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biens entre eux également. Ce qui aurait été accordé par eux tous, et spécialement ratifié par Jean d'Orléans fils aîné, lequel, après le trépas des père et mère donateurs, ayant été mis en procès par ses frères et sœurs, pardevant le prévôt de Paris, aurait obtenu lettres pour être relevé de l'acceptation et ratification par lui faite de ce partage; finalement serait intervenue sentence, par laquelle, ayant égard aux lettres et icelles entérinant, ledit prévôt de Paris aurait ordonné que partage et division seraient faits entre les parties, et à eux baillé leur juste part, déduit et distrait préalablement toutefois au profit dudit aîné, le droit d'aînesse qui lui pouvait appartenir audit fief des Ouches, suivant la coutume de la prévôté et vicomté de Paris.

» De cette sentence, qui fut donnée le 22 décembre 1559, y ayant eu appel, la cour a mis l'appellation au néant, a ordonné que la sentence dont a été appelé sortirait son plein et entier effet.

» Que, si en l'espèce du différend terminé par cet arrêt, la cour a jugé que le partage fait par les pères et mères dès leur vivant, de choses qu'ils avaient acquises et dont la disposition pouvait sembler leur être plus libre, ne pouvaient préjudicier à la coutume, ni tollir ou diminuer le droit d'afinesse, encore qu'il fut

accepté par les enfans, et mêmement par l'aîné; ce que l'on peut dire avoir été jugé par la raison de la loi Si quandò, §. Illud etiam, C. de inofficioso testamento ».

Arrêt du 22 juillet 1578. Une mère avait fait à tous ses enfans donation universelle entre-vifs qui avait été insinuée. Elle avait ensuite voulu disposer à cause de mort des biens compris dans cet acte; et après l'avoir fait par un testament qualifié de partage, elle l'avait révoqué par un codicille qui rétablissait l'ordre de succéder ab intestat.

Après son décès, contestation entre ses enfans. Quelques-uns voulaient s'en tenir à la donation; les autres réclamaient l'exécution du codicille.

La cause portée à l'audience de la grand'chambre, M. l'avocat-général Brison, après avoir rendu compte des faits, a dit qu'il se présentait deux questions: l'une, si le premier des actes dont il s'agissait, pouvait être considéré comme une véritable donation entre-vifs; la seconde, si, envisagé comme une Démission de biens, il était révocable.

Sur la première question, M. l'avocat-général a dit qu'il ne fallait pas avoir égard aux termes employés dans l'acte, mais en pénétrer le sens et l'esprit ; et qu'il était évident, par l'universalité qu'ils établissaient dans la disposition de

la mère, qu'ils ne pouvaient caractériser qu'un partage.

Sur le deuxième, il a observé qu'une Démission de biens n'est rien autre chose qu'un partage entre enfans, et que conséquemment elle est sujette à révocation.

Par arrêt du 24 juillet 1578, le parlement de Paris, sans avoir égard à la donation universelle, ni aux autres dispositions de la mère, a ordonné le partage égal entre tous les enfans, suivant les coutumes des lieux où les biens étaient situés.

Quel a été le motif de cet arrêt? C'est ce que son dispositif ne permet pas de pénétrer : no n seulement il juge la donation bien et duement révoquée; mais il annulle même le codicille qui en avait prononcé la révocation; et dès-là, il faut qu'il se soit rencontré dans l'espèce quelques circonstances essentielles dont on ne nous a pas transmis la connaissance.

Arrêt du 14 mars 1603. De l'hommeau nous cite encore un arrêt de cette date, en faveur du parti de la révocation. Mais si l'on veut ouindiqué ci-dessus, on y verra que cet arrêt a vrir les plaidoyers de M. Servin, à l'endroit été rendu dans une espèce absolument conforme à celle du 14 août 1566, et parfaitement étran

gère à la difficulté qui nous occupe.

Arrêt du 20 mars 1643. Un des arrêts qu'on invoquait le plus communément, avant le Code civil, en faveur de la révocabilité des Démissions, est celui que rapporte Soefve, cent. I, chap. 9; on va apprécier l'application qu'en faisaient à ce parti ceux qui le citaient.

