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était aux prises avec le politique redoutable qui avait entrainé le second empire à sa perte; il importait de l'éclairer et de la prémunir de ses desseins.

Telle a été la genèse de ces études. Commencées en 1879, elles forment déjà neuf volumes, et bientôt, lorsque l'année 1868 sera reliée au drame du mois de juillet 1870, dont j'ai fait le récit, j'aurai parcouru, dans ses grandes lignes, tout le cycle de la politique extérieure du second empire, depuis son avènement jusqu'à sa chute.

Mon ambition, au début, certes, n'était pas aussi vaste; elle se bornait à mettre en pleine lumière les causes immédiates de la guerre : les négociations qui ont précédé et si malheureusement suivi Sadowa. Si j'avais prévu les exigences et les entrainements de l'histoire, j'eusse reculé devant une aussi lourde entreprise.

Je devais la confidence de mes scrupules, de mes hésitations à ceux qui m'ont encourage; ils comprendront maintenant pourquoi mes Souvenirs diplomatiques, bien qu'inspirés par la même pensée, ne se sont pas succédé dans un ordre strictement chronologique. J'aurais dù m'arrêter aux heures brillantes du règne, avant de rechercher les origines de ses revers.

Le livre que je publie aujourd'hui: la Prusse et son Roi pendant la guerre de Crimée qui a paru l'an dernier, et un troisième volume en voie de préparation. l'Entrevue de Stuttgard et la Guerre d'Italie, donneront à mon œuvre l'unité qui lui manquait; ils lui serviront d'introduction.

Le caractère particulier du talent de M. Rothan et l'esprit de ses ouvrages ont été bien décrits par un maitre, M. Albert Sorel, auquel nous empruntous quelques traits de l'étude qu'il a consacrée à son ami.

L'esprit de tous ces ouvrages est le même et l'auteur l'a parfaitement défini : «Raconter la douloureuse histoire de nos déceptions, les moyens dont on s'est servi pour défaire l'oeuvre de Richelieu et de Mazarin. Notre jeune diplomatie est aux prises avec la politique redoutable qui a entrainé le second empire à sa perte; il importait de l'éclairer et de la prémunir contre ses desseins. » Rothan reste donc encore politique, homme d'action, informateur et conseiller en racontant. Il fait pour le public ce qu'il a fait auparavant pour l'Etat. Il expose ce qu'il a vu, comme il l'a vu. Il ne s'abandonne point à la fantaisie très vaine et très abusive de refaire l'histoire pour la plier à ses vues; mais, prenant les événements et les hommes pour ce qu'ils ont été, il indique ce qu'en telle conjoncture on aurait selon lui, dù ou pu faire. Il n'expose point une thèse, il n'écrit point ad proban lum, mais il ne narre point pour le senl plaisir de narrer avec agrément, de composer de beaux tableaux ou de dessiner des scènes piquantes. Il écrit, de conseil, pour l'avertissement et la leçon des Français. Le souci littéraire, cette perplexité d'écrire dont il parle quelque part, l'agitait toujours, et bien à tort. Le principal mérite de ses récits est précisément dans l'allure naturelle, dans la sincérité du style, dans la vivacité des images reçues et conservées, dans les traits personnels saisis sur le vif, dans une sorte d'émotion sourde et profonde qui couve partout et éclate çà et là, au moment juste, dans I aisance enfin et dans le ton d'honnête homme qui règne constamment. Voilà ce qui donne un caractère particulier à ses écrits et les classe à part des autres dans la littérature historique de notre temps.

A proprement parler, ce sont des Mémoires, à l'ancienne el large façon des grands mémoires politiques. Ainsi conçus, ils prennent toute leur valeur. Rothan ne visait point à l'histoire générale, encore moins à l'histoire scien tifique. Ce n'est pas lui qui aurait dit avec un grand maître: Le patriotisme est une vertu, l'histoire est une science; il ne faut pas les confondre. Non, Rothan n'eût point dit cela, et j'ajoute que, quand il l'entendait dire, il souriait avec scepticisme, lorsqu'il ne s'indignait pas. L'histoire, ainsi entendue, lui paraissait devoir se confiner dans les antiquités, dans les temps prépolitiques, et se réserver au scul divertissement des ་་ érudits et des délicats ». Affaire de science, sans doute, mais de science académique, et non chose vivante e

nationale. Je dirai tout: il se méfiait des prétentions scientifiques des historiens. Il avait rapporté cette méfiance de la lecture de plusieurs Allemands, il l'étendait à tous leurs compatriotes, et s'il ne la rapportait pas sur nous-mêmes, c'était, je l'ai toujours cru, pour ne point froisser nos illusions et ne point contrarier notre zèle. Il estimait que l'histoire - j'entends toujours la moderne ne devait point afficher de trop hautes prétentions. Elle devait mettre sa gloire à remplir, sans déguisement et sans fard, son véritable rôle. Ce rôle était d'enseigner les esprits, de maintenir les traditions, de défendre la bonne réputation de l'Etat, de tenir le patriotisme en garde et en éveil.

