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LA COUR; - Vu le certificat de non produit de la part des sieurs Lapierre, Delestre et Allard, 2 délivré le 4 avril 1810, par le greffier de la Cour, et les art. 10 et 14 de la loi du 15 germ. an 6, concernant la contrainte par corps;-Et attendu, 21° que si l'art. 10, dite loi, oblige celui à la requête duquel se fait un emprisonnement, à élire domicile dans le lieu de la maison d'arrêt où est détenu son débiteur, il ne lui impose cette obligation que dans le seul intérêt de celui-ci; d'où il suit que tous autres prétendant avoir quelque action à exercer contre le créancier, à raison dudit emprisonnement, ne peuvent le faire citer dans le lieu où il a fait sadite élection de domicile; et qu'en déclarant valable une pareille citation signifiée audit demandeur, à la requête des défendeurs, le tribunal civil d'arrondissement de Neufchâtel a commis un excès de pouvoir, et a fait en même temps une fausse application dudit art. 10, en l'étendant à un cas qui lui était absolument étranger;

Attendu, 2o que l'art. 14, même loi, n'oblige le créancier qui aura fait emprisonner son débiteur, qu'à consigner d'avance, et par chaque mois, la somme de 20 fr. entre les mains du gardien de la maison d'arrêt, pour la subsistance de l'incarcéré; d'où il suit encore que l'on ne peut aggra། ་ ver les obligations dudit créancier, et qu'en condamnant ledit demandeur, sous cette qualité, à payer au médecin le prix des visites par lui faites au détenu pendant sa maladie, à l'apothicaire ses frais de médicamens, et au geôlier les bouillons extraordinaires qu'il lui a fournis, ledit tribunal a encore contrevenu audit article, et en a fait aussi une fausse application, en l'étendant pareillement à un cas non par lui prévu;-Casse, etc.

Du 17 juill. 1810.-Sect. civ.-Prés., M. Muraire, p. p.-Rapp., M. Cochard.-Concl. conf., M. Giraud, av. gén.-Pl., M. Mathias.

COMPÉTENCE.-MARCHANDISES.-LIVRAISON. Lorsqu'une demande de marchandises a été faite, par lettre, au domicile du commissionnaire, et que la marchandise a été expédiée à l'acheteur, c'est le tribunal du domicile du commissionnaire qui doit connaître des difficultés relatives à cette demande (1).

(Dugrais-C.Lecharlier.)

Le sieur Dugrais, négociant à Lorient, avait écrit au sieur Lecharlier, commissionnaire à Assigny, de lui expédier 400 livres de beurre. Ces 400 livres de beurre sont en effet expédiées; mais le sieur Dugrais a refusé de les recevoir.Assignation par Lecharlier à Dugrais devant le tribunal d'Assigny.-Dugrais décline la juridiction, soutenant que la marchandise devant être

(1) V. dans le même sens, Cass. 24 août 1830; Bourges, 10 janv. 1823.

(2) V.conf., Cass. 10 niv. an 11, et les observations qui accompagnent cet arrêt. V. aussi plusieurs arrêts identiques déjà rapportés dans ce Recueil.

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François Beune, conscrit de 1809, était prévenu d'avoir présenté devant le conseil de recrutement du département de la Dordogne un faux certificat, pour obtenir d'être placé à la fin du dépôt ; et d'avoir fait usage d'un faux passe-port portant qu'il avait satisfait à la conscription. Antoine Labrousse, conscrit de 1808, était aussi prévenu d'avoir présenté devant le même conseil un acte de naissance altéré, et un faux certificat, pour être placé à la fin du dépôt.

Pierre Villemar-Pinssac, secrétaire de la mairie de la commune de Greres, canton de Terasson, était soupçonné d'être l'auteur de ces faux, ou d'y avoir participé.-Traduits devant la Cour de justice criminelle et spéciale du département de la Dordogne, ces particuliers ont réclamé le bénéfice de l'amnistie accordée par le décret imBeune étant décédé périal du 25 mars 1810. pendant l'instruction, la Cour criminelle et spéciale, par son arrêt du 28 juin dernier, a déclaré n'y avoir lieu de statuer à son égard.

