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S. IV. Le Pouvoir judiciaire est-il compétent pour connaître des compensations opposées au trésor public par ses débi

teurs ?

V. l'article Compensation, §. 3.

S. V. Quelles étaient, avant l'abolition de la taxe d'entretien des routes, les attributions respectives de l'autorité administrative et du Pouvoir judiciaire, pour les contestations qui s'élevaient au sujet de cette taxe ?

V. l'article Taxe d'entretien des routes.

S. VI. Est-ce au Pouvoir judiciaire ou à l'autorité administrative, qu'appartient la connaissance des contestations qui s'élèvent entre la regie de l'enregis trement et les redevables de rentes ou prestations domaniales?

V. le plaidoyer et l'arrêt du 3 pluviôse an 10, rapportés à l'article Rente foncière,

S. 10.

S. VII. 10 Est-ce au Pouvoir judiciaire ou à l'autorité administrative, qu'appartient la connaissance de la demande formée contre un agent du gouvernement, en paiement de lettres de change qu'il a tirées en sa qualité ( pour denrées fournies à l'État par des particuliers), sur l'entrepreneur général de la fourniture de ces denrées?

2o Que doit-on décider à cet égard, s'il s'agit d'une lettre de change tirée sur le trésor public par un agent consulaire du gouvernement, pour faire face à des dépenses qui sont au compte du gouvernement lui-même ?

30 Que doit-on décider relativement à une obligation contractée par un particulier pour le comple et de l'ordre d'un agent du gouvernement, mais sans faire mention de cet ordre, et lorsque d'ailleurs rien ne constate que cet ordre fút connu du donneur de valeur ?

40 Que doit-on décider relativement à des lettres de change qu'un membre et le directeur d'une compagnie d'entrepreneurs pour le service de l'État, ont tirées pour les besoins de ce service, mais de l'ordre d'un préposé de l'administration qui les a endossées sans énonciation de sa qualité ?

I. Il existe, sur la première de ces questions, plusieurs arrêts de la cour de cassa

tion.

Le 17 fructidor an 7, ordre du ministre de la marine, qui, sur la proposition du munitionnaire général des vivres de ce département, place le sieur Labouret au port de Quimper, pour y remplir, sous le nom de garde-magasin, les fonctions de directeur des vivres.

Les 22 ventôse, 4 et 8 fructidor an 9, lettres du munitionnaire général aux sieurs Guertin, Joguez et Dufou, de Nantes, Blaise, de Saint-Malo, et Baour, de Bordeaux, par lesquelles il ouvre sur eux respectivement des crédits au sieur Labouret, en sa qualité de directeur des vivres de la marine à Quimper.

Les 9 et 15 germinal et 20 fructidor de la même année, Guertin, Joguez, Dufou, Blaise et Baour informent Labouret des crédits qui lui sont ouverts chez eux.

Les 12 et 26 du même mois fructidor an 9, Labouret tire sur Joguez et Dufou, d'une part, et sur Baour, de l'autre, deux lettres de change à l'ordre de Pierre Lemoing et Sébastien Loyez, toutes deux causées pour frêts dus par le gouvernement, et toutes deux signées Labouret, garde-magasin des vivres de la marine.

Ces lettres de change sont protestées à leurs échéances, par l'effet de la faillite du munitionnaire général.

Loyez et Lemoing font en conséquence assigner Labouret au tribunal de commerce de Quimper, en remboursement de ces lettres de change.

Labouret oppose sa qualité de garde-magasin, au moyen de laquelle l'obligation qu'il a contractée, ne peut pas peser sur lui personnellement, et l'arrêté des consuls du 19 thermidor an 9, portant que « les contesta» tions relatives au paiement des fournitures » faites pour le compte du gouvernement, » entre les particuliers et les agens du gou» vernement, seront de la compétence des » prefets »; et il demande son renvoi devant l'autorité administrative.

Mais par jugemens des 23 brumaire et 28 frimaire an 10, le tribunal de commerce rejette le déclinatoire, et condamne Labouret à rembourser les deux lettres de change.

