Sivut kuvina
PDF
ePub

des ordonnances de 15to et 1539 qui, se référant à ces lois, les supposent nécessairement obligatoires dans tout le territoire français.

» Mais si, dans un contrat, il y a des doutes plus ou moins fondés, soit sur la nature, soit sur le sens de ses clauses; si, au lieu de dispositions claires et précises, il ne présente que des nuages plus ou moins épais ; si, en un mot, la manière dont il est rédigé, ouvre un champ vaste aux dissertations conjecturales, et que, dans les débats auxquels il donne lieu, les juges supérieurs se déterminent pour telle interprétation plutôt que pour telle autre, viendra-t-on dire qu'il y a eu, de leur part, violation du contrat ; et, sous ce prétexte, admettrez-vous les parties à vous présenter, comme moyens de cassation, ou les moyen d'appel, ou les réponses à griefs qu'elles ont inutilement fait valoir devant le tribunal dont elles attaquent le jugement?

» Loin d'ici un système qui dénaturerait entièrement, et l'institution des tribunaux d'appel et l'institution du tribunal de cassation, système qu'on a voulu naguère vous prêter dans une diatribe qui, par l'excès même de son insolence et par les erreurs de fait dont elle fourmille, est devenu un objet de pitié publique; mais système que vous avez constamment repoussé, et contre lequel dépose votre invariable jurisprudence... (1). » Examinons donc si, par le jugement dont se plaint le demandeur, le tribunal d'appel de Paris a violé textuellement le contrat passé entre Bellanger et Imbert, le 23 floréal an 3, ou s'il n'a fait que lui donner une interprétation, sinon à l'abri de toute critique, du moins très-plausible et telle que l'on puisse la défendre, sans abjurer les premières règles de la logique.

» Qu'a décidé, par rapport à cet acte, le tribunal d'appel de Paris? Il a décidé que cet acte ne contenait pas, de la part du cit. Imbert, une obligation personnelle de payer aux enfans du cit. Bellanger, le douaire qui peut un jour leur être dû; il a décidé que cet acte ne contenaif, de la part du cit. Imbert, qu'un consentement à ce que la maison qu'il acquérait, demeurât spécialement hy. pothéquée à ce douaire; il a décidé que cet acte ne contenait, de la part des deux contractans, qu'une stipulation et un engage ment hypothécaires.

» Le demandeur soutient qu'en prononçant

(1). les conclusions du 2 février 1808, rapportées dans le Répertoire de jurisprudence, au mot Société, sect. 2, §. 3, art. 2.

ainsi, le tribunal d'appel a violé les dispositions de cet acte; et cependant il est forcé de convenir que cet acte n'impose au cit. Imbert ni soumission expresse, ni obligation nominativement personnelle, d'acquitter le douaire à sa décharge; mais voici comment il raisonne.

» Il est de principe que, dans les conventions, on doit rechercher quelle a été l'intention des parties contractantes, sans s'embarrasser du sens grammatical des termes. Or, si nous consultons l'acte du 25 floréal an 3, nous n'y trouverons pas, à la vérité, les dénominations formelles et positives de soumission, d'obligation personnelle; mais la chose s'y fera remarquer partout, et c'est là l'essentiel.

» Dès le début du contrat, le vendeur annonce à l'acquéreur qu'il le garantira de toutes les évictions et de toutes les hypothèques, à l'exception du douaire. Voilà donc l'acquéreur bien averti que le douaire est destiné à retomber sur lui; le voilà donc déjà obligé personnellement au douaire.

» Ensuite, le vendeur exige que l'acquéreur garde dans ses mains, pour sûreté et jusqu'à l'ouverture du douaire, une somme de 240,000 livres qui en forme précisément le capital; il entend donc que ces 240,000 livres seront appliquées par l'acquéreur au paiement du douaire; il entend donc que l'acquéreur ne pourra les payer qu'entre les mains des douairiers; il entend donc donner aux douairiers, dans la personne de l'acquéreur, un débiteur direct exclusif.

>> C'en était assez sans doute pour exprimer l'intention des parties; mais l'acte va encore plus loin; le cit. Imbert y déclare, à son tour, que cette condition de la vente est bien entendue par lui et bien acceptée.

