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viendrons souvent, dans le traitement des affections de l'estomac en général et dans celui de l'ulcère simple en particulier, à des résultats qui dépasseront nos espérances.

Quant aux médicaments proprement dits, je les regarde comme très-secondaires dans le traitement de l'ulcère simple de l'estomac. Les amers, les ferrugineux, si efficaces dans certaines affections dyspepsiques de l'estomac, sont ici formellement contre-indiqués. L'opium ne réussit que dans le cas où l'élément gastralgique s'associe à l'élément phlegmasique, et souvent il m'a fallu y renoncer bien vite, à raison du vomissement qu'il déterminait.

L'eau gazeuse chargée d'une grande quantité de gaz acide carbonique m'a paru agir quelquefois comme sédatif, il en est de même de la glace; j'ai eu souvent à me louer de la médication alcaline à faible dose, et en particulier du bicarbonate de soude, de l'eau de chaux, de la poudre d'yeux d'écrevisses, et surtout du phosphate de chaux préparé par la calcination des os et finement porphyrisé.

Pour ce qui est des dérivatifs ou révulsifs appliqués sur l'épigastre, tels que vésicatoires, cautères, j'y ai eu souvent recours, et ils m'ont paru, au moins dans quelques cas, exercer une influence salutaire sur la marche de la maladie.

J'ai eu à me louer de l'usage des bains gélatineux et alcalins, des ablutions fraîches sur toute la surface du corps, et, dans quelques cas, des ablutions très-chaudes, des bains frais par immersion, et des frictions stimulantes sur toute la surface du corps.

Mais, je le répète, dans les maladies de l'estomac, et plus particulièrement encore dans l'ulcère simple, qu'on peut considérer comme le degré le plus élevé de la gastrite, le grand, l'indispensable moyen, c'est le régime.

N'oublions jamais que la guérison de l'ulcère simple de l'estomac ne peut être durable que si le régime alimentaire est continué longtemps après la consolidation de la cicatrice; n'oublions jamais que l'ulcère simple de l'estomac est très-sujet à la récidive, et que cette récidive aboutit souvent ou à une hémorrhagie mortelle ou à la perforation de l'estomac. Or on préviendra bien certainement toute récidive par une bonne hygiène alimentaire et par l'absence de médicaments stimulants ou irritants. Je recommande surtout d'être avare de purgatifs et de vomitifs, non-seulement chez les

malades qui ont actuellement un ulcère simple de l'estomac, mais encore chez ceux qui en sont guéris depuis longtemps. J'ai vu deux cas de perforation de l'estomac qui ont eu lieu aux dépens de la cicatrice d'un ulcère simple, l'un à la suite d'un vomitif, l'autre à la suite d'un purgatif. Le tissu cicatriciel le plus parfait, malgré sa force de résistance physique, s'ulcère et se détruit beaucoup plus facilement sous l'influence des causes d'irritation, que la membrane muqueuse de l'estomac, si délicate en apparence, mais si résistante en raison de sa vitalité.

Tels sont les caractères cliniques et thérapeutiques de l'ulcère simple de l'estomac.

Je termine par les conclusions suivantes, qui sont le résumé de la seconde partie de ce mémoire.

Conclusions.

1° L'ulcère simple de l'estomac, véritable gastrite ulcéreuse, peut être toujours soupçonné et presque toujours positivement diagnostiqué.

2o Le diagnostic de l'ulcère simple de l'estomac est fondé sur les caractères différentiels qui le séparent, d'une part, de la gastralgie et de la gastrite non ulcéreuse, d'une autre part, du cancer de l'es

tomac.

3o L'ulcère simple de l'estomac se distingue de la gastralgie idiopathique par la permanence des accidents avec alternatives d'exaspération et de rémission, tandis que la gastralgie est temporaire, survient brusquement, disparaît de même, ne laisse aucune trace après elle, et qu'elle est d'ailleurs soudainement calmée par l'opium.

4° L'ulcère simple de l'estomac se distingue de la gastrite non ulcéreuse non moins que de la gastralgie par les vomissements noirs et par les déjections noires.

5o Il est infiniment probable qu'il existe des ulcères simples de l'estomac sans vomissements noirs et sans déjections noires, et dans ce cas un diagnostic différentiel positif entre l'ulcère simple et la gastrite non ulcéreuse devient extrêmement difficile.

6o Les vomissements noirs ne sont nullement caractéristiques du cancer de l'estomac; ils sont communs au cancer et à l'ulcère simple. 7o Il en est de même des déjections noires, qui sont tout aussi caractéristiques d'une gastrorrhagie que les vomissements noirs.

8° Les vomissements noirs et les déjections noires sont en quelque sorte plus inhérents à l'ulcère simple qu'au cancer de l'estomac; car ils appartiennent à toutes les périodes de l'ulcère simple, dont ils sont souvent le premier symptôme. On voit, au contraire, un grand nombre de cancers d'estomac sans vomissements noirs et sans déjections noires, et quand ils se produisent, ce n'est bien souvent qu'à la dernière période de la maladie.

9o Les caractères différentiels entre l'ulcère simple et le cancer de l'estomac se déduisent: 1° de signes physiques: absence de tumeur dans l'ulcère simple; 2o de la douleur: il y a assez souvent absence de douleur dans le cancer, jamais absence de douleur dans l'ulcère simple; 3° des caractères de la douleur : dans l'ulcère simple, sensation de plaie vive, de brûlure, de morsure, au niveau de l'appendice xiphoïde (point xiphoïdien), retentissement à la région correspondante du rachis (point rachidien); dans le cancer, crampes ou contractions spasmodiques avec durcissement de l'estomac.

