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développement des produits hétéromorphes, quelques signes peuvent faire craindre qu'un travail de ce genre ne menace le poumon; la sécheresse de la peau accuse le trouble de ses fonctions, et les facultés digestives s'allanguissent.

En présence d'un état morbide aussi complexe, l'indication dominante était évidemment de tarir ce flux, qui épuisait la malade; il fallait, en outre, s'efforcer d'atteindre, s'il était possible, l'état de l'organisme qui avait préparé et qui entretenait cette sécrétion immodérée; il fallait réparer les forces et imprimer aux fonctions nutritives altérées une meilleure direction.

Pour relever l'activité des forces digestives, les ramener à leur type et à leur direction normales, j'ai prescrit à cette malade, avec un régime analeptique, une solution de sel de Vichy et des pilules de proto-iodure de fer. Les alcalins ont été plusieurs fois employés avec succès dans le diabète, et, sans accepter les explications chimiques qu'on a données de leurs effets, il me paraît incontestable qu'ils favorisent, dans beaucoup de cas, les fonctions de nutrition et d'hématose. Le fer agit dans le même sens, et dans son composé iodique je trouvais l'avantage de lui ajouter une substance dont on a constaté l'action atrophiante sur les organes glanduleux, et sur la mamelle en particulier. Pour exciter l'action des autres émonctoires et tâcher d'y produire une dérivation utile, après avoir sollicité l'action du rein par les boissons indiquées plus haut et qui jouissent de propriétés diurétiques, j'ai conseillé des bains minéraux, des frictions quotidiennes avec une brosse de crin, moyen énergique qui m'a rendu service dans beaucoup de circonstances, et dont l'action stimulante ne me paraît pas bornée au tissu cutané, mais m'a semblé, par l'intermédiaire des nerfs périphériques, retentir quelquefois jusqu'aux centres nerveux; enfin j'ai fait sur la glande elle-même des applications résolutives, aidées d'une compression légère, telle que le pouvait permettre l'extrême sensibilité dont cet organe était le siége, pour diminuer son volume et y modérer l'afflux du sang.

Quelle part faut-il attribuer à chacun des éléments de cette médication dans le résultat si rapidement obtenu? C'est ce qu'il n'est pas possible de dire. Je sens toute la justesse des critiques adressées aux traitements complexes au point de vue de l'expérimentation thérapeutique, mais je n'en reste pas moins convaincu que

dans un grand nombre de maladies, surtout dans les affections chroniques, et plus encore dans celles qui sont accompagnées d'un état cachectique, il est rare qu'on puisse triompher du mal à l'aide d'un seul moyen, et le plus souvent il faut toucher l'organisme par plusieurs côtés pour le ramener à ses conditions d'équilibre. Comme je l'ai déjà dit, le résultat a répondu à mon attente; plusieurs médications énergiques avaient été employées sans succès, et là me parait être le principal intérêt de ce fait.

Les exemples analogues sont fort rares dans les auteurs; je n'en ai rencontré qu'un très-petit nombre, et je vais les analyser :

Dans les Éphémérides des curieux de la nature (2o décade, an 2, p. 99), on raconte qu'une femme enceinte fut, depuis le cinquième mois de sa grossesse, incommodée par un flux laiteux dont la quantité s'élevait à une livre et demie chaque jour, On lui pratiqua trois saignées; des ligatures furent appliquées sur les membres inférieurs; on restreignit la dose de ses aliments, on lui prescrivit l'exercice en plein air. Le flux fut réduit à une demi-livre, et cette femme accoucha à terme d'un enfant vigoureux.

C'est à ce fait sans doute que fait allusion Sauvages dans sa Nosologie, t. V, quand il dit : Visa sunt mulieres quæ quinto graviditatis mense libram et semissem lactis quotidie fundebant.