Appliquant ensuite à Labrousse et à Pinssac le décret du 25 mars, elle déclare n'y avoir lieu à continuer contre eux aucune poursuite criminelle.

Mais la Cour de cassation a vu dans cet arrêt une fausse application du décret du 25 mars, pour ce qui concerne Pinssac; en conséquence elle a rendu l'arrêt suivant :

ARRÊT.

LA COUR;- Considérant qu'en se déclarant

(3) V.sur cette question, Legraverend (Traité de législ. crim., t. 2, ch. 19, p. 511 et s.); Carnot, Instr. crim., t. 1er, p. 6, no 11; Merlin, Rép., yo Amnistie, no 11.

incompétente par son arrêt du 28 juin 1810, pour connaître de l'usage de pièces fausses qu'Antoine Labrousse, conscrit réfractaire, est prévenu d'avoir fait pour se soustraire aux lois de la conscription, la Cour de justice criminelle et spéciale du département de la Dordogne a fait une juste application du décret impérial d'amnistie du 23 mars 1810, et du second décret interprétatif du 20 juin suivant, Confirme cet arrêt en cette

partie;

Mais relativement à Pierre Villemar-Pinssac, secrétaire de la mairie de la commune de Greres, prévenu d'être l'auteur des pièces fausses dont François Beune et Antoine Labrousse ont fait usage;-Vu l'art. 1er du décret du 30 juin dernier; -Attendu que, d'après les dispositions formelles de ce décret, la Cour de justice criminelle et spéciale de la Dordogne a faussement appliqué à Pinssac, secrétaire de la mairie, le bénéfice du décret du 25 mars 1810, et qu'elle devait se déclarer incompétente à son égard, pour connaître du faux dont il était prévenu; -Vu l'art. 456 du Code du 3 brum. an 4;-Casse, etc.

Prés., M.

Du 19 juill. 1810. Sect. crim. Barris. - Rapp., M. Favard de Langlade. Concl., M. Lecoutour, av. gén.

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De ce que l'art. 1390, Cod. civ., défend aux époux de stipuler dans les contrats de mariage que leur association sera réglée par l'une des coutumes abrogées par le Code, il ne s'ensuit point, par nécessité de conséquence, qu'une institution testamentaire doive etre nulle, parce que le testateur aura dit vouloir qu'elle ait effet selon une coutume abrogée. (Cod. civ., art. 6, 900 et 1390.) Au surplus, un testateur qui défère sa succession à ses parens plus proches, de l'estoc d'où ses biens proviennent, en admettant la représentation à l'infini (à l'instar de telle coutume), ne fait qu'user de la faculté que la loi accorde de disposer contrairement à l'ordre des successions ab intestat. Cette institution faite en masse, de ses parens plus proches, dans tel estoc, sans dénomination individuelle, n'est point vicieuse, comme elle le serait, si l'instituant avait confié à un tiers le soin de choisir les légataires : en ce cas, on ne peut pas dire que le légataire recueille autrement que par la volonté du testateur. (Cod. civ., art. 895 et 967.) (1)

(Millavaux-C. Chazerat.)-ARRÊT. LA COUR;-Attendu que l'art. 1390 du Code

(1) Certaines coutumes admettaient la représentation à l'infini en ligne collatérale, et voulaient que dans le partage d'une succession, on recherchat la nature et l'origine des biens pour les adjuger, non pas aux parens les plus proches du défunt, mais à ceux qui descendaient de la famille à laquelle ces biens avaient originairement appartenu. Ces dispositions, qui étaient une source intarissable de procès, ont été abrogées. Aujourd'hui, lorsqu'une personne ne laisse pas de descendans, sa succession est divisée en deux parts égales; l'une appartient aux parens les plus proches de la branche paternelle, et l'autre à ceux de la branche maternelle, sans qu'il soit permis de prendre en considération la nature ou l'origine des biens; d'un autre côté, on sait que la représentation n'est admise en ligne collatérale qu'en faveur des descendans des frères ou sœurs du défunt. Il est sans doute permis de déroger à ces

