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«Et n'est-ce pas un véritable leurre que d'annoncer au public l'avènement d'un établissement avec une dotation considérable, alors que, moyennant le sacrifice d'un cinquième, il est facultatif à chacun de s'en dégager?

«Et comment dirions-nous mieux que l'honorable M. Pirmez, dans sa vigoureuse riposte à M. Reynaert, du 2 février 1870: « Ainsi, l'honorable M. Reynaert, pour être « sévère, dit aux gens: Vous vous êtes en«gagés à payer 1,000 francs et vous pensez « que cela ne signifie rien? Détrompez-vous. «L'engagement que vous avez pris est sé«rieux, car vous êtes tenus de verser... «333 fr. 33 c. (D'après la loi de 1873, moins encore, 200 francs seulement.)

«Est-ce sérieux ?

<< Savez-vous ce qu'on fera avec ce sys<< tème? On annoncera, par exemple, qu'une « société est fondée au capital de deux mil«lions de francs, mais que les actionnaires << ne doivent verser que 500 francs par action « de 1,000 francs, et que, ce versement fait, «<les actions seront au porteur. »

«< Or, la vérité, dans ce cas, c'est que la << société ne sera constituée en réalité qu'au «< capital d'un million de francs, et cela par <«<le motif qu'il n'y a aucun moyen de faire << entrer le second million.

<< Inscrire pareille chose dans les actes de « société, ce serait induire le public en <«<erreur. On ne peut indiquer comme gage << répondant des obligations de la société, « que ce que l'on est en droit d'exiger de << personnes certaines. » (GUILLERY, p. 247.)

«Or, qu'y a-t-il de plus incertain que l'inconnu? Induire le public en erreur, c'est ne pas apporter à la transaction la bonne loi qui en doit être l'âme ; c'est se rendre coupable d'un véritable quasi-délit.

« Quoi d'étonnant, en conséquence, que, pour mieux assurer l'exécution loyale et fidèle de sa promesse, la loi retienne son auteur, au moins à titre de répondant, de son fait, de sa faute, dans une certaine limite de temps. Elle le veut si bien, qu'elle fait de cette obligation une mesure d'ordre public, nonobstant toute stipulation contraire.

<< Tel est l'effet juridique attaché par elle à la cession de toute action non libérée; tempérant du côté de la responsabilité ce qu'elle ne veut pas retrancher à la liberté humaine.

«Serait-il vrai qu'une résolution aussi sage, justifiée par les considérations les plus impérieuses de morale et de philosophie, confirmée par une expérience aussi ancienne que l'institution même de cette forme de société, serait venue à échouer sur quelque obstacle invincible, sur un écueil que, mal

gré nos efforts, nous ne parvenons pas à dé-couvrir? C'est assez qu'on l'affirme, pour que nous nous fassions un devoir de le vérifier avec vous, et de discerner cette raison supérieure.

«On a cru la trouver dans une double modification apportée au texte de l'article 42. La première, en réalité, de bien peu d'importance et qui a substitué aux mots des actions par eux souscrites ceux-ci : de leurs actions, empruntés aux lois françaises de 1856 et 1863, dans lesquelles ils n'ont pas un sens différent de celui que leur attribue le pourvoi; étendant ainsi la disposition à tous les cessionnaires successifs, garants à leur tour, au même titre que le souscripteur, comme au cas de la lettre de change et sauf recours les uns contre les autres solidairement en remontant jusqu'au premier. C'est pourquoi les actions restent nominatives jusqu'à libération complète (art. 40). Ce n'est pas l'action qui est débitrice, c'est celui qui l'a souscrite. (GUILLERY, p. 438, no 523, 20 novembre 1872.)

« La seconde modification de texte a seule quelque portée; elle consiste dans l'addition de la partie finale du premier alinéa de l'article 42, à savoir: « la cession « des actions ne peut les affranchir de con<< tribuer aux dettes antérieures à sa publi<< cation »>.

