Sivut kuvina
PDF
ePub

sorte d'exactions et de violences envers le peuple, le peuple salua de ses acclamations celui qui, le premier, se saisit d'un pouvoir qui, avant de se faire sentir à lui, devait peser sur ses oppresseurs.

Alors seulement il recommença à vivre de la vie politique; l'ardeur guerrière s'était presque éteinte; elle se ranima; les comités nationaux eurent un plus grand nombre de citoyens empressés de prendre part aux délibérations; et désormais réunies au mois de mai, ces assemblées acquirent de l'importance à cause de l'empressement des nouveaux rois à leur soumettre les édits, chartes ou constitutions auxquels ils voulaient donner force de loi salique (1).

Ainsi furent promulgués les actes législatifs qui, sous le nom de capitulaires, formèrent, durant près de deux siècles, le droit civil et politique des Français (2).

Deux choses étaient nécessaires pour que ces actes

(1) Ces assemblées générales s'occupaient à la fois de législation, de justice et d'administration civile et militaire. Elles portaient le nom de mallum ou placita majora; étaient ordinairement présidées par le roi luimême, et se composaient en grande partie de seigneurs et de membres du haut clergé. Mais, indépendamment de ces assises supérieures, il y avait dans chaque paroisse ou dans chaque district, des assemblées particulières appelées mallum ou placita minora. Les comtes, viguiers ou centeniers, qui les présidaient, devaient s'occuper des affaires provinciales, rendre bonne justice et consulter le jury national sur l'application des lois. (Meyer, Esprit des Institutions judiciaires.)

Nul n'avait droit de se rendre en armes au mallum ou aux plaids: nullus ad mallum vel ad placitum infra patriam arma, id est, scutum et lanceam portet. . (Capit. III, anno 806.)

(2) Capitulaire, dans le sens général du mot, s'entendait autrefois de tout écrit divisé par chapitres: Capitularium nomen generale est, et in universum intelligitur de omni opere scripto in varia capita diviso. ( Baluzius. Præf.) Ce n'est que sous Charlemagne que les ordonnances soumises au consentement des assemblées nationales prirent le nom de capitulaires. Non-seulement ces lois obligeaient les simples citoyens, mais les seigneurs, les évêques et les papes eux-mêmes étaient tenus de s'y soumettre. Pépin, Charlemagne,

devinssent exécutoires dans tout le royaume : la proposition du roi et le consentement du peuple (1).

Lorsque les circonstances exigeaient l'adoption de quelques dispositions nouvelles, il arrivait aussi que les seigneurs rédigeaient les projets de lois qu'ils croyaient utiles à l'administration du pays; les évêques, de leur côté, formulaient, dans l'intérêt de la discipline ecclésiastique, des règlements puisés presque toujours dans les anciens canons. Ces projets étaient ensuite présentés au roi, et, quand il le jugeait convenable, renvoyés par lui aux grands plaids du royaume.

En matière civile, l'exécution des capitulaires était commise aux comtes et aux autres seigneurs temporels, ainsi qu'aux archevêques et évêques en ce qui concernait les affaires ecclésiastiques. Les uns et les autres agissaient sous la haute surveillance des commissaires (missi) délégués par le roi (2).

Ces considérations nous ont paru nécessaires nonseulement pour expliquer l'origine des institutions, mais aussi pour faire comprendre leur jeu, leur portée et leur puissance.

Au temps où furent publiés les premiers capitulaires, c'est-à-dire après la proclamation de Pépin comme roi des Français, le clergé avait repris, dans la direction des affaires, la haute influence que le gouvernement tout

Louis-le-Débonnaire, Charles-le-Chauve, Lothaire et Louis II ont publié plusieurs capitulaires; mais cet usage s'est perdu au commencement de la troisième race.

(1) Lex consensu populi fit et constitutione regis.

[ocr errors]

(Karoli Calvi. Edict. Pist., cap. 6.) (2) Afin que l'exécution des capitulaires n'éprouvât ni retard ni fausse interprétation, on en faisait faire un certain nombre de copies, que le maire du palais était chargé d'envoyer directement aux archevêques et aux comtes et magistrats, avec ordre de les faire copier et relire dans les assemblées provinciales. (Ludovici pij. Capit. ann, 823.)

[ocr errors]

divine, et recommandait au peuple de ne pas attendre ses ordres pour se prosterner au pied des autels (1).

Les capitulaires ne font mention d'aucun impôt; le trésor royal était alimenté par les amendes, par l'hériban (2) et par les revenus des terres appartenant au souverain. Dans plusieurs, il est question de certains péages sur les grands chemins, sur les rivières et sur les ponts (3); mais, en général, ces péages étaient perçus par les propriétaires, et Charles ne manquait pas de les abolir toutes les fois qu'ils n'étaient pas destinés à compenser quelques travaux d'utilité publique, ou qu'ils n'étaient pas fondés sur un ancien usage.