civ., est au liv. 3, tit. 5 du contrat de mariage et des droits respectifs des époux; que c'est l'association des époux que cet article défend de régler d'une manière générale par l'une des coutumes, lois ou statuts locaux qui régissaient ci-devant les diverses parties du territoire français, et qui sont abrogés; que les dispositions du même Code, relatives aux testamens, sont au liv. 5, tit. 2, chap. 5, art. 967 et suivans; que la Cour de Riom ne peut pas avoir violé l'art. 1390 du Code civ., en ne se croyant pas permis d'étendre aux testamens une disposition de ce Code faite pour les contrats de mariage,

Attendu que Marie-Gilberte Rollet n'a pas confié à un tiers le soin de choisir ses légataires et de régler la distribution de sa succession; qu'elle les a désignés elle-même et d'une manière certaine qu'elle a déterminé de même la portion revenant à chacun d'eux sur ses biens, en appelant à les partager ceux de ses parens, dans les trois branches de ses aïeul et aïeule paternels, et de son aïeule maternelle, qui seraient en ordre de lui succéder, suivant les règles de la représentation à l'infini, telle qu'elle avait lieu dans la ci-devant coutume d'Auvergne, pour être divisés entre les trois branches au marc la livre de ce qui lui est parvenu de chacune desdites branches, et être subdivisés entre chacune d'elles, suivant les mêmes règles de la représentation à l'infini; - Qu'en confirmant un testament dont, ainsi que l'observe la Cour d'appel, les dispositions témoignent fortement que la testatrice a eu une volonté propre, éclairée et déterminée, cette Cour ne peut pas avoir violé les art. 892, 895 et 975 du Code civ.; - Attendu que le partage de la succession de Marie-Gilberte Rollet, entre ses légataires, aura lieu suivant les principes de la coutume d'Auvergne, non par la force de cette coutume, qui n'existe plus comme loi de l'empire, mais par la volonté de ladite Rollet, qui, n'ayant ni ascendans ni descendans, maîtresse conséquemment de disposer à son gré de la totalité de ses biens, a pu les distribuer par testament entre ceux de ses parens qu'elle a jugé à propos de choisir; qu'ainsi l'arrêt attaqué ne fait pas revivre une coutume abrogée, et ne contrevient ni à l'art. 6 du Code civ., ni à l'art. 7 de la loi du 30 vent. an 12; Attendu que la Cour d'appel a jugé que la clause, telle qu'elle avait lieu dans la ci-devant coutume d'Auvergne, n'était, dans le testament contentieux, qu'une clause surabondante; qu'il n'y avait pas dans cet acte une seule disposition qui ne pût être exécutée indépendamment de toute coutume quelconque, et par le seul fait de la volonté certaine et connue de la testatrice;

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Qu'on ne peut voir là autre chose qu'une in

règles. Mais peut-on y déroger jusqu'à ce point qu'au moyen d'un testament on puisse rendre la vie à des coutumes que la loi nouvelle a entendu abroger? Il faut distinguer: si l'on insère dans un testament des dispositions d'une coutume abrogée, le vœu du testateur devra être respecté (pourvu que la disposition ne soit pas illicite ou contraire à la loi), parce que dans ce cas, il se rend propre la disposition; et il en doit être ainsi, alors même que le testateur aurait énoncé ensuite qu'il dispose en conformité d'une ancienne coutume: c'est ce que juge l'arrêt que nous recueillons. Mais il en devrait être autrement, selon nous, si le testateur avait manifesté la volonté de se placer sous l'empire d'une coutume abrogée, et sans disposer luimême, s'était généralement référé aux dispositions

de cette coutume.

terprétation du testament sur lequel cette Cour était appelée à prononcer; que quand elle aurait mal à propos supposé à ces expressions, les règles de la représentation à l'infini, un sens clair, absolu et indépendant de la coutume d'Auvergne, cette erreur ne serait la violation d'aucune loi; Attendu, enfin, qu'il serait superflu d'examiner s'il y a, dans l'arrêt de Riom, fausse application de l'art. 25, tit. 12, de la ci-devant coutume d'Auvergne, puisque cette fausse application, fût-elle réelle, il ne peut résulter d'ouverture de cassation, ni de la violation, ni de la fausse application d'une coutume abrogée;-Rejette, etc.

