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tre pas dans mon esprit de mesurer toujours la durée de l'attaque sur celle de la constipation, je regarde cependant comme incontestable que, quand celle-ci existe, l'apparition des selles est suivie d'une amélioration subite dans les douleurs. Qu'y a-t-il d'ailleurs d'étonnant que, de deux symptômes dus à une même cause, l'un s'apaise quand l'autre s'arrête. Il est rare', quand l'attaque de colique cesse, que le malade passe immédiatement à la santé; presque toujours les douleurs arthritiques ou les paralysies commençantes le tiennent affaissé pendant plusieurs jours. Mais souvent aussi une rechute de la colique a lieu, et peut offrir des accidents aussi graves que le premier accès, ce qui prolonge beaucoup la durée totale de l'attaque.

Quand la colique est en récidive, il y a plus d'irrégularité dans la succession des symptômes et dans leur durée; mais c'est surtout quand la maladie suit tout son cours qu'alors les symptômes se croisent, et que la durée totale peut aller très-loin. J'ai déjà fait pressentir cependant que je considérais trois périodes dans la colique végétale, quand sa marche était régulière la colique proprement dite formait la première; l'arthralgie et la paralysie, la deuxième, et l'encéphalopathie, la troisième. Mais il ne faut pas considérer ces périodes comme tellement distinctes, qu'elles n'empiètent le plus souvent les unes sur les autres. Ainsi la colique et la constipation reparaissent à diverses reprises dans le cours de la maladie, et laissent toujours une aggravation dans l'état général; la paralysie et les tremblements commencent fréquemment pendant la première attaque de colique, quand elle est violente, persistent pendant les accidents encéphalopathiques, ou peuvent se prolonger longtemps après encore; enfin les diverses formes de l'encéphalopathie peuvent se montrer peu de temps après l'attaque de colique, surtout si elle est en récidive et que le malade soit déjà très-anémié.

La durée de la maladie complète est fort longue, comparée à l'intensité des symptômes, et l'on est en droit de se demander comment l'homme peut supporter pendant aussi longtemps de si atroces douleurs. C'est par mois que se compte cette durée, et, d'après les observations que je vois consignées dans les divers mémoires, ainsi que d'après les miennes, elle n'est pas moindre de trois à quatre mois.

La marche de la colique végétale complète me paraît essentiellement continue, mais à paroxysmes quelquefois assez éloignés, et pouvant être séparés par des intervalles de mieux qui se rapprochent de la santé. Le nommé Ollivaut, de la Sybille, ce malade à attaques épileptiformes, sans autres accidents que l'anémie et la faiblesse, avait pu sortir de l'hôpital et rester un mois à son bord, après l'attaque de coliques, avant que l'épilepsie se déclarât.

Dans les localités à endémie paludéenne, si le malade était atteint de fièvre intermittente avant la colique végétale, on peut voir ses accès reparaître dans le cours de la maladie, mais toujours dans les moments où la colique se tait, et sans exercer d'influence sur elle, du moins d'après mes observations. M. Raoul pense qu'alors la quinine peut enlever la fièvre et la colique en même temps; le même fait s'observe dans la dysenterie. Ces accès sont survenus chez presque tous mes malades provenant de la Sybille, parce qu'ils sortaient d'un foyer intense d'endémie paludéenne, Fortde-France; mais cela n'est arrivé à aucun des malades provenant des navires de commerce qui venaient de faire des traversées plus ou moins longues ou qui n'étaient pas sortis de Saint-Pierre, où n'existe pas cette endémie. Je n'hésite pas à regarder les cas de colique intermittente cités par M. Fonssagrives comme de simples fièvres d'accès qui ont réveillé la colique chez des hommes qui y étaient disposés ou qui l'avaient déjà eue.

Ces faits, qui ont dû être observés par tout le monde, n'ont pas été signalés jusqu'ici, parce qu'on a toujours regardé la fièvre comme très-distincte de la colique.

