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tions, auquel il cherche vainement à donner une consistance sérieuse. L'équité, ajoutet-il, se trouverait profondément blessée, si on reconnaissait au vendeur le moyen de se rembourser, sous forme de dommages-intérêts, de peries que d'autres créanciers supportent en définitive; ce serait créer un privilège par une voie détournée; c'est pourquoi il repousse l'application des articles 1184 et 1654 du code civil, bien que de droit commun, et espère trouver dans la législation commerciale de justes motifs de dérogation.

<« Nous avons, en conséquence, à recher⚫cher si cette exception est aussi réelle qu'on le prétend, si elle se justifie en droit comme en équité, et si les motifs invoqués à l'appui présentent un degré suffisant de certitude pour repousser la créance du vendeur abusé.

«L'article 1142 gouverne, dans sa généralité, toutes les obligations, quelles qu'elles soient, y compris celles qu'engendre tout contrat de vente; l'acheteur en défaut de prendre livraison chercherait vainement à se soustraire à son empire. Le demandeur se garde bien de le méconnaître; mais il en refuse l'application, au cas où l'acheteur viendrait à être déclaré en faillite; par conséquent, et de son aveu, dans les transactions civiles, l'acheteur en défaut de prendre livraison est tenu à réparation, fût-il même tombé en état de déconfiture; la créance du vendeur n'en subsiste pas moins en principe, elle n'est que susceptible de réduction au prorata commun. Cette conséquence est importante et ses effets ne sauraient être trop médités.

<< Cependant, sur un autre point qui confine de près à celui du litige, relativement à la faculté reconnue au vendeur de se dispenser de la délivrance, par suite de l'insolvabilité de l'acheteur, la loi ne fait aucune distinction entre l'état de faillite et celui de déconfiture qu'elle met sur la même ligne, attendu que, en droit, il n'existe aucune cause de différence (art. 1613).

«Mais, par là même, la question d'équité, qui, dans cette contestation, occupe une si grande place, ne se trouve-t-elle pas immédiatement résolue?

«S'il est juste et convenable de reconnaître, en principe, le droit du vendeur à une indemnité, nonobstant l'état de déconfiture de l'acheteur, comment cette même indemnité pourrait-elle dégénérer en une iniquité au cas de faillite? De quelle influence cette circonstance peut-elle être dans l'établissement du droit du vendeur? Que l'acheteur ait, ou non, fait acte de commerce, la perte en sera-t-elle moins vivement ressentie par la ville de Cologne?

« Ce qui serait inique et condamnable, c'est que, éprouvant un dommage incontesté,

elle n'en pût obtenir aucune réparation, si minime qu'elle fût, à la différence de tous les autres créanciers? Cependant la faillite est un naufrage commun où le sort de tous les créanciers doit être égal.

«Ne perdons pas de vue qu'au moment où cette catastrophe vient à se manifester, le dommage est consommé, la créance existe, et que le jugement déclaratif a virtuellement ordonné à la ville de Cologne, comme à tous les créanciers sans exception, de faire sa déclaration (art. 466). Elle a fait sa production en conséquence, sans rencontrer de la part du curateur de contradiction, ni quant à la réalité, ni quant à l'importance du préjudice; la contestation ne portant que sur son maintien ou son extinction, en présence de l'état de faillite.

«Peu de considérations paraissent devoir suffire à démontrer le peu de fondement de cette prétention et sa contrariété avec la loi. Reconnaître l'existence de la créance dans son principe et, d'autre part, lui faire prendre fin au moment où surgit la faillite, c'est attribuer à cet événement un effet juridique que jamais et nulle part on ne lui a reconnu.

«La faillite ne résout pas les contrats antérieurs, le demandeur en convient, mais il ajoute << sauf les restrictions légales ».

«Dans sa pensée, par conséquent, il existe certains liens de droit que le fait seul de la faillite vient à rompre, ipso facto, par la seule force de la loi.