Du 19 juill. 1810.-Sect. req.-Prés., M. Henrion.-Rapp., M. Aumont. Concl. conf., M. Merlin, proc. gén.-Pl., M. Mailles.

DÉLIT FORESTIER. USAGE. BETES A

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LAINE.-CONVENTION Illicite. L'introduction des chèvres, brebis et moutons ne peut jamais avoir lieu dans les bois, en quelque temps que ce soit, même dans les forêts sujettes au droit de parcours et de la part des usagers. (Ord. de 1669, tit. 19, art. 13.) (1)

Toutes conventions contraires à cette prohibition sont nulles, lors même qu'elles remonteraient à une époque antérieure à l'ordonnance de 1669 et qu'elles auraient été homologuées par l'autorité municipale. Le seul fait de l'introduction d'un troupeau de bêtes à laine dans un bois est un délit, sans qu'il soit nécessaire de constater les dommages causés dans ce bois (2).

(Forêts-C. Aubert.)- ARRÊT.

LA COUR; - Vu l'art. 456, § 1er de la loi du 3 brum. an 4;- Attendu que les dispositions prohibitives de l'art. 13, tit. 19 de l'ord. de 1669, sont absolues, et ne peuvent comporter aucune exception; Que cette ordonnance a été spécialement déclarée exécutoire, par un édit du mois de fév. 1704, enregistré au parlement d'Aix, dans le pays et comté de Provence, dont le département actuel des Basses-Alpes faisait partie; -Que les dispositions de l'art. 13 ont été renouvelées et confirmées par l'art. 1er du décret du 17 niv. an 13, et par l'avis du conseil d'Etat du 18 brum. an 14, approuvé par sa majesté le 16 frim. de la même année, sans qu'il y ait été apporté aucune modification, ni relativement aux localités, ni relativement à la teneur des titres constitutifs des droits d'usage; Qu'il résulte de là que l'introduction des moutons, chèvres et brebis ne peut jamais avoir lieu dans les bois, en quelque temps que ce soit, même dans les forêts sujettes au droit de parcours, et de la part des usagers; Que le droit de pâturage accordé par la transaction du 30 juin 1652, par les auteurs du propriétaire actuel du bois de la Blache, aux habitans de la commune d'Entragues, n'a pu continuer de recevoir, en ce qui concerne le pâturage des moutons et des bêtes à laine, une exécution contraire aux dispositions prohibitives de l'ord. de 1669, promulguée postérieurement à cette transaction; - Qu'il n'a pu également être dérogé au vœu de l'ordonnance, par la délibération du conseil municipal de la commune d'Entragues, du 7 mai 1806, approuvée par le préfet

(1) V. conf., l'art. 78 du Code forest.; Merlin, Répert., add., v° Usage (droits d').

(2) V. Cass. 21 vend. et 26 brum. an 12; 30 oct. 1806, et les notes.

des Basses-Alpes, le 11 juill. suivant, d'autant plus que cette délibération n'est pas même en soi constitutive du droit d'usage, qui se réfère à un titre plus ancien;-Que si les habitans d'Entragues sont, à raison des localités et des circonstances qui déterminèrent la transaction de 1652, dans une position qui puisse mériter une exception particulière, c'est au souverain seul qu'il pourrait appartenir de déroger, sur leur demande, à des lois générales dont les dispositions ont été dictées par des motifs d'intérêt et d'ordre public;

Que dès lors, et dans l'état actuel de la législation sur cette matière, il est certain que Charles Aubert était coupable d'une contravention formelle à l'ordonnance, et passible des peines prescrites par l'art. 38, tit. 2 du Code rural, par cela seul qu'il avait fait introduire un troupeau de moutons et de bêtes à laine dans le bois de la Blache, sans qu'il fût nécessaire de considérer si des dommages plus ou moins graves avaient été causés au propriétaire de ce bois, le fait seul de l'introduction constituant par lui-même un délit;-Que la Cour de justice criminelle du département du Var a par conséquent violé la loi, en ce qu'elle n'a pas prononcé contre les délinquans les peines prescrites par l'art. 38, tit. 2 du Code rural, modificatif des dispositions pénales de l'art. 13, tit. 19 de l'ordon. 1669, en ce qui concerne les bois des communes et des particuliers; -Casse, etc.

