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tence, par le motif déjà invoqué devant le juge de paix, la possession trentenaire, soutenant que cette possession lui avait procuré l'acquisition d'un droit de servitude sur le terrain sur lequel s'étendaient les branches à élaguer. Dans le développement de ses moyens, il soutint qu'un des terrains qualifié propriété de la veuve Gaudry était au contraire le sien.

Le 9 fév. 1849, jugement par lequel le tribunal de Tournay confirme la sentence, déclarant, en outre, que le moyen tiré de ce qu'un des terrains précités serait la propriété d'Arnould constituait une question de propriété, et qu'il y avait lieu de surseoir, en ce qui touchait ce point, jusqu'à décision de cette question. Il ordonna en conséquence à l'appelant de justifier de sa demande devant lui, tribunal, siégeant pour ce en première instance, et fixa jour à cet effet.

Arnould s'est pourvu en cassation.

Le jugement, disait le pourvoi, viole d'abord l'art. 7, n° 1, de la loi du 25 mars 1841, et les art. 2219, 544, 672 et 690 du C. civ., par la décision sur la compétence. Le juge de paix et le tribunal, juge d'appel, étaient incompétents. Du moment où, sur une action en élagage, s'élevait une question de propriété ou de servitude, il ne leur appartenait pas d'apprécier le fondement apparent de la question soulevée, le tribunal devait se borner à dire que pareil état du contestatoire n'était pas de nature à enlever au premier juge la connaissance de l'action lui soumise. »

Le pourvoi citait le commentaire de Marc-Deffaux, sur la loi française du 25 mai 1838.

Le second moyen se basait sur la violation de l'art. 172 du C. de pr., tiré de ce que le juge avait statué à la fois sur la compétence et le fond, alors que le défendeur, sous réserve de tous ses droits, s'était borné à exciper d'incompétence.

Pour troisième moyen il invoquait la violation de la loi de compétence, art. 7, no 1, tiré de ce que le tribunal de Tournay, saisi comme juge d'appel, au lieu de se déclarer incompétent pour connaître de la question de propriété soulevée devant lui, avait retenu cette partie de la cause afin d'y statuer comme juge de première instance.

Enfin, il invoquait la violation des droits de la défense et de l'art. 11 de la constitution de l'an 1, qui les consacre, en ce qu'Arnould avait été condamné sans avoir été entendu, nonobstant ses réserves, et sans ordonnance de plaider au fond.

M. le 1 avoc. gén. Dewandre a conclu au rejet du pourvoi:

Aux termes de l'art. 672 du C. civ., a-t-il dit, tout voisin a le droit d'obliger son voisin à étaguer les branches de ses haies ou de ses arbres qui avancent sur l'héritage voisin.

D'autre part, la loi sur la compétence civile du 25 mars 1841 attribue la connaissance de ces sortes d'actions aux juges de paix, mais au cas seulement où la propriété ou bien la servitude ne sont pas contestées.

Dans l'espèce, la veuve Goudry, défenderesse au pourvoi et demanderesse originaire, a fait assigner le demandeur, son voisin, devant le juge de paix du canton de Tournay,' aux fins de le faire condamner à élaguer les branches des arbres qui se trouvent dans deux haies longeant, disait la citation, les propriétés de cette dernière.

Dans cette position que pouvait faire Arnould pour se soustraire à la juridiction du juge de paix? Il pouvait, aux termes de l'article 7 de la loi sur la compétence, ou bien demander son renvoi, en se prétendant propriétaire des héritages sur lesquels les branches se projetaient, ou bien encore prétendre au droit de conserver ces branches en vertu d'une servitude acquise par titre sur ces mèmes héritages.

En fait, sur quoi le défendeur Arnould a-t-il fondé son exception d'incompétence? Il l'a fondée uniquement sur ce que les arbres et haies en question se trouvaient dans leur état actuel depuis plus de trente ans, et qu'il avait, ainsi, acquis le droit de les conserver tels. C'était donc en réalité, non pas une question de propriété, mais une question de servitude acquise par la prescription, qu'il avait soulevée devant le premier juge.