10° La véritable pierre de touche pour le diagnostic différentiel entre l'ulcère simple et le cancer est dans la différence des effets du régime alimentaire, qui échoue complétement dans le cancer, et produit de merveilleux effets dans l'ulcère simple.

11o Le grand problème à résoudre dans le traitement de l'ulcère simple, c'est de trouver un aliment qui soit toléré sans douleur par l'estomac; cet aliment une fois trouvé, la guérison s'effectue avec une grande facilité.

12o Dans l'immense majorité des cas, le régime lacté est le seul qui réponde parfaitement aux instincts de l'estomac dans le cas d'ulcère simple; le lait semble agir à la manière d'un spécifique, mais sa spécificité vient exclusivement de son innocuité.

13° Enfin, dans le traitement de l'ulcère simple, les moyens médicamenteux proprement dits, tant internes qu'externes, ne peuvent être considérés que comme des moyens secondaires.

Post-scriptum. Le fait suivant, que je viens d'observer, peut être considéré comme un type de l'ulcère simple de l'estomac.

Observation sur deux ulcères simples de l'estomac occupant, l'un le pourtour de l'orifice pylorique, l'autre le pourtour de l'orifice cardiaque, ces orifices étant restés intacts.

Dans les premiers jours de ce mois (mars 1856), M. Blain des Cormiers, chef de clinique de la Faculté, m'a prié d'examiner l'estomac d'un individu mort à l'hôpital de la Charité, dans le service du professeur Piorry, dans le marasme, avec tous les symptômes du cancer de l'estomac. M. Blain avait cru reconnaître, à l'autopsie, les caractères anatomiques que j'ai tracés de l'ulcère simple de cet organe.

Or je trouvai sur cet estomac deux ulcères simples, parfaitement caractérisés : l'un, situé au pourtour du pylore, intact; l'autre, situé autour de l'orifice cardiaque, également intact; tous deux étaient semi-lunaires.

1o L'ulcère pylorique se présentait sous l'aspect d'une rigole, profonde d'un demi-centimètre, dont le bord voisin du pylore était coupé à pic, dont le bord opposé était coupé en talus. Cette rigole, parfaitement demi-circulaire, concentrique à l'orifice pylorique, avait 1 centimètre de largeur à une de ses extrémités, allait se rétrécissant graduellement, et avait à peine 2 millimètres à l'extrémité opposée; le fond de cette rigole était lisse, blanc, d'aspect fibreux. Sur cette surface lisse, proéminait un petit vaisseau d'apparence artérielle, non recouvert par la cicatrice. Dans presque tous les cas d'ulcère simple hémorrhagique de l'estomac que j'ai eu occasion d'observer, j'ai retrouvé une disposition semblable; je veux dire un vaisseau artériel ouvert et plus ou moins proéminent.

L'orifice pylorique de l'estomac avait été respecté; le bord voisin de la rigole ulcéreuse était séparé de cet orifice par un intervalle de 3 à 4 millimètres. La membrane muqueuse, parfaitement saine, se terminait abruptement sur ce bord, et formait un gros bourrelet en forme d'ourlet demi-circulaire; il en était de même de la muqueuse du bord opposé. Aucune trace de membrane muqueuse de nouvelle formation n'existait sur toute la surface de l'ulcère. La partie d'estomac qui avoisinait cette rigole ulcéreuse était remarquable par un grand épaississement hypertrophique, lequel portait principalement et sur la membrane fibreuse et sur la membrane musculeuse. Point d'obstacle au pylore.

2o L'ulcère de l'orifice cardiaque se présentait également sous la forme d'une rigole circulaire qui entourait les deux tiers de cet orifice, à 3 ou 4 millimètres duquel il était situé. L'orifice cardiaque était d'ailleurs parfaitement libre.

Cette rigole circulaire, recouverte par une cicatrice fibreuse mince et lisse, ne présentait, de même que l'ulcère pylorique, aucune trace de membrane muqueuse accidentelle : une particularité bien remarquable, c'est que sur un des points de cette cicatrice se remarquait une érosion profonde, en forme de cul-de-sac, qui avait détruit toute l'épaisseur des parois de l'estomac, moins le péritoine, qui seul avait été respecté. Cette particularité nous révèle le mécanisme de la perforation de l'estomac consécutive à la cicatrisation de l'ulcère.

Pour compléter la description de cet estomac, je dirai qu'il était hypertrophié dans toute son étendue, mais principalement au voisinage de l'ulcère pylorique. Je ne suis donc nullement étonné que M. Piorry, avec le tact exquis qui le caractérise, ait pu reconnaître à la région pylorique une induration ou épaississement non circonscrit qui n'avait pas été apprécié par d'autres observateurs.

Je ferai également observer que l'estomac avait subi une déformation que j'ai signalée à un degré beaucoup plus considérable dans d'autres cas (1), savoir : un rapprochement considérable du pylore et du cardia, et par suite un développement remarquable de la petite tubérosité de l'estomac; ainsi l'extrémité pylorique de l'estomac, rejetée en arrière, était débordée à droite par une tubérosité beaucoup plus considérable que la grosse tubérosité de l'estomac, qui débordait l'œsophage à gauche.

(1) Voyez Anatomie pathologique, avec planches, 20o livraison, planche 6.

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