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avons de l'antiquité, et principalement de l'histoire romaine qu'il avait approfondie, surtout au moyen de ses lois. Il est curieux de voir la révolution qu'il opère dans toute la suite de l'histoire ancienne. Tout est changé, transporté, interprété, renversé.

>> Ce n'est pas tout. Ayant désigné le commencement du monde moral, qui, comme le physique, a aussi son chaos, Vico en désigne même la fin; et, ce qui est plus singulier encore, il reconnaît dans sa fin la raison de son commencement. C'est ainsi que le monde civil, comme le phénix', renaît de sa destruction, se recompose par sa dissolution elle-même, et recommence sa marche ordinaire.

» Sous ce rapport, Vico poursuit et décrit le retour des choses humaines, ou des mêmes phénomènes politiques depuis la renaissance des nations. Il compare les barbares des premiers temps avec ceux du moyen âge; il reconnaît chez ceuxci les mêmes caractères, les mêmes traces, la même conduite, enfin la même histoire des dieux, des héros, des hommes. S'il y a quelque exception, il cherche à la motiver; de sorte que tout semble aller d'accord avec son système.

» Telle est à peu près, si je ne me trompe, l'idée ou l'histoire que Vico avait conçue de l'humanité ou du monde civil; il l'avait appelée éternelle, parce qu'elle résultait des lois propres à la nature humaine, qu'aucune force étrangère ne peut détruire. Il la nommait idéale, parce qu'analysant la nature sociale de l'homme telle qu'on la suppose, il la concevait telle qu'elle doit être.

» Qu'on ne croie pas cependant que sa conception soit l'ouvrage d'une synthèse chimérique ou d'une imagination rêveuse: l'idée qu'il a donnée lui-même de ses principes et de sa méthode prouve que tout ce qu'il expose par synthèse, il l'avait d'abord déduit par l'analyse la plus étendue.

« Ce que j'indique est incontestable, si l'on compare la

première édition de la Scienza nuova, faite en 1725, avec les suivantes de 1730 et de 1744. Au reste, Vico appuie toujours ses théories par les phénomènes les plus constants et les plus connus de la nature humaine, qu'il fait ressortir de la combinaison successive des circonstances physiques et des besoins correspondants qu'elles excitent. » (Note du traducteur.)

(Note M, page 128.)

De tous les auteurs écossais qui ont consacré leur attention aux études métaphysiques avant l'union des deux royaumes d'Angleterre et d'Écosse, je n'en connais aucun aussi éminent que George Dalgarno d'Aberdeen, auteur de deux ouvrages aussi distingués par l'originalité du génie que par lajustesse des aperçus philosophiques. L'un, publié à Londres en 1660, est intitulé: Ars signorum, vulgò, character universalis et lingua philosophica, quá poterunt homines diversissimorum idiomatum, spatio duarum septimanarum, omnia animi sui sensa (in rebus familiaribus) non minùs intelligibiliter, sive scribendo, sive loquendo, mutuò communicare, quàm linguis propriis vernaculis'; prætereà hinc etiam poterunt juvenes, philosophiæ principia, et veram logicæ praxin, citiùs et faciliùs multò imbibere, quàm ex vulgaribus philosophorum scriptis.

Le second ouvrage de Dalgarno est intitulé: Didascalocophus, ou le Guide du sourd et muet. Il a été imprimé à Oxford en 1688. J'ai dit quelque chose du premier dans les notes annexées au premier volume de ma Philosophie de l'esprit humain; et du dernier dans un Mémoire publié dans le septième volume des Transactions de la Société royale d'Édimbourg. Comme les deux ouvrages de Dalgarno sont devenus extrêmement rares, et qu'ils ne formeraient ensemble qu'un très-petit in-octavo, il me semble qu'un libraire trouverait son avantage

à les publier. Il serait bien malheureux pour Dalgarno qu'après avoir été injustement négligé par ses contemporains, on laissât dans un oubli total les preuves qu'il a données de ses talents philosophiques.