» Et les deux parties sont tellement pénétrées de cette intention d'appliquer les 240,000 livres au paiement du douaire, que, pour en garantir imperturbablement l'exécution, le cit. Imbert affecte et hypothèque à la sureté des obligations qu'il contracte, nonseulement les neuf arcades qui lui sont vendues, mais encore tous ses biens meubles et immeubles, présens et à venir. Certes, ce n'est point là un engagement purement hypothécaire; une telle affectation, de la part de l'acquéreur, constitue un engagement personnel, un engagement direct, un engagement absolu.

» Cependant ce n'est pas tout. Le cit. Bellanger a tellement à cœur qu'il soit bien reconnu par le contrat, que le cit. Imbert demeurera seul et invariablement chargé du douaire; que, par une précaution ultérieure,

il déclare que son intention est que les neuf arcades soient toujours le gage spécial du douaire.

» Il fait plus encore. Pour manifester d'autant mieux sa volonté de faire peser l'obligation du douaire sur la personne du cit. Imbert exclusivement, il déclare qu'il entend avoir désormais la libre disposition de tous ses immeubles; il ne veut pas qu'aucun acquéreur puisse le gêner en prétendant retenir le fonds du douaire ni lui opposer à cet égard la moindre inquiétude ; il veut, au contraire, que les neuf arcades acquises de lui par le cit. Imbert, forment pour le douaire un assignat spécial, et en offrent ainsi la responsabilité toujours subsistante.

» Enfin, ce qui lève toute difficulté, c'est que le cit. Imbert, à la suite de la déclaration du cit. Bellanger, reconnaît que les neuf arcades par lui précédemment acquises, sont et resteront affectées et hypothéquées à toujours à la GARANTIE du douaire, et que ce n'est que par suite de cette affectation et de la GARANTIE qui en résulte, que les acquéreurs des autres immeubles vendus ou à vendre

par le cit. Bellanger, lui ont payé ou paieront ce qu'ils lui doivent pour le prix de leurs acquisitions.

>> Par cette clause, le cit Imbert entend si bien se charger personnellement du douaire, qu'il en garantit, pour ainsi dire, tout le monde.

» Et qui, d'après cela, paierait donc le douaire, si ce n'était le cit. Imbert?

» Serait ce le cit. Bellanger? Mais il a le droit de vendre tout ce qui lui reste, et le cit. Imbert ne peut pas l'inquiéter à raison du douaire.

» Seraient-ce les acquéreurs qui avaient acheté avant le cit. Imbert? Mais le cit. Imbert lui-même a consenti qu'ils payassent le cit. Bellanger, et il s'est soumis à le garantir.

» Seraient-ce les acquéreurs qui pourront acheter un jour? Mais il est dit dans le contrat que ces acquéreurs ne pourront pas gêner le vendeur par la retenue du fonds du douaire, et le fonds du douaire aura toujours pour que assignat spécial les neuf arcardes vendues au cit. Imbert.

» Le douaire ne regarde donc absolument que le cit. Imbert. Lui seul est donc tenu d'en effectuer le paiement. Il s'est donc soumis à ce paiement.

» Telle est la conclusion du cit. Bellanger; et pour l'apprécier, nous croyons devoir nous arrêter à trois choses: à l'intention des parTOME XI.

ties contractantes, relativement au mode de paiement du prix stipulé dans leur contrat; au but direct et patent des clauses relatives au douaire; à ces clauses elles-mêmes.

>> L'intention des parties contractantes était-elle, pouvait-elle être, qu'en cas de retour de la monnaie métallique, le cit. Imbert fût tenu de payer en numéraire les 240,000 livres qu'il s'obligeait de garder pour la sûreté et jusqu'à l'ouverture du douaire? Si elles ont eu cette intention, rien de plus raisonnable que de supposer, dans le contrat, une sou. mission personnelle, du cit. Imbert au paiement du douaire. Si elles ne l'ont pas eue, rien au contraire de moins admissible qu'une pareille supposition.

» Or, pour juger, sinon quelle a été, du moins quelle a dû être, à cet égard, leur intention, il faut se reporter aux circonstances dans lesquelles elles ont traité.