Un homme de 82 ans qui avait deux filles mariées, avait fait, avec un de ses gendres, un contrat par lequel il lui donnait l'usufruit de tout son bien, pendant que lui donateur vivrait, à la charge de le nourrir, loger et entretenir, et de lui payer une pension annuelle de 100 li

vres.

Ce contrat ayant reçu pendant quelques années une exécution entière et paisible, le vieillard, sous le prétexte d'avoir été maltraité par son gendre, obtint des lettres de rescision pour rétracter le contrat et rentrer dans la jouissance de son bien, aux offres d'en laisser la propriété à ses enfans après son décès.

Il n'y avait aucune preuve des mauvais traitemens articulés par le donateur. Néanmoins, dit Soefve, « comme ces sortes de Démissions » de biens, qui se font quelquefois par les père » et mère en faveur de leurs enfans, soit à l'é» gard de la propriété, soit à l'égard de l'usu» fruit, sont toujours révocables ad nutum de » celui ou de celle qui a donné, la cour, ayant » égard aux lettres, remit les parties en tel

» état qu'elles étaient auparavant le contrat, » permit au père de jouir de son bien sa vie durant, ainsi que bon lui semblerait, la propriété d'icelui réservée à ses enfans ».

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On voit bien que cet arrêt n'était pas aussi décisif que notre question, qu'il le paraissait aux yeux de Soefve.

D'abord, le contrat fait entre le beau-père et le gendre n'était pas une Démission; il ne comprenait pas la propriété des biens du premier, et dès-là il ne formait pas un abandonnement universel. D'ailleurs, il n'était point, passé avec tous les héritiers présomptifs du prétendu démettant.

Ce n'était donc qu'une convention particulière; et par conséquent ce qui a été prononcé sur une demande tendante à le rétracter, ne peut pas faire préjugé pour les Démissions proprement dites.

En second lieu, celui que l'on qualifiait de démettant, était un vieillard qui, pour ne pas avoir pu prouver les torts qu'il reprochait à son gendre et dont il était résulté une incompatibilité d'humeurs, n'en avait pas moins des intentions pures et favorables. Il ne demandait qu'à jouir par ses mains, et probablement sa jouissance ne devait plus être fort longue. Il ne s'agissait que de lui procurer du repos, et il le payait bien par le sacrifice qu'il faisait de la propriété de son patrimoine.

preuve, mais « sur ce que les Démissions ainsi » conçues sont réputées faites per modum ul» timæ voluntatis, et par conséquent révoca»bles ad nutum, si ceux qui les ont faites ne » persévèrent jusqu'au temps de leur décès; » ambulatoria est enim hominis voluntas us

» que ad supremum vitæ spiritum. Aussi celle

» dont il s'agissait dans l'espèce, ne contenait D pas les mots essentiels qu'on insère ordinai»rement dans les donations entre-vifs, pour » étre perpétuelle et irrévocable: conséquem» ment la durée de cet acte dépendait tou» jours de la bonne volonté du père et de la mère».

Arrêt du 11 février 1647. Un père se disposant à marier sa fille, arrête et signe, au mois de septembre 1645, des articles de mariage par lequels il lui promet une dot fort avantageuse. Quelque temps après, le 24 novembre suivant, il passe un contrat avec tous ses enfans, et en révoquant la constitution dotale, il déclare donner tous ses biens à ses enfans, par forme de donations entre-vifs.

Le 29 du même mois, il proteste contre cet acte, soutient qu'il lui a été extorqué par force, et confirme la promesse de dot faite à sa fille au mois de septembre précédent. En conséquence, sa fille se marie.

Procès au bailliage d'Amiens. Une sentence du 19 juillet 1646 ordonne que le contrat du Arrêt du 5 mai 1645. Voici enfin un arrêt 24 novembre 1645 sera exécuté selon sa forme

qui paraît avoir jugé notre question.