Labouret se pourvoit en réglement de juà la cour de cassation; et le 22 pluviose an 10, arrêt, au rapport de M. Minier, par

ges

lequel,

«Attendu que les lettres de change qui ont fait l'objet des contestations jugées par le tribunal de commerce de Quimper, les 23 brumaire et 28 frimaire, ont été tirées par le

demandeur, en sa qualité de garde-magasin des vivres de la marine, et qu'elles ont eu pour cause des frêts dus par le gouvernement;

» Attendu qu'aux termes de l'arrêté des consuls, du 19 thermidor an 9, les contestations de cette nature sont de la compétence des préfets;

» Attendu que les lettres de change tirées par le demandeur, l'ont été sur des maisons sur lesquelles le munitionnaire général des vivres lui avait ouvert des crédits relatifs à sa gestion;

» Attendu que le déclinatoire proposé par le demandeur, était fondé, et qu'il a été mal à propos Idébouté de sa demande en renvoi devant l'autorité compétente ;

>> Le tribunal, sans avoir égard aux jugemens du tribunal de Quimper, qui sont considérés comme non avenus, renvoie les parties à se pourvoir, ainsi qu'elles aviseront, devant l'administration compétente pour con. naître de leur différend ».

Le 6 frimaire an 9, lettre du ministre de la marine au préfet maritime du quatrième arrondissement, qui lui annonce que le sieur Duparcq est attaché au service de la marine à Nantes, en qualité de directeur des vivres.

Peu de temps après, traité entre le gouvernement et Minet-Gérard, par lequel celui-ci se charge, en qualité de munitionnaire général, de la fourniture de tous les vivres de la marine. Par une clause de ce traité, il est dit que les employés du gouvernement destinés à faire le service des vivres sous les ordres de munitionnaire, continueront de faire partie de l'administration de la marine; et ne pourront même être révoqués par le munitionnaire que du consentement du ministre.

En conséquence, le sieur Duparcq continue, jusqu'au 30 brumaire an 10, jour de la cessation de ses fonctions, d'être porté sur les états des revues du port de Nantes.

Dans l'intervallle, le sieur Duparcq, en sa qualité, achète, pour le compte du munitionnaire général, des farines et d'autres denrées qui sont versées dans les magasins de l'État.

Le garde magasin en délivre les certificats aux différens fournisseurs; et, sur la représentation de ces certificats, Duparcq leur remet des lettres de change qu'il tire, en sa qualité, sur le munitionnaire général.

A l'échéance, et faute de paiement de la part du munitionnaire général, les fournisseurs font assigner Duparcq devant le tribunal de commerce de Nantes.

Duparcq soutient qu'en sa qualité d'agent du gouvernement, il n'est pas justiciable de ce tribunal, et que l'affaire doit être jugée administrativement.

Mais par douze jugemens en dernier ressort, et par d'autres rendus à la charge de l'appel, le tribunal de commerce se declare compétent, et condamne Duparcq.

Recours en réglement de juges de la part de celui-ci ; et le 18 messidor an 10, arrêt, au rapport de M. Chasle, qui,

Attendu que les traites et demandes qui ont fait l'objet des jugemens dont il s'agit, ont eu pour cause des fournitures de denrées pour le compte du gouvernement; que lesdites traites ont été faites par le demandeur, en qualité de directeur des vivres de la marine, sur le munitionnaire général des vi

vres ;

» Attendu qu'aux termes de l'arrêté des consuls, du 19 therminor an 9, les contestations relatives au paiement des fournitures faites pour le compte du gouvernement, entre les particuliers et les agens du gouvernement, sont de la compétence des préfets; que cet arrêté, invoqué par le demandeur au soutien du déclinatoire par lui proposé, a été élude par les juges du tribunal de commerce à Nantes;

» Attendu que ce déclinatoire était fondé, et que c'est mal à propos et contre le vœu de la loi que le demandeur en a été débouté ;

» Sans s'arrêter ni avoir égard aux jugemens rendus par le tribunal de commerce, seant à Nantes, lesquels sont considérés comme non avenus, renvoie les parties à se pourvoir, ainsi qu'elles aviseront, devant l'autorité administrative compétente ».

Le 7 vendémiaire an 11, le même Duparcq dénonce à la cour de cassation, par une requête en réglement de juges, quinze jugemens du tribunal de commerce de Nantes, semblables à ceux qui avaient été annulés le 18 messidor an 10.

Et dès le 21 du même mois, arrêt, au rapport de M. Chasle, par lequel ces quinze jugemens sont également déclarés comme non avenus. Il est inutile d'en transcrire les motifs et le dispositif ; il n'est, dans l'une et dans l'autre partie, que la répétition du précédent.

Le sieur Labouret, sous-chef de l'administration des vivres de la marine, avait, en cette qualité, souscrit quatre lettres de change au profit de Conedet et d'autres personnes.

Ces lettres de change ayant été protestées faute de paiement, les porteurs avaient pour

suivi leurs endosseurs, qui, de leur côté, avaient assigné Labouret en garantie devant le tribunal de commerce de Vannes.

