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de possesseur provisoire, en ce que celui-ci pouvait, en donnant caution, se faire autoriser à continuer ses travaux; et qu'il évitait eet inconvénient par l'emploi du troisième mode. Rationem hanc affert (dit Pothier, sur cette loi,dans ses Pandectes, liv. 39, tit. 1, no 7) cur potiùs per ictum lapilli debeamus prohibere cùm quis in nostro aliquid ædificat, quàm per operis novi nunciationem, quia scilicet opus novum ei nunciando, possessorem eum facimus. Sed quare eum possessorem facimus? Quia nempè receptum est ut hoc casu possit, oblatá cautione de restituendo opere, pergere opus, ut infrà videbimus; per hanc autem pergendi operis licentiam, in possessione videtur constitui. Idem non obtinet, cùm quis per jactum lapilli prohibetur : nec enim hoc casu receptum videmus, ut oblatá satisdatione permittatur ei satisdare, adeòque ità prohibitus, non constituitur possessor; sed de possessione, interdicto quod vi aut clàm, disceptatur.

De ces trois modes de Dénonciation de nouvel œuvre, nos mœurs n'admettent plus que le premier; ou du moins ce n'est plus qu'en s'adressant au juge, et en obtenant de lui une défense de continuer le nouvel œuvre commencé, que l'on peut légalement en empêcher la continuation. C'est ce que j'ai établi dans le Répertoire de Jurisprudence, aux mots Dénonciation de nouvel œuvre, et ce qu'a jugé

formellement l'arrêt de la cour de cassation, du 11 juillet 1820, qui y est rapporté.

§. II. L'action en Dénonciation de nouvel œuvre est-elle possessoire, en ce sens qu'on doive la comprendre au nombre de celles que l'art. 10 du tit. 3 de la loi du 24 août 1790 et l'art. 3 du Code de procédure civile placent dans les attributions du juge de paix?

L'affirmative n'est et ne peut être susceptible d'aucun doute, quand l'action porte sur un nouvel œuvre pratiqué dans le terrain du demandeur.

La question ne peut donc être élevée sérieusement, que dans le cas où l'action porte sur un nouvel œuvre pratiqué par le défendeur sur son propre terrain.

Et un arrêt de la cour supérieure de justice de Bruxelles, du 25 novembre 1817, dont j'ai rendu compte dans le Répertoire de Jurisprudence, aux mots Dénonciation de nouvel œuvre, l'a jugée implicitement pour la négative, en pronocant sur le fond de l'appel d'un jugement du tribunal civil d'Anvers qui avait * statué en première instance sur une action de

cette nature.

Mais, comme je l'ai remarqué au même endroit, c'est une erreur qui ne peut se soutenir en présence de l'art. 10 du tit. 3 de la loi du 24 août 1790 et de l'art. 3 du Code de procédure civile, rapprochés de deux principes incontestables, l'un, que l'action en Dénonciation de nouvel œuvre est expressément qualifiée d'interdit, par les lois romaines; l'autre, que les interdits du droit romain n'étaient pas autre chose que des actions possessoires.

Aussi, la cour de cassation a-t-elle jugé implicitement le contraire par deux arrêts du 13 juin 1814, rapportés dans le Répertoire de Jurisprudence, au mot Servitude, §. 35, no 2 bis, et par un troisième du 11 juillet 1820, cité dans le §. précédent, no 3.

Elle l'a même jugé formellement par deux autres arrêts dont voici les espèces.

En 1817, le sieur Guérin, propriétaire d'un jardin contigu à un étang appartenant à la dame Carbonnel, y creuse, à la distance d'environ un mètre de cet étang, un canal qui traverse son jardin même et va arroser un pré qu'il possède dans le voisinage.

La dame Carbonnel s'aperçoit bientôt que ce canal attire à lui par filtration les eaux de son étang; et prenant le nouvel œuvre du sieur Guérin pour un trouble apporté à sa possession, elle le fait citer devant le juge de paix pour se voir condamner à rétablir les lieux dans leur

premier état et à des dommages-intérêts.

Le sieur Guérin répond qu'il n'y a pas lieu à l'action possessoire, et décline en conséquence la juridiction du juge de paix.