Un père et une mère font à leurs enfans une Démission de biens, moyennant une pension annuelle de 600 livres. L'acte accepté, on l'insinue au greffe de la justice ordinaire des lieux. Quelque temps après, les démettans obtiennent des lettres en chancellerie, pour se faire restituer contre la Démission. La cause portée à la sénéchaussée d'Anjou, sentence qui appointe les parties en droit. Appel, et après une plaidoirie contradictoire, arrêt prononcé par M. le président de Mesmes, conformément aux conclusions de M. l'avocat-général Briquet, qui met l'appellation et ce au néant, émendant et évoquant le principal, entérine les lettres de rescision; ce faisant, ordonne le que père et la mère rentreront dans tous leurs biens, sans dépens, « nonobstant (dit l'auteur » du Journal des audiences) que la Démission » eût été duement acceptée et insinuée au greffe de la justice ordinaire des lieux, et » que, par ce moyen, on la voulût faire pas»ser pour donation entre-vifs ». L'arrêt est fondé, continue-t-il, non sur les plaintes et les faits d'ingratitude qui étaient allégués par le père et la mère, parcequ'il n'y en avait aucune

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et teneur. Appel.

M.l'avocat général Bignon a dit que ་ le con>>trat portait avec soi les marques de la vio»lence alléguée, n'étant pas croyable qu'un » père se soit volontairement dépouillé de tout » son bien, sans aucune constitution de pré>> caire ni rétention d'usufruit, ni qu'il eût » voulu par ce moyen se mettre en tutelle, » pour s'ôter toute faculté de disposer de toute » chose à l'avenir ».

Il a ajouté que l'acte, quoique qualifié donation entre-vifs, n'était pas dit irrévocable; « ce qui fait croire (continuait-il) que, quand >> elle serait volontaire, elle ne pourrait être » considérée qu'à cause de mort, comme toutes » les Démissions de biens, lesquelles sont ré>> vocables par la doctrine des arrêts, toutes » fois et quantes ».

Sur ces raisons, arrêt du 11 février 1647, qui infirme la sentence, entérine les lettres de rescision, remet les parties au même état où elles étaient avant l'acte du 24 novembre 1645, et ordonne l'exécution des articles de mariage, sans dépens.

Il est aisé de voir que cet arrêt n'a pas été rendu en thèse, et que la violence dont le con

trat du 24 novembre 1645 paraissait être le fruit, a dû influer puissamment sur les opinions des juges.

Arrêt du 24 mai 1647. C'est Dufresnes qui, dans le Journal des audiences, rapporte, sous cette date, un arrêt par lequel, dit-il, notre question a été jugée en bien forts termes ; mais il est à craindre qu'il ne se soit trompé.

Une mère qui s'était démise au profit de ses enfans, avait donné, par préciput, à son fils aîné, les fiefs que la coutume lui aurait déférés s'il n'eût recueilli sa succession qu'après qu'elle aurait été morte. Ce fils aîné vint à décéder, et laissa un fils et des filles pour héritiers. Le fils recueillit les fiefs que son aïeule avait cédés à son père. Il mourut lui même en basâge, et transmit sa succession à ses sœurs.

Le tuteur de celles-ci voulut s'emparer, en leur nom, des fiefs délaissés par leur frère; mais leur oncle, frère de leur père, prétendit

les

que le droit d'aînesse lui étant dévolu par le décès de l'enfant mâle de son frère aîné, fiefs dont leur mère avait fait le partage par l'acte de Démission, lui devaient retourner, aux termes de la coutume de Melun, art. 494, qui exclud les filles du droit de représenter leur père au droit d'aînesse.

La mère, qui vivait encore, intervint dans la contestation, et déclara que son intention était que les fiefs dont elle avait fait Démission et partage, retournassent à son second fils, qui se trouvait l'aîné de la maison.

Ainsi, trois circonstances s'élevaient contre les filles de l'aîné:

Le vœu de la coutume dont on ne devait pas présumer que la mère eût cherché à s'écar

ter;

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Ce sont sans doute ces considérations qui ont déterminé le parlement à révoquer la Démission en ce qui concernait les fiefs seulement, et à les adjuger à l'oncle des mineures, devenu par l'événement l'aîné de la famille.

Cet arrêt n'est donc pas fondé sur le seul caprice de l'auteur de la Démission de biens.

Il n'est pas inutile au surplus de remarquer qu'il prononce par ayant égard aux lettres de rescision, lettres, dit Dufresnes, que le parlement « a présupposé devoir avoir été obtenues > par la mère » quoique, dans le fait, on ne voie pas qu'elle en eût pris.