« Cependant, s'il n'est pas en son pouvoir de donner naissance à aucun rapport de créancier à débiteur, il n'est pas davantage en sa puissance d'en rompre arbitrairement un seul qui aurait été légalement formé. Certes, elle est l'expression de certains rapports qui dérivent de la volonté de l'homme ou de la nature des choses, auxquels elle impose son règlement et dont elle détermine l'étendue, mais ravir à des individus des droits privés ou de patrimoine, ce serait porter atteinte à l'inviolabilité de la propriété.

«Aussi la faillite n'a-t-elle jamais été considérée comme un mode d'extinction des obligations. Quiconque est obligé personnellement est tenu de remplir ses engagements sur tous ses biens; les biens du débiteur sont le gage commun de ses créanciers, etc. Il ne faut pas s'attendre à ce que la loi des faillites, qui n'est, en définitive, qu'une loi de police, aurait, dans quelqu'une de ses dispositions, méconnu des préceptes aussi sages, aussi universellement admis. Une loi qui n'a pour objet que le meilleur règlement des faillites n'a pas à s'occuper du fondement d'une action de pur droit civil, telle qu'en dommagesintérêts. Loin d'exclure aucune espèce de créance, elle s'abstient rigoureusement de

statuer sur le fond d'aucun droit, et déclare expressément les admettre toutes en concours. Or, il importe de le remarquer, le pourvoi ne se contente pas de refuser au vendeur un privilège (que, du reste, la ville de Cologne n'a garde de réclamer), ce qu'il vous demande, c'est de prononcer l'extinction de la créance tout entière, l'anéantissement complet d'un droit quelconque, de telle sorte que, tandis que tous les autres créanciers éprouvent la satisfaction de recevoir au moins le tantième réglementaire, elle, au contraire, a le regret de se voir rigoureusement exclue du partage.

Le seul mot de privilège retentit aux oreilles du demandeur comme un épouvantail, et la crainte de rompre le niveau de l'égalité l'entraîne à une iniquité que, vainement, il cherche à dissimuler.

« On ne justifierait, en effet, par aucune raison, ni cette suppression du droit en luimême, ni cette différence de traitement d'avec toutes les autres créances. La conscience pul lique se résignera toujours difficilement à admettre que, suivant la condition civile de l'acheteur, suivant qu'il appartiendra ou non au monde commercial, il sera ou non débiteur.

Un écart aussi profond dans l'application d'un principe, qui jamais ne devrait varíer, aurait besoin de s'appuyer sur un texte bien formel, et ce ne serait pas assez de déductions d'une portée douteuse, pour nous autoriser à rompre avec le droit commun, s'il n'apparait d'un juste motif. Si telle était l'intention des auteurs de la loi, rien ne leur était plus facile que de l'exprimer, comme ils n'ont pas manqué de le faire en supprimant, au cas de faillite de l'acheteur, d'autres garanties accordées au vendeur, telles que le droit de revendication et celui de résolution; si bien que le silence gardé relativement aux dommagesintérêts doit être considéré comme un témoignage bien plutôt de leur maintien que de leur suppression. Le législateur n'ignore pas la nécessité qui lui incombe de manifester clairement sa volonté, à peine de compromettre les plus sérieux intérêts, de jeter la confusion dans le droit des parties et de susciter de regrettables conflits. Devoir plus impérieux encore, à mesure que grandit Timportance de la réforme qu'il prépare.

« Or, sur ce point, si nous consultons les travaux préparatoires de la loi, nous constatons que rien n'y fait présager la suppression d'un droit aussi conforme au vieu de la nature qu'à l'équité, de réclamer la réparation d'un dommage injuste. Faculté si importante aux yeax de la loi romaine qu'elle devait suffire à elle seule, de manière à rendre le droit de résolution complètement superflu.

« Si non donationis causa, sed verè vineas « distraxisti, nec pretium numeratum est, << actio tibi pretii, non eorum quæ dedisti, << repetitio competit. » (Cod. IV, tit. XXXVIII, 1. 8.)

«Non ex eo, quod emtor non satis con<<ventioni fecit, contractus irritus constitui« tur.» (Cod. IV, tit. XLIV, 1. 14.)