D'aucune manière il ne prétendait être propriétaire des fonds sur lesquels s'étendaient les branches dont l'élagage était demandé par la veuve Goudry; la prétention d'avoir acquis par trente ans le droit de les conserver était, en effet, comme le dit avec raison la décision attaquée, exclusive de l'idée d'une prétention à la propriété du fonds, car on ne prescrit pas sur sa propre chose.

En fait donc, il ne saurait être un instant douteux que, devant le juge de paix, Arnould n'avait pas soulevé de question de propriété, et ce qu'il ajoutait encore dans ses conclusions, qu'il ne reconnaissait même pas que la veuve Goudry fût propriétaire des ter> rains rappelés dans l'exploit de citation, » loin de constituer dans le chef de lui Arnould une prétention à la propriété, ne faisait que rendre d'autant plus sensible, au contraire,que telle n'était pas la portée qu'il attachait luimême à la première partie de ses défenses.

Sa demande de renvoi se bornait donc à prétendre que, par une possession trentenaire, des branches litigieuses, dans l'état où elles se trouvaient, il avait acquis le droit de les conserver dans cet état.

Une pareille question concernait-elle la propriété? Non évidemment.

La possession trentenaire soulevait-elle une question de servitude dans le sens de l'art. 7 de la loi du 25 mars 1841, question qui dût arrêter le juge du possessoire dans sa décision? Nous ne le pensons pas.

En effet, la loi sur la compétence, lorsqu'elle parle de la propriété ou de la servitude, suppose des exceptions qui, étant justifiées, sont élisives de la compétence du juge de paix. Or, s'il est vrai que Troplong et Marc-Deffaux, dans son Commentaire sur la loi française du 25 mai 1848, enseignent que le droit de ne point élaguer certains arbres ou certaines haies soit susceptible de la prescription acquisitive, il n'en reste pas moins vrai aussi que cette doctrine est unanimement repoussée par tout ce que la science compte de jurisconsultes les plus éminents: Henrion de Pansey, Comp. de juges de paix, p. 312; Duranton, t. 5, no 378; Vazeille, des Servitudes, n° 119; Pardessus, des Servit., n° 196; Duparc-Poulain; Dalloz, aîné, Nouv. rép., vo Actions possessoires, n° 427; Zachariæ, § 242; Proudhon, du Domaine privé, n° 581; Garnier, des Actions possessoires; Guichard, tous enfin enseignent de la manière la plus formelle qu'un fait tel que celui de branches vivantes qui, en fait, ne restent pas un seul instant dans le même état, n'est pas susceptible de servir de base à la prescription. Tous expriment cette pensée que s'il s'agissait d'un fait permanent, tel, par exemple, que celui de l'existence de la haie elle-même ou des arbres riverains à l'endroit où ils sont plantés, et que le voisin prétendit les faire arracher, alors l'exception de prescription deviendrait une question préjudicielle, parce que la possession, dans ce cas, étant établie, deviendrait le fondement d'un droit; mais s'agit-il au contraire des branches d'une haie ou d'un arbre qui vivent, qui sont en croissance, qui, de moment en moment, usurpent toujours davantage sur le fonds joignant, et qui, par suite, à chaque instant, constituent des faits nouveaux de trouble à la possession du voisin, alors la doctrine, comme la jurisprudence, sont d'accord pour reconnaître qu'une semblable possession, toujours nouvelle, et qui, chaque année, donne au voisin une action nouvelle, manque essentiellement de ce point de départ fixe qui est le principe

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élémentaire, indispensable de toute prescription.

Lors donc que, dans l'espèce, le jugement attaqué s'est refusé à reconnaître dans les conclusions prises par le défendeur originaire Arnould, devant le juge de paix, one exception qui, aux termes de l'art. 7 de la loi du 25 mars 1841, dût déterminer ce juge à se déclarer incompétent, il n'a pas contrevenu à cette disposition, qui nécessairement suppose une exception sérieuse et fondée sur un fait qui, se trouvant établi, soit de nature à engendrer un droit de propriété ou de servitude, et non une allégation quelconque qui, en définitive, n'aurait pour résultat que d'entraîner les parties dans des frais frustratoires et irrécupérables.