Arrêt du 17 mars 1671. Un père, nommé

Philippe Duret, remarié en secondes noces, fait, le 5 août 1664, conjointement avec sa deuxième femme, un acte par lequel, après s'être l'un et l'autre réservé une portion de leurs biens, ils donnent le surplus en avancement d'hoirie à tous leurs enfans, pour être partagé entre eux à l'amiable. Ce partage effectué, Henri Duret, fils du premier lit, passe, quatre ans après, un contrat de mariage par lequel il fait donation universelle de tous ses biens à sa future, et il se marie en conséquence, sans avoir requis le consentement de son père.

Environ un mois après, le père est interdit, sa seconde femme est créée curatrice à son interdiction, et en cette qualité elle révoque la Démission de biens. Le fils décède ensuite sans enfans, et son père le suit de très-près.

En ce moment, contestation entre la bellemère, ses enfans, et la veuve du fils démissiondonné que la donation faite par le fils à sa naire. Par arrêt du 17 mars 1671, il a été orfuture, serait exécutée; mais qu'elle n'aurait desquels la belle-mère avait fait la révocation. aucun effet pour les biens du père, à l'égard du second lit. Ces biens ont été adjugés entiers aux enfans

Cet arrêt ne décide rien par rapport à notre question; écoutons, pour nous en convaincre, les raisons qui ont déterminé M. l'avocatgénéral Talon à conclure en faveur de la révocation faite par la belle-mère :

« Il faut qu'on demeure d'accord qu'il est inutile de vouloir déterminer précisément si l'acte du 5 août 1664 est une Démission de biens, ou une donation entre-vifs; car, si c'est une Démission de biens par un père à ses enfans, l'on ne peut douter que cet acte ne soit révocable par la disposition du droit civil et celle de nos coutumes, sans que celui qui révoque, soit obligé de rendre raison du changement de sa volonté : ce n'est qu'un acte dont la disposition est estimée à cause de mort, et qui est révoqué par le prédécès de celui au profit de qui il est fait. Philippe Duret père a survécu à son fils, et a révoqué valablement, avant son décès,, comme nous allons dire.

>> Mais si c'est une donation entre-vifs, comme le prétend la veuve du fils, comment la peuton soutenir ? Elle n'a jamais été insinuée....

» Pour la révocation qui a été faite par la curatrice, elle produit son effet tout entier, soit que la disposition du père soit prise pour une Démission, soit pour une donation. Pour juger qu'elle en est l'autorité, il faut remarquer que, lorsqu'il s'agit de marier un fils dont le père est furieux ou imbécile, c'est le curateur et tout le corps de la famille assemblée qui représente la puissance paternelle....

il

En ce cas, si la famille reçoit une injure, si le père est méprisé, à qui est-ce à agir, sinon au curateur qui est établi pour le bien du père et de sa famille, et pour faire ce qu'il eût fait lui-même ? En veut-on une preuve certaine ? La novelle 115 propose pour une des causes d'exhérédation, si un fils a négligé de prendre soin de son père qui est en démence ; il ne s'agit pas ici de savoir en quoi consiste le soin qu'il en doit avoir, mais de savoir qui peut exhéréder quand la cause est certaine ? Sans doute, n'y a que le curateur; car le père n'agit plus. Passons plus avant : si un fils malheureux a attenté à la vie de son père qui est en démence, voilà une cause d'exhérédation ; quiest-ce qui la pourra prononcer, si ce n'est le curateur? Voilà donc un pouvoir légitime en la personne de la curatrice de Philippe Duret. Or, dans le fait, peut-on entendre sans indignation que Henri Duret, demeurant chez son père, sistant en apparence, oublie le respect qu'il lui doit, jusqu'au point de contracter un mariage sans lui en parler, sans en parler à sa belle-mère, à ses frères, à un grand nombre de parens de qualité... » ?

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Voilà ce qu'a dit M. l'avocat général Talon, et l'on conçoit sans peine que ses raisons étaient trop victorieuses pour ne pas déterminer l'arrêt. Mais aussi cet arrêt ne peut pas être cité comme un préjugé en faveur de la révocabilité arbitraire des Démissions de biens, puisque, dans l'espèce sur laquelle il a été rendu, il y avait une cause suffisante pour autoriser le père ou sa curatrice à révoquer même une donation entre-vifs.

Sans cette circonstance, il y a tout lieu de croire que la révocation faite par la belle-mère aurait été déclarée nulle, indépendamment de la question de savoir si le père lui-même eût pu révoquer, étant en bon sens.

