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Ces observations, au nombre de trois seulement pour l'espèce humaine, jointes à celles analogues relatées par notre collègue, M. H. Bouley, à la Société de biologie, dans l'espèce chevaline, suffiront cependant à établir comme possible le fait que nous signalons. De nouvelles recherches viendront montrer plus tard dans quelle proportion on peut espérer de voir l'arthrite suppurée se terminer d'une manière aussi heureuse.

Je dois une de ces observations à l'obligeance de M. Monod, qui a bien voulu m'en communiquer les principaux détails en 1848, quand je lui parlai de ce que j'avais observé moi-même, La deuxième a été recueillie par moi, sur une des malades placées dans l'infirmerie de la Maternité de Paris, à laquelle j'étais alors attaché en qualité d'interne. Toutes deux ont pour sujet des femmes en couches; je dirai, en terminant, ce que cette particularité peut avoir d'important.

Il est bien entendu, d'ailleurs, qu'il ne s'agit point ici de ces suppurations articulaires multiples qu'on observe dans la fièvre puerpérale, mais bien d'arthrites mono-articulaires, franchement inflammatoires, en dehors de tout état général grave.

Quant à la troisième, elle est empruntée à la clinique de M. le professeur Nélaton, qui a bien voulu me permettre de la rapprocher des précédentes. Il s'agit, dans ce cas, d'une arthrite traumatique du genou, développée chez un jeune homme de 18 ans.

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OBSERVATION I. La femme P... (Victoire), âgée de 18 ans, journálière, d'une assez bonne constitution, d'un tempérament sanguin, née de parents qu'elle dit bien portants, ne fut elle-même jamais malade. Réglée pour la première fois à l'âge de 16 ans, elle continua de l'être régulièrement jusqu'au moment où elle devint enceinte; tout le temps de sa grossesse se passa sans le moindre malaise.

Le 20 février 1848, sans cause appréciable, elle acoucha, à huit mois seulement de grossesse, d'un enfant du sexe masculin pesant 2,500 gram. et présentant le sommet en o. i. g. a. Le travail dura dix-huit heures; la délivrance fut naturelle. La journée se passa sans aucun accident; mais le soir cette femme fut prise de violentes coliques, pour lesquelles on la transporta à l'infirmerie.

Le 21. De simples cataplasmes laudanisés ont suffi à calmer les douleurs de ventre. - G. S., p. C., bouillons.

Le 23. Il n'est plus question des douleurs abdominales; elles ont complétement disparu. Aujourd'hui la malade accuse dans le pied droit des douleurs qu'elle compare à des crampes. L'examen le plus attentif ne

permet de constater aucun phénomène local bien marqué; il existe seulement, au niveau de la malléole interne, un très-léger gonflement avec un peu de rougeur. Les mouvements qu'on imprime à l'articulation tibio-tarsienne sont très-douloureux. — 6 sangsues sur le point légèrement tuméfié; grand bain, et, au sortir du bain, l'articulation est recouverte d'un large cataplasme de farine de graine de lin mis à nu. A ces moyens, on ajoute l'influence de la position: la jambe est placée dans l'élévation sur un coussin de balle d'avoine, et, afin d'éviter les douleurs vives causées par les moindres mouvements, on maintient le pied dans une immobilité presque complète au moyen de bandes qu'on fixe au cerceau destiné à soutenir les couvertures.

État général bon, pas de fièvre notable.

On renouvelle le pansement deux fois par jour.

Le 24. La malade se trouve beaucoup soulagée; elle ne souffre presque plus quand on lui imprime des mouvements. Mêmes moyens. Le 26. L'amélioration ne s'est pas maintenue; le gonflement a augmenté, surtout au niveau des malléoles; on ne sent pas encore nettement de fluctuation. — Même traitement.

Le 3 mars. Depuis le 26 février, malgré les moyens indiqués, le gonflement a toujours augmenté, la fluctuation est devenue évidente au niveau des malléoles. Je fais sur chacun de ces points une incision de 3 à 4 centimètres, par laquelle s'écoule une assez grande quantité de pus bien lié, au milieu duquel on aperçoit des traînées de synovie facile à reconnaître à sa couleur jaunâtre et à sa consistance, comme sirupeuse, qui lui permet de s'étirer en longs filaments. Un stylet mousse, introduit par l'incision interne, pénètre à plus de cinq centimètres de profondeur; il arrive sans difficulté jusque dans l'articulation tibio-tarsienne. En le retirant et lui donnant une autre direction, on pénètre également dans plusieurs des articulations du tarse: la peau est peu décollée autour de l'incision. En dehors, le stylet est arrêté par les plans fibreux. Quand on fait mouvoir le pied sur la jambe, on cause de vives douleurs et on produit un frottement rugueux, une sorte de crépitation qu'on perçoit avec les mains et avec l'oreille. Toutes les personnes présentes peuvent constater le fait. Même position du membre; cataplasmes.