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Sect. crim. Du 20 juill. 1810. Prés., M. Barris.-Rapp., Guieu.-Concl., M. Lecoutour, av. gén.

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Le trouble dans l'exercice d'un droit de passage (servitude discontinue imprescriptible) autorise l'action en complainte, si le demandeur se prévaut à la fois de la possession annale et d'un titre qui en soit le fondement (3). (Carteret-C. Pelleport.)

Depuis longtemps, le sieur Pelleport avait l'habitude de passer et de faire passer ses charretiers, sur un terrain appartenant aux époux Carteret.-Les 6 et 11 juill. 1807, cette possession fut troublée; les époux Carteret creusèrent un fossé, pour intercepter le passage.

Action en complainte. - Les époux Carteret soutinrent, en principe général, que l'action en complainte n'était pas recevable dans les matières imprescriptibles, et dans l'espèce la matière est un droit de passage, ou de servitude discontinue, droit que la loi déclare imprescriptible. (Art. 688 et 691 du Code civ.)

21 juillet 1807, jugement du juge de paix, qui, sans s'arrêter à l'exception, maintient Pelleport possession du droit de passage.

Appel.-Les époux Carteret insistent sur l'application du principe que l'action en complainte n'est pas recevable dans les matières imprescriptibles. En effet, disent-ils, quel est le fondement de la complainte? C'est parce que le possesseur est présumé propriétaire: donc, lorsque la nature

(3) V. en ce sens, Cass. 6 juill. 1812, et 2 mars 1820. V. aussi nos observations sur ce dernier arrêt.

de sa possession est telle qu'il n'en résulte pas la présomption de propriété, il n'y a plus lieu à maintenir ou à réintégrer: aussi, tous les auteurs sont d'accord que la maintenue n'est pas due à la possession acquise vi, clam, precario: de même, elle n'est pas due à la possession qui est essentiellement le résultat de la tolérance du voisin (Code civil, art. 2232): or, la tolérance du voisin est nécessairement présumée alors que la possession n'a et ne peut avoir d'effet pour la prescription.-Donc, en matière imprescriptible, la possession ne fait aucunement présumer la propriété elle ne peut donc être le fondement d'une maintenue en possession provisoire.-Le sieur Pelleport répondit que ces principes vrais, s'il s'agissait d'une servitude sans titre, cessaient d'être applicables lorsque le droit de passage est établi par un titre et en effet, il produisit un titre, du 17 juillet 1774, passé entre ses auteurs et ceux du sieur Carteret.

20 juillet 1808, jugement du tribunal civil de Saint Gaudens, qui maintient le sieur Pelleport en possession: attendu le fait de possession annale et la production de son titre, auquel nulle loi ne défend de donner effet au possessoire.

POURVOI en cassation pour contravention aux art. 688, 691 et 2232 du Code civil.-Les demandeurs reproduisaient leur théorie sur le fondement de l'action en complainte et sur l'inadmissibilité de cette action en matière non sujette à prescription.

Pour le sieur Pelleport on a répondu : Dans la plupart des pays coutumiers, les servitudes, tant continues que discontinues, ne s'acquéraient que par titre. La possession était inutile à cet égard.-Telle était particulièrement la règle admise dans la coutume de Paris, art. 186. Dans la plupart des pays de droit écrit, et particulièrement dans le ressort de l'ancien parlement de Toulouse, la possession tenait au contraire lieu de titre. En matière de servitude, une possession de trente ans suffisait pour les servi– tudes continues, et l'on exigeait une possession immémoriale pour les servitudes discontinues.— C'est ce qu'enseignent Ferrières sur Guypape, question 573; Catellan et Vedel, liv. 3, chap 6; Boutaric et Serres, aux Institutes, liv. 2, tit. 3.

