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Plus tard, en 1434, il parait, peu de temps après la découverte de la Côte de l'or, un capitaine portugais, Antonio Gonsalves, venant y débarquer, amenait avec lui quelques nègres pour les vendre à des familles maures du sud de l'Espagne. Et il n'est pas étonnant que le premier négrier fut portugais, quand ces nationaux avaient été les premiers navigateurs et les premiers à faire des découvertes le long de la côte africaine.

Ce qui paraît être aussi vrai, c'est que cet acte fut alors déjà très critiqué, et donna, cependant, origine à cette coutume, très suivie ensuite par tous les capitaines qui allaient à la Côte, d'en emmener quelques nègres escla ves des deux sexes; d'abord comme simple curiosité, et par la suite, comme article principal d'un grand et profitable trafic.

Qui plus est, on voyait des sociétés chrétiennes de la péninsule espagnole, familiarisées depuis des siècles avec la fréquentation intime des musulmans, chez lesquelles la traite des noirs était une coutume et une loi; c'est ainsi que l'usage de l'importation d'esclaves arrachés à la conquête s'implanta avec la plus grande facilité dans nos mœurs, qui d'ailleurs étaient toujours douces, et l'on remarque, que chez nous, l'esclave faisait, pour ainsi dire, partie de la famille, et adaptait sa malheureuse existence à la manière d'être de ses maîtres; il était encore esclave, mais il était déjà chrétien; il était encore esclave, mais il avait déjà monté un degré vers son affranchissement.

L'Infant D. Henrique, le plus grand propagateur des découvertes et des gloires maritimes portugaises au XVe siècle, et un des hommes qui, par leur position, par leur savoir et par leurs inclinations, ont contribué le plus à encourager la navigation et la connaissance des mondes ignorés, n'est pas lui-même exempt du soupçon d'avoir encouragé le commerce d'esclaves maures et nègres pour le continent européen, parmi les équipages des navires qu'il envoyait explorer l'Afrique.

On doit cependant remarquer que son but principal était d'arracher les musulmans et les nègres à leur primitive dégradation spirituelle, morale et physique, en ajoutant aussi à la richesse de son pays par l'augmentation de bras à bon marché; il se flatttait d'ailleurs que ces captifs étaient amplement récompensés par les avantages réels que la civilisation imprimait chez eux.

En outre, selon le témoignage des écrivains contemporains, Azurara, Diego Gomes de Cintra et Cadamosto, la violence répugnait toujours au cœur de l'Infant; et, toutes les fois que, selon les idées du temps, il devait recourir à la capture de prisonniers dans les conquêtes qu'il faisait, il recommandait paternellement aux marins d'en user avec douceur avec les indigènes et de s'abstenir de les maltraiter.

D'après l'opinion de M. R. H. Major, érudit biographe anglais de notre Prince, on doit admettre que le témoignage indépendant de trois contemporains aussi illustres est plus que suffisant pour effacer de la mémoire de ce grand homme l'imputation de cruauté attribuée à la manière dont il faisait la déportation de ces nègres.

De tels esclaves prisonniers, qu'ils fussent maures ou nègres, adoptaient facilement le christianisme; ils étaient traités avec bienveillance, et l'on ne faisait aucune différence entre eux et d'autres serviteurs nés libres en Portugal. Plus encore, ceux qui étaient enfants apprenaient des métiers; et quand, parmi ceux-ci, il y en avait qui montraient de l'aptitude à se gouverner eux-mêmes, ils étaient libérés, mariés à des femmes du pays et

recevaient une bonne dot, comme si les maîtres qui les affranchissaient fussent réellement leurs pères.

Ces maitres reconnaissaient par leur libéralité les bous services qu'ils avaient obtenus des esclaves.