On lit dans le même recueil (décade 11, an 5, p. 475) l'observation d'une femme qui perdait chaque jour 3 pintes de lait, outre celui qu'elle fournissait à son nourrisson; une autre, après avoir bu 6 livres de lait de chèvre, sentit un tel afflux vers ses mamelles qu'elle était à peine soulagée par les nombreux enfants auxquels elle offrait son sein; ut pene rupta ægre a numerosis pueris, uberibus ad motis levaretur. (Ces derniers faits ont été cités par de Haller dans le 7e vol. de sa Physiologie, 2e partie, p. 24.) On trouve dans les Prælectiones academicæ, rédigées par le même auteur (t. III, p. 303, § 380), le cas observé par Boerhaave, qui le premier donna à cette affection le nom de diabète lacté : « Une femme de Dordrecht avait été enceinte ou nourrice pendant douze années consécutives sans interruption; elle finit par être affectée d'un diabète laiteux, de sorte que toute la nourriture qu'elle absorbait s'échappait de ses mamelles sous forme de lait, sans aucune succion. Buvait-elle une livre de bière, elle perdait par

les seins à peu près la même quantité de lait, maladie pénible dont elle ne fut délivrée qu'au bout de neuf mois; jamais ses urines ne continrent du lait. Chez d'autres femmes, ajoute le médecin de Leyde, les canaux du rein sont tellement relâchés par l'usage des boissons tièdes ou sous l'influence d'autres causes, qu'ils laissent échapper du lait, et qu'il survient un diabète laiteux, promptement suivi d'un épuisement mortel.» Boerhaave prétend expliquer ce résultat par la différence de dilatabilité des conduits urinaires et laiteux. Il confond ici deux maladies essentiellement différentes. D'ailleurs M. Rayer a justement contesté l'authenticité de ces urines laiteuses: ce savant médecin pense que, dans le plus grand nombre des cas, et peut-être dans tous, on a désigné sous ce nom des urines qui contenaient des matières grasses ou du pus.

Van Swieten (t. IV, p. 572) cite l'observation d'une femme chez laquelle les mamelles étaient le siége d'un écoulement de lait continuel et incommode qui persista plusieurs semaines, bien qu'elle eût cessé d'allaiter son enfant ; un amaigrissement rapide en fut la conséquence; après plusieurs remèdes infructueux, elle fut guérie sous l'influence de l'administration de la sauge à doses répétées toutes les trois heures.

Tissot (t. VIII, p. 135, édition de Hallé) dit avoir vu deux exemples de diabète mammaire chez des femmes qui n'avaient pas nourri: «L'une, dit-il, fut une femme de ce pays, que cet écoulement, qui dura plus de huit mois, jeta dans un épuisement dont elle ne s'est jamais relevée; l'autre, une Française, qui perdait la vue pendant ses grossesses, et chez qui l'abondance du lait était si grande qu'elle perçait les matelas, les couettes et les paillasses, ce qui la conduisit à une mobilité excessive qui subsistait encore bien des années après. »

Dans les publications récentes, je n'ai trouvé que les indications suivantes :

M. Puquet, médecin à Bourg, adressa à l'Académie de médecine une observation de flux laiteux abondant survenu après l'accouchement, et qui fut tari à l'aide d'une application de sangsues à l'anus (Archives gén. de méd., 2a série, t. XVI, p. 621).

On lit dans le British and foreign review, t. XX, une observation empruntée à M. Green, de New-York, dont le sujet était, une femme de 47 ans, mère de quatre enfants; elle avait eu le

premier à l'âge de 20 ans, le dernier à 33; la sécrétion du lait n'avait pas cessé depuis son dernier accouchement et augmentait aux époques menstruelles. Cette femme nourrit ses quatre enfants et deux enfants étrangers, qui tous prospérèrent, et sa santé ne subit aucune altération. Cette dernière circonstance devrait faire éliminer ce fait du cadre que je me suis tracé, mais je le mentionne pour montrer que, dans certains cas, l'organisme paraît s'habituer à cette production anormale, comme dans quelques cas, il s'habitue à des flux sanguins ou muqueux qui finissent même quelquefois par entrer dans ses conditions d'équilibre relatif.

Je dois à l'obligeante érudition de mon collègue et ami M. le D' Lasègue les trois faits suivants :

Hanck, Journal hebdomadaire de médecine (en allemand Wochenschrift, etc., 1836), cite le fait d'une jeune femme trèsrobuste qui, à sa première couche, avait nourri quatre semaines son enfant. A cette époque, vive. douleur dans les deux seins qui la forcent à sevrer. La sécrétion lactée persiste, malgré la diète et les purgatifs. Le lait coule abondamment, et par intervalles il sort par jet des mamelles, de manière qu'en peu de temps on peut en remplir une cuvette. Amaigrissement, débilité croissante. Guérison après cinq semaines de maladie.

