Que ce divin objet vint pour la fecourir; Il crût que ce n'étoit que pour le voir mourir; Et dans ce fentiment, prêt à lui fatisfaire, Il penfa qu'il pouvoit, fans craindre fa colere, Ni fortir du refpect, lui tenir ces propos Souvent entrecoupés de pleurs et de fanglots.
Je meurs, vous les voïez; et quelque violence Qui m'oblige fans ceffe à rompre le filence, Si devant vos beaux yeux je ne perdois le jour, Jamais vous n'auriez fçeu l'excez de mon amour, Ce n'eft point par des cris, ce n'eft point par de plaintes,
Que mon mal vous fait voir fes fenfibles atteintes, Je l'ai fi bien caché, que malgré fon effort, Il ne f'eft découvert qu'en me donnant la mort: Et quand vous daignerez, Belle pour qui j'expire, Comparer mon audace avecque mon martyre, S'il m'ofa, direz-vous, déclarer fon tourment, Son audace du moins n'a duré qu'un moment, Et fa flame.... mais las! vous ignorez encore, Depuis combien de tems fon ardeur me devore, Si ce n'eft que vos yeux connoiffant leur pouvoir Sachent qu'il faut aimer quand on ofe les voir. Ces beaux yeux font fi clairs, et fi remplis de fla-
Qu'ils peuvent aisément pénétrer dans les ames. Mais f'ils ont daigné voir, ces ajmables vainqueurs, Que j'aimois mieux montrer au milieu des lan- gueurs,
Au milieu des tourmens, des fupplices, des gênes, L'excez de mon respect que celui de mes peines; S'ils m'ont, vû, fans efpoir d'aucune guérifon, Idolâtrer mes fers, et chérir ma prifon, Ils peuvent voir encor mon ame confumée Conferver les ardeurs dont ils l'ont enflamée, Mais telles, que fentant qu'elles me font mourir, Je l'aime encore mieux que de les amoindrir.
Croïant à ce difcours, fa bouche criminelle, I alloit fe jetter aux pieds de cette Belle,
Segrais. Mais n'embraffant que l'air au lieu de fes genoux, O mes douleurs! dit-il, où me reduifez-vous? Ces mots furent fuivis d'une mortelle tranfe Qui priva fes efprits de toute connoiffance, Il demeura fans voix, fans poux, fans mouvement Et n'eut point vû finir ce long faififfement, Si de fon cruel fort l'impitoïable haine, Qui prolonge fes ans pour prolonger fa peine Ne l'eût fait vivre encor par un cruel fecours, Si c'eft vivre pourtant que mourir tous les jours.
GAMACHES, cher Marquis, dont l'ame noble et belle
M'a toûjours honoré d'une amitié fidelle; S'il eft vrai que le ciel t'ait fait affez heureux, Pour n'être point fenfible aux tourmens amoureux, Donne quelques foûpirs aux cruelles atteintes Que dans ces triftes Vers ma Mufe t'a dépeintes: Et fi ton coeur f'émeut aux maux de mon Berger, Que ce foient les derniers qui puiffent t'affliger!
(Antoinette Deshoulieres, geborne du Ligierdi la Garde, lebte zu Paris von 1634 bis 1694, und befaß viel Talent zu leichten gefälligen Gedichten; aber sehr wenig für größere Dichtungsarten, am wenigsten für die dramatische. Ihre Idyllen haben eine vorzügliche Anmuth der Ideen und des Ausdrucks, und dabei alle erfoderliche Simplicitåt. Ihr berühmteftes Schäfergedicht hat die Aufschrift, les Moutons. Schade nur, daß ihr davon fast nichts weiter gehört, als die Umånderung des Versbaues; denn das Stück selbst findet sich in den früher gedruckten Promenades der poetischen Samms lung eines damals schon fast vergessenen åltern Dichters, Coutel, beinahe wörtlich. Man sehe hier gleich die drei ers Ben Stanzen:
Hélas! petits mutons, que vous êtes heureux!