Mais comment justifie-t-il son déclinatoire ? Invoque-t-il les principes écrits dans la loi 26, D. de damno infecto, rapportée au no 2 du §. précédent, et en conclut-il qu'il n'a fait, en creusant un canal dans son jardin, qu'user de son droit de propriété; que la dame Carbonnel ne pourrait l'en empêcher qu'autant qu'elle eût acquis de lui ou qu'elle eût prescrit contre lui une servitude qui y mît obstacle; et que de même qu'elle pourrait dessécher son étang, et par là le priver des eaux qui arrivent jusqu'à lui par filtration; de même aussi il a pu faire chez lui tous les travaux qu'il lui a plu, bien qu'ils aient eu pour résultat d'augmenter la quantité des eaux que la filtration enlevait précédemment à l'étang de la dame Carbonnel? En un mot, expose-t-il qu'il ne peut pas y avoir lieu à l'action possessoire, dans une affaire où il ne pourrait pas y avoir lieu à l'action pétitoire?

Rien de tout cela. Supposant que la dame Carbonnel aurait pu l'actionner au pétitoire, il se retranche dans le système embrassé peu de temps après par l'arrêt de la cour supérieure de justice de Bruxelles, du 25 novembre 1817.

Il n'y a (dit-il ) trouble autorisant la.complainte dans le sens de l'art. 10 du tit. 3 de la loi du 24 août 1790, et dans le sens de l'art. 3 du Code de procédure, que lorsque le fait ou les travaux dont se plaint le possesseur d'un fonds, ont été commis ou exécutés sur ce fonds même; que, si, au contraire, le dommage causé résulte, comme dans l'espèce, de travaux exécutés par un propriétaire sur son propre terrain, alors celui qui souffre de ces travaux peut demander la réparation du tort qui lui est causé, en soutenant que son adversaire a usé du droit de propriété d'une manière trop étendue; il n'a qu'une action ordinaire qu'il doit porter devant les tribunaux civils, seuls compétens pour apprécier dans quelles limites doit être restreint L'exercice du droit de propriété.

En effet, lorsque le trouble est exercé sur le fonds du plaignant, il est clair que l'auteur du trouble porte atteinte à la possession par une voie de fait qu'il ne peut justifier en faisant valoir ses droits à la propriété, parceque, jus? qu'à ce que ses droits soient reconnus, il doit respecter celui résultant de la possession. Dans ce cas, le possesseur troublé a le droit de se plaindre ou de se faire préalablement maintenir ou rétablir dans sa possession; mais il n'en peut pas être de même lorsque le propriétaire d'un fonds exécute sur son propre terrain, des travaux quelconques : s'il en résulte du dommage pour son voisin, celui-ci peut, à la vérité, s'en plaindre; mais il ne peut reprocher de voie de fait à son adversaire; il peut seulement soutenir qu'il a exercé son droit de propriété d'une manière trop étendue, c'est-à-dire, que la contestation doit s'engager, dès le premier moment, sur la question de savoir jusqu'à quel point le propriétaire a eu le droit d'user de son terrain; or, une telle difficulté doit être évidemment soumise aux juges du pétitoire.

» Pour bien sentir la différence qu'il y a entre les deux cas, il faut remarquer que, dans le premier, en supposant que l'auteur du trouble soit condamné au .possessoire, et qu'il gagne ensuite son procès au pétitoire, la première condamnation ne paraîtra point contraire à l'équité, parcequ'il y aura toujours eu faute de la part de l'auteur du trouble, en ce qu'il a porté atteinte à la possession d'autrui par une voie de fait, avant d'avoir fait reconnaître le droit qu'il avait lui-même. Dans la seconde hypothèse, au contraire, si le propriétaire d'un fonds, exerçant son droit de propriété sur son propre fonds, est condamné au possessoire sur la plainte d'un tiers, et qu'ensuite il démontre qu'il n'a fait qu'user de son droit de propriété dans dẹ justes bornes, et que par conséquent il soit maintenu au pétitoire, il sera évident que la première

condamnation aura blessé la justice, en condamnant celui qui n'a fait qu'user de son droit, et à qui l'on ne peut pas même reprocher d'avoir sciemment porté atteinte à la possession d'autrui, car il croyait seulement exercer son droit de propriété sur son propre fonds, dont il avait aussi la possession.