Dans le Journal de Hufeland pour 1828 il y a une observation d'Amelung très-curieuse; il s'agit d'une jeune femme obligée de sevrer par suite de fissure du sein. Constipation opiniâtre, galactorrhée très-abondante. Les toniques sont employés sans succès et provoquent de vives douleurs abdominales; on administre le calomel à hautes doses. Salivation; pendant toute la durée de ce nouveau flux, la perte du lait s'arrête; elle reparaît après que le ptyalisme a cessé. La galactorrhée s'arrête spontanément au retour des règles.

Naumann raconte, dans son Manuel de clinique (Handbuch, 1838), le fait suivant : « Je connais, dit-il, une jeune femme qui, dans la deuxième semaine de son allaitement, fut prise d'une telle galactorrhée, que le lait, qui coulait sans interruption toute la nuit, traversait son lit. Un médecin prescrivit des diaphorétiques. La galactorrhée se suspendit, mais il survint des sueurs profuses plus fatigantes pour la malade et qu'il fallait arrêter par les acides minéraux et le quinquina. Les sueurs cessèrent, la galactorrhée

reparut presque aussitôt, mais beaucoup moins intense, et surtout d'un seul côté. La guérison ne fut complète qu'au bout de six mois.

On trouve dans le Bulletin thérapeutique une observation de galactorrhée beaucoup plus complète que la précédente, publiée par le Dr Pétrequin, de Lyon, et dont je dois encore l'indication au D' Lasègue:

Femme mariée, frangeuse, âgée de 26 ans ; tempérament lymphaticosanguin, bien constituée.

Lors de son premier accouchement, elle se destinait à être nourrice; mais, ayant pris froid, elle fut forcée d'y renoncer au bout de quinze jours; les mamelles devinrent le siége d'un engorgement inflammatoire, et les deux seins s'abcédèrent. Guérison après trois mois de traitement. Depuis lors le sein droit conserva un volume anomal, il était indolent; mais, quand elle était en sueur, il suintait par le mamelon une sérosité blanchâtre dont la quantité augmenta quand elle redevint enceinte, et ce flux fut continu durant le cours de la deuxième gestation. Cette nouvelle couche eut lieu deux ans après la première; elle fut heureuse, les lochies fluèrent naturellement pendant une semaine. La malade n'allaita pas un seul jour; l'écoulement du lait ne tarda pas à s'établir des deux côtés avec une telle abondance qu'elle en était inondée. La peau des mamelles rougit et s'enflamma dès le sixième jour. Le 30 septembre, vingt et un jours après l'accouchement, elle entra à l'hôtel-Dieu de Lyon.

Les seins étaient alors très-volumineux, distendus, douloureux; la peau rouge, comme érysipélateuse, et le mamelon environné d'une auréole de boutons enflammés; la galactorrhée continua à être trèsforte; il y avait, en outre, de la céphalalgie, de la constipation et quelques coliques; il s'y était joint une fièvre tierce, qui était à son quatrième accès; on attribua cette inflammation au contact continu du lait (que la chaleur faisait rapidement aigrir), au frottement des vêtements et au peu de propreté de l'accouchée; du linge propre, des cataplasmes et des lotions émollientes, furent les seuls moyens locaux qu'on dirigea d'abord contre elle; on y joignit des laxatifs, le petit-lait, antilaiteux de Weiss, qui eurent pour résultat des coliques et du dévoie

ment.

Un léger accès fébrile ayant reparu, le médecin prescrivit une décoction de quinquina, et la fièvre ne revint plus. Les purgatifs étant impuissants, on essaya des astringents; l'alun, l'extrait de ratanhia, la limonade sulfurique, le carbonate de potasse à la dose de 2, puis de 4 grammes, furent successivement employés; en même temps, un sachet résolutif fut appliqué sur le sein.

Tous ces moyens restèrent inefficaces, deux vésicatoires appliqués à

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