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Le 4. Soulagement notable, douleurs beaucoup moins vives, suppuration encore abondante, proportion de synovie plus considérable que la veille. Méme traitement.

Le 9. La suppuration diminue de jour en jour, le pus devient de plus en plus liquide, et la proportion de synovie va toujours en augmentant; du reste, douleurs nulles quand le pied reste immobile. Même traitement.

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Le 15. La suppuration est complétement tarie; la malade ne souffre nullement. On peut, sans causer de douleurs, imprimer au pied quelques légers mouvements. Même traitement.

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Le 18. Les plaies résultant des incisions sont réduites à de petites

plaies plates, linéaires; l'articulation a recouvré son volume normal, il n'y a plus le moindre gonflement, pas la plus petite douleur. La malade peut impunément se remuer dans son lit et se coucher sur le côté; elle meut elle-même le pied sur la jambe. Quand on imprime des mouvements à l'articulation malade, on ne sent plus aucun frottement rugueux, aucune crépitation. On remplace les cataplasmes par de petits emplâtres d'onguent de la mère.

Le 26. L'articulation est tout à fait guérie, les petites plaies résultant des incisions sont cicatrisées, les mouvements s'exécutent sans douleur.

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Le 29. Sans cause appréciable, l'articulation tibio-tarsienne est de nouveau gonflée et douloureuse, la peau y est légèrement rouge. taplasmes; élévation.

Le 30. Le gonflement, la rougeur et la douleur, ont augmenté, surtout au niveau de la malléole interne; il me semble y sentir un peu de fluctuation. Je pratique une incision qui ne donne issue qu'à du sang.. Cataplasmes; élévation.

Le 31. La malade se trouve soulagée, elle ne souffre presque plus; les bords de l'incision tendent à se réunir. Même traitement.

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Le 2 avril. Tous les accidents ont disparu; la dernière incision est cicatrisée. Les cataplasmes sont supprimés; on se contente du repos au lit.

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Le 5. Notre malade ne souffrant plus et faisant exécuter au pied toute espèce de mouvements, on ne peut plus la retenir au lit: elle veut absolument se lever; mais bientôt elle acquiert la preuve qu'elle ne peut se soutenir sur le membre qui vient d'être malade. Elle garde de nouveau le lit jusqu'au 8 avril. A ce moment, elle commence à pouvoir se soutenir sur son membre droit.

Le 17. Le mieux a fait de grands et rapides progrès. Depuis le 9, la malade s'est levée chaque jour quelques instants, et a marché chaque fois un peu davantage. Aujourd'hui l'articulation tibio-tarsienne droite est complétement revenue à son état normal; il n'y a plus ni gonflement, ni rougeur, ni douleur; les mouvements s'y exécutent comme du côté sain: ils ne sont accompagnés d'aucune roideur, d'aucun frottement rugueux, d'aucune crépitation. Notre malade sort de la Maternité complétement guérie et sans la moindre trace d'ankylose.

OBS. II.. Mme X..., âgée de 35 ans, d'un tempérament nerveux, d'une assez bonne constitution, eut un premier accouchement très-heureux, à l'exception de quelques phénomènes nerveux, consistant surtout en une prostration insolite qui dura pendant cinq ou six jours. Cette dame nourrit avec succès.

Elle devint enceinte une seconde fois. Cette deuxième grossesse fut beaucoup plus pénible que la première; un déménagement, les soins d'un ménage considérable à diriger, avaient causé pendant les derniers

mois de grandes fatigues. Malgré cela, elle accoucha naturellement et à terme; mais, presque immédiatement après l'accouchement, elle présenta de nouveau cette prostration singulière, accompagnée cette fois d'angoisse et d'insomnie. La sécrétion laiteuse fut peu abondante, et vers le quatrième ou cinquième jour des couches, en même temps que les symptômes généraux se dissipaient, il survint dans les deux genoux un épanchement séreux qui, malgré tous les soins, alla en augmentant. Au bout d'un mois, le liquide du genou droit fut presque entièrement résorbé; mais la distension des ligaments avait été telle que le tibia s'était porté dans la demi-luxation en dehors, et que les mouvements sont restés assez notablement génés.