Comme preuve de la sincérité de nos intentions à faire la conquête des infidèles, nous citerons Azurara, le plus ancien chroniqueur des faits que nous rapportons, qui nota que, de 927 individus qui vinrent jusqu'en 1448, année dans laquelle D. Alfonso V sortit de la tutelle de son oncle, « la plus grande partie furent remis dans le Véritable Chemin du Salut. »

Il y avait des dames portugaises veuves (c'est encore Azurara qui le dit) qui traitaient les jeunes captives sur le pied d'egalité avec leurs filles, en leur laissant des biens par leurs testaments, afin qu'elles arrivassent à se marier et qu'elles fussent considérées comme libres. «Moi-même — dit-il je fus iuvité souvent par des dames à assister au baptème ou au mariage de plusieurs de ces captives, fêtes dans lesquelles on observait le même cérémonial que s'il se fut agi d'une personne de la plus haute condition. ›

encore

L'Eglise sanctionnait nos conquêtes par la voix des Pontifes. Quand on reçut dans le royaume les premiers esclaves azenegues, l'Infant envoya à Rome, comme ambassadeur, Fernando Lopes d'Azevedo. Le pape accorda le pardon de leurs péchés à tous les chrétiens qui mourraient dans la guerre que D. Henrique faisait alors contre ces maures; Martin V lui concéda l'autorité de seigneur sur les pays qu'il découvrirait jusqu'aux Indes, et ses successeurs Eugène IV, Nicolas V et Sixte IV confirmèrent cette concession. Pendant le règne de D. Duarte, le légat du pape Eugène viat en Portugal apporter la bulle de croisade contre les infidèles. I.'Infant remettait le drapeau de la croisade aux capitaines qui partaient faire des découvertes, sous le serment que, jusqu'à la mort, jamais ils ne l'abandonneraient, s'obligeant à le défendre jusqu'au dernier moment, et avec celte bannière en main, ils attaquaient les populations et capturaient les musul

mans.

Malgré cela, nous devons avouer que la plus grande partie des Portugais, qui, après le glorieux Infant, allèrent à la conquête à la côte d'Afrique, partaient animés de sentiments moins élevés, et regardaient plus au lucre pécuniaire du commerce qu'au salut des âmes égarées. Ces négriers, avant d'établir des factoreries dans le pays, commencèrent par traiter directement avec les noirs influents des localités.

Les chefs noirs qui servaient ainsi d'intermédiaires dans le commerce sur le littoral africain étaient tellement satisfaits avec les couteaux, les miroirs, les verroteries et les quincailleries qui leur étaient offerts, qu'ils cherchaient à avoir toujours à la disposition des blancs l'or, l'ivoire et les esclaves que ceux-ci allaient leur acheter. Ce fut ainsi, il est certain, que commença le trafic par l'initiative des Portugais, mais les Espagnols, les Anglais et d'autres peuples européens, attirés par le gain, les suivirent bientôt.

Cependant cet infàme commerce n'aurait pas pris de bien grandes proportions, si Colomb n'eut pas découvert l'Amérique et les iles des Indes occidentales, en 1493.

Ce fut alors que le commerce d'esclaves commença à se développer davantage et c'est principalement la côte occidentale d'Afrique qui en four

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nissait à toute l'Amérique qui commençait alors sa colonisation et son exploitation.

On voit encore aujourd'hui dans la ville de Loanda, près du quai de la Douane, un siège de pierre, d'où l'évêque d'Angola bénissait les levées d'esclaves qui étaient envoyés en exil au delà de l'Atlantique.

L'Espagne, nation qui, la première, arriva à se trouver en possession de vastes territoires dans le continent américain et dans les îles adjacentes, ne pouvait manquer de rechercher aussi des bras étrangers vigoureux pour travailler ce sol nouveau, des plus fertiles, mais insalubre.

Les aborigènes, par leur constitution physique peu robuste, spécialement dans les Indes occidentales, accoutumés comme ils l'étaient uniquement à la chasse et à la pêche pour subvenir à leurs nécessités rudimentaires, ne pouvaient, en aucune façon, résister bien longtemps au rude travail que les conquérants leur imposaient, et sous le poids de ce travail forcé, des mauvais traitements et de la contagion de maladies provenant de ces diverses causes, sans parler d'autres maladies apportées de l'Europe par les blancs, commencèrent bientot à dépérir et à s'éteindre avec une rapidité effrayante. Peu d'années après l'arrivée des Espagnols en Amérique, quelques dizaines de milliers d'Indiens étaient morts.

Un historien affirme que la population de l'île Saint-Domingue, qui, en 1508, était de 60,000 âmes, se trouvait réduite à 14,000 en 1515, et tout faisait prévoir que bientôt, la race des aborigènes Indiens s'éteindrait entièrement si l'on ne prenait pas des mesures extraordinaires, tendant à épargner leurs forces en faisant venir des bras étrangers.