« Cet amendement, dit l'arrêt attaqué, dont la portée a été définie par M. Pirmez, dans son second rapport du 13 novembre 1872, no 159 (GUILLERY, p. 187), n'est rien moins que l'introduction d'un système nouveau, incompatible avec les premières résolutions de la chambre. Il a pour conséquence nécessaire de faire disparaître la responsabilité du souscripteur, à raison des versements ultérieurs, vis-à-vis de ses associés et, en ce qui concerne les tiers, de la limiter aux dettes antérieures à la publication de la cession de ses actions.

« A notre sens, l'amendement n'étend pas ses conséquences jusque-là; il respecte l'article 42 dans son principe, tel qu'il fut proposé par le gouvernement et sanctionné une première fois par la chambre; il le maintient, sans qu'aucune déclaration, ni de la commis sion, ni de la Chambre elle-même en ait contesté l'utilité. Or, c'eût été, de la part de cette assemblée, une inconséquence peu pardonnable, que de laisser subsister dans la loi l'expression d'une pensée qu'elle entendait répudier. Sans doute, il était en son pouvoir de revenir d'une première impression et d'embrasser une opinion toute différente de celle qu'une première fois elle avait adoptée.

«Mais, pour justifier d'un bouleversement aussi inattendu et de l'adoption d'une théorie

précédemment flétrie, aussi bien au nom du droit que de la morale, nous ne saurions nous contenter de déclarations fugitives et équivoques; nous avons le droit d'exiger quelque chose de plus, l'apport d'une preuve indéfectible d'un retour d'opinion, éclairé par la discussion et ratifié, en connaissance de cause, par une volonté incontestée.

« Ces conversions d'idées et de systèmes sur des principes essentiels ne doivent jamais se présumer légèrement; il y a toujours de justes motifs de supposer que des hommes judicieux et réfléchis demeurent conséquents avec eux-mêmes et n'abandonnent pas, sans de graves motifs, un sentiment mûrement délibéré.

« Ces réserves faites, reprenons l'examen du second rapport de l'honorable M. Pirmez (13 novembre 1872, GUILLERY, p. 187, no159), et signalons tout d'abord ces deux déclarations caractéristiques qui en déterminent si bien la portée :

a1° L'intérêt des tiers est le seul qui nous preoccupe dans l'examen de cette question;

Ne pas déroger aux principes que la chambre a admis. Et lors même que l'honorable rapporteur de la commission en eût pensé autrement, ces affirmations si positives n'étaient-elles pas de nature à agir profondément sur l'esprit de la Chambre et à l'entretenir dans la confiance que la responsabilité du souscripteur demeurait engagée?

Or, la Chambre, en séance du 7 avril 1870, avait adopté la rédaction suivante :

Art. 40. (42 de la loi). Les souscripteurs sont, nonobstant toute stipulation contraire, « responsables du montant total des actions * par eux souscrites.

«L'ancien propriétaire aura un recours solidaire contre celui auquel il a cédé son titre et contre les cessionnaires ultérieurs. >> (GUILLERY, p. 407 et suiv.)

« Cet article fut représenté, sans modification, à la Chambre, le 22 novembre 1870, par M. Cornesse, ministre de la justice. (GUILLERY, p. 55, art. 134.)

• En cet état, qu'a proposé la commission? Maintenir la disposition telle qu'elle avait été admise au premier vote, c'était incontestablement étendre la responsabilité des souscripteurs, envers les tiers, à toutes les dettes sans distinction, y compris celles contractées postérieurement à leur retraite de la société; disposition difficile à justifier, attendu que ces créanciers-là n'ont pu mesurer leur crédit à la solvabilité d'anciens membres devenus étrangers à la société; cependant, leur responsabilité, inscrite dans l'article 42, les retenait encore. C'est alors, en constatant ce point, que la commission, jetant les yeux sur le statut anglais, y a trouvé, dans la publica

tion annuelle de la liste des actionnaires, un remède assuré et comme un frein à ce que cette responsabilité présentait d'excessif.