Par voie de conséquence le jugement attaqué n'a pas davantage contrevenu à l'article 2219 du C. civ. sur la prescription, puisque le droit dont il s'agit n'était susceptible d'être acquis par la prescription qu'au point où se trouvaient les branches trente ans avant l'action.

Il n'a pas méconnu les dispositions de l'art. 690, aux termes duquel les servitudes continues et apparentes peuvent s'acquérir par la possession de trente ans, parce que la possession du demandeur, en ce qui concerne les branches de ses arbres, a sans cesse changé pendant les trente années qui ont précédé l'action de la défenderesse, et que, comme le dit encore, avec raison, le juge de Tournay, les branches prenant chaque année un nouvel aceroissement, il y a eu chaque année aggravation de préjudice et matière à une nouvelle action absolument étrangère à la première.

Le jugement attaqué, enfin, n'a commis ni une violation, ni fait une fausse application des art. 544 et 672 du C. civ., parce que le demandeur, n'ayant pu, en ce qui concerne ses branches, acquérir un droit de propriété superposé à la propriété foncière de la défenderesse, celle-ci tenait de l'art. 672 le droit de lui faire couper ces branches.

Le premier moyen du pourvoi ne peut donc être accueilli.

Le demandeur puise son second moyen de cassation dans la violation de l'art. 172 du C. de proc. civ., aux termes duquel « toute demande en renvoi doit être jugée sommairement, sans qu'elle puisse être réservée ni jointe au principal. ›

En fait, la Cour sait que ce moyen ne s'adresse pas directement à la décision du tribunal de première instance de Tournay. Ce dont se plaint le pourvoi, c'est que ce tribu

nal, statuant comme juge d'appel, n'ait point annulé, pour contravention à l'art. 172 du C. de pr. civ., la sentence du juge de paix, qui, sans s'arrêter au déclinatoire proposé, et par un seul jugement, a statué sur le fond de la demande de la dame veuve Gondry.

Le grief dont il s'agit, portant sur la décision dont était appel, était donc susceptible de réformation par le juge supérieur, à moins qu'il n'intéresse l'ordre public: il était donc aussi au pouvoir de l'appelant d'y renoncer.

Or l'appelant, devant le tribunal de première instance de Tournay, n'a aucunement demandé la réformation de la décision dont était appel, par le motif que le premier juge aurait contrevenu à l'art. 172 du C. de pr. civ., en ce qu'il aurait, par un seul et même jugement, prononcé sur le déclinatoire et sur le fond. Ce qu'il a demandé, et ses conclusions en font foi, c'est ce que déjà il avait demandé devant le premier juge, c'est-à-dire « que les >> branches dont il s'agit existantes dans le » même état depuis plus de trente ans, il fût » dit que le point de savoir s'il avait le droit › de les conserver soulevait une question de » propriété étrangère à la compétence du juge de paix, seule question, ajoutait-il, » qu'il eût soulevée devant le juge de paix de » Tournay, et que ce juge, en se déclarant » compétent, avait commis un excès de pou» voir. De l'art. 172, il n'en a pas été question devant le juge d'appel.

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Le moyen, soulevé pour la première fois devant vous est donc comme tel non recevable, à moins, nous le répétons, que la nullité, si elle existait, et encore qu'en existant elle pût vicier la décision d'appel, ce qui resterait à examiner à ce double point de vue n'intéresse l'ordre public.

A cet égard, nous ne croyons pas qu'un seul doute puisse s'élever. La question de savoir si, au cas de déclinatoire proposé devant les tribunaux ordinaires, l'affaire doit être jugée comme affaire sommaire, si le tribunal doit la juger sur-le-champ et à la même audience, si le tribunal peut prononcer sur le fond par le même jugement qui rejette le déclinatoire ou s'il faut des jugements séparés, toutes ces questions, disonsnous, ont été très-longuement examinées et très-diversement résolues par les auteurs, et nous ne rechercherons pas aujourd'hui si, quand le juge d'appel a fait ce que le premier juge aurait dû faire, et que la partie qui se plaint n'en a subi aucun grief, il pourrait, dans ce cas, y avoir lieu à cassation; mais ce que nous avons à constater pour la cause actuelle, c'est que pas un seul monument de

doctrine ou de jurisprudence, que nous sachions, ne soulève même la pensée que le juge qui statue par un seul jugement sur le déclinatoire et sur le fond, ait porté la moindre atteinte à l'ordre public.