«Ici, c'est moins le droit de résolution en lui-même que prétend exercer le vendeur, que celui de retenir sa marchandise à titre de gage, aussi longtemps qu'il a de justes motifs de craindre qu'il n'en recevra pas le prix. « Venditor pignoris loco quod ven«didit, retinet, quoad emtor satisfaciat. >> (Dig. XXI, tit. I, fr. 51, § 8, et liv. XVIII, tit. IV, fr. 22.) La remise du prix de vente était, pour le demandeur, d'une telle importance, que le droit romain lui avait subordonné la transmission de propriété, au cas de tradition. (Dig. XIX, tit. Ier, fr. 13, § 8.)

Ce n'est pas là résoudre le marché, c'est uniquement en suspendre provisoirement les effets. C'est là un droit fondé sur l'équité. Et c'est ce droit, si conforme à nos mœurs, qui, dans nos codes, occupe une place sí ample, parce qu'il est la sauvegarde des parties, que le législateur aurait tout à coup supprimé, sans en annoncer l'intention, par voie de prélérition, laissant sa pensée mal définie et la livrant aux hasards du raisonnement et à la sagacité des interprètes.

<< Mais il n'en est pas ainsi; sa pensée, il nous l'a révélée quand, dans le rapport de la commission de la chambre des représentants, il déclare n'avoir apporté au droit antérieur qu'une main très discrète et introduit seulement quelques modifications de détail.

« Nous tenions à démontrer », y est-il dit, « qu'en matière commerciale surtout, le «<législateur ne doit pas toucher légèrement « à des lois qui régissent un peuple depuis << un temps immémorial, et produire un sys«<tème nouveau qui peut jeter la perturba«<tion dans toutes les relations commer«ciales. Nous pensons donc que le législateur << belge a sagement imité le législateur fran«çais, en s'arrêtant comme lui à des modi«<fications de détail. » (RENOUARD, Beving, p. 420.)

«S'agit-il du droit de revendication? Il précise avec soin les limites étroites dans lesquelles il renferme son exercice (art. 566 et 8); de même pour le droit de rétention (art. 570) qu'il déclare expressément emprunter au code civil (art. 1612 et 1615, p. 419), lui conservant ainsi le caractère que ce code lui assigne, lui attribuant aussi nécessairement les mêmes effets, par conséquent, la possibilité d'un concours avec l'action en dommages-intérêts, de droit commun.

«Mais ce droit de rétention n'est encore, dans la plupart des cas, qu'une demi-mesure et un palliatif de nature certainement à atténuer le mal, mais qui ne suffit pas toujours à garantir le vendeur d'un dommage éprouvé; pure faculté suggérée par l'équité, mais qui n'enlève rien à l'obligation pour l'acheteur en défaut de réparer le préjudice causé par sa demeure.

<< Permettre au vendeur, comme le fait l'article 570, de retenir la marchandise par lui vendue, ce n'est donc aucunement exonérer l'acheteur du surplus de sa dette.

« On procède par comparaison et l'on excipe de la situation malheureuse du vendeur qui a opéré la livraison, peut-être la veille de la déclaration de faillite et qui, cependant, ne recueillera qu'un simple dividende, tandis qu'un autre, mieux avisé, qui aura retenu sa marchandise, obtiendrait, en outre, des dommages-intérêts. Mais cette différence, dans le droit des parties, n'estelle pas la résultante de leurs propres actes et de leur volonté; et de ce que l'une s'est dessaisie de son gage, tandis que l'autre l'a conservé, ne suit-il pas nécessairement une modification dans les conséquences juridiques? « Minima circumstancia facti, etc. » Et l'égalité de traitement promise entre tous les créanciers ne se trouve-t-elle pas nécessairement rompue, sans que l'équité en reçoive la moindre atteinte?

«La loi, ajoute-t-on, n'accorde au vendeur qu'un simple droit de rétention, rien de plus! Cela est vrai au regard de la loi des faillites, mais est-il nécessaire de rappeler que le droit commun enveloppe tout notre être et ne cesse de nous régir en tout ce qui n'est pas modifié par une disposition spéciale; qu'il ne faut pas induire facilement l'abrogation des lois, et qu'il n'existe, relativement au point en litige, aucune antinomie entre la loi de 1851 et le code civil. Naturellement, lors de la discussion de la première, le droit de rétention fut mis en question, par le motif que, d'après la rigueur des principes, il ne devrait pas être admis; mais on a pensé que comme il ne donne pas lieu aux mêmes difficultés que la revendication, quant à l'identité des objets, quant à la prise de possession, il n'y avait pas lieu de modifier, pour le cas de faillite, les principes consacrés par le code civil. (RENOUARD, Beving, p. 419, in fine.)