Invoquer cette publication, c'était, à n'en pas douter, témoigner une fois de plus que la situation des tiers restait seule à régler, dans ses rapports avec la responsabilité des souscripteurs. Quant aux associés, la publication n'a rien à leur apprendre et ils n'eurent pas à attendre la distribution du Moniteur jusqu'en avril 1881, pour apprendre que, depuis dix-huit mois, de Markas avait cessé de faire partie de la société.

« C'est alors que revint à la pensée de la commission cette distinction si rationnelle entre les créanciers, suivant qu'ils sont antérieurs ou postérieurs à la publication de la retraite de l'actionnaire, déjà consacrée par elle dans l'article 24, relativement à la cession des parts dans une commandite; laquelle ne peut avoir d'effet, quant aux engagements de la société antérieurs à sa publication. (Second rapport du 13 novembre 1872, GUILLERY, p. 186, no 157, et p. 432, no 514.)

« Ce qui autorisait M. Pirmez à dire (sècond rapport, GUILLERY, p. 187, no 159) : « Ce système consiste à réaliser, en matière « de société par actions, le droit commun des << autres sociétés, en simplifiant seulement la << publication des mutations d'actions.

« En quoi consiste le droit commun? « Un associé dans une société de commerce << ne peut se retirer de la société au préjudice « des tiers qui ont traité avec la société; mais « les tiers n'ont aucun droit de l'empêcher de << mettre fin pour l'avenir à ses engagements, «<et en publiant, conformément à la loi, qu'il « se retire, l'associé est dégagé des obliga<«<tions que la société contracte postérieure<<ment à la publication de sa retraite... >>

«... Ce principe est admis pour les com<«< manditaires; pourquoi ne serait-il pas ad« mis pour les simples actionnaires?

«... Appliquons aux actionnaires ... ces << principes généraux; quelle en sera la con« séquence?

« C'est que l'actionnaire, autorisé par le <«< contrat constitutif à céder son droit (1), << pourra le faire en demeurant engagé pour « le passé, en cessant de l'être pour l'avenir, <«<et en atteignant une libération complète « après cinq ans, s'il n'est pas inquiété au<< paravant. » (GUILLERY, p. 187.)

«La commission n'était-elle pas bien fondée à dire que l'intérêt des tiers était, en ce moment, sa seule préoccupation? Songeaitelle à dégager la responsabilité du cédant

(1) L'actionnaire n'a pas besoin d'autorisation; la faculté de céder ses actions est de droit commun.

vis-à-vis de la société? Eh! comment s'y serait-elle autorisée, en présence du principe consacré par l'alinéa premier du même article (42)?

« Telle est donc la différence essentielle entre la commandite simple et la commandite par actions ou la société anonyme, c'est que, dans la première, il est facultatif au commanditaire de se retirer, si son contrat l'y autorise, tandis que pour les deux autres formes de société, encore après la publication de sa retraite, il demeure responsable de son cessionnaire, nonobstant toute stipulation contraire.

« C'est à cette rédaction et avec le sens y attaché que l'honorable M. De Lantsheere, ministre de la justice, a déclaré se rallier. (20 novembre 1872, GUILLERY, p. 438, no 523.) Moyen très simple, en effet, de sortir de cette difficulté, sans déroger aux principes admis par la Chambre.

« Ainsi s'explique, sans effort, l'absence de toute contradiction au sein de l'assemblée, lors de la discussion publique, et l'adoption du projet en son entier, par un vote unanime (8 mai 1875, GUILLERY, p. 511); toutes les objections se trouvant résolues et les principes fondamentaux, admis une première fois, scrupuleusement respectés. La Chambre, aussi bien que sa commission, avait donc les motifs les plus sérieux de maintenir intact le dogme de cette responsabilité qui demeure le fondement du régime légal des sociétés anonymes.

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« Encore n'était-ce là qu'une première épreuve; le projet en eut bientôt une autre à subir, non moins solennelle ni décisive, et qui ne peut manquer de nous révéler le véritable sens du vote de la Chambre. Ici c'est bien la législature elle-même qui, dans l'accomplissement de sa haute mission, interprète son œuvre et manifeste sa volonte.