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Le motif de l'art. 172 du C. de pr. civ. est constant, il est expliqué par les auteurs de la loi eux-mêmes. C'est que, comme le disait Rodier sur l'ordonnance de 1667, dont l'art. 172 n'est que la réproduction, dans les juridictionsinférieures, il faut donner le temps à la partie d'appeler, si bon lui semble, du jugement qui la déboute des fins de non-procéder, et qu'il ne serait pas séant d'obliger les parties à déclarer cet appel à la face du juge. » Serpillon professait la même opinion.

Tel est, MM., le seul motif qui ait dicté l'art. 172 du C. de pr. civ. C'est une mesure d'économie et de bonne procédure, mais l'ordre public n'a aucunement à s'émouvoir de ce que le juge, par une méprise, aurait confondu dans une seule décision deux résolutions qui eussent dû demeurer séparées. Ce qui intéressait bien autrement l'ordre public, c'est qu'un juge devant lequel un déclinatoire, fondé sur l'incompétence, était proposé, pût, en rejetant le déclinatoire, ordonner de plaider au fond, et cependant il n'est pas douteux, dans ce cas, que la partie qui, au lieu d'user de son droit d'appel, plaide au fond sans y être contrainte, se rend non recevable à appeler, et que si elle appelle ensuite sur le fond, elle ne peut plus se faire un grief de la nullité résultant de l'inobservation de l'art. 172 du C. de pr. civ. C'est au surplus la conséquence du principe consacré par la loi du 29 avril 1806 que les nullités de procédure, et il ne s'agit ici que d'une nullité de procédure, qui n'ont point été relevées en instance d'appel, ne peuvent, hors le moyen d'incompétence,être présentées comme moyen de cassation.

Le second moyen du pourvoi ne peut donc être accueilli.

Le 3 moyen prend sa base dans la disposition du jugement attaqué qui, statuant sur l'exception de propriété soulevée par l'appelant en instance d'appel, en ce qui concerne le terrain longeant sa propriété dans le fond, et indiquée au cadastre sous le n° 472, a renvoyé les parties à l'audience du tribunal de première instance,en fixant jour au 1er mars suivant, pour, par l'appelant, justifier de sa défense. Cette partie du jugement, dit le demandeur, contrevient expressément au § 1 de l'art. 7 de la loi du 25 mars 1841, parce que le tribunal de première instance, siégeant comme juge d'appel, ne pouvait faire

que ce que le juge de paix aurait lui-même dû faire si l'exception lui avait été proposée, c'est-à-dire, déclarer purement et simplement que le 1 juge était incompétent pour connaître de la demande portée devant lui.

Nous pensons que si une disposition de loi peut avoir été méconnue par la décision dont il s'agit, ce ne peut pas être celle invoquée à l'appui du moyen que nous examinons, et à laquelle seule nous puissions nous arrêter.

En effet, que dit l'art. 7 de la loi du 25 mars 1841? Il dit que les juges de paix connaissent des actions en élagages des arbres, lorsque les droits de propriété ne sont pas contestés. Le jugement attaqué prétend-il le contraire? Décide-t-il que le juge de paix pouvait en connaître? Aucunement, puisqu'il réforme au contraire la décision du premier juge, en ce qu'il s'était déclaré compétent pour connaître du chef dont il s'agit. Loin de contrevenir à l'article 7 de la loi du 25 mars 1841, le tribunal de Tournay s'y est donc littéralement conformé.