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Comme Rothan n'appartenait à aucune école, il ne se lia jamais à aucun parti. Il apporta dans nos divisions de société et dans nos coteries cet esprit du matin qui voit toujours le drapeau et ne voit que le drapeau, parce que drapeau, qui lui rappelle seul la patrie, devient pour lui toute la patrie. Affable, intéressant, et d'un commerce sûr, il avait des amis dans les camps les plus opposés. Il leur parlait du pays, en homme qui considère le pays du dehors. Son sens patriotique ne le trompa dans aucun des tournants dangereux de nos crises intérieures. Il disait aux conservateurs : « Ralliez-vous à la République, elle a pour elle la force des choses, obéissez loyalement et librement à cette force irrésistible, qui est la raison suprême des affaires d'Etat. » Il disait aux républicains: « Vous êtes l'Etat, rassemblez et concentrez en vos mains toutes les forces de la nation; les conservateurs en sont une; ralliez-vous à leur armée; l'Etat n'aura jamais trop de bons Français à le servir. » - Il pensait à l'avenir en véritable politique, sans impatience et sans défaillance. Il croyait à cet avenir de la France; mais il ne limitait pas ses espérances à une seule conjoncture. Il savait que l'histoire ne s'arrêterait pas plus après une guerre nouvelle qu'elle ne s'est arrêtée après la dernière guerre. Rien ne périt; tout se transforme dans les affaires. Les traités de 1815 ont été effacés, comme l'avaient été les traités antérieurs. Il en sera de même des traités qui ont suivi et de ceux qui suivront. Il y aura donc inévitablement des occasions, et elles pourront être employées pour nous dans l'avenir, comme, dans un passé récent, elles ont été employées contre nous; mais il serait aussi imprudent de prétendre les faire naître qu'il serait coupable de les négliger. Rothan prêchait la paix sur le pied d'une défensive formidable. « Ainsi armés, disait-il, on ne nous attaquera point. Nous ne menacerons personne et nous ne songerons qu'à nous-mêmes. » Il mettait les esprits échauffés en garde contre les alliances systématiques, les prétendues alliances naturelles: il rappelait l'engouement pour la Prusse, au temps de Frédéric II, et l'engouement pour l'Italie, au temps de VictorEmmanuel et de Garibaldi, lorsque l'Autriche passait pour l'ennemi héréditaire. Il prônait la politique des mains libres de traités, mais puissamment munies d'armes. On nous recherchera, disait-il, si l'on a besoin de nous; fuyez les engagements, ils seraient téméraires. » Quand on lui parlait de la Russie, il répétait : « Imitez-la. La vraie politique à suivre envers elle est la politique qu'elle suit envers nous; de tous les services qu'elle nous peut tendre, le plus profitable est l'exemple qu'elle nous donne. »

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DIPLOMATIQUES

PREMIÈRE PARTIE

TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES.

FRANCE ROUMANIE

Arrangement commercial avec la France

22 décembre 1889/3 janvier 1890.

Le gouvernement de Sa Majesté le roi de Roumanie et le gouvernement de la République française, considérant que les études entreprises dans chacun des deux pays pour l'établissement de leurs régimes douaniers respectifs, ont interrompu la marche des négociations pendantes pour la conclusion d'une convention commerciale définitive, ont décidé de proroger l'arrangement commercial provisoire, tel qu'il résulte de la déclaration échangée à Bucarest le 17/29 juin 1886, pour un nouveau terme qui prendra fin le 28 juin (10 juillet) 1891, date à laquelle ses effets cesseront de plein de droit et sans dénonciation préalable.

En foi de quoi les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé la présente déclaration et y ont apposé leurs cachets.

Fait en double expédition, à Bucarest, le 22 décembre 1889 (3 janvier 1890).

Signé AL. LAHOVARI.
G. DE COUTOULY.

Le projet de loi présenté à la Chambre des députés de Roumanie était précédé de l'exposé des motifs suivant :

<< L'arrangement commercial provisoire conclu avec la France, le 17 juin 1886, a mis fin à certaines contestations douanières préjudiciables au commerce roumain et français. Le renouvellement répété de cet arrangement, depuis cette

ARCH. DIPL. 1890.