«En effet (disait Boullenois, l'un des partisans les plus décidés de la révocabilité des Démissions de biens), l'interdit est présumé mort dans l'ordre civil; il ne lui faut plus que des alimens, en attendant la mort naturelle.

» D'ailleurs, la révocation de la Démission doit être l'ouvrage de la volonté de celui qui s'est démis, cette volonté doit être la sienne propre, et non celle d'autrui.

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Enfin, comment autoriserait-on un curateur à révoquer et à dépouiller ceux que la loi appelle à la succession de l'interdit, et qui, par une volonté déterminée, ont été rendus propriétaires par anticipation; eux qui, par l'état d'imbécillité dans lequel est tombé l'interdit, ont, indépendamment de la Démission, un droit, sinon formé, du moins commencé, sur les biens de l'interdit, qui ne peut plus vendre, aliéner,

disposer; aussi voyons-nous que le soin des biens d'un interdit est très-ordinairement confié, dans l'usage, à l'un des plus proches parens, parceque, dès-lors, ce soin intéresse plus spécialement ceux qui sont ses héritiers présomptifs ».

Arrêt de 1681. Voici un arrêt qui a jugé, mais dans une espèce particulière, en faveur de celui qui soutenait le parti de l'irrévocabilité d'une Démission de biens.

Barnabé Gorillon laissa, à sa mort, une veuve et quatre enfans. La veuve avait des reprises à exercer sur les biens de son mari. Pour éviter toute discussion, elle transigea avec ses enfans, et leur fit, sous la dénomination de donation entre-vifs, une Démission de tous ses biens, y compris les droits qu'elle avait sur la succession de leur père, mais à la charge d'une pension viagère de 1,000 livres.

L'un des quatre enfans, voulant entrer dans l'ordre de Malte, en qualité de frère servant, traita de tous ses droits et même de ceux qui étaient compris dans la Démission, avec un cousin germain, moyennant 8,000 livres, une fois payées, et 600 livres de rente viagère. Ce traité était concu en forme de donation entrevifs, et l'on avait eu soin de le faire insi

nuer.

La mère, instruite de cette disposition qui privait ses trois autres enfans des biens de leur frère, révoqua la Démission pour la part de celui-ci.

Cette révocation fut tenue secrète pendant un temps assez considérable ; elle ne parut qu'au moment où le cessionnaire se présenta pour demander partage.

Le cessionnaire se défiant de la vérité de cette révocation, fit signifier à la mère des faits et articles, pour savoir d'elle si effectivement elle avait révoqué la Démission faite par elle à son fila religieux dans l'ordre de Malte. La mère ne voulut point répondre.

La cause portée à l'audience de la grande chambre, sur l'appel d'une sentence des requêtes du palais, qui avait ordonné l'exécution du traité fait avec le cousin-germain, celui-ci faisait valoir trois raisons principales:

10 Il prétendait que la Démission de biens faite par la mère au profit de ses enfans, était plutôt une quittance qu'une véritable Démission. Toute la fortune de la mère, disait-il, consistait dans la reprise de ses conventions matrimoniales sur les biens de son mari, le remploi de ses propres, son douaire, et son préciput. Au lieu d'exercer cette reprise, qu'a-t elle fait? Pour éviter les procès qu'elle pouvait avoir avec ses enfans, elle a mieux aimé faire avec eux une espèce de transaction, et leur abandonner le

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tout pour une pension; « au moyen de quoi (est-il dit dans l'acte ) elle leur donne quittance de tout ce qu'ils pouvaient lui devoir ». S'il y est parlé de donation et de Démission, ces termes, purement de style, ne changent pas la substance du contrat; ils n'empêchent pas qu'on aperçoive clairement l'intention des parties de ne faire qu'une simple transaction.

20 Il observait que, si l'acte eût pu être envisagé sous un autre aspect, il eût fallu le regarder comme une donation entre-vifs; qu'en effet, il avait été insinué à la diligence des enfans, et que dès-là, il était irrévocable.

30 Il soutenait que la cession faite à son profit le frère servant de Malte, n'était pas grapar tuite, mais très-onéreuse; et qu'à peine ce qui lui en reviendrait, monterait au prix qu'il en avait donné.