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Le Code civil a pris un moyen terme à cet égard; il n'a pas admis indistinctement la règle: nulle servitude sans titre, qui était suivie dans les pays coutumiers; il n'a pas non plus regardé la possession comme suffisante pour acquérir toute sorte de servitudes.-L'on a distingué les servitudes apparentes des servitudes non apparentes, et encore les servitudes continues des servitudes discontinues. L'article 690 du Code a déclaré, après cette distinction, que « les servitudes continues et apparentes s'acquéraient par titre ou par la possession de trente ans. >>

L'article 691 porte que « les servitudes continues non apparentes et les servitudes discontinues apparentes ne peuvent s'établir que par titres... La possession, même immémoriale, ne suffit pas pour les établir, sans cependant qu'on puisse attaquer aujourd'hui les servitudes de cette nature, déjà acquises par la possession dans les pays où elles pouvaient s'acquérir de cette manière. Les servitudes discontinues, telles que le droit de passage, ne peuvent donc plus s'acquérir par la seule possession. Elles ne peuvent s'établir que par titres. La possession, même immémoriale, ne suffit pas. L'on a regardé la possession, à cet égard, comme basée sur une simple tolérance ou sur une pure familiarité. L'on a décidé, par cette raison, que la possession qui n'était justifiée par aucun titre était vaine,

-

attendu que les actes de simple tolérance ne peuvent fonder ni possession ni prescription.(V. l'art. 2232 du Code.)-Le même motif a mené à dire que l'action possessoire n'était pas recevable à l'égard des servitudes discontinues dont on jouissait sans titre dans les pays où l'on n'admettait aucune servitude sans titre.-L'on a jugé que la seule possession annale, dénuée de titre, ne pouvait plus donner lieu à l'action possessoire à raison des servitudes discontinues, parce que cette possession était purement précaire depuis le Code civil, et que l'art. 23 du Code de procédure n'admet l'action possessoire qu'en faveur de ceux qui, depuis une année au moins, sont en possession paisible à titre non précaire, c'est-à-dire en faveur de ceux qui possèdent autrement que par simple tolérance ou par familiarité.-L'on a appliqué aux servitudes discontinues ce qui s'observait en pays coutumier pour les servitudes en général, à l'égard desquelles on jugeait que la complainte n'avait pas lieu si la servitude n'était pas fondée en titre, comme le remarque Brodeau sur l'art.96 de la Coutume de Paris, que «comme il n'y a point de servitude sans titre pour obtenir action en complainte, il est besoin d'exhiber ce titre. >>>

On trouve la même réflexion dans Ferrières, sur l'article cité, glose unique, no 23, qui ajoute que « celui qui prétend une servitude doit rapporter titre, même au possessoire. >> - Le motif de cette jurisprudence est clairement expliqué par Pothier, en son Traité de la procédure civile, chap. 3, § 2, p. 201 du tit. 1er; on y lit : «Si je suis en possession de quelque droit de servitude sur un héritage voisin, et qu'on m'empêche d'en jouir, il y a lieu à la complainte; mais pour qu'il paraisse que je suis en possession de ce droit de servitude, par exemple, d'un droit de passage, il ne suffit pas que j'aie passé, car on présume que c'est par tolérance que j'ai passé; or, une possession précaire et de tolérance ne donne pas lieu à la complainte; mais il faut qu'il paraisse que j'ai passé, comme usant du droit de passer. »Il suit bien clairement de cette doctrine que celui qui n'a qu'une simple possession pour une servitude, qu'on ne peut pas acquérir sans titre, n'est pas recevable à intenter l'action possessoire, parce que sa possession est regardée comme purement précaire; mais il en résulte aussi que celui qui possède en vertu d'un titre qui est constitutif de la servitude, et qui est troublé dans cette possession, a la voie de complainte, parce que sa possession a alors tous les caractères requis pour la complainte. -Telle est aussi la doctrine des auteurs de la nouvelle collection de Denizart, au mot Complainte, § 2, no 9, qui, parlant des droits de servitude, disent << qu'il est absolument nécessaire, à leur égard, que le titre soit joint à la possession pour autoriser la complainte. »-C'est d'après ces principes que la Cour a jugé, par les arrêts des 21 oct. 1807 et 23 nov. 1808, que l'action possessoire n'était pas recevable à l'égard d'une servitude disconti⚫ nue, dénuée de titre. Mais ces décisions sont inapplicables au cas où le demandeur en complainte possédait la servitude en vertu d'un titre formel, alors la possession ne peut pas être regardée comme précaire; celui qui jouissait de la servitude, la possédait comme un droit réel, il avait la possession voulue par la loi pour la complainte.