Vous paissez dans nos champs fans fouci, fans alarmes;
Sitôt qu'êtes aimés, vous êtes amoureux;
Vous ne favez que c'eft de repandre des larmes.
Vous ne formez jamais d'inutiles defirs;
Vous fuivez doucement les loix de la Nature; Vous avez, fans douleur, tous fes plus grands plaifirs, Exempts des paffions qui caufent la torture, Nous fommes malheureux les ayant parmi nous; Car quoique nous ayons la raifon en partage, Cette même raifon que vous n'avez point chez vous, Nous réduit bien fouvent dans un dur éfclavage.
Ich habe daher noch ein zweites, ihr vermuthlich mehr eig nes, Idyll beigefügt.)
Hélas! petits moutons, que vous êtes heureux! Vous paiffez dans nos champs fans fouci, fans allar-
Auffi-tôt aimés qu'amoureux,
Deshoulie On ne vous force point à repandre des larmes;
Vous ne formez jamais d'inutiles defirs;
Dans vos tranquilles coeurs l'amour fuit la nature; Sans reffentir les maux, vous avez fes plaifirs. L'ambition, l'honneur, l'intérêt, l'imposture Qui font tant de maux parmi nous,
Ne fe rencontrent point chez vous. Cependant nous avons la raison pour partage; Et vous en ignorez l'usage.
Innocens animaux, n'en foyez point jaloux; Ce n'eft pas un grand avantage.
Cette fiere raison, dont on fait tant de bruit, Contre les paffions n'eft pas un fur remede! Un peu de vin la trouble; un enfant la féduit; Et déchirer un coeur qui l'appelle à fon aide, Eft tout leffet qu'elle produit.
Toujours impuiffante et févere,
Elle f'oppose à tout, et ne furmonte rien. Sous la garde de votre chien, Vous devez beaucoup moins redouter la colere Des loups cruels et raviffans,
Que fous l'autorité d'une telle chimére
Nous ne devons craindre nos fens.
Ne vaudroit-il pas mieux vivre comme vous faites, Dans une douce oifiveté?
Ne vaudroit-il pas mieux être comme voùs étes, Dans une heureufe obfcurité Que d'avoir fans tranquillité
Des richeffes, de la naiffance, De l'efprit et de la beauté?
Ces prétendus-trefors dont on fait vanité, Valent moins que votre indolence.
Ils nous livrent fans ceffe à des foins criminels:
Par eux plus d'un remords nous roħge. Nous voulons les rendre éternels,
Sans fonger qu'eux et nous pafferons comme un
Il n'eft dans ce vafte univers Rien d'affluré, rien de folide.
Des chofes ici-bas la Fortune décide Selon fes caprices divers:
Tout l'effort de notre prudence
Ne peut nous dérober au moindre de fes coups. Paiffez, moutons, paiffez, fans regle et fans fcience, Malgré la trompeuse apparence
Vous êtes plus heureux et plus fages que nous.
Ruiffeau, nous paraiffons avoir le même fort: D'un cours précipité nous allons l'un et l'autre, Vous à la mer, nous à la mort.
Mais hélas! que d'ailleurs je vois peu de rapport Entre votre courfe et la nôtre !
Vous vous abandonnez fans remords, fans terreur A votre pente naturelle;
Point de loi parmi vous ne la rend criminelle; La vieilleЛle chez vous n'a rien qui faffe horreur. Près de la fin de votre course, Vous êtes plus fort et plus beau, Que vous n'étes à votre fource.
Vous rétrouvez toujours quelque agrément nou
Si de ces paifibles bocages
La fraicheur de vos eaux augmente les appas, Votre bienfait ne fe perd pas:
Par de délicieux ombrages Ils embelliffent vos rivages.
Sur un fable brillant, entre des prés fleuris
Coule votre onde toujours pure;
Mille et mille poiffons, dans votre fein nourris,
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