Maintenir les principes du code civil, telle est la pensée des auteurs de la loi; or, le pourvoi reconnaît « qu'en matière civile, <«<lorsque l'acheteur ne s'exécute pas, ne « prend pas livraison de la chose vendue, « n'en paye pas le prix, le vendeur peut

« réclamer la résiliation du contrat et des « dommages-intérêts. »> Conclusions au rejet.

ARRÊT.

LA COUR; Sur l'unique moyen du pourvoi, accusant la fausse application des articles 1184 et 1654 du code civil, et la violation des articles 568 à 571 du code de commerce (loi sur les faillites), en ce que l'arrêt attaqué a décidé que la ville de Cologne a droit aux dommages-intérêts résultant de la non-livraison de la partie de marchandises restant à fournir suivant les conventions intervenues, dommages-intérêts que la ville de Cologne évalue à 96,261 francs, et dont la cour de Liège l'a admise à prouver le montant par experts:

Considérant qu'aux termes des articles 1142, 1184, 1612, 1613 et 1654 du code civil, qui constituent le droit commun en matière d'obligations et de vente, le vendeur, lorsque l'acheteur est tombé en faillite ou en état de déconfiture depuis la vente, est dispensé de la délivrance et peut demander des dommages-intérêts si l'engagement pris envers lui n'est pas exécuté;

Que le droit commun règle les matières spéciales à défaut de dispositions contraires des lois qui les régissent; que, dès lors, la ville de Cologne ne saurait être destituée du droit de poursuivre la réparation du préjudice dérivant de l'inexécution des obligations contractées par la société faillie et son admission au passif pour le montant du dommage que si la loi des faillites comportait une dérogation soit expresse, soit virtuelle, au principe général ci-dessus énoncé;

Considérant que l'article 546 du code de commerce enlève, il est vrai, en cas de faillite, au vendeur d'effets mobiliers, son privilège, le droit de revendication ainsi que le droit de résolution, et le réduit au rang de simple créancier chirographaire; que, d'autre part, les articles 568 et 569 n'autorisent le vendeur à revendiquer les marchandises qu'il a expédiées au failli, mais dont la tradition n'a point été effectuée dans ses magasins, qu'à charge de rembourser à la masse les acomptes reçus ainsi que toutes avances faites pour transport, commission, assurance ou autres frais et de payer les sommes qui seraient dues pour les mêmes causes, ce qui est exclusif du droit aux dommages-intérêts;

Mais que ces deux hypothèses sont étrangères au cas de l'espèce; qu'elles visent, l'une, le vendeur qui à livré, l'autre, le vendeur qui a expédié la marchandise sans s'assurer un payement simultané; qu'ici la dérogation à la loi générale est aussi mani

feste que bien justifiée; que, dans la première hypothèse, en effet, la marchandise livrée est entrée dans la masse des biens du débiteur et a figuré parmi les éléments de fortune qui ont déterminé son crédit et la confiance de ses créanciers; que, dans la seconde, le vendeur doit s'imputer de s'être dessaisi sans garantie et d'avoir aveuglément suivi la foi de son débiteur; que la loi a pu subordonner à l'accomplissement de conditions particulières la faveur qu'elle lui accorde de reprendre une marchandise entrée déjà dans le patrimoine du failli;

Considérant que l'arrêt dénoncé constate que la ville de Cologne n'a ni livré, ni expédié les goudrons dont la non-livraison constitue précisément la base de son action en dommages-intérêts; que l'on ne saurait done argumenter contre elle des dispositions dérogatoires au droit commun édictées par les articles 516, 568 et 569 susvisés;