Le Code civil ni le Code de procédure n'ont pas abrogé la règle consacrée par l'ordonn. de 1667, tit. 18, art. 1er, qui permettait de prendre la voie de la complainte à celui qui était troublé dans la possession d'un droit réel, au lieu que cette voię

était indistinctement permise, à raison de toutes servitudes, dans les pays de droit écrit, d'après l'observation de Rodier sur l'article cité, et qu'elle n'était praticable, en pays coutumier, que dans le cas où le demandeur en complainte possédait la servitude en vertu d'un titre.-Les règles tracées dans le nouveau Code autorisent à intenter la complainte pour toutes les servitudes continues et apparentes. Elles admettent la même voie pour les servitudes discontinues, possédées en vertu d'un titre, à l'exemple de ce qui se pratiquait en pays coutumier, pour toutes les servitudes en général, à l'égard desquelles la complainte était admise lorsque le demandeur joignait un titre à sa possession, comme on l'a déjà établi.

Il n'y a pas de même de prétexte pour refuser en ce cas l'action possessoire, parce que la loi se contente d'une possession paisible, à titre non précaire.-L'on doit ajouter, pour les pays où la possession tenait lieu de titre, qu'il y a un nouveau motif d'admettre la complainte en faveur de ceux dont la possession remontait à un temps immémorial, et s'est continuée jusqu'au moment du trouble qui a donné lieu à la réclamation. Le possesseur de la servitude a alors en sa faveur la dernière disposition de l'art. 691 du Code, qui défend d'attaquer aujourd'hui la servitude de cette nature, déjà acquise par la possession, dans les pays où elle pouvait s'acquérir de cette manière. L'on doit lui appliquer encore l'art. 2281 du Code, portant que « les prescriptions commencées seront réglées conformément aux lois anciennes. >>

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L'on doit aussi tenir, en matière de servitude discontinue, d'après l'art. 2281, que si la possession a commencé avant le Code, et s'il s'était écoulé un temps suffisant pour prescrire, l'action même possessoire doit être jugée conformément aux anciennes lois. Il y avait donc lieu, dans l'espèce, d'admettre l'exposant à exercer l'action possessoire, soit à cause du titre qui donnait à sa possession un caractère non précaire, soit à cause de son ancienne possession qui devait être réglée conformément aux anciennes lois. On objecte vainement que le juge de paix est contrevenu à l'art. 23 du Code de procédure. Il est évident, au contraire, qu'il s'y est parfaitement conformé, puisque M. Pelleport avait en sa faveur une possession de plus d'un an à titre non pré-❘ caire, dont cet article se contente pour l'action possessoire. Ce juge n'a non plus commis aucune contravention aux art. 688 et 689 du Code civil, qui définissent les servitudes continues et discontinues avec les servitudes apparentes et non apparentes.-L'article 691 n'a reçu non plus aucune atteinte: cet article se réduit à dire que les servitudes continues non apparentes, et les servitudes discontinues apparentes ou non apparentes, ne peuvent s'établir que par titre, ou que la possession ne suffit pas pour les établir.-Il résulte bien de cet article que la possession dénuée de titre ne suffit pas; il en résulte que la possession sans titre est purement précaire, et que s'il est question d'une possession nouvelle, elle ne peut donner lieu à complainte, parce qu'elle est considérée comme précaire.-Mais l'article déclarant seulement que la possession ne suffit pas, on ne saurait en conclure que la possession jointe au titre est insuffisante.-Cette conséquence serait aussi contraire à la lettre qu'à l'esprit de l'article qui, en déclarant que la possession ne suffit pas, suppose qu'elle doit être considérée lorsqu'elle est jointe au titre, comme la jurisprudence l'avait établi à l'égard des servitudes en général dans le pays où on suivait la règle, nulle servitude

sans titre.