2e SÉRIE, T. XXXIV (96)

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époque, a prouvé que, bien qu'un traité définitif n'ait pas été signé entre le gouvernement royal et le gouvernement de la République française, l'état de choses créé par cet arrangement a été profitable au commerce réciproque des deux Etats.

Etant donné ces résultats satisfaisants, M. le ministre plénipotentiaire de France a proposé, dès le mois de mai, au gouvernement royal la prolongation de cet arrangement provisoire pour une période plus longue que celle qui fait l'objet du renouvellement aujourd'hui en vigueur.

Ayant en vue cette proposition et considérant que les études entreprises chez nous et en France pour la fixation définitive du régime économique et douanier ne sont pas terminées;

Considérant que le traitement dont jouissent aujourd'hui les marchandises roumaines en France est en partie basé sur les traités conclus par cet Etat avec les autres puissances et que la durée de ces traités dépasse l'époque à laquelle expire le tarif conventionnel dont jouissent les marchandises françaises en Roumanie et assure par conséquent en France aux marchandises roumaines un régime analogue à celui d'aujourd'hui;

Considérant que la stabilité du traitement actuel en France n'est pas assuré en fait et qu'enfin le non renouvellement de l'arrangement serait préjudiciable à notre commerce d'exportation;

D'autre part, les relations commerciales franco-roumaines, ayant lieu en grande partie par voie maritime et par celle du Danube, se ressentent relativement des avantages effectifs de l'arrangement, du fait de l'hiver qui tient fermée cette dernière voie à peu près trois mois et demi par an. Le renouvellement de l'accord provisoire pour une période de six mois seulement n'assure donc pas suffisamment la stabilité de ces relations, et ne correspond pas à l'intention des deux gouvernements en ce qui concerne le résultat de cet arrange

ment.

Pour éviter cet inconvénient et sur la base des considérants qui précèdent, le gouvernement est d'avis et vous prie d'accepter la prolongation de l'arrangement provisoire actuel jusqu'au 28 juin (10 juillet) 1891, époque à laquelle expire notre tarif conventionnel existant, restant bien entendu que cet arrangement prendra fin à cette date, sans qu'il soit besoin d'une dénonciation préalable de notre part ou de la part du gouvernement français. »>

ALLEMAGNE - FRANCE

Arrangement relatif au régime douanier de la côte des esclaves. 26 décembre 1889 (1).

Le gouvernement de la République française et le gouvernement de Sa Majesté l'empereur d'Allemagne, voulant assurer le développement des relations commerciales dans les possessions des deux Etats situées sur la côte des Esclaves, entre les possessions anglaises de la Côte-d Or à l'ouest et le Dahomey à l'est, ont décidé de renouveler l'arrangement du 25 mai 1887 (2), relatif à l'établissement, sur ces deux territoires, d'un régime de douane commun, et ont arrêté, à cet effet, les dispositions suivantes :

Article premier. -Les possessions françaises et allemandes sur la

(1) Cet arrangement est promulgué dans le Journal officiel de la République française du 1 mars 1890.

(2) V. cet arrangement, Archives, 1887, III, p. 32.

côte des Esclaves, formeront un territoire douanier unique, sans ligne de douane séparative, en sorte que les mêmes droits y seront perçus et les marchandises qui les auront acquittés sur l'un des territoires pourront être introduites dans l'autre sans avoir à supporter de nouvelles taxes. Art. 2. fixé :

Le taux des droits à l'entrée du territoire commun est ainsi

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Art. 3.

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Tous les articles autres que ceux mentionnés ci-dessus seront admis en franchise. Art. 4. La perception des taxes pourra s'effectuer en monnaie française, allemande ou anglaise. Chacun des bureaux de douane placés à l'entrée du territoire commun devra posséder un tableau identique indiquant en détail le montant des droits prévus par l'article 2, selon qu'ils seront acquittés par les intéressés dans l'une ou l'autre de ces monnaies. Les différentes sortes de monnaies conserveront d'ailleurs la valeur libératoire qu'elles ont dans leur pays d'origine, c'est-à-dire que, d'une part, toutes les monnaies d'or françaises, allemandes et anglaises et les pièces d'argent françaises de 5 francs, ainsi que les thalers allemands (3 marks), aussi longtemps qu'ils conserveront force libératoire en Allemagne, pourront être employées sans limitation de quantité, et que, d'autre part, les monnaies divisionnaires françaises, allemandes et anglaises ne pourront être utilisées que comme appoint, savoir les pièces françaises jusqu'à concurrence de 50 francs, les monnaies alle

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