En 1503, les premiers esclaves noirs arrivèrent de la côte d'Afrique, et l'on reconnut immédiatement que, non seulement un de ces noirs faisait le travail de quatre Indiens, mais encore que, au lieu de dépérir rapidement sous les violents travaux ruraux et sous ceux qu'ils faisaient dans les mines, les Africains prospéraient admirablement, et se reproduisaient avec rapidité.

Ce fut alors que le célèbre évêque Las Casas, surnommé l'Apôtre des Indiens, donna occasion à ce que la traite des noirs fut pour ainsi dire inaugurée sur une grande échelle, dans la côte occidentale d'Afrique. En effet en 1517, le bon prélat, épouvanté de voir les privations et les cruautés souffertes par les habitants aborigènes des possessions hispano-américaines, cruautés qui devaient en amener l'extermination complète, implora Charles V pour qu'il octroyât un décret ordonnant l'importation de 4,000 nègres chaque année dans les iles des Indes occidentales. L'empereur accueillit cette pétition, qui était basée sur des motifs de la philantropie la plus sincère, et ce furent des négociants génois qui, les premiers, se chargèrent du commerce des noirs pour des colonies espagnoles.

L'Espagne, empêchée, comme elle l'était d'acquérir des territoires sur la côte occidentale d'Afrique en conséquence de la fameuse Bulle Inter cœlera du Pape Alexandre VI, datée du 4 mai 1413, qui lui défendait d'aller vers l'ouest du méridien passant entre les iles des Açores et les iles du CapVert, ne pouvait approvisionner d'esclaves ses possessions des Indes occidentales que par l'intermédiaire de la France, du Portugal ou de l'Angleterre. Par la paix d'Utrecht, célébrée en 1713 et imposée par l'Angleterre victorieuse à l'Espagne vaincue, ce contrat fut donné aux Anglais avec Gibraltar, en les autorisant à continuer d'approvisionner les colonies espagnoles, de 144,000 esclaves, jusqu'à l'année 1748.

L'Angleterre, qui est la nation avec laquelle nous nous sommes toujours rencontrés dans les questions africaines, et surtout dans celle de la suppression de la traite des noirs, question dans laquelle, pendant ce siècle, du moins, elle a employé ses efforts les plus diligents, a pris aussi une partie active dans la direction de ce trafic aux temps où un pareil procédé n'était pas encore stigmatisé par les idées philanthropiques qui ont surgi depuis.

Sir John Hawkins, qui a été trésorier de la marine royale, fut un des principaux négociants anglais faisant le commerce d'esclaves, et le gouvernement de la Reine Elisabeth elle-même employa les navires de l'Etat au transport de noirs.

Sir John Hawkins, après avoir reconnu que l'on gagnait de grandes richesses par le transport de noirs de la Côte africaine aux Indes occidentales, se résolut à se mettre dans le commerce; il eut des associés d'une haute position, et gréa trois navires avec lesquels il partit pour Serra Leoa e:: 1562. Là il embarqua 309 noirs, traversa l'Atlantique et les vendit à un bon prix à l'ile de Saint-Domingue.

Le succès de cette expédition appela l'attention publique; et l'année suivante, sept navires de Sa Majesté furent préparés pour un voyage semblable. Le navire chef jaugeait environ 700 tonneaux, et, par une singulière ironie du sort, il se nommait Jésus!

A partir de cette date, la traite des noirs gagna de la popularité en Angleterre; des négociants de Londres, de Liverpool et de Bristol s'y employèrent. Liverpool devint naturellement le port principal pour ces sortes de tentatives, et, dans les dernières années du xvII° siècle, il n'y avait pas moins de quatre-vingt-dix navires immatriculés pour faire ce service.

Déjà, en 1618, Jacques Ier avait donné l'autorisation de négocier en Guinée, à Sir James Rich, et à d'autres négociants de Londres. Une autre autorisation fut donnée par Charles I, en 1631, et enfin une troisième compagnie fut reconnue par Charles II, en 1662.

Dans cette dernière compagnie figuraient des personnages de haute position, à la tête desquels se trouvait le duc d'York, lui-même, frère du roi. Cette compagnie se chargea de fournir les Indes occidentales de 3,000 noirs chaque année.

