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sur le sol, il présente l'état suivant: immobilité absolue; la muqueuse et la langue sont violacées; les yeux saillants, les pupilles dilatées; les mouvements du cœur de 3 à 5 pour 10 secondes; l'insensibilité entière. Je le prends par les pattes de derrière, et je le secoue vivement, la tête en bas, puis j'imprime à son corps un mouvement circulaire de quelques secondes; ces diverses manœuvres ont pour résultat l'issue d'une très-grande quantité d'eau écumeuse, mais il reste insensible aux irritations mécaniques. Les battements du cœur s'affaiblissent encore. Je l'essuie vivement avec un linge; un fer rouge est porté à plusieurs reprises sur la poitrine; chaque brûlure donne lieu à un mouvement en sursaut. L'animal se met à plat ventre; il reste dans cette position pendant trois quarts d'heure, l'œil inerte, respirant régulièrement; de temps à autre il fait une aspiration des plus amples. Je le fis marcher : il tomba trois ou quatre fois. Il restait la tête tendue et fixe, dans la position où je l'avais placé. Quatre heures après, il n'était pas complétement remis.

On peut lire dans les Archives une observation rapportée par le Dr Bourgeois, où l'on voit, chez un individu retiré de la Seine et rappelé à la vie, des symptômes tout à fait analogues à ceux-ci; de plus, j'ai retrouvé les mêmes perturbations du système nerveux que j'ai notées plus haut. Les uns, dès les premières manifestations de la vie, s'agitent et se contournent dans tous les sens; les autres poussent des cris aigus en se débattant. Chez la plupart il y a eu des convulsions locales on voyait alors toute une région musculaire, ou seulement un seul muscle, pris de contractions réitérées et rapides; parfois les dents claquent fortement; les lèvres et les muscles de la face ont des contorsions des plus prononcées; les globes oculaires sont tremblottants, ou bien renversés, de manière que la cornée tout entière disparaît sous la yoûte orbitaire.

En réalité, la mort, dans la submersion, est donc due à l'asphyxie, et la privation d'air en est la cause première. Mais, en outre, il est un certain nombre de circonstances qui ne peuvent que la rendre plus inévitable; telles sont l'influence de l'abaissement de la température, les lésions du poumon, et enfin la coagulation du sang.

a. Quand un être vivant à respiration aérienne tombe au fond de l'eau, non-seulement il est enveloppé d'eau froide de toutes parts extérieurement, et il en a pénétré dans l'intérieur du corps par la trachée et l'œsophage une certaine quantité, mais encore l'acte es

sentiel qui détermine l'entretien de la chaleur naturelle, la respiration, est supprimée. La rapidité du refroidissement est en raison de cette double influence. A supposer d'ailleurs que la respiration pût continuer sous l'eau, elle serait insuffisante pour combattre l'effet de l'eau froide. Gauthereau, selon Louis, a vu un chien à la trachée duquel on avait adapté un tuyau avant de le plonger dans l'eau, de manière qu'il pût encore respirer l'air du dehors, résister pendant quelque temps. J'ai répété la même expérience au moyen d'un tube en caoutchouc : à la dixième minute, l'animal était mort.

b. Les altérations des poumons doivent être prises en sérieuse considération. Quand on regarde attentivement ces organes avec le secours de la loupe, on reconnaît que des vésicules pleines d'air, et d'un diamètre fort considérable, sont mêlées à d'autres vésicules excessivement fines; quand on les incise, il s'en écoule un liquide écumeux mêlé de sang. Cet état se rattache évidemment aux con ditions suivantes : plongé dans l'eau, l'animal fait instinctivement de violentes inspirations qui attirent dans les voies respiratoires une certaine quantité de liquide, à laquelle il s'en ajoute bientôt par de nouvelles inspirations. Mais la colonne d'air qui se trouvait encore emprisonnée dans les vésicules est refoulée, et progressivement elle arrive à y être resserrée à ce point de les distendre outre mesure, et enfin d'en déterminer la rupture; alors le liquide s'épanche dans le tissu pulmonaire, et ces ruptures entraînent nécessairement celles de quelques vaisseaux sanguins. Aussi les épanchements d'eau sont-ils mélangés constamment d'une certaine quantité de sang. La présence d'une aussi grande quantité de liquide dans le tissu même du poumon constitue un obstacle invincible à l'exercice de ses fonctions. La surface pulmonaire est parsemée de taches rouges, de nuances variables. Il est évident que ce sont les analogues des ecchymoses sous-pleurales, dont j'ai déjà parlé si souvent; seulement ici elles ont perdu de leur intensité, comme couleur, à cause de la présence de l'eau.

