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Elle fait maintenant tout le mérite de mon Mémoire, dont elle forme, en quelque sorte, le complément.

J'avoue que j'avois eu principalement en vue d'établir ma thèse par le poids de la raison et du sentiment: M. Girault a voulu y joindre l'autorité bien plus imposante de l'Ecriture et celle de Dieu lui-même; j'ai lieu de croire que le zèle le plus austère, que mes raisonnemens n'auroient pas même ébranlé, se rendra sans réserve à un tel argument; car il est très vrai, d'après le passage du Livre des Nombres cité par M. Girault, que l'usage de la Musique dans les cérémonies religieuses est de précepte divin.

M. Girault a dit que j'avois pris mes exemples chez les Chinois, chez les Grecs, etc., et qu'il prenoit les siens chez un peuple non moins ancien sur la terre, et dont les annales ne sont pas moins respectables, chez les Hébreux. Je me permettrai d'observer à ce sujet qu'il n'entroit pas dans le plan de mon Mémoire (écrit d'ailleurs à la campagne et sans secours) de multiplier les exemples. Cependant, parmi ceux en petit nombre que j'ai donnés, je n'ai pas tout-à-fait négligé celui du Peuple de Dieu, puisque j'ai cité la belle énumération des nombreux instrumens que le Prophète-Roi, dans son enthousiasme, veut faire concourir à la louange de l'Eter

nel; et que, comme pour mettre à mes preuves le sceau d'une autorité irrécusable, j'ai fini par rappeler la mémorable solennité de la translation de l'Arche sainte dans le Temple élevé au Dieu d'Israël par le fils de David.

Quoi qu'il en soit, j'ai lu avec un vif intérêt l'histoire que nous présente M. Girault de la Musique religieuse des Hébreux, depuis l'invention des instrumens par Jubal, fils de Mathusaël, jusqu'à l'établissement de la loi nouvelle, et de l'introduction de la Musique dans les cérémonies du Christianisme (3).

(3) M. Girault rappelle les premières Orgues connues en France, envoyées à Pépin par Constantin Copronyme. Sous le règne de Louis le Débounaire, on en établit dans plusieurs Eglises du royaume. On croit que cet instrument étoit déja connu en Italie dans le septième siècle, mais il ne comprenoit vraisemblablement alors que les jeux de flûtes; les Orgues envoyées de Constantinople en France avoient en outre des jeux d'anche.

L'Orgue, si l'on s'attache au nom, seroit un instrument très-ancien. La flûte à plusieurs tuyaux que D. Calmet croit être l'Organum des Hébreux, avoit bien quelque analogie avec l'Orgue moderne. Margraff prétend qu'il y avoit une Orgue dans le temple de Jérusalem.

On trouve dans la Musique des Chinois, un instrument nommé Siao, composé de tuyaux de bambou et réunissant trois classes de sons, composée chacune de douze tuyaux différens; après avoir ajouté quatre autres tuyaux à chaque douzaine, on fit

Puisque vous avez déja accordé, Monsieur, dans votre Journal, deux places à cette discussion, j'ai pensé que vous accueil

deux instrumens de seize tuyaux, dont l'un pour les sons graves et l'autre pour les sons aigus.

L'Orgue hydraulique ou Clepshydre dont Athénée donne la description, étoit un instrument à plusieurs tuyaux placés sur une espèce de sommier; dans le corps de l'instrument il y avoit de l'eau que l'on agiloit pour produire le vent qui faisoit parler les tuyaux. Mais il ne faut pas se prendre au mot Organum qui, chez les Grecs, signifioit en général un instrument quelconque : gavo dérivoit de for, opus.

Quoi qu'il en soit, il y avoit loin des instrumens que nous venons de citer, à l'Orgue moderne lorsqu'il est enrichi de tous les jeux et de l'étendue qu'on a réussi à lui donner. Il faut convenir qu'on ne pouvoit imaginer un instrument plus capable de remplir et d'animer la vaste capacité de quelques Eglises chrétiennes et des grandes basiliques, et de faire retentir leurs voûtes d'une harmonie formidable, analogue à la grandeur du culte catholique. C'est surtout en Allemague qu'il faut aller pour connoître toute la puissance de ce majestueux instrument, que rien ne surpasseroit, si on lui donnoit enfin le degré de perfection dont il est peut-être susceptible et que l'on cherche depuis longtemps. M. Grétry appréciant tout le parti qu'on retireroit de cet instrument perfectionné, avoit cherché, dans le temps, à encourager les travaux d'Erard : j'ignore ce qui en a pu résulter; mais il me semble que, depuis lors, le Panhar 'monicon de M. Maelzel a approché de fort près du but, s'il ne l'a atteint réellement.

leriez avec la même faveur quelques observations sur un sujet particulier, mais qui me paroît se lier naturellement au précédent. Car, maintenant qu'il est établi, à ce que j'ai lieu de croire, que la Musique peut mêler ses accords avec les chants de l'Eglise et être admise dans le sanctuaire pour y augmenter la pompe des offices divins, il est convenable de s'occuper des moyens de l'y fixer et surtout de lui donner le caractère que réclame son objet. C'est rappeler le souvenir des anciennes Maîtrises des Cathédrales; et c'est en effet de l'utilité de leur rétablissement que j'aurai l'honneur de vous entretenir un instant, si vous me le permettez.

Je crois à ce rétablissement plusieurs avantages réels, non-seulement pour l'intérêt de la Musique d'Eglise, mais pour celui de l'Art en général, et même pour d'autres objets d'utilité publique.

La Musique d'Eglise ne peut prendre le caractère de noblesse et de grandeur qui lui convient, qu'en puisant ses leçons au pied de nos autels, qu'en cherchant dans nos temples les célestes inspirations de la religion, qu'en se nourrissant de bonne heure des beautés sublimes de nos livres saints, qu'en se familiarisant, pour ainsi dire, avec le ton et la langue des Prophètes. Un écrivain célèbre, dont l'imagination nous charme

autant qu'elle nous étonne, a dit : « Le <<< Christianisme est sérieux comme l'homme, « Le <<< et son sourire même est grave....... « Musicien qui veut suivre la religion dans <«tous ses rapports, est obligé d'apprendre << l'imitation des harmonies de la solitude. Il « faut qu'il connoisse ces notes mélancoliques «que rendent les eaux et les arbres; il faut « qu'il ait étudié le bruit du vent dans les «cloîtres, et ces murmures qui régnent dans «<les temples gothiques, dans l'herbe des cime«tières et dans les souterrains des morts (4). Il est difficile de monter sa lyre sur tous les tons tous les artistes ne sont pas des Pergolèze, des Haydn, des Gossec, des Méhul, des Grétry, des Lesueur, des Cherubini. Un Musicien habituellement occupé des chants passionnés du théâtre, de la Musique légère et sans caractère des petits concerts et des salons ou du fracas de la Musique guerrière, un tel artiste se pliera difficilement au genre sévère qu'exige la Musique sacrée; il ne pourra s'élever à cette austère dignité, à cette majesté imposante qui doit concorder avec la gravité des pompes religieuses des chants tumultueux, profanes ou frivoles viendront s'allier avec elles, en

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(4) Génie du Christianisme, partie III, livre premier.

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