Du côté gauche, la résorption ne put être obtenue: le genou resla énorme. La cautérisation transcurrente, l'immobilité dans une gouttière, demeurèrent sans effet. Dans le second mois, sans cause bien appréciable, survint un travail inflammatoire, la suppuration se manifesta; à la partie inférieure et externe de l'articulation, il s'établit bientôt spontanément une ouverture par laquelle s'écoula une quantité abondante de pus; du reste, pas de phénomènes de réaction générale. Plusieurs contre-ouvertures furent pratiquées en différents points; la suppuration de bonne nature alla en diminuant graduellement. Un mois environ après l'ouverture de la collection purulente articulaire, le genou fut guéri. A partir de ce moment, les mouvements se rétablirent peu à peu; la malade cependant n'a jamais pu depuis fléchir le genou au delà de l'angle droit.

Cette dame, devenue grosse une troisième fois, eut un accouchement heureux et naturel. Au début des couches, on observa encore quelques phénomènes nerveux qui se dissipèrent promptement pendant l'administration de l'alcoolature d'aconit; rien de particulier ne se manifesta du côté des genoux.

OBS. III. Arthrite traumatique suppurée guérie avec conservation des mouvements. Un jeune ouvrier en châles, de 18 ans, s'enfonce dans l'articulation du genou gauche l'une des pointes des longs ciseaux dont il se sert pour tondre les châles. Tout d'abord ce jeune homme s'occupe peu de sa blessure; mais, du huitième au dixième jour de l'accident, survient un gonflement considérable de la jointure, et le malade vient demander à entrer à l'hôpital Saint-Louis, où il est admis.

Il présente tous les signes d'une plaie pénétrante du genou: tuméfaction très-étendue, avec coloration blanchâtre, påteuse, ayant de l'analogie avec le gonflement de la phlegmatia alba dolens; les lèvres de la plaie sont mollasses, blanchâtres, œdémateuses. Par cette plaie, s'écoule un liquide séro-purulent, dont on augmente l'écoulement par des pressions sur les différents points de l'articulation. On met en usage le traitement préconisé par M. Fleury (de Clermont), c'est-à-dire qu'on enveloppe toute l'articulation d'un vésicatoire monstre.

Malgré ce moyen, la tuméfaction persiste. Dans le liquide qui s'écoule par la plaie, le pus prédomine de plus en plus; bientôt il n'est plus formé que de pus, dont une quantité considérable s'échappe chaque jour par des contre-ouvertures et par la plaie primitive. Immobilité

dans une gouttière matelassée.

Un peu plus tard, le produit versé au dehors de l'article reprend le caractère séreux; enfin il est bientôt constitué uniquement par de la sérosité, et les plaies se cicatrisent, le tout en six semaines. A ce moment, le malade peut faire exécuter quelques mouvements à son genoú; ces mouvements, d'abord difficiles, le deviennent de moins en moins, et au bout de trois mois, le malade, revu par M. Nélaton, a recouvré complétement les mouvements de son membre, et il a repris son étal de châlier.

Je rapprocherai des observations précédentes un fait signalé par M. le professeur H. Bouley, d'Alfort, à la Société de biologie (séance du 23 février 1856).

Notre collègue présente l'articulation temporo-maxillaire d'un cheval chez lequel il existait un arthrite suppurée, datant déjà de quelque temps. Une quantité assez considérable de pus s'écoulait de l'articulation malade, surtout pendant la mastication que l'animal exécutait chaque jour plusieurs fois, malgré la souffrance que cela lui causait, la faim l'emportant sur la douleur. M. Bouley, désireux de voir dans quel état se trouvaient les surfaces articulaires, sacrifia l'animal et voici ce qu'il trouva: sur le temporal comme sur le maxillaire inférieur, les cartillages articulaires ont entièrement disparu; à leur place on observe des bourgeons rouges vasculaires, tassés les uns contre les autres, recouverts par places de portions osseuses lisses; il n'y a plus de trace de synoviale.

M. Bouley pense que cette articulation, qui, au moment où l'on a sacrifié le cheval, suppurait peu, était déjà en voie de guérison, et il se fonde, pour émettre cette opinion, sur ce qu'il a vu dans un assez grand nombre d'autres cas de la même espèce. Il parait en effet que l'arthrite suppurée de l'articulation temporo-maxillaire n'est pas rare chez le cheval, et qu'il est fort commun de voir les animaux poussés par la faim continuer de manger, continuer par conséquent de se livrer à des mouvements de mastication, et enfin guérir complétement après un temps plus ou moins long.

Ainsi donc, d'après ces renseignements, sur lesquels M. Bouley insiste invité par nos questions, l'arthrite suppurée, dans l'espèce

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