3o Le plus souvent, quelque courte qu'ait été la submersion, le cœur contient des caillots; quelquefois même le sang est pris en une seule masse dans les ventricules, dans les veines caves et dans les vaisseaux coronaires de l'estomac. J'ai souvent retiré des ventricules des masses ovoïdes parfaitement moulées sur la surface inVII.

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terne des cavités et des veines caves ou des jugulaires, des cylindres de 5 à 6 centimètres de long, qui de loin ressemblaient à de grosses sangsues. Ces caillots sont noirs, solides, résistants; placés sous le robinet d'une fontaine, ils ne se divisent que difficilement. Ils sont tout à fait différents de ces masses à demi coagulées que l'on trouve quelquefois dans les corps qui ont séjourné une quinzaine de jours sous l'eau. Le 10 février, j'ai ouvert, en présence de M. Tardieu, un animal que j'avais jeté dans l'eau le 24 janvier, au moment où on venait de l'étouffer; le sang contenu dans le cœur avait perdu sa liquidité; mais il était épais, demi-fluide, comme du sirop ou du miel, il n'avait pas cet aspect de masses solides que je viens de signaler.

Cet état me parut d'autant plus remarquable, qu'il est tout à fait en contradiction avec ce que l'on trouve dans les auteurs; partout il est indiqué que chez les noyés le sang est d'une fluidité remarquable. De toutes les nombreuses autopsies que j'ai lues, il n'en est qu'une qui fasse mention de l'état que je signale; elle se trouve dans l'ouvrage de M. Devergie. Un homme qui n'avait séjourné que quelques instants sous l'eau, et qui fut ouvert à la Morgue, avait des caillots dans le cœur droit et dans les veines jugulaires. Je me suis demandé, puisque l'on ne les avait pas encore signalés dans les autopsies faites au moins vingt-quatre heures après la mort, si, avec le temps, le sang ne revenait pas à l'état fluide après s'être coagulé au moment de la mort, et ayant conservé dans l'eau des animaux pendant quelques heures ou plusieurs jours, j'ai trouvé le sang effectivement fluide. Quand il y avait des caillots, ils étaient incomparativement moindres que ceux que l'on rencontre quand l'autopsie a lieu immédiatement après la mort.

Cette coagulation du sang chez les noyés au moment de la mort est-elle une loi? est-ce une condition fortuite? Ce qu'il y a de certain, c'est que plus ou moins marquée, on la rencontre constamment. Au reste, pour qu'elle se produise, il faut que la mort ait lieu sous l'eau; jamais on ne la rencontre dans les cadavres submergés après la mort, jamais non plus quand l'animal noyé est retiré de l'eau avant qu'il ait cessé de respirer.

DU CHANGRE LARVÉ OU ULCERATION SYPHILITIque primiTIVE INTRA-URETHRALE PROFONDE, ET DE LA BLENNORRHAGIE SYPHILITIQUE;

Par le D' G. LAGNEAU fils.

Personne ne nie qu'après des écoulements uréthraux, on ait vu des accidents syphilitiques cutanés ou autres; mais tandis que, selon quelques syphiliographes, ils ne se montreraient qu'après les écoulements déterminés par des ulcérations primitives développées dans le canal, selon la plupart des autres praticiens, la vérole pourrait aussi être le résultat d'une blennorrhagie virulente, non ulcéreuse. Les premiers pensent qu'il n'y a pas de gonorrhée syphilitique sans chancre larvé; les seconds, qu'elle peut être syphilitique sans coexistence d'ulcération uréthrale primitive.