Il est curieux de remarquer que les premières mesures tendant à restreindre la traite des noirs en Angleterre, partirent de la Jamaïque, dont l'assemblée législative promulgua deux bills en 1774, qui limitaient l'importation des noirs. Cependant, ces bills furent rejetés par le Gouvernement britannique, dont le ministre des Colonies, qui était, à cette époque, lord Dartmouth, déclara que jamais il ne permettrait que les Colonies restreignissent ou décourageassent, sous quelque forme que ce fût, un commerce aussi avantageux pour la nation.

La traite des noirs, faite par des Anglais, prit, en cette occasion, de si grandes proportions, que l'on calcule qu'il n'y avait pas moins de 57,000 esclaves importés alors annuellement dans les îles des Indes occidentales britanniques.

Macpherson, dans son histoire du commerce, affirme que le nombre des noirs africains, embarqués en 1768, par toutes les nations européennes, pour l'Amérique et les Indes occidentales, fut calculé à 97,000. De ce nombre, 60,000 furent transportés sur des navires anglais, 23,000 sur des

navires français, et le reste en petites portions, par d'autres nations, dont le Portugal faisait partie pour le chiffre de 1,700.

Dans les années suivantes, ce trafic devint encore plus actif, et l'on affirme que, pendant ce siècle, on n'importa pas moins de 2,130,000 nègres dans l'Amérique anglaise, en dehors de ceux qui furent transportés sur des territoires d'autres nationalités. En 1732, Liverpool, seul, retirait la recette nette de 214,617 liv. ster. pour sa part de la traite des noirs. Bristol ne devait pas lui être inférieur quand le trafic était florissant.

La participation de l'Angleterre à la traite des noirs se termina d'une façon brillante, et par un acte philanthropique de repentir honorable, elle décréta l'affranchissement de tous les esclaves dans ses possessions, en 1834, et vota avec magnanimité la somme de 20,000,000 liv. ster. pour compensation à donner aux possesseurs d'esclaves.

Parmi toutes les nations qui luttèrent, plus ou moins directement, en faveur de cette grande idée, le Portugal a, chronologiquement, la première place. Il ouvrit la voie dans l'intention de racheter ses erreurs passées, et montra aux autres peuples l'unique chemin possible vers lequel devaient tendre les efforts universels.

Voyons comment :

Par des chartes gouvernementales, du 20 mars 1570, du 11 novembre 1595, du 26 juillet 1596, du 5 juin 1605, du 30 juillet 1609, du 10 septembre 1611, nous avons condamné définitivement, au nom du droit naturel et sous de fortes pénalités, l'esclavage et le trafic des indigènes du Brésil, les proclamant libres et égaux aux autres hommes, soit qu'ils fussent déjà convertis à notre foi, soit qu'ils vécussent encore dans les croyances de leur sauvagerie, auxquelles nous avions cherché à les arracher par le catéchisme et par l'éducation chrétienne.

Les maures libres avaient déjà été expulsés du Portugal au xve siècle, mais ce fut seulement au XVIIe siècle que, par un édit du 23 mars 1621, il fut ordonné que personne n'eût de maures captifs à Lisbonne, ni dans les pays à vingt lieues autour de la ville, ainsi que dans les autres ports de

mer.

Par un autre édit, du 1er juin 1641, confirmant la disposition des lois du royaume (Ordenaçao), il fut défendu, de nouveau, de conserver des esclaves maures, dont il y avait une grande quantité dans toutes les villes, les bourgs et les villages de Portugal.

Nous n'avons pas craint de compromettre notre domination, encore faible en Amérique, en prenant ces mesures humanitaires et pleines de compas

sion.

La plus ancienne de ces mesures, citée dans des documents promulgués par le roi D. Sébastien, indique déjà un brillant point de départ de ce que nous avons fait par la suite. Après avoir exposé dans ce document le peu de scrupule qu'on a eu en soumettant à l'esclavage des gentils du Brésil, sous quelque prétexte futile que ce fût, il est dit plus loin :

« ..... Défends et ordonne que, dorénavant, on emploie le moyen dont a on s'est servi jusqu'à présent dans lesdites parties du Brésil, de rendre a esclaves les susdits gentils, ni que l'on puisse le faire par moyen ni « manière aucune, sauf envers ceux qui auront été pris en guerre juste, «que les Portugais auront faite auxdits gentils par mon autorité et avec «ma permission, ou celle de mon Gouverneur en ces pays, ou bien envers « ceux qui ont coutume d'attaquer les Portugais, ou d'autres gentils pour

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