Considérant que la situation dans la faillite du vendeur qui n'a pas livré n'est visée dans la loi commerciale que par les articles 570 et 571; que l'article 570 ne fait que reproduire, en d'autres termes, la disposition de l'article 1615 du code civil; qu'il constitue un corollaire de l'article 571, lequel, à son tour, se borne à consacrer un principe général, en rappelant que la faillite ne résout pas les contrats passés antérieurement avec le falli et en réservant, par suite, au curateur la faculté d'exiger livraison de la marchandise vendue en payant intégralement le prix con

venu;

Que l'introduction dans la loi des faillites des dispositions des articles 570 et 571 ne saurait donc entrainer dérogation à la règle des articles 1142, 1181 et 1651 du code civil;

Considérant que l'on soutiendrait vainement que les dommages-intérêts sont exclus par les principes généraux en matière de faillite, et spécialement par le principe de l'égalité entre tous les créanciers;

Que l'arrêt dénoncé reconnait cette loi d'égalité et la fait subir à la ville de Cologne, pa-squ'il ne l'admet au dividende au marc le franc avec les autres passif que pour un créanciers;

Que l'on ne saurait, sous assimiler au vendeur qui s'est dessaisi de la prétexte d'égalité, marchandise et a souffert qu'elle figurât dans le patrimoine de l'acheteur, celui qui a eu

la prudence de stipuler le payement au fur et à mesure de la livraison et qui n'a donné à l'acheteur aucune apparence de fortune, à ses autres créanciers aucun motif de confiance dans la solvabilité de leur débiteur;

Considérant qu'il y aurait évidente injustice à permettre au curateur d'exiger, en cas de hausse, l'exécution du marché, et de limiter, en cas de baisse, le droit du vendeur à, la rétention de la marchandise; que l'égalité et la justice commandent de conserver au contrat sa force obligatoire au regard des deux parties, sous la règle du dividende qui s'impose à tous les créanciers;

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Considérant, en résumé, qu'avant la faillite de la Société de Marche-les- Dames, la ville de Cologne puisait dans son contrat le droit de réclamer des dommages-intérêts en cas d'inexécution; que la faillite du débiteur n'a affranchi celui-ci d'aucune de ses obligations contractuelles et destitué le créancier d'aucun de ses droits; que la faillite n'a pu produire d'autre effet que de substituer la règle du payement proportionnellement égal entre tous les créanciers au principe de droit commun qui l'obligeait à l'exécution intégrale de ses engagements;

Qu'il suit de ces considérations que l'arrêt attaqué, en reconnaissant au vendeur resté en possession de sa marchandise le droit de figurer au passif de la faillite pour le montant du dommage que l'inexécution du contrat lui occasionne, a fait une saine application à la cause des articles 1142, 1184 et 1654 du code civil, et n'a pu violer les articles 568 à 571 de la loi des faillites; Par ces motifs, rejette...

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Audenarde, rapport du 21 avril 1888, approuvé le 1er mai, par M. le procureur général Lameere (Moni- · leur du Notariat et de l'Enregistrement, du 30 septembre 1888, p. 2162). Contrà: RUTGEERTS, Commen. taire de la loi de ventôse an XI, nos 441 et 867.

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(CARETTE, C. L'ADMINISTRATION DU TIMBRE.)

Par acte avenu devant Me Carette, notaire à Courtrai, du 15 mai 1886, les dames Clément et Muylle, toutes deux religieuses, demeurant à Courtrai, déclarèrent vouloir céder aux dames Raepsaet et Delannoy, également religieuses, en la même ville, « ici présentes et acceptant solidairement », porte l'acte, « la moitié ou chacune un quart, l'autre moitié appartenant aux cédantes, de deux baux emphyteotiques, avec tous les droits qui en résultent. >>

Cet acte est clôturé comme il suit : « Dont acte fait et passé à Courtrai, le 13 mai 1886, pour les dames comparantes Clément, Raepsaet et Delannoy, en présence des sieurs De Brauwere et Ryckvoort, témoins requis, lesquels ont signé avec les comparantes et nous notaire, lecture faite. (Signé) Clément, etc.