« Quand nous n'aurions que le rapport de l'honorable M. Solvyns, au nom des commissions réunies des finances et de la justice, est-il un seul instant douteux que la seule interprétation possible de la loi est celle que vous lui avez donnée en 1887?

<«< Impossibilité de se soustraire aux verse<«<ments encore à effectuer, par suite de l'im« possibilité de convertir les actions nomi

(1) PONT, Des sociétés, no 948. « La responsabilité ainsi étendue des actionnaires n'est pas seulement la garantie des tiers qui traiteront avec la société; elle est celle de la société elle-même ou des associés, qui, à ce point de vue du payement du montant des actions souscrites, sont assurément de véritables créanciers... Sans doute, le principe qui déclare le

« natives en titres au porteur avant leur « pleine et entière libération.

(( ... Les sociétés doivent être sérieuses; << il est juste que les versements le soient « également.

...

(( 3o Une troisième garantie est imposée « par le projet pour sauvegarder les droits « des coassociés et des tiers. Il se pourrait « que le souscripteur primitif, voulant « échapper à des versements ultérieurs et « sortir de la société, transférât frauduleu«sement ses actions non entièrement libé«rées à des insolvables. Pour éviter cet abus, « le projet dispose que, malgré la cession «et nonobstant toute stipulation contraire, «<les souscripteurs primitifs restent respon«sables du montant total de leurs actions. L'action devant rester nominative

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« jusqu'à complète libération, il est de l'in«térêt des actionnaires et des créanciers de «la suivre dans les cessions successives qui « en sont faites, et en même temps de pou«voir s'assurer de la qualité et de la posi«tion, vis-à-vis de la société, des souscrip«<teurs primitifs et de leurs cessionnaires. >> (GUILLERY, P. 516.)

«Langage entièrement inconciliable avec l'hypothèse d'un dégagement de responsabilité pour le cédant, vis-à-vis de la société (1).

«Tel était donc le sentiment des commissions réunies du sénat, et s'il n'est pas démontré qu'il ait été abandonné au cours de la discussion, il deviendra manifeste pour chacun que le principe de cette responsabilité n'a pas cessé d'être maintenu.

«A entendre le défendeur, il n'en serait pas ainsi, et l'attitude prise au cours des débats, par l'honorable M. De Lantsheere, équivaudrait à un revirement complet.

«Interpellé en séance publique sur le point de savoir si la responsabilité d'un souscripteur est indéfinie, il n'hésite pas à répondre « Elle est parfaitement limitée... >> (7 mars 1873, GUILLERY, p. 555, no 19.)

«La cession d'une action est une retraite « de la société; celui qui cède son action cesse « d'être actionnaire. »>>

« Vérité incontestée, car ne figurant plus au registre de la société, ne participant plus à ses bénéfices, il n'est que juste qu'il soit affranchi de l'obligation de fournir les versements ultérieurs; son cessionnaire occupe sa

souscripteur responsable, nonobstant toute stipulation contraire, protège les tiers, les créanciers sociaux qui ont droit a tout le capital social tel qu'il a été annoncé ou promis... Mais ce n'est pas à dire que le législateur, en l'établissant, n'ait pas eu en vue aussi l'intérêt de la société elle-même. »

place et a succédé à toutes ses obligations; | chir des dettes qui n'ont pris naissance seulement il a à répondre de la solvabilité de qu'après son départ. son substitut.

Achevant ensuite sa réponse, l'honorable ministre rappelle la prescription quinquennale de l'article 127 et finit en disant : L'obligation est donc limitée dans le temps par un terme de cinq ans... >>

N'est-ce pas reconnaître que, jusqu'à l'expiration de ce terme, l'obligation continue de subsister, et, dès lors, ne sommes-nous pas autorisé à dire, l'article 42 à la main : Les souscripteurs d'actions sont, nonobstant toute stipulation contraire, respon«sables du montant total de leurs actions? >>

« C'est le sens attaché à cette disposition par l'auteur du projet de loi (1865) du jour où elle y est entrée, c'est celui qu'elle n'a cessé de revêtir dans tout le cours de cette longue discussion.

a D'après l'arrêt attaqué, l'amendement ajouté à l'article 42 en aurait profondément moditié le sens et restreint la portée, en ce qu'il n'aurait plus pour objet que de déterminer la responsabilité du souscripteur visà-vis des tiers seulement, à l'exclusion de la société. Cependant, nous ne pouvons assez y insister, dans sa première partie, son texte n'a subi aucun changement, il est resté ce qu'il était dans son principe.

