 313 du Code de commerce; 2o que d'ailleurs il aurait pu être négocié, quand il ne serait pas à ordre, attendu que tel est l'usage d'Amsterdam, lieu du contrat.

13 décembre 1808, arrêt de la Cour de Bruxelles qui, infirmant, déclare bonne et valable la négociation du contrat à la grosse, «attendu qu'il est prouvé au procès que dans la ville d'Amsterdam, lieu du contrat à la grosse, l'acte portant que tel contrat était transmissible par endossement; qu'au surplus, dans l'espèce, le preneur à la grosse a promis de payer au porteur légitime du contrat d'où il résulte que, si même la législation française devait servir a la décision de la présente cause, d'après l'art. 313 du Code de commerce, l'acte serait transmissible par simple endossement. »

POUR VOI en cassation de la part du capitaine Bouten, pour contravention à l'art. 313 du Code de commerce.-11 soutenait, 1o que la loi française avait seule dû être appliquée; -2° Que l'art.313 du Code de commerce ne considérait pas les mots payable au porteur, comme les mots payable à l'ordre de tel.-M. Daniels, substitut du procureur général, a conclu au rejet, par les motifs exprimés comme il suit: « Nous accorde. rons au demandeur, a dit ce magistrat, que pour déterminer la valeur et les effets de l'endossement dont il s'agit, on doit recourir non pas aux usages d'Amsterdam, mais aux lois françaises, puisque c'est en France qu'on a formé la denande. Mais il nous semble qu'aux termes mêmes du Code de commerce, le contrat à la grosse signé par le demandeur, est à ordre; que par conséquent il pouvait être négocié, et que le débiteur ne peut pas opposer au porteur les exceptions qu'il pourrait avoir contre le créancier originaire.-Le mot ordre ne se trouve pas, vérité, dans ce contrat à la grosse; mais aucune Joi n'exige qu'on s'exprime précisément en ces termes: il suffit que l'ordre y soit virtuellement; et les termes payable à un tel ou au porteur légitime, expriment la même chose. Dans l'un comme dans l'autre cas, le débiteur déclare que

à la

(1) Le contraire a été implicitement jugé par la Cour de cassation sous l'empire de l'ord. de 1673, le 16 pluv. an 13 (V. à cette date et nos observations), et expressément sous l'empire du Code de commerce par la Cour de Toulouse, les 20 juin et

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son intention est de faire regarder son engagement comme s'il avait été pris, non-seulement envers le créancier primitif, mais encore avec tout autre porteur du billet ou contrat à la grosse. Il est donc juste que nous attachions le même effet à ces deux expressions, et que nous appliquions à l'une comine à l'autre, la règle de droit, suivant laquelle on ne peut pas opposer au porteur les exceptions qu'on avait contre son auteur. Nous en avons un exemple dans les billets payables au porteur sans aucune désignation de personne. Ces billets ne contiennent pas le mot ordre, et cependant ils ne diffèrent en rien d'une lettre de change, lorsqu'il s'agit de savoir quelles sont les exceptions qu'on peut opposer au propriétaire du billet. Leyser, dans son Commentaire sur le Digeste, Spec. 202; de Cessione Cambii, a traité la question de savoir si les mots à la disposition d'un tel, équivalaient ou non au mot ordre. Il adopta l'affirmative, et la Faculté de droit de l'Université de Leipzig fut du même avis. Le Code de commerce, en déclarant de même que tout acte de prêt à la grosse peut être négocié par la voie de l'endossement, s'il est à ordre, n'exige pas le mot ordre, mais la chose, c'est-à-dire la déclaration du débiteur par laquelle il consent, par l'acte même, à ce que le créancier originaire transporte, sans autre signification, à un tiers, le droit résultant du con

trat.>>>

ARRÊT.

LA COUR; Attendu que l'obligation de payer au porteur, contractée par l'acte de prêt à la grosse, a le même effet que celle à ordre, quant à la faculté de le transmettre par la voie de l'endossement; que, par conséquent, en déclarant valable l'endossement de celui dont il s'agit, l'arrêt attaqué n'a contrevenu à aucune loi;

Que, dès lors, la négociation de l'acte ayant les mêmes effets que celle des autres effets de commerce, le débiteur ne peut opposer au porteur aucune des exceptions qu'il aurait pu opposer au cédant, ce qui justifie suffisamment cet arrêt ;-Rejette, etc.