Ce tribunal avait, en effet, par quatre jugemens en dernier ressort, des 12 et 16 frimaire an 10, condamné Labouret à garantir Conedet et les autres endosseurs des poursuites exercées contre eux.

Mais sur le recours en cassation de Labouret, arrêt du 8 messidor an 11, au rapport de M. Henrion par lequel,

« Vu l'art. 13 du tit. 2 de la loi du 24 août 1790, et la loi du 16 fructidor an 3;

» Attendu que, dans les affaires administratives, se placent naturellement toutes les opérations qui s'exécutent par les ordres du gouvernement, par ses agens, sous ses ordres et avec les fonds du trésor public;

» Attendu qu'il est écrit dans les quatre jugemens attaqués, que Labouret, sous-chef de l'administration des vivres de la marine, a traité avec le défendeur en cassation en sadite qualité, c'est-à-dire, comme agent du gouvernement, pour le gouvernement et en son nom;

» Le tribunal casse les quatre jugemens; et pour être statué sur le fond, renvoie les parties à se pourvoir devant les autorités administratives ».

Aurait on dû juger de même, s'il se fût agi d'une lettre de change qu'un agent du gouvernement eût tirée conjointement avec des particuliers justiciables des tribunaux ordi

naires?

On verra ci-après, no 4, qu'un arrêté du gouvernement du 15 brumaire an 10, et deux décrets des 25 thermidor an 13 et 31 mai 1807, ont décidé pour l'affirmative.

II. La seconde question est décidée dans le même sens par un décret du 11 avril 1810, ainsi conçu :

l'ordre de Michel Buzenach, de Marseille, et par celui-ci au sieur Rault;

» Vu le certificat du ministre des relations extérieures, qui constate que la lettre de change dont il s'agit, a été tirée par le sieur Dubois-Thainville pour fournir au paiement des limes dues par la France à la régence d'Alger;

» Vu l'arrêté du préfet de la Seine, qui a élevé le conflit;

» Vu l'arrêté du 19 messidor an 9, qui attribue aux préfets la connaissance des contestations entre les particuliers et les agens du gouvernement, en raison des fournitures faites pour le compte de l'État ;

» Notre conseil d'État entendu, nous avons décrété et décrétons ce qui suit :

» Art. 1er. Le jugement du tribunal de Marseille du 7 août 1809, est déclaré nul et non avenu.

» La cause et les parties sont renvoyées devant l'autorité administrative.

» Notre grand-juge ministre de la justice, et notre ministre des relations extérieures sont charges, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret ».

III. La troisième question s'est présentée dans l'espèce suivante.

Au mois de juillet 1815, le sieur Petit achète verbalement du sieur Tribard, la récolte d'un arpent de pré, moyennant 420 francs.

Le 6 septembre 1817, le sieur Tribard dispose de cette somme sur le sieur Petit, par une lettre de change qui, à son échéance, est protestée faute de paiement.

Assigné en remboursement par le porteur devant le tribunal de commerce de Bourges, le sieur Tribard met en cause le sieur Petit. Le sieur Petit pouvait décliner la juridic tion de ce tribunal, sur l'unique fondement

« Sur le rapport de notre commission du qu'il n'avait ni tiré, ni endossé, ni accepté la contentieux,

» Vu le rapport présenté par notre grandjuge ministre de la justice, ayant pour objet de faire statuer sur l'arrêté du préfet de la Seine, qui élève le conflit entre l'autorité administrative et le tribunal de Marseille, dans la contestation entre le sieur Rault et le sieur Dubois-Thainville, consul à Alger;

» Vu le jugement du tribunal de commerce de Marseille, qui condamne le sieur DuboisThainville au paiement d'une lettre de change de 16,462 francs 80 centimes, tirée d'Alger, le 1er messidor an 13, au profit de SimonCaën Zulats, valeur reçue d'Éliaon, Bedjaia, l'un et l'autre négocians algériens, passée à

lettre de change dont il s'agissait, et invoquer, à ce sujet, les arrêts de la cour de cassation rapportés à l'article Lettre de change, §. 4.

Mais, préférant le parti de défendre au fond, il soutient que ce n'est pas pour son propre compte, que c'est uniquement pour le compte de la ville de Bourges, obligée, à cette époque, de fournir des foins pour le service de l'armée de la Loire et en vertu d'une commission expresse du maire de cette ville, qu'il a acheté la récolte de pré dont le montant de la lettre de change forme le prix. En conséquence, il conclud à ce qu'en le déchargeant de la demande intentée contre lui, le tribunal renvoie le sieur Tribard à se pour

voir devant l'administration, pour obtenir le paiement de ses 420 francs.