» Elles ont traité en floréal an 3, c'est-àdire, à l'une des époques les plus critiques de la révolution; à une époque où le gouvernement disséminé dans trois grands comités, et par conséquent sans force, était incapable de conjurer les orages que l'esprit de parti, l'or de l'étranger et la famine amoncelaient sans cesse autour du vaisseau de la république ; à une époque, par conséquent, où il ne devait exister, où il n'existait, en effet, aucune ombre de crédit; et où, par une suite nécessaire, les immeubles devaient avoir perdu considérablement de la valeur qu'ils avaient eue, non seulement dans les dernières années de la monarchie absolue, mais même dans les

premières années qui avaient suivi la mémorable journée du 14 juillet 1789.

» Ce n'est donc ni à l'année 1787, ni même à l'année 1791, qu'il faut remonter pour connaître la valeur vénale des neuf arcardes dont il s'agit en floréal an 3, et conséquemment l'esprit dans lequel ont dû alors traiter les cit. Imbert et Bellanger, relativement à la fixation du prix de cet immeuble.

" Il importe donc peu qu'en 1787 ces neuf arcades aient été vendues par Philippe d'Orléans au polonais Ryewski, moyennant 450,000 livres, valeur métallique, et que celui-ci les ait revendues, le 15 juin 1791, moyennant 512,000 livres assignats, représentant à cette époque, suivant le tableau de dépréciation du département de la Seine, une somme de 426,480 livres en numéraire.

» Mais ce sur quoi il importe de se bien fixer, c'est le prix commun auquel se vendaient les arcades du palais du Tribunat, aux époques les plus rapprochées du contrat dont il est ici question.

15

» Or, il est prouvé au procès, qu'en ven. tôse an 3, chaque arcade s'est vendue depuis 84,000 jusqu'à 130,000 livres; en germinal et floréal, depuis 87,000 jusqu'à 118,000 livres; en prairial, 150,000 livres; en thermidor, 383,000 livres.

» Le moyen terme de ces différens prix est de 256,250 livres : somme qui, à très-peu de chose près, répond aux 250,000 livres qui, dans le contrat des cit. Imbert et Bellanger, forment le prix de chacune des arcades vendues par celui-ci à celui-là; et observez que c'est trop accorder au cit. Bellanger que de partir ici de ce moyen terme : car il est bien sûr que les parties, en traitant ensemble ont dû s'arrêter uniquement au prix courant du mois dans lequel elles traitaient, et de ceux qui l'avaient immédiatement précédé; et si l'on ne peut pas raisonnablement leur supposer, sur le prix des mois suivans, une prescience en quelque sorte surnaturelle, serait pas plus raisonnable d'imaginer que cette prétendue prescience eût influé, pour quelque chose, dans la fixation du prix stipulé entre elles.

il ne

» C'est donc à leur véritable, ou, pour parler plus juste, à leur plus haute valeur en Papier-monnaie, que les neuf arcades ont été portées par le contrat.

» Or, est-il vraisemblable qu'après avoir ainsi réglé en assignats le prix de leur traité, les cit. Imbert et Bellanger aient eu seulement la pensée, l'un d'exiger et l'autre de consentir que, sur les 2,100,000 livres qui formaient ce prix, il en serait payé 240,000 livres en numéraire ? Nous ne craignons pas de le dire, non, il n'y a là aucune ombre de vraisemblance; et tout, au contraire, se réunit pour faire présumer que les parties ont entendu que ces 240,000 livres seraient payées comme le restant du prix.

» Quel est donc le but direct et patent des clauses qui, dans le contrat du 25 floréal an 3, se réfèrent au douaire? C'est là le second objet que nous avons promis d'examiner, et c'est ici le moment de le faire.

» Il résulte du contrat du 25 floréal an 3, qu'à l'époque où il a été souscrit, le cit. Bellanger venait de vendre à différens particuliers des immeubles dont le prix lui était encore dû; qu'il voulait toucher la totalité de ce prix, sans que les acquéreurs pussent lui en retenir une partie pour sûreté du douaire de ses enfans; et que c'est pour parvenir à ce but, qu'il a pris le parti de leur offrir, dans les neuf arcades qu'il vendait au cit. Imbert, un gage spécial qui devait les mettre

hors de toute inquiétude sur l'événement de l'ouverture du douaire.