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Supposons toutefois que le plaignant eût en effet le droit d'empêcher son voisin d'exercer des travaux sur son fonds: il aurait eu une servitude sur le fonds de son voisin, mais une servitude, non apparente, c'est-à-dire, qui ne peut s'acquérir par la prescription; or, il est de règle que la possession ne confère le droit d'intenter complainte que dans le cas où, prolongée pendant le temps réglé pour la prescription, elle peut attribuer la propriété ; donc, dans l'espèce, en admettant le fait de la possession de la servitude, le possesseur n'en serait pas moins non-recevable à former l'action en complainte »

Ainsi, le sieur Guérin, tout en soutenant que la dame Carbonnel n'a point de servitude sur son fonds, tout en concluant de là qu'elle ne peut pas l'empêcher, par voie de complainte, de faire sur son fonds tous les travaux qu'il lui plait, n'en reconnaît pas moins qu'elle pourrait, même sans titre de servitude, l'actionner au prétitoire.

Une défense aussi peu réfléchie ne pouvait qu'échouer.

Le 7 mai 1817, jugement qui rejette le déclinatoire, et ordonne le rétablissement des lieux dans leur premier état.

Appel de la part du sieur Guérin au tribunal civil d'Avranches.

Le 3 janvier 1818, jugement qui confirme celui du juge de paix.

Le sieur Guérin se pouvoit en cassation, mais comme il se borne à reproduire à l'appui de son recours, les mauvais moyens qu'il a fait valoir, tant en première instance qu'en cause d'appel, arrêt intervient, le 13 avril 1819, au rapport de M. Favart de Langlade, et sur les conclusions de M. l'avocat général Lebeau, par lequel,

« Vu l'art. 3 du Code de procédure;

» Attendu que, d'après cet article, le juge de paix est compétent pour statuer sur toute action au possessoire ;

» Attendu que l'action intentée par la dame Carbonnel pour faire cesser le trouble apporté à la jouissance des eaux de son étang par le sieur Guérin, au moyen d'une tranchée que celui-ci a pratiquée sur son propre fonds, a tous les caractères d'une aetion possessoire, et qu'elle a été exercée dans l'année du trouble;

» Attendu, dès-lors, que le juge de paix était

compétent pour en connaître, et qu'en reconnaissant cette compétence, le tribunal civil d'Avranches n'a fait, dans le jugement attaqué, , que se conformer aux dispositions de la loi ;

» La cour (section des requêtes) rejette le pourvoi.... (1)».

La seconde espèce s'est présentée presque en même temps que la première, mais entre d'autres parties et devant d'autres tribunaux.

En 1817, le sieur Brousse, propriétaire d'un terrain bordé par la rivière d'Orb, fait, dans le lit de cette rivière et sur la rive opposée à celle qui borde un terrain appartenant au sieur Iché de Thou, des travaux et une plantation d'arbres par l'effet desquels les eaux prennent une direction qui les fait refluer sur la propriété de

celui-ci.

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Le sieur Brousse appelle de ce jugement au tribunal civil de Béziers, et là, sans s'occuper de la question de savoir si, en thèse générale, il y a lieu, en pareil cas, à l'action possessoire, il soutient que, dans l'espèce, toute action de cette nature est interdite, et que, par suite, le juge de paix a violé les règles de la compétence, parceque la rivière d'Orb est navigable, et que, dès-lors, aux termes de la loi du 23 floréal an 10, il n'appartient qu'au conseil de préfecture de prononcer sur la contestation.

Le 18 août de la même année, jugement qui rejette le moyen d'incompétence proposé par le sieur Brousse, et ordonne de plaider au fond,

«Attendu qu'il ne rapporte aucun acte réglementaire émané de l'autorité administrative, qui déclare la rivière d'Orb est navigable; que mais que, cette rivière fût-elle réellement navigable, il s'agit, dans l'espèce, d'une action possessoire intentée le sieur Iché de Thou, qui se plaint, dans son intérêt privé, que les ouvrages et plantations d'arbres faits par le sieur Brousse, font refluer sur son héritage les eaux de la rivière.

par

» Attendu que la loi du 29 floréal an 10, qui attribue en certains cas, compétence aux conseils de préfecture, en ce qui concerne les ri

