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CHAPITRE VII.

Les poëtes.

I. Domination et domaine de l'esprit classique. - Ses caractères, ses œuvres, sa portée et ses limites. Comment il a son centre dans Pope.

II. Pope. Son éducation.

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Les

Pastorales.-L'Essai sur la critique.-Sa personne. Sor genre

de vie.

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-Son caractère. — Pauvreté de ses passions et de ses idées. Grandeur de sa vanité et de son talent. Sa fortune indépendante et son travail assidu.

III. L'Épître d'Héloïse à Abeilard.

Le

Ce que deviennent les passions dans la poésie artificielle. La boucle de cheveux enlevée. monde et le langage du monde en France et en Angleterre. En quoi le badinage de Pope est pénible et déplaisant. — La Sottisiade. Saletés et banalités. En quoi l'imagination anglaise et l'es

prit de salon sont inconciliables.

IV. Son talent descriptif. Son talent oratoire. Ses poëmes didactiques. Pourquoi ces poëmes sont l'œuvre finale de l'esprit classique. L'Essai sur l'homme. Son déisme et son optimisme. Valeur de ces conceptions. Comment elles sont liées au style régnant. Comment elles se déforment sous les mains de Pope. Procédés et perfection de son style. Excel

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V. Disproportion de l'esprit anglais et des bienséances classiques. —

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La pastorale antique est impossible dans les cli

Le sentiment de la campagne est naturel en AnThompson.

VI. Discrédit de la vie de salon. - Apparition de l'homme sensible.

Pourquoi le retour à la nature est plus précoce en Angleterre qu'en France. Sterne. Richardson.

pherson.

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Mackensie.

MacGray, Akenside, Beattie, Collins, Young, Shenstone. Persistance de la forme classique. - Empire de la période. Johnson. L'école historique.

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Robertson, Gibbon, Hume. Commencements de l'âge mo

Lorsqu'on embrasse d'un coup d'œil la vaste région littéraire qui s'étend en Angleterre depuis la restauration des Stuarts jusqu'à la révolution française, on s'aperçoit que toutes les productions, indépendamment du caractère anglais, y portent l'empreinte classique, et que cette empreinte, particulière à ce territoire, ne se rencontre ni dans celui qui précède ni dans celui qui suit. Cette forme régnante de pensée s'impose à tous les écrivains, depuis Waller jusqu'à Johnson, depuis Hobbes et Temple jusqu'à Robertson et Hume; il ya un art auquel ils aspirent tous; le travail de cent cinquante années, pratique et théorie, inventions et imitations, exemples et critique, s'emploie à l'atteindre. Ils ne comprennent qu'une seule espèce de beauté ; ils n'établissent de préceptes que ceux qui peuvent la produire ; ils récrivent, traduisent et défigurent sur son patron les grandes œuvres des autres siècles; ils l'importent dans tous les genres littéraires, et y réussissent ou y échouent selon qu'elle s'y adapte ou qu'elle ne peut s'y accommoder. La domination de ce style est si absolue, qu'elle s'impose aux plus grands, et les condamne à l'impuissance quand ils veulent l'appliquer hors de son domaine.

La possession de ce style est si universelle, qu'elle se rencontre dans les plus médiocres, et les élève jusqu'au talent quand ils l'appliquent dans son domaine1. C'est lui qui porte à la perfection la prose, le discours, l'essai, la dissertation, la narration, et toutes les œuvres qui font partie de la conversation et de l'éloquence. C'est lui qui détruit l'ancien drame, abaisse le nouveau, appauvrit et détourne la poésie, produit l'histoire correcte, agréable, sensée, décolorée et à courtes vues. C'est cet esprit, qui, commun à ce moment à l'Angleterre et à la France, imprime son image dans la diversité infinie des œuvres littéraires, en sorte que dans son ascendant partout visible on ne peut s'empêcher de reconnaître la présence d'une de ces forces intérieures qui ploient et règlent le cours du génie humain.

Il n'y a point de genre où il se montre plus manifestement que dans la poésie et il n'y a point de moment où il apparaisse plus nettement que sous la reine Anne. Les poëtes viennent d'atteindre l'art qu'ils avaient entrevu. Depuis soixante ans, ils s'en approchaient; à présent ils le tiennent, ils le manient, déjà ils l'usent et l'exagèrent. Le style se trouve du même coup achevé et artificiel. Ouvrez le premier venu, Parnell ou Philips, Addison ou Prior, Gay ou Tickell, vous trouvez un certain tour d'esprit, de versification, de langage. Passez au second, ce même

1. Une femme de chambre sous Louis XIV, dit Courier, écrivait mieux que le plus grand écrivain d'aujourd'hui.

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tour reparaît; on dirait qu'ils se sont copiés l'un l'autre. Parcourez un troisième : même diction, mêmes apostrophes, même façon de poser l'épithète et d'arrondir la période. Feuilletez toute la troupe; avec de petites différences personnelles, ils semblent tous. coulés dans un seul moule : l'un est plus épicurien,` l'autre plus moral, l'autre plus mordant; mais partout règnent le langage noble, la pompe oratoire, la correction classique; le substantif marche accompagné de l'adjectif, son chevalier d'honneur; l'antithèse équilibre son architecture symétrique le verbe, comme chez Lucain ou Stace, s'étale, flanqué de chaque côté par un nom garni de son épithète; on dirait que le vers a été fabriqué à la machine, tant la facture en est uniforme; on oublie ce qu'il veut dire; on est tenté d'en compter les pieds sur ses doigts; on sait d'avance quels ornements poétiques vont le décorer. Il a une toilette de théâtre, oppositions, allusions, élégances mythologiques, réminiscences grecques ou latines. Il a une solidité d'école, maximes sentencieuses, lieux communs philosophiques, développements moraux, exactitude oratoire. Vous croiriez être devant une famille naturelle de plantes; si la grandeur, la couleur, les accessoires, les noms diffèrent, au fond le type ne varie pas; les étamines sont en nombre pareil, insérées de même, autour de pistils semblables, au-dessus de feuilles ordonnées sur le même plan; qui connaît l'une connaît les autres; il y a un organe et une structure commune qui entraîne la communauté du reste. Si vous par

courez toute la famille, vous y trouverez sans doute quelque plante marquante qui manifeste le type en pleine lumière, tandis qu'à l'entour et par degrés il va s'altérant, dégénère et finit par se perdre dans les familles environnantes. Pareillement, ici, on voit l'art classique rencontrer son centre dans les voisins de Pope et surtout dans Pope, puis s'effacer à demi, se mêler d'éléments étrangers, jusqu'au moment où il disparaît dans la poésie qui l'a suivi.

I

En 1688, chez un marchand de toile rue des Lombards à Londres, naquit une petite créature délicate et maladive, factice par nature, toute fabriquée d'avance pour la vie de cabinet, n'ayant de goût que pour les livres, et qui, dès son bas âge, mit tout son plaisir dans la contemplation des imprimés. Il en copiait les lettres, et ainsi apprit à écrire. Il passa son enfance avec eux en tête-à-tête, et se trouva versificateur dès qu'il sut parler. A douze ans, il avait composé une tragédie d'après l'Iliade, et une ode sur la solitude. De treize à quinze, il fit un grand poëme épique de quatre mille vers, appelé Alcandre. Pendant huit ans, enfermé dans une petite maison de la forêt de Windsor, il lut tous les meilleurs critiques, presque

tous les poëtes anglais, latins, français qui ont un « nom, Homère, les poëtes grecs, et quelques-uns « des grands dans l'original, le Tasse et l'Arioste dans

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