« Une situation si étrange, si compromettante pour l'avenir de la société, n'est pas le résultat de quelque stipulation insérée dans les statuts, où chacun aurait pu se renseigoer, mais d'une simple réticence, d'une absence de précaution, du silence même du Contrat ne renfermant pas cette clause, que, nonobstant sa retraite, le cédant resterait responsable des versements ultérieurs.

Pour avoir donné à l'article 42 son sens littéral et naturel, pour n'y avoir pas vu ce que tant d'autres ne sont pas parvenus à y découvrir, la cour de Bruxelles (7 mars 1881), comme la cour de Gand (7 juillet 1888), aussi bien que vous-mêmes (31 mars 1887), les associés abusés auront le regret de voir échouer une entreprise durable et prospère par l'abandon arbitraire d'un des leurs.

« Pour justifier une proposition aussi fàcheuse, une seule objection de quelque portée vient à surgir; encore est-elle tirée, moins du texte de la loi, que des conséquences inhérentes à certaines situations.

Si, dit-on, le cédant est responsable des appels de fonds postérieurs à sa retraite, il arrivera nécessairement que les sommes versées de ce chef dans la caisse sociale iront se confondre dans la masse commune, pour y servir de gage à tous les créanciers sans distinction; or, la cession a pour effet de l'affran

« Ce résultat, dont nous ne nous dissimulons pas les inconvénients, ne saurait être évité; il est dans la force même des choses et la conséquence nécessaire d'un ordre de rapports engendré par la volonté des parties et auquel la loi n'apporte aucun obstacle.

« N'oublions pas que cette addition à l'article 42 de la loi n'a qu'une portée fort limitée, et que sans donner atteinte au principe primordial de la responsabilité du souscripteur, ses auteurs ne se sont proposé que d'atténuer celle-ci et de lui venir en aide, dans un cas où elle ne se trouverait, en aucune manière, engagée. S'il arrivait, en effet, que des créanciers postérieurs à la publication de la retraite intentassent, au nom de la société, l'action subrogatoire autorisée par l'article 1166 du code civil, en payement de versements arriérés, l'amendement ajouté à l'article 42 lui serait d'un précieux secours pour repousser une prétention aussi insolite. Il n'est donc pas exact de prétendre que la publication devient superflue dès là que la responsabilité du souscripteur demeure engagée vis-à-vis de la société. Remarquez qu'elle n'est entrée dans la loi qu'avec l'amendement tendant à maintenir cette même responsabilité envers les créanciers sociaux. Ce n'est que pour eux et dans leur seul intérêt qu'elle est instituée. Mais cette exception est personnelle du souscripteur à cette classe de créanciers; elle cesse d'être recevable au regard de la société agissant à toutes fins, pour la réalisation du but qu'elle s'est assigné; et la circonstance qu'une quote-part de cet appel de fonds, quelle qu'elle fût, pût être affectée à l'extinction de dettes récentes, ne saurait justifier le refus de contribuer au développement de l'entreprise, dans les limites de l'obligation contractée.

« Ce n'est là, après tout, qu'une conséquence possible, éventuelle de l'application de la loi, dans un cas déterminé, et qui n'infirme, en aucune manière, le principe de responsabilité qui en forme la sanction et le fondement. « Nous concluons à la cassation. >>

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un arrêt qui est attaqué par les mêmes moyens que ceux du premier pourvoi;

Que, dès lors, la cour de cassation est appelée à connaître, chambres réunies, du second pourvoi, conformément à l'article 1er de la loi du 7 juillet 1865;

Au fond :

