Sivut kuvina
PDF
ePub

III.

JE vous ecrivoi hier (ma seur) que vertu vient de l'estude des bonnes lettres, et pour ce a nous princesses sont-elles plus necessaires qu'aux autres. Car tout ainsi qu'un prince surmonte ses subiects en richesses, en puissance, en autorité et commandement: ainsi doit estre entre tous le plus grand en prudence, en conseil, en bonté, en grace, et toute sorte de vertu. Par quoi les Egyptiains ont paint un œil au sceptre des rois, et disoient que nulle vertu n'est mieus seante à un prince que prudence. A Reims.

IV.

Puis doncques qu'un prince doit surmonter ses subiects non en voluptés et delices, mais en sens, en temperance, et en prudence: et que son devoir et office est de preposer les utilités dela Republique aux siennes; il faut, ma seur, que mettions peine d'estre bien sages. Et que ne laissions aller un seul jour sans apprendre quelque chose. A l'exemple d'Appelles peintre, qui en son art a esté de si grande diligence, qui ne laissoit passer un jour seul, au quel de son pinceau ne tirast quelque ligne. Adieu, et m'aime toujours bien. A Reims.

III.

MARIA REGINA SCOTORUM ELIZABETE SORORI OPTIME S. P. D.

SCRIBEBAM heri, dilectissima soror, quod virtus venit de studio bonarum literarum. Quare eædem sunt magis necessariæ nobis principibus quàm privatis. Nam ut princeps subditis suis vult antecellere divitijs, potestate, autoritate, et imperio: sic debet inter omnes excellere prudentia, consilio, bonitate, gratia, et omni genere virtutis. Qua de re hierogliphica Ægyptiorum notaverunt oculum in sceptro regum, dicebant enim nullam virtutem magis principem decere quàm prudentiam.

IV.

M. R. SCOTORUM ELIZABETE SORORI S. P. D.

QUUM igitur princeps debet antecellere privatis non voluptatibus delicijsve, sed sensu, temperantia, et prudentia et suum officium anteponere utilitatis reip. suis opus est (soror omnium charissima) nos dare operam ut sapiamus, exemplo Appellis pictoris, qui tanta fuit in arte sua diligentia ut nullus præteriret dies in quo non ipse lineam aliquam penicillo duxisset. Vale, et me ama ut soles.

JE ne me puis assez ebahi de quoi sur les fautes d'autrui nous sommes plus clairs voians qu'Argus, qui avoit cent yeus. Mais pour voir et corriger les notres, nous sommes plus aveugles que la taupe. C'est de quoi se mocque Esope, qui dit qu'en la besace de devant nous portons les vices d'autrui, et en celle qui pend derriere nous mettons les notres. Ne faisons ainsi, ma seur, car celui qui veut parler d'autrui doit estre sans culpe. De Compienne ce 26. Juillet.

VI.

HIER je lisoi une fable en Æsope autant profitable que plaisante. La formis en temps d'hyver faisoit bonne chere du blé qu'elle avoit amassé en esté, quand la cicade aiant grand fain vint à elle, pour lui demander manger. Mais la formis lui dit, Que faisois-tu en esté? Je chantoi, dit-elle. Si tu chantois en esté, repondit la formis, saulte maintenant en hyver. La fable signifie, ma seur, que pendant que sommes jeunes devons mettre peine d'apprendre des lettres et vertus

à

V.

M. SCOTORUM REGINA EL. S. P. D.

NON possum satis mirari quod simus oculatiores in errores alienos quam Argus, qui habebat centum oculos sed ut videamus et emendemus nostros, sumus cæciores talpa. Qua de re Esopus ridebat, et dicebat nos ferre aliena vitia in mantica quæ dependet ad pectus, et in alia quæ ad tergum ponimus nostra. Ne ita faciamus, soror dilectissima, nam qui de alijs vult loqui, debet esse sine culpa. Vale.

VI.

MA. SCOTORUM REGINA ELIZABETE SORORI S. P. D.

LEGEBAM heri apud Æsopum fabulam non minus utilem quam urbanam. Formica hyeme laute vivebat tritico quod collegerat æstate, quando cicada laborans fame venit ad illam, et petebat cibum. Sed formica dicit, Quid faciebas æstate? Cantabam, dixt. (sic). Si tu canebas æstate, hyeme salta. Fabula significat (suavissima soror) nos debere (dum iuvenes sumus) dare.

pour nous conduire en viellesse. A Dieu, et m'aime autant que tu pourras, tu pourras autant que tu voudras. A Compienne. 26. Juillet.

VII.

J'AI entendu par notre maitre, ma seur ma mignonne, que maintenant vous estudiés fort bien, de quoi je suis très joieuse, et vous prie de continuer, comme pour le plus grand bien que sauriés avoir en ce monde. Car ce que nous a donné nature est de peu de durée, et le redemandera en viellesse, ou plus tost. Ce que nous

a presté fortune elle nous l'ostera aussi. Mais ce que vertu (laquelle procede des bonnes lettres) nous donne, est immortel, et le garderons a jamais. A Compienne. 25. Juillet.

VIII.

CATON disoit, ma seur, que l'entendement d'un chacun est semblable au fer, lequel tant plus est manié, de tant plus reluyt. Mais quand on le laisse en repos il devient rouillé. Ce que tesmoigne bien Cicero au livre des

« EdellinenJatka »