Les appelans répondaient que leur frère ne les avait dépouillés de ses biens, que parcequ'il était mal disposé à leur égard ; ils rapportaient en effet des lettres par lesquelles il se plaignait d'eux, et surtout de n'en avoir jamais pu tirer aucun secours; mais ces lettres étaient postérieures à la cession.

Ils ajoutaient que la révocation d'une Démission était toujours permise; et que l'acte dont il s'agissait, était revêtu de tous les caractères propres à une Démission véritable.

M. l'avocat-général Talon, qui porta la parole dans cette affaire, ne dit absolument rien sur la question de droit; il s'arrêta uniquement au refus de la mère de déclarer si la révocation qu'elle avait faite, était sérieuse ou feinte, libre ou extorquée. Il en conclud que la mère elle-mé. me reconnaissait, ou qu'elle n'avait pas réellement révoqué ou qu'elle ne l'avait pas fait librement; et par cette raison, il estima qu'il avait été bien jugé par la sentence dont était appel. Néanmoins il proposa au parlement l'alternative d'autoriser les héritiers à rembourser le cessionnaire de ses deniers principaux, arrérages, frais et dépens, en se chargeant, à son acquit, de la pension du religieux. Mais ce parti ne fut point adopté, et par arrêt rendu en 1681, la sentence des requêtes du palais fut confirmée purement et simplement.

Qu'a-t-on jugé par là? Que les Démissions de biens étaient irrévocables, soit par elle-mêmes, soit dans le cas où le démissionnaire avait aliéné? Il paraît que non, et Boullenois pensait avec raison que les circonstances seules avaient dicté l'arrêt.

Arrêt du 3 août 1707. Grégoire Aubrelique, domilicié à Noyon, avait quatre enfans. Il vivait avec l'un des puînés qui, d'accord avec un

de ses frères et sa sœur, le pressait vivement de les avantager au préjudice de l'aîné. Pour se soustraire à leurs brigues fatigantes, il alla vivre à la campagne. Là, rendu à lui-même et libre, il fit, le 18 novembre 1702, une Démission de ses biens au profit de ses enfans: par cet acte, qui était qualifié de donation entre-vifs, il laissait à l'aîné le préciput que la coutume lui accordait, et pour le surplus il ordonnait une parfaite égalité. Du reste, il se réservait l'usufruit du tout, et la libre disposition par testament d'une somme de 6,000 livres.

Grégoire Aubrelique, de retour de la campagne, fait signifier sa Démission de biens à ses enfans, avec sommation de l'accepter. L'aîné et deux puînés l'acceptent sans balancer: un seul refuse, mais son refus n'empêche pas qu'on ne fasse insinuer l'acte.

Cette formalité remplie, Gregoire Aubrelique va demeurer précisément chez celui qui n'avait pas voulu accepter la Démission. Livré à ce fils, il fait, le 2 avril 1703, un second acte par lequel il révoque la Démission de biens et, par un nouveau partage en forme de dona. tion, il avantage les puînés au préjudice de

l'aîné.

Les deux premiers, qui avaient accepté l'acte de 1702, prennent des lettres de rescision contre leur acceptation, et tous trois, de concert avec leur père commun, font assigner le fils aîné pour voir dire que cet acte demeurera

comme non avenu.

La contestation a été d'abord portée aux requêtes du palais; mais il n'y a eu rien de jugé en ce tribunal. Il n'y est intervenu qu'une sentence interlocutoire, le 9 septembre 1703 par laquelle, sans préjudice aux droits des parties au principal, il était permis aux enfans puînés de faire interroger Aubrelique père sur des faits articulés par leur requête du 28 août précédent; et au fils aîné de faire informer des violences et des voies de fait exercées par l'un des puînés sur la personne du père, pour le forcer à révoquer l'acte de 1702 et faire une nouvelle disposition.

Aubrelique père a été interrogé devant le lieutenant-général du bailliage de Noyon. Ily a eu aussi un commencement d'information, mais elle a été interrompue par un arrêt de défense qui a été obtenu sous le nom d'Aubrelique père.

D'abord le parlement n'a été saisi que de l'appel de cette sentence interlocutoire; mais depuis, il y a eu un arrêt d'évocation consenti par toutes les parties, et l'affaire a été appointée au rapport de M. de la Grange.

Dans un mémoire que nous avons sous les yeux; et qui a été fait par le célèbre juriscon

« EdellinenJatka »