Mais, vous dit-on, comme juge d'appel, ce tribunal ne pouvait retenir la connaissance du fond, il devait se borner à renvoyer les parties à se pourvoir comme de droit! C'est possible, mais si ce devoir était en effet tracé au tribunal de Tournay, ce n'est pas dans f'art. 7 de la loi du 25 mars 1841, et la Cour de cassation ne peut examiner le mérite des moyens qu'on lui propose que dans leurs rapports avec les textes que l'on invoque comme ayant été violés. Or s'il était vrai que le litige, en ce qui concerne la partie de terre dont il s'agit, ne se trouvait pas dévolu au tribunal de Tournay comme juge de première instance, et que, non saisi de la cause en cette qualité, il ne put régulièrement en retenir la connaissance, que si le demandeur prétend qu'incompétemment portée devant le juge de paix, l'affaire n'a pas subi le préliminaire de la tentative de conciliation, et que ce qui s'est fait ne peut en tenir lieu, ce n'est pas dans l'art. 7 de la loi du 25 mars 1841 que l'on peut trouver la justification de ces griefs, et le pourvoi ne cite aucun texte qui condamne ce que le jugement attaqué a cru pouvoir faire, à savoir le renvoi du point litigieux à une audience ultérieure du tribunal d'appel, siégeant comme juge de première instance, et la loi du 4 août 1832 cependant veut, sous peine de déchéance, que le demandeur indique formellement les textes auxquels il prétend qu'il a été contrevenu.

Ce qu'il faut éviter, pour l'appréciation des moyens, c'est de confondre deux choses qui doivent être soigneusement distinguées, c'est

à-dire, la partie du jugement qui, en présence de l'exception de propriété soulevée en appel par l'appelant, décide que le juge de paix était incompétent, et qui, de ce chef, est entièrement conforme à l'art. 7 de la loi du 25 mars 1841, et la seconde disposition du même jugement qui renvoie la cause à l'audience du 1 mars, point étranger à l'art. 7 précité, et dont cet article ne s'occupe pas, parce qu'il ne concerne pas les tribunaux de première instance, et que, cependant, c'est incontestablement comme juge de première instance que le tribunal de Tournay, après avoir, au premier chef, confirmé la sentence du premier juge, a ensuite renvoyé la cause à son audience du 1er mars, en ordonnant à l'appelant d'y justifier de son droit de propriété.

En résumé, nous disons donc, en tant que juge d'appel, et comme faisant ce que le juge de paix aurait dù faire, si l'exception de propriété avait été soulevée devant lui, le tribunal de Tournay a prononcé l'incompétence de ce juge pour connaître de l'action : impossible donc que, de ce chef, il puisse encourir la censure, puisqu'il s'est littéralement conformé à la loi; que si, après cela, comme tribunal de première instance, il a, en renvoyant la cause ainsi qu'il l'a fait, méconnu les règles des juridictions, ce n'est pas dans l'art. 7 de la loi du 25 mars 1841, article qui ne s'occupe que des juges de paix, et nullement des tribunaux de première instance, ni de ce que ces tribunaux peuvent faire comme juges d'appel, ce n'est pas, disons-nous, dans l'art. 7 de la loi de 1841, que les règles de juridictions que le pourvoi prétend avoir été méconnues trouvent, ni leur principe,ni leur sanction, et puis enfin, d'autre part, s'il est vrai que le juge de paix ne tenait pas de la loi le pouvoir de prononcer, quant au chef qui concerne les arbres et les haies du fonds de la propriété du demandeur, il n'est pas moins vrai aussi que le tribunal de première instance, devant lequel les parties se trouvaient, n'était, dans tous les cas, pas tenu de les renvoyer à la conciliation du juge de paix, du moment que le défendeur ne concluait pas à ce que le tribunal, comme juge de première instance, se dépouillât de la connaissance de l'affaire. Or le défendeur originaire, alors appelant, s'était borné à conclure devant le tribunal de Tournay « à ce qu'il plût » au tribunal mettre à néant le jugement > dont était appel, ordonner la restitution » de l'amende et condamner l'intimée aux » dépens des deux instances. »

Là se bornaient les conclusions de l'appelant. Quant au renvoi de l'intimée à se pour

voir par action nouvelle, l'appelant n'y avait pas conclu. Il aurait pu, devant le tribunal de Tournay, consentir à ce que ce tribunal jugeât le fond en premier et dernier ressort. Cela n'est pas contestable en présence des dispositions de l'art. 6 du tit. 4 de la loi du 16-24 août 1790, à plus forte raison a-t-il donc pu tacitement renoncer à une formalité de procédure dont l'inutilité avait déjà été constatée en fait.

Nous estimons donc que le second moyen de cassation ne peut être accueilli.