Il produit, à l'appui de cette défense, des certificats du maire de Bourges, qui s'accordent parfaitement avec ses allegations, et attestent de plus que la municipalité poursuit depuis long-temps, auprès du gouvernement, la liquidation de la dette dont il s'agit, ainsi que de plusieurs autres contractées pour la même cause et dans la même forme par le sieur Petit.

Le sieur Tribard répond qu'il n'existe, sur les registres de la mairie de Bourges, aucune délibération qui ait chargé le sieur Petit d'acheter des foins pour le compte de la ville; que d'ailleurs le sieur Petit ne lui a pas acheté ceux dont il s'agit, comme préposé de l'administration, mais en son nom personnel; et qu'il a même reconnu depuis, à différentes reprises, en présence de témoins, qu'il était personnellement tenu d'en payer le prix.

Le 13 octobre 1817, jugement qui, en condamnant le sieur Tribard à rembourser le

montant de la traite au porteur, l'admet à prouver par témoins les faits qu'il oppose à la defense du sieur Petit.

Le 3 novembre suivant, arrêté du préfet du département du Cher, qui élève le conflit. En conséquence, l'affaire est portée au conseil d'état; et sur le rapport du comité du contentieux, il intervient, le 3 juin 1818, une ordonnance ainsi conçue :

« Considérant qu'il n'est produit aucune pièce antérieure à la vente, constatant que le sieur Petit fût chargé d'acheter des foins pour le compte de la municipalité de Bourges; que les certificats postérieurs à cette vente, ne peuvent produire aucun effet au préjudice du vendeur; que rien n'établit qu'au moment de la vente, le sieur Tribard ait eu connaissance de la qualité en laquelle le sieur Petit prétend avoir agi (1); qu'au contraire, il soutient que ce dernier s'est engagé personnellement, et qu'il résulte de ces faits qu'une pareille contestation est évidemment du ressort des tribunaux ordinaires;

>> Notre conseil d'État entendu, nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit :

» Art. 1er. L'arrêté de conflit pris par le préfet du département du Cher, le 3 novembre 1817, relativement à la contestation entre les sieurs Tribard et Petit, est annulé.

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» 2. Les parties continueront à procéder devant les tribunaux, tous leurs droits, moyens et dépens respectivement réservés ».

IV. La quatrième question doit être réso

lue,

En ce qui concerne le membre et le directeur de la compagnie d'entrepreneurs, d'après la règle générale établie dans le Répertoire de jurisprudence, aux mots Pouvoir judiciaire, S. 2, no 12, que l'autorité administrative est sans Pouvoir, et que les tribunaux sont seuls compétens pour connaître des demandes formées par des particuliers contre les entrepreneurs à prix ferme ;

Et en ce qui concerne le préposé du gouvernement qui a endossé les lettres de change sans faire mention de sa qualité, d'après le principe proclamé par l'ordonnance du 3 juin 1818, rapportée au no précédent, que le préposé d'une administration, qui s'est obligé purement et simplement, ne peut pas, lorsqu'il s'agit de payer, se prévaloir, pour décliner la compétence des tribunaux, d'une qualité qu'il a eue en contractant.

Voici une espèce dans laquelle cette ques. tion a été en effet ainsi décidée dans sa prefaite à la religion du gouvernement, elle a mière branche; mais où, par une surprise reçu, dans la seconde, une décision tout op. posée.

En 1800, le service des subsistances de l'armée française en Italie, était abonné à la compagnie Antonini. Cette compagnie l'ayant laissé en souffrance, faute d'envoi de fonds, il fallut y pourvoir, en mettant dans la circulation des lettres de change qui furent tirées, les unes par le sieur Laporte, l'un des intéressés dans l'entreprise, les autres par le sieur Billion-Duplan, directeur de la compagnie, et dont plusieurs furent endossées par le sieur Eyssautier, commissaire ordonnateur, qui ne fit, dans ses endossemens, aucune mention de sa qualité.

Toutes ces traites furent protestées, et les porteurs exercèrent leurs recours contre les

tireurs et l'endosseur.

L'endosseur, le sieur Eyssautier, parvint d'abord à se mettre à l'abri des poursuites judiciaires. Le 15 brumaire an 10, une décision du gouvernement, motivée sur ce qu'il n'avait agi qu'en sa qualité de commissaire ordonnateur et uniquement pour prévenir la défection du service, l'autorisa, sur un rapport du ministre de la guerre, non communiqué aux parties intéressées ni débattu par elles, à se pourvoir pardevant le préfet de l'Isère, qui, d'après l'arrêté des consuls du

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19 thermidor an 9 (1), y était-il dit, est autorité compétente pour prononcer.