» C'est effectivement ce qu'on voit dans une première clause, par laquelle le cit. Bellanger annonce des oppositions de la part des cit. Depestre, Delondre, Bidaut, Cabaret, Hortillac et Michel, tous acquéreurs de différens immeubles qu'il leur a vendus précédemment, lesquels, est-il dit, se sont réservé le droit de former lesdites oppositions pour súreté du fonds du douaire.

» Après cette clause, en vient une autre ainsi conçue : déclare le vendeur que son intention est que ladite maison, présentement vendue, soit à toujours le gage spécial du douaire, jusqu'à son ouverture, et afin qu'en tout événement et dans toutes les opérations que pourrait faire par la suite le vendeur, relativement à ses immeubles, aucun acquéreur quelconque ne puisse géner le vendeur en prétendant retenir le fonds dudit douaire, qui aura toujours ladite maison pour assignat spécial.

et

Le contrat ajoute immédiatement attendu cette intention bien prononcée, termes qui assurément ne laissent aucun doute sur le motif qui, dans cette stipulation, guide et dirige le cit. Bellanger, le vendeur met pour condition spéciale, que l'acquéreur ne pourra se libérer des 240,000 livres fonds du douaire,

avant son ouverture.

» Tel est donc le but direct et patent des clauses qui, dans le contrat, sont relatives au douaire: le cit. Bellanger ne veut pas qu'aucun obstacle puisse entraver le paiement des aliénations qu'il vient de faire ou qu'il pourra faire par la suite; il veut déterminer ses acquéreurs à ne pas retenir dans leurs mains chacun une somme équivalente au fonds du douaire; et pour y parvenir, il leur présente la maison qu'il vend au cit. Imbert, comme un assignat spécial, sur lequel ce douaire demeurera invariablement hypothéqué, jusqu'à ce qu'il soit ouvert. Voilà tout ce qu'il veut; et vous sentez que, pour donner effet à cette volonté, il n'a pas besoin d'imposer au cit. Imbert l'obligation personnelle d'acquitter le douaire à son ouverture; vous sentez que, pour donner effet à cette volonté, il suffit qu'il obtienne du cit. Imbert un consentement à ce que la maison demeure affectée spécialement au douaire même.

» Ainsi, à partir du motif exprimé dans le contrat, le cit. Imbert n'est pas obligé personnellement à payer le douaire; il se charge seulement de souffrir sur la maison qu'il acquiert, une hypothèque pour la sûreté de cette créance. Et remarquons bien qu'en gé

1

néral, les motifs des contrats sont les règles les plus sûres auxquelles on puisse s'attacher, pour l'interprétation exacte de leurs différentes clauses; car ce sont les motifs des parties qui constituent leur volonté; et la loi 29, D. de verborum significatione, nous avertit que, in conventionibus contrahentium, voluntatem potiùs quàm verba spectari pla

cuit.

» Il existe donc déjà deux fortes présomptions contre le système du cit. Bellanger : la première, c'est que les parties contractantes ont réglé leur prix sur la plus haute valeur qu'avaient alors, en Papier-monnaie, les arcades du palais du Tribunat ; la seconde, c'est que, d'après les motifs expressément énoncés dans le contrat, le cit. Bellanger ne cherchait qu'à procurer au douaire dont il était éventuellement chargé envers ses enfans, une hypothèque spéciale qui pût en garantir ses autres biens vendus et à vendre.

» Maintenant entrons, s'il est permis de nous exprimer ainsi, dans l'intérieur même du contrat du 25 floréal an 3 et pesons-en toutes les clauses relatives au douaire.

» La première est la déclaration du cit. Bellanger, qu'il vend les neuf arcades, avec promesse de garantir l'acquéreur de tous troubles, empêchemens, evictions et hypothèques, à l'exception du douaire préfix dont il sera parlé ci-après.

» Que résulte-t-il de cette déclaration? Une seule chose: c'est que l'acquéreur n'aura point d'action contre le vendeur pour le contraindre à faire cesser l'hypothèque du douaire; c'est qu'il sera tenu de souffrir cette hypothèque. Mais entre souffrir une hypothèque et être obligé personnellement à la dette qui en est l'objet, la différence est assurément trèsgrande; et vouloir argumenter de l'un à l'autre, c'est oublier les principes élémentaires du droit.