Du 27 fév. 1810.-Sect. req.-Prés., M. Henrion.-Rapp., M. Cassaigne.-Concl., M. Daniels, subst.

LETTRE DE CHANGE.-ENDOSSEMENT.-AC

CEPTATION.

Une lettre de change à l'ordre de soi-même,' est réputée tirée dans le lieu où elle a été souscrite et non dans le lieu où elle est passée au donneur de valeur.

Ainsi, elle est réputée tirée d'un lieu sur un autre, encore qu'elle soit payable dans le mème lieu où elle est passée au donneur de valeur. ( Cod. comm., art. 110 et 632.) (1)

(Guilbert-C. Daigremont-Desmares.) Daigremont-Desmares était porteur de trois traites, chacune de 3,000 fr., souscrites par le sieur Lésénecal, et acceptées par Guilbert. Ces traites étaient ainsi conçues : -«Bernières, prês Vire, le 1er déc. 1807. Au 1er sept. 1808, il vous plaira payer, ordre de moi-même, la somme de 3,000 fr., valeur entendue, selon l'avis de votre serviteur, signé LÉSÉNECAL.-A M. Guilbert.A Caen.-Accepté, pour la somme de 3,000 fr., signé GUILBERT.-Payez à l'ordre du sieur Daigremont-Desmares, valeur reçue, Caen, le 15

4 juill. 1835. Et la Cour de cassation a consacré cette doctrine par l'arrêt du 10 juill.1839 (aff. Lissençon), qui cependant est plutôt une décision en fait qu'en droit.

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août 1808. »>-Ces traites n'ayant pas été acquit tées à leur échéance, le sieur Guilbert fut assigné devant le tribunal de commerce de Caen. Il déclina la juridiction, attendu qu'il n'y avait point eu remise d'argent de place en place; ce qui seul constitue l'essence de la lettre de change, relativement à la compétence du tribunal de commerce, aux termes de l'art. 632 du Code de commerce. En effet, disait-il, la négociation a été faite à Caen.-A la vérité, les traites sont datées de Bernières, près Vire.-Mais il n'y a point eu remise d'argent faite à Bernières. Et, à bien dire, cette date de Bernières n'est pas la véritable date de l'effet. Les lettres de change payables à l'ordre de soi-même ne sont parfaites, comme lettres de change, que lorsque le tireur les a passées au donneur de valeur, ce qui se fait alors par la voie de l'endossement; en sorte que l'endossement forme partie essentielle de ces sortes de lettres de change. Et comme c'est l'endossement qui indique la négociation, sa date est véritablement celle de la lettre de change. - Ce qui a été projeté à Bernières par le tireur seul, ne peut aucunement former un contrat de change. Il n'y a eu contrat de change que lorsqu'il a été fait à Caen un échange de valeurs. Mais alors ce n'a pas été une remise d'argent de place en place, puisque le paiement devait aussi être fait à Caen. Donc les effets n'ont pas eu le caractère de lettre de change.-Et puisque d'ailleurs il ne s'agit pas d'opérations commerciales, la matière est de la compétence des juges civils. Il y a lieu à renvoi.

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Mais le tribunal de commerce de Caen rejeta le déclinatoire, et condamna Guilbert.

17 décembre 1808, arrêt de la Cour d'appel de Caen, qui confirme.

Pourvoi en cassation de la part de Guilbert pour contravention à l'art. 110 du Code de com

merce.

M. Daniels, avocat général, a fait remarquer que l'art. 110 permet que la lettre de change soit lirée à l'ordre du tireur lui-même; d'où il a conclu que, dans l'espèce, les lettres de change avaient été vraiment tirées avant d'être passées à l'ordre de Daigremont-Desmares: donc elles avaient été réellement tirées, non à Caen, mais à Bernières; donc elles avaient été tirées d'un lieu sur un autre. Conclusions au rejet.

ARRÊT.

LA COUR; - Attendu que l'art. 110 du Code de comm. n'a pas été violé, puisque cet article considère comme lettre de change l'effet qui a été tiré d'un lieu sur un autre, à l'ordre du tireur lui-même, ce qui se rencontre dans l'espèce; Rejette, etc.