Pronostic et terminaison.- Le pronostic de la colique végétale varie suivant que la maladie s'arrête à la colique ou qu'elle parcourt toutes ses périodes. Je ne sache pas que l'on ait observé un seul cas de mort après une attaque de colique simple, quelque intense qu'elle fût. On guérit donc toujours d'une colique primitive qui n'est pas suivie d'accidents graves, et on peut le faire d'une manière radicale, c'est-à-dire sans qu'il y ait désormais aucune récidive et bien qu'on ne quitte pas le lieu où on l'a contractée. C'est là l'exception, mais cela a lieu à terre; c'est incontestable, j'en connais plusieurs cas, et M. Segond en cite plusieurs de son côté.

Si ce genre de guérison est l'exception, c'est donc que la récidive est la règle, et que les accidents de la seconde période, sou

vent, et ceux de la troisième, plus rarement, accompagnent et suivent la colique; alors le pronostic est toujours grave, et, quand le malade ne meurt pas, il reste pendant longtemps affaibli ou exposé à divers accidents qui en font un être impropre à toute occupation nécessitant l'activité de l'esprit ou du corps. Si j'examine ce qui se passe à terre, la mort arrive assez rarement encore cependant, et, pour mon compte, je n'ai eu-qu'un décès sur les 22 cas que j'ai cités; mais, si je prends la maladie à bord des navires, où elle a le plus souvent le caractère endémique, alors le pronostic change ainsi, à bord de l'Eldorado, M. Fonssagrives a perdu 3 malades sur 8; M. Raoul, en 1846, a eu, sur 112 malades appartenant à 21 navires, 12 décès et 12 invalides renvoyés en France et dont le sort ultérieur n'a pas été bien connu.

L'Artémise, à Mayotte, a fait aussi des pertes considérables; à Cayenne et aux Antilles, au contraire, on n'observe pas ces grandes mortalités.

Les accidents qu'on observe à la suite de la colique sont le plus souvent des paralysies ou des tremblements musculaires, qui persistent pendant un temps plus ou moins long et peuvent durer même plusieurs années. Je ne puis pas dire si elles peuvent rester à l'état d'infirmité; mais leur durée, constatée pendant deux ou trois ans, constitue déjà une terminaison suffisamment grave. J'ai dit que j'avais observé une paralysie des fonctions génératrices deux ans après la guérison; je ne sache pas que l'épilepsie ait persisté chez les malades qui ont guéri des autres accidents. Il m'a été donné de suivre un de ces malades pendant plusieurs années, et jamais les accidents épileptiformes ne se sont reproduits, mais l'anémie et la faiblesse durent pendant plusieurs mois.

Telles sont les terminaisons de la colique végétale qui me sont connues; je ne parle pas de la susceptibilité du ventre que conservent plusieurs personnes pendant de longues années, ni de la propriété qu'ils portent avec eux de voir la maladie se reproduire s'ils retournent dans son foyer; ce sont des caractères propres à la colique végétale, caractères qui appartiennent aussi à d'autres endémies des pays chauds, la dysenterie et l'hépatite, par exemple.

Traitement.

Une détermination plus exacte de la cause de la

colique végétale, et une étude plus rationnelle des symptômes rapportés à leur source et à leur nature véritable, doivent nécessairement amener un progrès notable dans le traitement de cette maladie, et, si l'on veut que les résultats répondent à ces espérances, on ne doit pas s'écarter de la voie tracée aujourd'hui. Quand on aborde un cas de colique intense, on ne doit pas oublier que les symptômes dominants du début, ceux qui en font toute la gravité, sont d'abord les douleurs, celles de l'abdomen surtout, puis la constipation, et que ces accidents sont l'effet d'un empoisonnement miasmatique qui porte son action principalement sur les centres nerveux, le point de départ ayant lieu le plus souvent aux nerfs de la périphérie, et le lieu d'élection au système nerveux abdominal. L'effet produit sur ce système est une exaltation vive de sa sensibilité dans tout le tube digestif, et une diminution ou abolition de la contractilité avec trouble ou même suppression de sécrétions. Il est donc rationnel de chercher surtout à calmer la sensibilité, et en même temps à rétablir les fonctions de l'intestin, dont le trouble cause la constipation.