Sur le premier moyen, violation des articles 41 et 42 de la loi du 18 mai 1873, et, en tant que de besoin, violation des articles 1154, 1833, 1845 et 2092 du code civil, en ce que l'arrêt attaqué décide que les souscripteurs d'actions qui ont cédé leurs actions n'encourent plus aucune responsabilité dès que la liste des actionnaires qui n'ont pas encore libéré leurs titres, a été publiée;

Attendu qu'il est constaté par le jugement du tribunal de commerce de Bruxelles, du 26 mai 1884, et par l'arrêt dénoncé que le transfert des actions du défendeur a été opéré sur les registres sociaux en 1879, tandis que les versements litigieux ne sont devenus exigibles qu'en 1880;

Qu'en outre, il n'est pas contesté que l'avoir de la Banque Européenne excédait notablement le montant de ses dettes le 21 avril 1881, date de la publication de la cession d'actions consentie par le défendeur;

Attendu que la société demanderesse, agissant, dès lors, dans son intérêt exclusif, soutient qu'en vertu de l'article 42 de la loi du 18 mai 1875, aucune clause des statuts n'a pu affranchir le défendeur vis-à-vis d'elle de l'obligation de verser intégralement le montant des actions par lui souscrites, ni l'autoriser à se substituer un cessionnaire;

Attendu que la portée de l'article 42 précité ressort tant des travaux législatifs que de son texte même;

Que la Chambre des représentants avait, dans la session de 1869-1870, adopté une disposition suivant laquelle les souscripteurs d'actions dans les sociétés anonymes étaient, nonobstant toute stipulation contraire, responsables du montant des actions par eux souscrites >>;

Qu'une pareille disposition semblait nécessaire pour mettre à l'abri des cessions frauduleuses les tiers envers lesquels la société avait contracté des engagements;

Que ce système, contraire au droit commun (1), et qui offrait de nombreux inconvé

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nients, fut abandonné lorsque le projet de loi, dans la session de 1872-1873, fut de nouveau soumis aux chambres;

Qu'on autorisa d'abord expressément, par l'article 24, pour les sociétés en commandite simple, la cession de parts ou d'intérêts, sous la condition seulement qu'elle ne peut avoir d'effet quant aux engagements de la société antérieurs à sa publication;

Qu'on reconnut ensuite qu'il était également possible, pour les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions, de concilier le principe de la liberté des conventions avec la protection due aux intérêts des tiers; qu'il suffisait, tout en permettant les transferts d'actions nominatives libérées d'un cinquième, de maintenir la responsabilité des cédants quant aux dettes sociales existantes au moment où le transfert est publié;

Que c'est dans cet esprit que fut votée la disposition de l'article 42, dont la rédaction avait été modifiée et complétée à cette fin par la commission de la Chambre des représentants;

Attendu qu'en prenant le texte du dit article dans son ensemble, au lieu d'en isoler une partie, comme le fait la demanderesse, on se convainc que le système du pourvoi n'est point conforme à l'intention du législateur, et conduit à des conséquences illogiques;

Qu'il est, en effet, impossible d'expliquer juridiquement, dans ce système, l'utilité de la réserve faite au profit des créanciers antérieurs à la publication de la cession, ni l'utilité de la publication annuelle de la liste des actionnaires prescrite par l'article 41; cette réserve et cette publication étant absolument superflues si l'on entendait lier le souscripteur d'une manière indissoluble à l'égard de la société, pour le montant intégral de ses actions;

Qu'on ne saurait davantage justifier une règle aux termes de laquelle le souscripteur d'actions, après la cession de ses titres, autorisée par les statuts et dûment publiée, demeurerait responsable des appels des fonds ultérieurs, mais serait, néanmoins, affranchi de l'obligation de contribuer aux dettes futures;

Qu'il ne se conçoit pas que les sommes ainsi acquittées par le souscripteur et qui ne sont, en réalité, que des apports faits au lieu et place des cessionnaires, puissent, contrairement aux principes essentiels du contrat de société, être soustraites aux chances de pertes sociales;

Attendu qu'aucun texte ne fait dépendre de la publication de la liste des actionnaires, prescrite par l'article 41, l'efficacité de la

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