Il n'est pas douteux que cette décision n'eût été rapportée, si les parties intéressées eussent fait connaître au gouvernement que le sieur Eyssautier ne s'était pas obligé en sa qualité d'agent de l'administration, et qu'il avait tout simplement endossé de son nom les lettres de change dont il s'agissait

Mais elles se soumirent à cette décision, et se bornèrent respectivement à poursuivre les tireurs devant les tribunaux.

Le sieur Laporte fut d'abord cité devant le tribunal de commerce de Paris, en remboursement d'une somme de 47,000 francs, montant de lettres de change tirées par lui à l'ordre du sieur Eyssautier, qui les avait endossée au profit du sieur Giroux, lequel avait ensuite transporté ses droits au sieur Spriafica; et ce tribunal ne fit aucune difficulté de le condamner.

Mais sur l'appel, il intervint, à la cour de Paris, le 5 germinal an 11, un arrêt qui, se fondant sur la décision du gouvernement du 15 brumaire an 10, déchargea le sieur Laporte des condamnations prononcées contre lui, et renvoya les parties à se pourvoir administrativement.

En conséquence, le sieur Spriafica s'adressa au préfet du département de l'Isère, qui, trouvant sa compétence fort douteuse, renvoya les parties, par un arrêté du 18 nivôse an 12, à se pourvoir en réglement de juges devant le conseil d'état.

Sur ce renvoi, décret du 25 thermidor an 13, ainsi conçu :

« Considérant que l'avis du conseil d'état, approuvé le 15 brumaire an 10, n'est relatif qu'au sieur Eyssautier, qui ne devait pas être poursuivi par les tribunaux pour des endossemens qu'il n'avait donnés que pour assurer la subsistance de l'armée, et parcequ'il était chargé d'y veiller en sa qualité de commissaire ordonnateur;

» Que l'avis du conseil d'état n'est point applicable au sieur Laporte, tireur des lettres de change, ni aux agens de la compagnie Antonini, obligée personnellement à un service qu'elle avait par entreprise, et dont les profits et les pertes la concernaient;

» Que le sieur Laporte ne saurait se prévaloir de la solidarité entre les tireurs et les endosseurs, 1o parceque cette solidarité n'a

(1) Cet arrêté est visé dans deux arrêts de la cour de cassation, rapportés no 1.

vait de motif que l'avantage du porteur qui ne la réclame pas; 2o parceque l'endossement du sieur Eyssautier n'est qu'un cautionnement, et qu'une caution peut avoir des exceptions personnelles qui la dégagent, sans qu'elles profitent au principal obligé ;

» Qu'en effet, la compagnie Antonini, ou le sieur Laporte, son préposé, ne peut pas, parcequ'un commissaire ordonnateur intervint pour l'aider à remplir ses engagemens, se prévaloir, au préjudice des tiers, de la protection particulière que l'État doit à ce commissaire;

» Qu'il est de principe que les entrepreneurs pour le service de l'État, sont justiciables des tribunaux à raison des obligations qu'ils ont contractées pour leur entreprise, à l'égard des tiers, à la différence des régisseurs et agens du gouvernement qui ne sont justiciables que de l'administration;

» Que le sieur Eyssautier, agent du gouvernement et étranger à l'entreprise, a pu être séparé du sieur Laporte, entrepreneur, sans que celui-ci puisse, non plus que sa compagnie, décliner la juridiction des tribu

naux;

» Notre conseil d'état entendu, nous avons décrété et décrétons ce qui suit :

» La contestation entre le sieur Spriafica, d'une part, et le sieur Laporte, d'autre, est de la compétence des tribunaux ; en conséquencé, l'arrêt intervenu, le 5 germinal an 11, en notre cour d'appel de Paris, est considéré comme non-avenu; les parties sont renvoyées en notredite cour d'appel, pour leur être fait droit ».

Pendant que le sieur Laporte était poursuivi par le sieur Spriafica, pour les lettres de change qui se trouvaient entre les mains de celui-ci, le sieur Billion-Duplan l'était, de son côté, par les sieurs Durand et fils, négocians à Grenoble, porteurs de lettres de change qu'il avait tirées à l'ordre du sieur Eyssautier, qui les avait négociées et en avait employé le montant au service des subsistances de

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