(1) Jurisprudence de la cour de cassation, tome 19, page 489.

vières navigables, ne leur attribue aucune. compétence quant aux actions possessoires intentées pour un intérêt privé, de particulier à particulier; qu'il est cependant de principe. que les conseils de préfecture sont des tribunaux d'exception qui ne peuvent connaître que des matières qui leur sont attribuées par une loi expresse; qu'en suivant ce principe, il suffit que la loi n'attribue nullement aux conseils de préfecture la connaissance des actions possessoires et que peuvent avoir à exercer les uns sur les autres, ceux qui ont des propriétés sur les bords opposés d'une rivière navigable, et que la loi du 24 août 1790 attribue aux juges de paix, d'une manière générale, la connaissance des actions possessoires, sans qu'aucune loi ait fait une exception expresse à cette attribution générale, quant aux actions possessoires de la nature de celles qui sont l'objet du procès, pour que le tribunal doive décider que l'action du sieur Iché a été compétemment portée en justice de paix ; que ce qui achève de confirmer le tribunal sur la compétence de la justice de paix, c'est que, quoique le contentieux des domaines nationaux soit attribué par une loi expresse aux conseils de préfecture, il est cependant reconnu que les actions possessoires auxlieu, sont de la compétence des juges de paix; quelles les domaines nationaux peuvent donner que le motif qui, dans ce dernier cas, détermine la compétence des juges de paix, est pris de ce que les actions possessoires, en ce qui concerne les domaines nationaux, ne sont pas attribuées expressément aux conseils de préfecture, et que le même motif s'applique à l'espèce avec beaucoup plus de raison, puisque la loi du 29 floréal an 10 ne va pas même jusqu'à attribuer aux conseils de préfecture tout le contentieux des rivières navigables;

» Attendu que, d'après tout ce qui vient d'être dit, la compétence du premier juge est incontestable; d'où il suit que l'exception d'incompétence proposée par le sieur Brousse, est dénuée de fondement, et que c'est le cas d'ordonner que les parties contesteront au fond ».

Le sieur Brousse se pourvoit en cassation contre ce jugement, et fait valoir deux moyens. 11 prétend d'abord que la rivière d'Orb est navigable, et il conclud de là que la loi du 23

floréal an 10 a été violée.

Il ajoute que, quand même la rivière d'Orb ne serait pas navigable, le juge de paix n'en aurait pas moins été incompétent.

« Pour autoriser (dit-il) une action possessoire, il faut demander d'être maintenu en possession d'un objet prescriptible et possédé paisiblement pendant un an et plus.

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Or, la demande dont a connu le juge de

paix, ne portait, ni sur un objet possédé par le demandeur, ni sur un objet prescriptible.

» Selon le sieur Iché, le sieur Brousse aurait fait, sur son propre terrain, une plantation moins défensive pour le sieur Brousse, qu'offensive contre le sieur Iché.

» Ce qui forme (est-il dit dans le plan du 3 mai 1817) des sortes d'éperons dans toute la longueur de la chaussée, au moyen desquels le gravier s'est beaucoup étendu et élevé du même côté, au point que les eaux se jettent avec rapidité et peuvent de plus en plus se jeter dans des peupliers sur la chaussée et le champ du sieur Iché qu'elles peuvent entrainer.

» Le sieur Brousse s'est permis de faire faire dans le lit de ladite rivière des plantations ou des ouvrages en osier qui dépassent sensiblement la ligne des arbres de sa chaussée....; ouvrages offensifs.

» C'est pourquoi le sieur Iché conclud par voie de complainte et réintégrande à faire détruire les ouvrages offensifs, et se voir défendre d'en faire à l'avenir, etc.

» Et c'est en effet ce qui a été accordé par le juge de paix, le 26 mai 1817, sans qu'il prononçât de dommages intérêts.

» Le juge a été saisi d'une action possessoire, au sujet d'ouvrages qui n'auraient pas été trouble de possession, qui n'auraient été qu'offensifs, et qui auraient été faits ailleurs que sur la propriété du demandeur.

