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Franchement, après trois révolutions en moins de quarante années, quel est l'homme ayant quelque expérience des affaires publiques, dont les antécé« dents ne puissent donner prise à la passion des « détracteurs? Comme si le fait seul d'avoir servi ⚫ son pays sous les pouvoirs précédents était un « crime.

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« Cette tactique odieuse n'aura pas le succès qu'on < s'en promet. Le neveu de l'Empereur demeurera inébranlable. Il a pris pour règle de conduite les paroles de son oncle immortel, s'écriant un jour « au conseil d'État : - Gouverner pour un parti, c'est se mettre tôt ou tard dans sa dépendance; on ne

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m'y prendra pas; je suis national. Je me sers de « tous ceux qui ont de la capacité et la volonté de « marcher avec moi. Voilà pourquoi j'ai composé « mon conseil d'État de constituants qu'on appelait « modérés ou feuillants, comme Defermon, Roederer, Regnier, Regnault; de royalistes comme Devaines « et Dufresne; enfin de jacobins comme Brune, Réal et Berlier. J'aime les honnêtes gens de tous les partis. »

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L'année finit sous ces auspices; le 12 décembre, un décret avait licencié les six bataillons qui subsistaient de la garde mobile. Les officiers reçurent, à titre de gratification, un mois de la solde de leur grade; une indemnité analogue fut accordée aux sous-officiers, caporaux et soldats. Cette mesure était commandée par le plan financier de M. Fould, puisque l'économie résultant de ce licenciement était comprise pour

2,700,000 francs dans les réductions obtenues sur le budget de la guerre.

VII

Le commencement de l'année 1850 ne fut marqué par aucune de ces solennités usitées dans les temps précédents. L'Assemblée ne crut pas devoir nommer de députation pour rendre visite au chef de l'Etat; et les réceptions officielles ne furent accompagnées d'aucun discours.

Une députation de citoyens appartenant au parti de l'ordre offrit une épée d'honneur au général Changarnier; la riche poignée de cette arme, dessinée par M. de Nieuwerkerke, était ornée de deux brillants donnés, l'un par le Président, l'autre par la princesse Mathilde, fille du roi Jérôme.

Jusqu'alors aucune mésintelligence n'avait troublé les relations du Président de la République et du général en chef de l'armée de Paris. Le Prince se montrait noblement reconnaissant et le général complétement dévoué. Par quelles influences ces bons rapports furent-ils altérés? C'est ce qu'il n'est pas possible de dire encore. L'histoire contemporaine a ses réticences obligées.

Constatons seulement que déjà se manifestait dans l'Assemblée le germe de toutes les divisions et de tous les malheurs futurs. L'influence funeste du Gouvernement provisoire, trop bien servie par un ministre que

l'Assemblée Constituante elle-même renversa dans un jour d'indignation et de justice, avait opposé les instituteurs primaires au clergé, et converti les maîtres d'école en apôtres du socialisme. Le scandale était devenu trop grave pour être supporté; le Gouvernement demanda pour ses préfets le droit de suspendre les instituteurs qui, prévariquant de leurs fonctions, répandraient parmi l'enfance les doctrines subversives et irréligieuses. M. de Parieu demanda l'urgence pour ce projet de loi, qui soulevait la colère de l'opposition. Le scrutin donna 312 voix pour et 312 voix contre. Par conséquent l'urgence ne fut pas adoptée. La proclamation de cet étrange résultat fut accueillie par des éclats de rire. «- Il n'y a pas de quoi rire, s'écria prophétiquement M. Dupin, quand on voit une assem«blée unique ainsi divisée en deux parties égales. Ré« fléchissez!» Mais le lendemain une vérification plus attentive fournit à l'urgence une voix de majorité, triomphe aussi désastreux qu'une défaite. Quarantehuit heures après, le désarroi de la majorité devint plus évident encore; il s'agissait de renouveler le bureau: M. Dupin aîné fut réélu par 290 voix seulement. Il adressa sur-le-champ la lettre suivante à l'Assemblée :

< Paris, le 5 janvier 1850.

« Messieurs et très-honorables collègues,

« Je vous remercie des suffrages qui, pour la

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trième fois, m'appellent à l'honneur de présider « l'Assemblée Nationale. Personne ne place plus haut

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⚫ que moi cette dignité. Mais l'expérience m'a appris ⚫ combien aujourd'hui cette grande fonction est difficile à remplir; et en présence d'un scrutin dont le • résultat me donne une majorité inférieure à celle • que j'avais obtenue dans les trois précédentes élections, j'ai craint, je vous l'avoue, de ne plus trouver au sein de l'Assemblée Nationale cette force d'adhésion qui m'a soutenu jusqu'ici, et sans laquelle l'énergie d'un seul homme est bientôt épuisée et demeure impuissante. Je prie donc respectueusement «mes honorables collègues de vouloir bien regarder « mon élection comme non avenue, et de reporter leurs < suffrages sur un autre candidat.

Signé: DUPIN. »

La majorité, effrayée de sa faiblesse et de son impuissance, se rallia un instant et réinstalla M. Dupin au fauteuil par 377 voix.

Dans cette même séance (7 janvier), à propos de la discussion sur les affaires de la Plata, le Prince fut de nouveau mis en cause relativement à un article du Napoléon, journal qui venait de faire son apparition sous la direction de M. Briffault, ancien secrétaire de la Présidence. Les différents partis qui composaient l'Assemblée Législative consentaient bien à patroner des journaux qui devinssent les interprètes de leur mauvaise humeur et de leurs rancunes; mais ils trouvaient fort extraordinaire que la politique du Président eût un organe dévoué qui la défendît et la propageât, et ils allèrent jusqu'à répandre le bruit que cette feuille

était écrite par le Prince Louis--Napoléon, et que même il s'amusait à en corriger les épreuves au milieu des imprimeurs. C'étaient là des commérages, au travers desquels on voit cependant toujours percer le bout de cette haine mesquine et tracassière vouée par l'Assemblée au Président, et pour l'épanchement de laquelle la plus chétive circonstance fournissait un prétexte suffisant. Cette fois, c'est M. Daru, rapporteur, qui, au nom de la commission de la Plata, vient déclarer avec une certaine arrogance qu'il repousse tous les amendements proposés, et qu'il invite l'Assemblée à voter la résolution de la commission, fruit d'une étude approfondie de la question qui a eu lieu dans son sein. D'ailleurs, ajoute en terminant

M. Daru, la commission, j'ose le croire, ne peut • être accusée de ces ambitions parlementaires ni de ⚫ces jalousies dont il est question aujourd'hui dans plusieurs journaux. »

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A cette brusque apostrophe, dont le sens était clair pour tout le monde, M. de La Hitte, ministre des affaires étrangères, monte à la tribune. Messieurs,

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s'écrie-t-il, je prie l'honorable rapporteur de dire s'il a voulu faire allusion tout-à-l'heure à un article de journal publié ce matin par plusieurs journaux? « M. DARU. Oui!

« M. LE GÉNÉRAL LA HITTE. La note dont il s'agit a • été publiée tout-à-fait en dehors de ma participa⚫tion, tout-à-fait en dehors de mon consentement.

Je pense que les personnes qui m'entendent vou⚫ dront bien croire à mon affirmation. C'est malheu

« EdellinenJatka »