» La seconde clause dont se prévaut le cit. Bellanger, porte que, du prix de la vente, l'acquéreur sera tenu d'en garder 240,000 livres pour sûreté et jusqu'à l'ouverture du douaire, stipulé par le contrat de mariage du vendeur, propre à ses enfans; à la charge toutefois d'en payer l'intérêt à quatre pour cent..... par chaque année, à compter du 1er juillet prochain.

» Le cit. Bellanger conclud de là que le cit. Imbert s'est obligé d'appliquer les 240,000 livres au paiement du douaire; qu'il s'est soumis à ne verser cette somme qu'entre les mains des douairiers; qu'il s'est constitué leur débiteur direct et personnel.

» C'est ainsi, en effet, que le conseil des

cinq cents avait envisagé ces sortes de clauses, dans sa première rédaction de l'art. 11 de la loi du 27 thermidor an 6; et la preuve en est écrite dans l'art. 12 de sa résolution du 11 germinal de la même année: tout acquéreur volontaire ou judiciaire (portait cet article), qui, par clause de son titre, a retenu dans ses mains le fonds d'un douaire, en diminution du prix, quoique stipulé en Papier-monnaie, est tenu de payer le capital, si le droit est ouvert, ou lors de son ouverture, de la même manière que le douaire doit l'être, suivant l'art. 14 de la loi du 16 nivóse dernier; 2o de servir jusqu'alors la rente en numéraire métallique ; si mieux il n'aime résilier, en con formité de l'art. 10 de ladite lọi.

» Mais la résolution dont cet article faisait partie, ayant été rejetée, le 3 floréal suivant› par le conseil des anciens, le conseil des cinq cents a senti qu'il avait été trop loin, en assujétissant l'acquéreur à payer le douaire en monnaie métallique, par cela seul qu'il en aurait retenu l'équivalent en diminution de son prix; il a reconnu que c'était une erreur d'assimiler une pareille clause à l'indication de paiement dont parle l'art. 10 de la loi du 16 nivóse; et par une nouvelle résolution du 24 prairial, qui a été convertie en loi, le 27 thermidor, par le conseil des anciens, il a fait la distinction que nous avons déjà remarquée entre l'acquéreur qui s'est soumis au paiement du douaire, et l'acquéreur qui ne s'y est pas soumis.

» Ainsi, la loi elle-même condamne formellement l'induction que l'on voudrait tirer ici de la clause qui charge l'acquéreur de garder 240,000 livres pour sûreté du douaire des enfans du vendeur. Et quand la loi ne la condamnerait pas, le bon sens ne suffirait-il pas pour la repousser?

» Observons-le bien, c'est uniquement pour sûreté de douaire, que l'acquéreur est tenu de garder les 240,000 livres; ce n'est donc pas pour le paiement du douaire même; l'acquéreur se constitue bien dépositaire d'une somme qui sert de gage au douaire, mais il ne s'oblige pas pour cela envers les douairiers ; il ne donne pas pour cela aux douairiers une action directe et personnelle contre lui; seulement il se met dans le cas de ne pouvoir payer les 240,000 livres aux héritiers du vendeur, qu'après s'être assuré de leur libération envers les douairiers; comme un débiteur entre les mains duquel a été pratiquée une saisie-arrêt, ne peut payer son créancier qu'après que celui-ci s'est acquitté envers le saisissant, sans que, pour cela, le saisissant puisse le compter au nombre de ses débiteurs directs.

» Et ce qui prouve bien clairement que l'acquéreur, en s'obligeant de garder les 240,000 livres pour sûreté du douaire, ne s'oblige pas à les payer directement aux douairiers; ce qui prouve bien clairement qu'il ne demeure obligé qu'à les payer aux heritiers du vendeur; c'est que, par la clause immédia tement subséquente à celle dont il s'agit, il est stipulé que, lors et après l'ouverture du douaire, l'acquéreur pourra se libérer de 240,000 livres à sa volonté, soit en deux paiemens égaux, soit en un seul paiement. Il est sensible, en effet, que, si l'acquéreur était obligé personnellement à payer le douaire entre les mains des douairiers, il faudrait qu'il le leur payât, intégralement et en une seule fois; il faudrait qu'il le leur payât dès l'instant que ce droit serait échu. Pourquoi donc le vendeur lui accorde-t-il des facilités pour le paiement? C'est parceque c'est envers le vendeur seul que l'acquéreur s'oblige; c'est parceque c'est aux héritiers du vendeur luimême que l'acquéreur doit payer; c'est parcequ'il n'est lié personnellement qu'envers le vendeur.