» Y a-t-il trace d'un droit de possession, relativement à un objet prescriptible? Non sans doute; donc il n'y avait pas lieu à action sessoire; donc excès de pouvoir ».

pos

Assigné devant la section civile pour répondre à ces moyens de cassation, le sieur Iché de Thou oppose au premier que, des pièces produites au procès, il résulte que la rivière d'Orb n'est point navigable au point qui sépare les deux propriétés; et il fait observer, sur le second, qu'il n'a été proposé ni devant le juge de paix, ni devant le tribunal civil de Béziers, circonstance assurément fort indifférente, puisqu'il s'agissait d'une prétendue incompétence ratione materiæ (1).

Par arrêt du 23 août 1819, au rapport de M. Carnot, et sur les conclusions de M. l'avocat général Cahier,

« Considérant que le tribunal qui a rendu lejugement dénoncé, n'eut à juger, sur l'appel du demandeur, que l'unique question de savoir si la justice de paix avait été incompétemment saisie, comme le prétendait le sieur Brousse, en supposant que la rivière d'Orb était une

(1) V. l'arrêt de la cour de cassation, du 28 juin 1805, rapporté ci-après, S. 4.

rivière navigable, dont la police appartenait exclusivement aux corps administratifs, et qu'il résultait des pièces produites, que, si ladite rivière est navigable à Sérignan, jusqu'à son embouchure, elle ne l'est pas depuis Sérignan en remontant vers sa source; et qu'elle ne l'est pas notamment sur le terrain de Béziers, lieu de la situation des propriétés des parties;

» D'où il suit,qu'en déclarant que la justice de paix avait pu être compétemment saisie, le tribunal n'a pu violer aucune loi; » La cour rejette le pourvoi.... (1) ».

§. III. Si, troublé dans ma possession par un nouvel oeuvre, je prends, pour conserver mes droits, la voie du pétitoire devant le tribunal civil, puis-je introduire devant ce tribunal une demande tendant à ce que, par provision, les choses soient remises dans l'état où elles étaient avant le nouvel œuvre ?

Non, et il y en a deux raisons sans réplique: l'une, qu'aux termes de l'art. 35 du Code de procédure civile, je ne peux pas cumuler le possessoire avec le pétitoire, Pautre que, la connaissance du possessoire appartient au juge de paix, exclusivement au tribunal civil.

Et c'est ainsi que l'a décidé, dans une affaire où il ne s'agissait pas précisément de Dénonciation de nouvel oeuvre, mais à laquelle les mêmes principes étaient applicables, un arrêt de la cour de cassation dont voici l'espèce.

Le 5 mai 1814, jugement du tribunal civil de Tarascon qui, statuant sur un procès élevé entre la commune d'Eyguières et les enfans du sieur Renaud de Lubières, agissant par le ministère de leur mère et tutrice, déclare ceux-ci propriétaires des montagnes de Sainte-Cécile et de Vandelèque.

Point d'appel de ce jugement de la part de la commune d'Eyguières.

Cependant le sieur Gilles, habitant de cette commune, continue d'envoyer son troupeau en paturage dans les montagnes de Sainte-Cécile et de Vandelèque.

La veuve Renaud de Lubières le fait citer devant le juge de paix, en vertu de l'art. 10, no I, du tit. 3 de la loi du 24 aout 1790, pour le faire condamner à la réparation du dommage qu'il lui a causé par là, avec défenses de récidiver; et se fonde sur le jugement qu'elle a

obtenu contre la commune.

Le sieur Gilles répond que ce n'est pas comme habitant de la commune d'Eyguières qu'il met

(1) Jurisprudence de la cour de cassation, tome 20, page 63.

son troupeau en pâturage dans les montagnes dont il s'agit; mais qu'il le fait par un droit qui lui appartient individuellement en vertu de titres auxquels le jugement du 5 mai 1814 n'a porté ni pu porter aucune atteinte.

Jugement par lequel, attendu que la défense du sieur Gilles présente une question préjudicielle sur laquelle il n'appartient qu'au tribunal civil de statuer, le juge de paix se déclare incompétent.

En conséquence, la dame Renaud de Lubieres se pourvoit devant le tribunal de première instance d'Arles, et en concluant à ce qu'en définitive, il soit dit que le sieur Gilles n'a pas le droit de mettre son troupeau en pâturage dans les montagnes de Sainte-Cécile et de Vandelèque, elle demande que, par provision et pendant le procès, il lui soit fait défenses de l'y faire conduire.