Le dernier moyen se puise dans la violation de l'art. 11 de la déclaration des droits qui précédait la Constitution du 5 fructidor an i, en ce que le juge de paix de Tournay, malgré les conclusions du défendeur originaire Arnould tendantes à ce qu'il se déclarât incompétent, et sous réserve de tous autres moyens exceptionnels, l'a condamné au fond sans l'entendre.

La Constitution du 5 fruct. an III n'existant plus, et cette constitution ayant été remplacée par la Constitution consulaire du 22 frim. an vIII, laquelle n'a plus elle-même d'existence, il n'y a pas lieu de s'arrêter à ce moyen.

Quoiqu'il en soit au surplus, s'il était vrai que le premier juge eût méconnu les droits de la défense du sieur Arnould, et que, de ce chef, la décision du juge de paix fût reprochable, l'appelant a été admis devant le juge d'appel à présenter tous ses moyens. La nullité qu'il invoque serait donc, comme on vous l'a dit avec raison, pour la défenderesse, une nullité sans grief, ce qui rend le moyen non recevable.

ARRÊT.

LA COUR; Sur le premier moyen de cassation, déduit de la violation de l'art. 7, § 1o, de la loi du 25 mars 1841, sur la compétence en matière civile, d'un excès de pouvoir et de la violation des règles de la compétence, résultant dudit art. 7, de la violation des art. 2219 et 690 du C. civ., et de la violation et fausse application des art. 544 et 672 du même Code:

Attendu, qu'aux termes de l'art. 7, § 1", de la loi du 25 mars 1841, les juges de paix connaissent des demandes en élagage lorsque les droits de propriété ou de servitude ne sont pas contestés;

Attendu que, sur l'action en élagage intentée contre lui, le demandeur a décliné la compétence du juge de paix, en se fondant sur ce que les arbres et haies dont l'élagage

est demandé se trouvent depuis plus de 30 ans dans l'état où ils sont aujourd'hui, et sur ce qu'il a, en conséquence, le droit de les conserver dans cet état ;

Attendu qu'il entrait dans les attributions du juge de paix d'examiner si, d'après les faits allégués et en les supposant établis, les conclusions du demandeur soulevaient véritablement une question de servitude; qu'en appréciant, sous ce rapport, le déclinatoire proposé, le juge de paix restait dans les termes de la compétence qui lui est attribuée; que, par suite, le jugement attaqué n'a pu contrevenir à l'art. 7, § 1o, de la loi du 25 mars 1841.

Quant aux articles du Code civil qu'invoque le pourvoi:

Attendu que l'action que donne l'art. 672 du Code civil au propriétaire sur le fond duquel avancent les branches des arbres du voisin, tend à réprimer un trouble, une espèce d'usurpation qui se reproduit et s'aggrave chaque année, sans qu'il soit possible de déterminer le degré d'accroissement que prennent périodiquement les branches; que la nature même des choses s'oppose à ce que le propriétaire des arbres puisse soutenir qu'il les a possédés pendant 30 ans dans l'état où ils se trouvent au moment où s'exerce contre lui l'action en élagage; que cette ac-. tion naît chaque année, et dès lors est imprescriptible;

Attendu que le propriétaire des arbres n'est pas mieux fondé à réclamer un droit de servitude, en se fondant sur une prétendue possession trentenaire, qu'il ne le serait à exercer l'action en complainte, en alléguant que depuis l'an et jour les branches de ses arbres avancent sur le fond voisin; d'où il résulte que le jugement attaqué n'a contrevenu à aucune des dispositions citées du Code civil. En ce qui concerne le 2o moyen, fondé sur la violation de l'art. 172 du C. de pr. :

Attendu que, devant le tribunal d'appel, le demandeur ne s'est pas fait un grief de ce que le juge de paix aurait disposé, par le même jugement, sur la demande en renvoi et sur le fond;

Attendu que ce moyen n'est pas d'ordre public, et ne devait pas être suppléé d'office par le juge d'appel; d'où il suit que le demandeur n'est pas recevable à le proposer, pour la première fois, devant la Cour de cassation.

Sur le 3 moyen déduit de la violation de l'art. 7, § 1o, de la loi du 25 mars 1841, et des règles de la compétence et des juridictions établies par la même loi :

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