Du 28 fév. 1810.-Sect. req.-Prés., M. Henrion. Rapp., M. Rupérou.-Concl., M. Daniels, av. gén.-Pl., M. Duprat.

COURS SPÉCIALES. COMPÉTENCE. Les Cours spéciales sont des tribunaux extraordinaires et d'exception qui n'ont aucune juridiction sur les magistrats de la justice criminelle ordinaire. · En conséquence,

(Chaval.)-ARRÊT.

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LA COUR;-Vu l'art. 456 du Code du 3 brum. an 4, § 6;-Attendu que ladite Cour s'est permis de renvoyer les gendarmes Gosset et autres devant le magistrat de sûreté dans l'arrondissement de Tournay, pour les poursuivre à raison des sévices et mauvais traitemens exercés par eux envers lesdits Chaval; - Que ce renvoi porte une injonction audit magistrat de sûreté de poursuivre lesdits gendarmes; que les Cours de justice criminelle et spéciale sont néanmoins des tribunaux extraordinaires et d'exception, qui n'ont point de juridiction sur les magistrats de la justice criminelle ordinaire; Que, hors des cas qui leur sont attribués par la lui, elles n'ont donc ni le droit d'indication de juridiction, ni celui d'injonction de poursuites;-Que l'indication de juridiction au magistrat de sûreté de Tournay, et l'injonction faite à ce magistrat de poursuivre les susdits gendarmes, ont donc été, de la part de la Cour de justice criminelle et spéciale du département de Jemmapes, une violation des règles de compétence établies par la loi, et un excès de pouvoir;-Par ces motifs;-Casse, etc. Du 1er mars 1810.- Sect. crim. Prés., M. Boivin.-Rapp., M. Bauchau.--Concl., M. Pons,

subst.

1oINSCRIPTION HYPOTHÉCAIRE.—SOCIÉTÉ.-RAISON SOCIALE.

2o APPEL.- GRIEFS.

1 Une inscription faite au nom de deux associés est réputée faite au nom de la raison sociale connue sous le nom de ces deux associés. (L. 11 brum. an 7, art. 17; Cod. civ., art. 2148, anal.) (2)

2o Un acte d'appel n'est pas nul, encore qu'il ne contienne pas l'énoncé sommaire des griefs ou moyens d'appel. (Cod. proc. civ., art. 61, 456, 462 et 470.) (3)

(Dannoot-C. Palmaërt et Opdemberg.)

La maison de commerce Palmaërt et Opdemberg avait produit dans un ordre ouvert au tribunal civil de Bruxelles. L'inscription hypothécaire avait été prise au nom des sieurs Palmaërt et Opdemberg, négocians.

Le sieur Dannoot demande la nullité de cette inscription. Si c'est la maison Palmaërt et Opdemberg qui est créancière, disait-il, l'inscription devrait énoncer qu'elle est prise au nom collectif de la société. Si au contraire, ainsi que les expressions l'indiquent, elle est prise au nom individuel des sieurs Palmaërt et Opdemberg, elle devrait énoncer leurs prénoms. Ainsi elle est nulle dans l'une ou l'autre hypothèse, parce qu'elle ne désigne pas suffisamment le créancier, ainsi que le veut la loi.

Jugement du tribunal de Bruxelles, qui déclare l'inscription nulle: « Attendu que l'art. 17 de la loi du 11 brum. an 7, porte expressément que le bordereau doit contenir les nom, prénoms, profession et domicile du créancier; que l'inscription hypothécaire dont il s'agit ayant été faite en faveur des sieurs Palmaërt et Opdemberg, sans la désignation de leurs prénoms res

une Cour spéciale ne peut, sans excès de pou-pectifs, cette omission infecte de nullité cette voir, renvoyer un prévenu devant le magis-inscription.>> trat de sûreté, avec injonction de poursuivre (1).

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Appel par Palmaërt et Opdemberg.

Dannoot demanda la nullité de l'acte d'appel

d'une société est valable quoiqu'elle n'indique pas les prénoms de tous les associés, pourvu qu'elle contienne l'énonciation de la raison sociale. Paris, 15 avril 1809.

(3) V. conf., Cass. 4 frim. an 3; 4 déc. 189, et la note.

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