La cause portée à l'audience sur le provisoire, le sieur Gilles oppose aux conclusions prises à cet égard contre lui, qu'elles ne forment réellement qu'une action possessoire, et qu'elles sont non-recevables sous deux rapports: qu'elles le sont, parcequ'il y a plus d'un an qu'il exerce paisiblement le droit contesté par fa dame Renaud de Lubières ; et qu'elles le sont encore, parceque les actions possessoires sont du ressort exclusif des juges de paix.

Le 28 novembre 1816, jugement par lequel le tribunal civil d'Arles se déclare incompétent pour prononcer sur la demande de la dame Renaud de Lubières en possession provisoire, la renvoie à se pourvoir là et ainsi qu'il appartiendra, et ordonne qu'il sera procédé à l'instruction du pétitoire.

Appel de ce jugement à la cour royale d'Aix ; et, le 14 juin 1817, arrêt qui, en infirmant le jugement attaqué, adjuge à l'appelant ses conclusions sur le possessoirę,

« Attendu que la jouissance est due à celuj qui a le dernier état en sa faveur; que la teneur et le résultat des titres ne sont à considérer que lorsque les parties en viennent au pétitoire, et que jusque-là la possession paisible pendant l'an et jour est le seul point à considé rer; qu'à la vérité, la dame Renaud de Lubieres a reconnu ne pouvoir exercer une action possessoire, mais que, d'un autre côté, on peut dire le sieur Gilles ne se présente pas que comme ayant eu, d'une manière incontestable, une paisible possession pendant et au-delà d'un an ;

» Attendu que le titre invoqué par le sieur Gilles sera examiné et apprécié lors du jugement sur le pétitoire; mais qu'en l'état et d'après ce qu'on lit dans les pièces du procès, n'est pas suffisamment justifié que ce soit d'a

il

près ce titre, et non comme ayant usé d'un droit communal, que ledit Gilles ait possédé; que, dès-lors, il ne pourrait se fonder sur sa possession pour repousser les fins provisoires de la dame de Lubières, ce qu'il ne saurait obtenir qu'à la faveur d'une possession non seulement annale, mais paisible, mais exercée avec l'esprit et l'intention d'user d'une faculté qui lui fut propre et indépendante d'un droit communal auquel il eût participé avec tous les habitans d'Eyguières ;

» Attendu enfin que, dans le doute, et lorsqu'il n'est pas suffisamment établi que la possession a été paisible et qu'elle a eu son principe dans un titre jusque-là non contesté, il est de règle que l'état provisoire est accordé à celle des parties qui a le titre de propriété le plus apparent, sans rien préjudicier au fond ».

Mais le sieur Gilles se pourvoit en cassation, et par arrêt du 4 août 1819, au rapport de M. Henri Larivière, sur les conclusions de M. l'avocat-général Cahier, et après un délibéré en la chambre du conseil,

» Vu l'art. 25 du Code de procédure, qui porte que le possessoire et le pétitoire ne seront jamais cumulés ;

>> Attendu que l'action provisoire dont il s'agit, constituait une action possessoire dont la connaissance était exclusivement dévolue au juge de paix, et qu'en prononçant sur les fins provisoires de la dame de Lubières, la cour royale d'Aix a cumulé le pétitoire et le possessoire, et par conséquent violé l'art. 25 du Code précité;;

» La cour casse et annulle..... (1) ».

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2o Quel est, dans ce cas, le juge compétent pour connaitre de la Dénonciation de nouvel œuvre? Est-ce le juge du pétitoire? Est-ce le juge de paix ?

I. Ce qui, sur la première question, paraît au premier coup-d'oeil, devoir faire embrasser la négative, c'est la généralité du principe écrit dans l'art. 25 du Code de procédure civile, que le possessoire et le pétitoire ne seront jamais, cumulés. De là, en effet, il semble résulter que l'action possessoire ne peut jamais concourir avec l'action pétitoire, et qu'une fois celle-ci engagée, il ne peut plus y avoir lieu à celle-là.

(1) Bulletin civil de la cour de cassation, tome 21, page 209.

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