<< Fait et passé à Sweveghem, pour la dame comparante Muylle, le 13 mai 1886, en présence des sieurs Viaene et Pamelaere, témoins requis, lesquels ont signé avec la comparante et nous, notaire, après lecture faite. (Signé) suivent les signatures. »

L'acte fut enregistré le 15 mai 1886.

Le 10 novembre 1887, procès-verbal fut dressé du chef de contravention à l'article 25 de la loi du 15 brumaire an vii, pour avoir établi à l'acte de cession précité deux clôtures distinctes, et contrainte fut décernée et signifiée pour le recouvrement de l'amende et du timbre éludé (55 fr. + 1 fr. = 56 fr.).

Sur l'opposition formée à la dite contrainte intervint, le 7 février 1888, un jugement du juge de paix du deuxième canton de Courtrai, qui déclara l'opposition mal fondée.

Ce jugement, après avoir proclamé que les lois fiscales doivent s'interpréter littéralement, examine le point de savoir « si l'acte dressé par le notaire Carette constitue, avec sa première clôture et indépendamment de la seconde clôture, un acte ayant ou pouvant avoir ses effets juridiques », et il résout cette question affirmativement :

«Attendu que cet acte stipule que les dames Clément et Muylle, religieuses à Courtrai, cèdent à dames Raepsaet et Delannoy, aussi religieuses à Courtrai, qui l'acceptent solidairement, la moitié ou chacune un quart, l'autre moitié appartenant aux cédantes, de deux baux emphyteotiques, avec tous les droits qui en résultent; que cet acte, signé par le notaire, deux témoins, l'une des cédantes dénommées dans l'acte, la dame Clément, et les deux cessionnaires, les dames Raepsaet et Delannoy, est un acte ayant tous ses effets juridiques entre parties qui l'ont signé; que si, ultérieurement, la dame

Muylle, non comparante, quoique indiquée dans le premier acte, par la seconde clôture, signée par elle, le notaire, les témoins Viaene et Pomelaere, fait sien le contexte du premier acte, cette clôture est bien un second acte ayant ses effets juridiques, entre elle, cédante, et les cessionnaires, dames Raepsaet et Delannoy, citées dans le premier acte; qu'ainsi, il y a deux actes, actes passibles chacun de l'impôt du timbre. >>

Pourvoi par Carette.

En concluant au rejet du pourvoi, le procureur général dit :

«Le pourvoi se fonde sur une équivoque manifeste, qu'il vous sera facile de dissiper. D'après l'article 25 de la loi de brumaire an vii, il ne peut être fait ni expédié deux actes à la suite l'un de l'autre sur la même feuille de papier timbré. Tous les efforts du demandeur tendent à établir que nous nous trouverions en présence d'une convention unique avenue entre quatre personnes différentes, dont le concours était nécessaire pour sa perfection. La dernière signature n'a été que le complément d'un acte inachevé!

« Ces explications ne sauraient être admises, car elles nous détournent du véritable sens de la loi. Laissant de côté les conventions des parties, qui peuvent ne se traduire qu'en paroles, elle s'en tient aux actes qui seuls sont soumis à la formalité, désignant, par cette expression, tout écrit ayant pour objet de constater des faits juridiques.

«En cette matière, la convention n'est rien, l'acte est tout; des conventions multiples peuvent se révéler dans un acte unique, comme à l'inverse une seule et même convention peut se reproduire dans des actes distincts et nécessiter, pour lors, l'emploi d'autant de feuilles; ce qui arrive pour les actes sous seing privé contenant des conventions synallagmatiques et qui réclament autant d'originaux qu'il y a de parties ayant un intérêt distinct. (Art. 1525 du code civil.)

<< On le voit donc, entre l'accord des parties et l'acte qui le manifeste, au regard du timbre, il n'y a nulle relation.

<< De cette observation il ressort que, lors même, avant que de rien acter, le consentement de toutes les parties eût été donné, c'est assez que deux actes aient été rendus nécessaires pour interdire leur expédition à la suite l'un de l'autre, sur une même feuille.

«Non seulement le juge constate l'existence de ces deux actes, mais les circonstances qu'il énumère témoignent de leur indispensable nécessité.

«Par le premier, en effet, passé à Courtrai, la demoiselle Clément cede son quart indivis

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