La Physiologia nova experiméntalis de lord Stair, publiée à Leyde en 1686, mérite aussi d'être mentionnée dans une Histoire littéraire d'Écosse. Si on n'y trouve que bien peu de traces des talents éminents qui distinguaient l'auteur comme jurisconsulte et homme d'état, on y découvre au moins une connaissance très étendue des diverses doctrines métaphysiques et physiques alors en vogue, et surtout de celles de Gassendi, de Descartes et de Malebranche. Il y présente quelques remarques ingénieuses et importantes sur les erreurs de ces trois philosophes, et rend en même temps justice à leur mérite. Partout lord Stair manifeste une indépendance d'opinion et une liberté d'examen fort rare parmi les philosophes du dix-septième siècle. L'ouvrage est dédié à la Société royale de Londres, et l'auteur paraît avoir parfaitement compris l'utilité de cette institution pour avancer les connaissances fondées sur l'expérience.

Les bornes d'une note ne me permettent pas d'entrer dans plus de détails sur l'état de la philosophie en Écosse pendant l'intervalle qui s'est écoulé entre l'union des couronnes et celle des royaumes. L'état des affaires publiques n'était certainement pas favorable à l'état de la science. Mais il existe des preuves suffisantes pour montrer que le goût philosophique qui a distingué les Écossais d'une manière si remarquable pendant le dixhuitième siècle, était en quelque sorte un héritage qu'ils avaient reçu de leurs prédécesseurs immédiats.

Leibnitz, à ce qu'il me semble, parle quelque part du nombre de savants écossais qui l'ont visité dans le cours de leurs voyages. Il a adressé à l'un d'eux (M. Burnet de Kemney) une lettre très-intéressante, datée de 1697, sur l'état général des

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sciences en Europe. Il lui ouvre son âme sur tous les sujets avec une franchise et une confiance qui font le plus grand honneur aux connaissances et au caractère de son correspondant. Le docteur Arbuthnot, qui naquit vers le temps de la restauration, peut être cité comme une preuve éclatante de l'éducation tout-à-fait libérale que l'on recevait alors dans quelques universités écossaises.

La part considérable qu'on lui attribue dans les Mémoires de Martin Scribler est un témoignage suffisant de la variété de son instruction, et de la justesse de ses aperçus sur la philosophie scolastique. Dans un ou deux passages, où il jette un coup-d'œil sur les erreurs de ses contemporains, un lecteur attentif et intelligent découvrira, au milieu de ses plaisanteries, une profondeur et une solidité de métaphysique qui semblent appartenir à une époque plus rapprochée de nous. N'y a-t-il donc plus d'Arbuthnot aujourd'hui pour châtier la folie de nos craniologistes?

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NOTE ADDITIONNELLE.

Au moment où cette dissertation allait être imprimée, on venait de publier les OEuvres posthumes du savant, ingénieux et aimable docteur Thomas Brown, mon ami. Les découvertes que la philosophie de l'esprit humain doit à ses talents et à ses travaux appartiennent exclusivement à l'histoire littéraire du 19° siècle; et je ne doute pas que quelques uns de ses nombreux élèves ne leur rendent la justice qui leur est due. Si sa mort récente, qui a causé tant de regrets, ne m'eût imposé silence sur toutes les questions de controverse existantes entre nous, j'aurais été tenté de présenter ici quelques éclaircissements additionnels, relatifs à certains points sur lesquels nous différions d'opinion, et plus particulièrement en ce qui concerne le mérite philosophique de lord Bacon et du docteur Reid.

Ma santé, pendant l'hiver, a été d'ailleurs dans un tel état d'affaiblissement, que j'ai trouvé dans la correction des épreuves un travail plus que suffisant pour m'occuper l'esprit et le corps. J'ai même été forcé de me refuser le plaisir de lire les Leçons du docteur Brown, jusqu'après la publication de mon ouvrage.

FIN DES NOTES

DU TROISIÈME ET DERNIER VOLUME,

« EdellinenJatka »