» Sans doute, cette clause serait insignifiante, sans doute elle prouverait seulement que le vendeur, en accordant des facilités à l'acquéreur, pour le paiement des 240,000 livres, a mal à propos entrepris sur les droits des douairiers, si d'ailleurs, par les autres clauses du contrat, l'acquéreur s'était constitué personnellement et directement débiteur du douaire.

» Mais les autres clauses du contrat ne di

sant rien de semblable, les autres clauses du contrat ne présentant que des sûretés, qu'une hypothèque stipulée pour le douaire, la clause dont il est ici question, doit avoir tout l'effet attaché aux termes dans lesquels elle est conçue; elle doit prouver que l'acquéreur n'est personnellement obligé à rien envers les douairiers; elle doit prouver qu'il n'existe d'action personnelle contre lui que de la part du vendeur ou de ses héritiers.

» A la suite de cette clause, vient celle qui impose au cit. Imbert la charge de souffrir les oppositions que d'autres acquéreurs précédens pourraient former au sceau de ses lettres de ratification, pour sûreté du paiement du douaire auquel sont également hypothé qués les immeubles qu'ils ont achetés. Et certes, il n'y a pas encore là, pour le cit. Imbert, d'obligation personnelle d'acquitter le douaire à son ouverture; ce n'est encore là, pour lui, qu'un engagement de souffrir que l'hypothèque du douaire pèse spéciale

ment et de préférence sur la maison qu'il acquiert.

» Mais, voici une clause qui, au premier coup d'œil, paraît en dire beaucoup plus : Pour sûreté des obligations ci-dessus, la maison présentement vendue demeure, par privilége spécial, affectée et hypothéquée; et en outre, sans qu'une obligation déroge à l'autre, l'acquéreur affecte et hypothèque à la même sûreté tous ses biens meubles et immeubles présens et à venir. Affecter tous ses biens meubles et immeubles, à la sûreté d'une obligation, c'est certainement, dit le cit. Bellanger, se soumettre personnellement à l'accomplissement de cette obligation, et puisque le douaire fait partie des obligations ci-dessus, il est clair que l'acquéreur se soumet personnellement au paiement du douaire. » Oui, sans doute, par cela seul que le cit. Imbert affecle tous ses biens meubles et immeubles à la sûreté des obligations ci-dessus, le cit. Imbert se soumet personnellement à remplir ces mêmes obligations.

» Mais est-il vrai que le paiement du douaire fasse partie des obligations ci-dessus ? Le cit. Bellanger le suppose ainsi, et c'est, comme vous le voyez, trancher la question par la question même.

dessus, ou, en d'autres termes, à quoi le » En quoi consistent les obligations cicit. Imbert s'est-il obligé par les clauses précédentes?

» Il s'est obligé à payer le prix de la maison ostensiblement fixé par le contrat à 1,800,000 livres, quoique montant, dans la réalité, à 2,100,000 livres. Il s'est obligé à garder une portion de ce prix jusqu'à l'ouverture du douaire, et pour en assurer le paiement aux douairiers. Il s'est obligé à souffrir les oppositions que d'autres acquéreurs pourraient former sur sa maison pour sûreté de ce même douaire. Il s'est obligé à tout cela, et c'est à toutes ces obligations qu'il affecte tous ses biens meubles et immeubles présens et à venir. » Mais s'est-il obligé à payer lui-même le douaire aux douairiers? Nous avons démontré que non. Donc le paiement du douaire n'est pas compris dans les obligations ci-dessus; donc ce n'est pas au paiement du douaire qu'il affecte tous ses biens; donc la clause dans laquelle le cit. Bellanger parait mettre tant de confiance, est absolument inconcluante.

» Le cit. Bellanger tirera-t-il un meilleur parti de la clause par laquelle il déclare que la maison vendue sera toujours le gage spécial du douaire, jusqu'à son ouverture; et ce, afin qu'en tout événement, et dans toutes

« EdellinenJatka »