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- L'article 2232 qu'on invoque, et qu'on présente comme violé, ne peut pas être d'une plus grande utilité aux adversaires. - II déclare seulement que les actes de simple tolérance ne peuvent fonder ni possession ni prescription. Or, on ne saurait regarder les actes possessoires du chemin réclamé par l'exposant, comme étant de simple tolérance, puisque ces actes se réfèrent à un titre formel du 17juill.1774, qui lui donnait le droit d'y passer à titre de servitude, et qu'ils se rattachent à une possession immémoriale, formant en faveur de l'exposant un nouveau titre. Il est manifeste que M. Pelleport n'a exercé le droit de passage qu'a titre de servitude, et que sa possession ne peut être considérée, ni comme précaire, ni comme de simple tolérance, mais au contraire comme ayant tous les caractères requis pour donner lieu à la complainte, puisqu'il jouissait en vertu d'un titre légitime. On répète inutilement dans le mémoire des adversaires, que la complainte ne peut avoir lieu à raison d'une servitude discontinue. - Cette assertion n'est exacte qu'à l'égard des servitudes discontinues dénuées de titres, et pour lesquelles la possession est censée précaire. Elle n'a aucune exactitude à l'égard des servitudes même discontinues, dont la possession est justifiée par un titre qui lui donne un caractère non précaire, comme le prouvent les autorités citées. L'on a déjà remarqué que les arrêts de la Cour ne sont aucunement contraires aux observations qui viennent d'être faites, puisque ces arrêts ont seulement déclaré que la voie de la complainte n'était pas praticable à l'égard des servitudes discontinues dénuées de titres. On suppose gratuitement qu'il ne doit pas y avoir de différence entre le cas où le demandeur est sans titre, et celui où sa possession est justifiée par un titre. - La différence est au contraire énorme, puisque la possession sans titre est censée précaire, et dès lors inutile pour la complainte; au lieu que lorsqu'elle est jointe au titre, elle n'a plus rien de précaire, et elle justifie par conséquent la complainte pour laquelle l'art. 23 du Code de proc. se contente d'une possession paisible à titre non précaire. Le titre ne constitue pas seulement le droit, comme les adversaires l'allèguent, il justifie encore la possession, à laquelle il imprime un caractère non précaire. C'est le motif pour lequel on a toujours exigé, en pays coutumier, la réunion du titre à la possession, afin de justifier la complainte en matière de servitude, comme il résulte des observations de Brodeau, Ferrières, Potier et autres. - C'est une erreur de penser que dans l'action possessoire l'on ne doive jamais avoir égard au titre. La doctrine des auteurs déjà cités démontre le contraire. Cette doctrine est aussi celle de Dunod et celle de Merlin, en ses Questions, au mot Complainte, t. 2, p. 455, qui professent qu'on peut produire son titre et alléguer les raison du pétitoire pour fortifier le possessoire.

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L'on oppose en vain que l'action possessoire se compose de deux seuls élémens, savoir, le trouble et la possession annale; l'on devait ajouter qu'il faut vérifier si cette possession est ou n'est pas précaire, parce que l'article 23 du Code de procédure le prescrit formellement. Or, le titre auquel la possession se réfère, est la meilleure preuve que l'on puisse fournir pour établir qu'elle n'est pas précaire; bien loin que l'examen du titre soit interdit dans l'action possessoire, il est donc de la plus grande importance. -On ne cumule pas ainsi le pétitoire avec le possessoire, parce qu'on n'examine le titre que

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