La probité dans les transactions commerciales est recommandée dans plusieurs' articles des capitulaires : tantôt on avertit les marchands de ne pas préférer un gain terrestre à la vie éternelle. Car si Dieu a donné à l'homme le travail qui lui sert à vivre, il lui a aussi imposé l'obligation de veiller au salut de son áme. Tantôt on leur rappelle que Dieu se montre vengeur sévère à l'égard de ceux qui trompent leurs frères dans les affaires qu'ils ont avec eux (4). Enfin on leur ordonne de n'employer que des poids et mesures toujours justes, toujours égaux, dans les villes comme dans les monastères, soit pour acheter, soit pour revendre, parce que Dieu a dit dans

(1) Si evenerit fames, clades, pestilentia, et inæqualitas aëris, vel alia qualiscunque tribulatio, ut non expectetur edictum nostrum, sed statim deprecetur Dei misericordia. (Cap. Baluz., t. 1, col. 725.)

(2) Heer, guerre, armée; bannum, ban, proclamation, ordonnance; lorsque après avoir reçu l'ordre de se rendre à l'armée on n'obéissait pas, on était condamné à une amende appelée heribannum, hériban.

(3) De pontatico, de teloneo ad transeundum pontem. (Apud Baluz, I, col. 822 et 765.)

(4) Ibid. 974. Ne quis supragrediatur neque circumveniat in negotio fratrem suum. Vindex est enim deus de his omnibus.

les proverbes de Salomon: Mon âme ne peut souffrir qu'il y ait poids et poids, mesure et mesure (1).

Si les objets vendus par eux n'étaient pas de bonne qualité, et qu'ils n'en prévinssent pas l'acquéreur au moment de l'acquisition, celui-ci était en droit de leur rendre la marchandise et de réclamer la restitution de son argent (2).

En aucun cas, les marchés ne pouvaient avoir lieu le dimanche (3).

Les capitulaires réglaient aussi les conditions requises pour l'exercice des diverses professions. Ils ne permettaient de confier la défense d'une cause qu'à des avocats ou avoués capables de la bien comprendre et de la mener à bonne fin.

Il en était de même pour les notaires qui étaient élus dans chaque localité, et dont les noms étaient transmis au roi par l'entremise des missi dominici (4).

Les scribes étaient tenus d'écrire correctement (5). Comme il y avait place pour tous ceux qui voulaient travailler, il était expressément défendu de faire l'aumône aux mendiants et vagabonds (6).

Nul, sous aucun prétexte, ne pouvait se livrer à l'ivrognerie. Tout homme ivre était exclu du mallum, où il ne pouvait ni plaider sa cause, ni comparaître en qualité

(1) Ut æquales mensuras et rectas pondera justa et æqualia omnes habeant, sive in civitatibus, sive in monasteriis, sive ad dandum, sive ad accipiendum in illis ; sicut in lege domini præceptum habemus : Pondus et pondus, mensuram et mensuram odit anima mea. (Karoli Magni capit., t. 1, 238.) (2) Cap. Baluz., t. 1, 901.

(3) Capit. 1, ann. 809, c. 18. Calvi, til 36, c. 19.

(4) Baluz., t. 1, 961.

[ocr errors][merged small]

809, c. 8. 1d. Karoli

(5) De scribis ut non vitiosè scribant. Ibid. 725. (6) De mendicis discurrentibus. Ibid. 726.

de témoin. Il était bien recommandé aux comtes de ne présider les plaids qu'à jeun (1).

Lorsque l'armée était en campagne, celui qui était surpris en état d'ivresse, ou provoquant un autre à boire, subissait une sorte d'excommunication qui consistait à ne boire que de l'eau jusqu'à ce qu'il eût été admis à faire amende honorable (2).

Mais c'est surtout contre la débauche que les sévérités des législateurs étaient déployées. Ce crime, disent-ils en empruntant les paroles d'Isaïe, ce crime abominable, qui est comme le laut de la mort, le puits de l'enfer et l'abíme de perdition; car celui qui s'accouple à une prostituée, ne fait plus qu'un seul corps avec elle; c'est un corps sans âme, un cadavre vivant (3).

Aussi la peine du fouet est-elle infligée aux débauchés et aux adultères. Chacun est obligé de dénoncer la des meure où se cache toute femme de mauvaise vie, et s'il ne le fait ou si, malgré les injonctions formelles de la loi, il a été jusqu'à lui donner asile chez lui, il est tenu de porter lui-même la coupable sur la place publique où elle doit être battue de verges, sous peine de subir luimême un pareil châtiment (4).

Mais les peines les plus sévères étaient celles que la loi réservait aux crimes politiques. Les auteurs d'une conspiration qui avait eu un commencement d'exécution étaient condamnés au dernier supplice, et leurs complices contraints de se frapper mutuellement de verges, de s'arracher les cheveux et de se couper le nez:

(1) Ibid. 761.

(2) Ibid. 767.

(3) Qui se jungit meretrici, unum corpus efficitur; et qui luxuriatur mortuus est in corpore vivente. (Capit., t. 1, 1004.)

(4) Ibid. 343.

« EdellinenJatka »