Ce désaccord scientifique mérite d'attirer l'attention sous plusieurs rapports. Sans m'occuper ici des conséquences médico-légales et hygiéniques que peut avoir l'adoption de la première ou de la seconde opinion, l'on comprend qu'elle puisse déterminer le médecin à prescrire contre certaines blennorrhagies d'origine suspecte, n'étant pas accompagnées de chancres larvés, soit un traitement simple, soit un traitement spécifique, qui met à l'abri des accidents consécutifs, n'a pas d'influence fâcheuse pour l'économie, et n'expose à aucun risque, comme le dit M. Velpeau (1).

Pour expliquer autant que possible la fréquence des véroles constitutionnelles apparaissant à la suite d'écoulements urétraux, les personnes pensant que la blennorrhagie syphilitique est forcément accompagnée de chancres primitifs larvés ont publié, aussi souvent qu'elles le pouvaient, des cas d'ulcérations situées dans le canal. Qui peut se contenter de cette preuve? Il ne s'agissait pas de démontrer l'existence d'ulcérations généralement admises a priori par les auteurs des siècles précédents, entre autres par Fabrice d'Aquapendente (2), par Astruc (3), par Lieutaud (4), etc., et re

(1) Voy. Gaz. des hôp., 16 octobre 1852; Acad. de méd., séance du 12 oct. (2) Opera chirurgica, 1617, Pentateuch. chirurgic., lib. 1, cap. 13, in Appendice: de Ulcere in urethra a gonorrhæa.

(3) Astruc, de Morbis venereis, lib. 11, cap. 1, de Gonorrhæa virulenta, § 2. (4) Lieutaud, § 2, Précis de médecine pratique, lib. 11, p. 571; 1759.

connues sur le cadavre par Littrc (1), par Terraneus, par Benevoli (2), etc., mais bien de prouver que ces ulcérations étaient la cause première, la raison sine qua non de la syphilis constitutionnelle succédant à des écoulements uréthraux, c'est-à-dire que la vérole, dans ce cas, reconnaissait toujours pour accident primitif le chancre larvé uréthral.

Or, loin d'être favorables à cette opinion, la physiologie, l'anatomie pathologique, et l'observation directe des malades, semblent, au contraire, la combattre.

Comment expliquer le développement d'ulcérations primitives dans les parties profondes du canal? Physiologiquement parlant, rien n'autorise à croire à la possibilité de la contamination directe des portions bulbeuse, membraneuse, ou prostatique de l'urèthre. Sans s'arrêter à la nécessité d'une érosion devant rarement se rencontrer dans ces parties profondes, car, selon les partisans du chancre larvé primitif, qui regardent cette condition comme de rigueur, l'absorption peut encore s'effectuer par l'introduction du virus dans des follicules volumineux, ou par le séjour longtemps prolongé « du pus virulent âcre, irritant, excoriant, avant d'être spécifique» (3) (deux circonstances d'ailleurs peu vraisemblables pour l'urethre, fréquemment lavé par les urines); il faut de toute nécessité admettre que la matière contagieuse ait pu pénétrer jusque-là. Or, en y réfléchissant, on pensera, avec Hunter, qu'il est impossible de concevoir « qu'aucune partie de la matière virulente de la femme puisse pénétrer dans le canal lors du coït » (4). En effet, lors de la discussion académique sur la transmission des accidents secondaires, la docte assemblée se refusa à regarder comme primitive l'ulcération pharyngienne, dont la sécrétion avait servi à inoculer trop positivement un jeune confrère, M. Lidmann; à plus forte raison, on aurait le droit de s'inscrire contre la possibilité de chancres primitifs de la vessie et des parties profondes de l'urèthre,

(1) Voy. Astruc, loc. cit., lib. 11, cap. 1.

(2) Morgagni, de Sedibus et causis morborum, lib. 111, epist. XLIV, n. 14 et 17.

(3) Ricord, lettres 12, p. 90, et 17, p. 135; Maisonneuve et Montanier, Traité des maladies vénér., p. 131.

(4) Hunter, trad. d'Audiberti, partie 11, chap. 1, sect. 9, p. 54, ou trad. de Richelot, 6e livr., p. 215.

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