Ceux qui regardent la constipation comme le thermomètre de la durée et de la gravité de la colique s'attaquent surtout à ce symptôme, espérant faire cesser les douleurs en même temps. Le traitement de la Charité, dans la colique de plomb, n'a pas d'autre but, il faut bien le dire, et il réussit souvent; je ne sache pas qu'il ait été jamais employé dans la colique végétale. Aujourd'hui la douleur est regardée avec plus de raison comme le symptôme le plus grave et comme celui qui domine tous les autres, et c'est à elle qu'il est prudent de s'attaquer tout d'abord.

Je dois dire, avant d'entrer dans les détails du traitement qu'on peut mettre en usage ou que j'ai employé, que des médecins éclairés par une longue expérience, après avoir essayé contre la colique végétale tous les calmants et les évacuants de la matière médicale, convaincus que les médications actives ne font que fatiguer les malades, et que, quoi qu'on fasse, on ne parvient pas à abréger la durée presque fatale de la maladie, se sont bornés à employer les moyens adoucissants les plus simples, ceux que tous les malades réclament quand ils en ont senti les premiers effets; ce sont les bains prolongés, les lavements simples ou huileux, les frictions camphrées et opiacées sur les parties douloureuses. Ce n'est

que lorsqu'ils savent qu'approche le moment de la détente qu'ils la favorisent par les évacuants les moins irritants et par les opiacés portés à une certaine dose. Dans les hôpitaux, à terre, et dans les cas endémiques particulièrement, cette conduite me parait sage, et je l'ai vue très-bien réussir pour la colique qui n'est accompagnée ou suivie d'aucun accident grave. Comme je n'ai jamais vu ni pu juguler une attaque de colique et que je crois qu'elle suit son cours comme un accès de fièvre intermittente suit le sien, je suis disposé, comme pour l'accès fébrile, à me borner à suivre et à modérer ses symptômes.

Mais, il faut le dire, dans la plupart des cas épidémiques, et même dans quelques cas sporadiques, la maladie se présente avec un aspect tellement effrayant et avec des symptômes tellement menaçants pour l'avenir, que le courage le plus expérimenté ne saurait rester inactif devant de telles souffrances.

S'il y a embarras gastrique prononcé ou si les vomissements sont fréquents, il me paraît utile de débuter par un émétique, qui ordinairement calme et même supprime ce symptôme, très-gènant pour la médication, puis on s'attaque immédiatement à la douleur. Si celle du rachis est très-forte et primitive, il faut de suite appliquer un long vésicatoire sur le point de l'épine qui fait souffrir, comme pouvant être le point de départ des autres douleurs ; ce vésicatoire est entretenu et pansé avec 10 ou 15 centigr. d'extrait de belladone étendus sur l'emplâtre; si c'est la douleur abdominale qui domine, comme c'est habituel, c'est alors par la bouche qu'il faut administrer le calmant; celui que j'ai employé pendant la petite épidémie que j'ai observée est la belladone, et l'idée m'en a été suggérée, comme à M. Fonssagrives sans doute, par la lecture de l'excellent rapport de M. Raoul sur le service de santé de la station du Sénégal, année 1846 ( rapport dont j'ai fait l'analyse dans un article sur la colique végétale, inséré dans le numéro 18, 1851, de la Gazette médicale). Je ne sais si ce moyen appartient à M. Raoul ou s'il remonte plus haut; mais jusque-là j'avais employé, comme tout le monde, la morphine, sans avoir trop à m'en plaindre, et si l'expérience m'a prouvé la supériorité de la belladone, je suis loin cependant de professer pour elle le même enthousiasme que M. Fonssagrives, qui en fait une espèce spécifique. Elle calme un peu plus que la morphine, je le crois, elle est sujette

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