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personne publique, puisqu'il est dans sa nature de n'être signé que par les parties.

» L'effet de la foi qu'il porte avec lui, est que l'exécution n'en peut être suspendue que par l'inscription de faux incident, ou par la mise en accusation sur une plainte en faux principal.

» Peut-on dire également d'un acte privé, qu'il fasse foi jusqu'à inscription de faux? Non, sans doute, puisqu'un tel acte ne fait pas foi par lui-même.

» L'art. 1322 dit bien que l'acte privé, reconnu par celui auquel on l'oppose, ou légalement tenu pour reconnu, fait, entre ceux qui l'ont souscrit, la même foi que l'acte authentique.

» Mais par cela même, la loi ne déclare-t-elle pas que l'acte privé ne fait pas foi, tant qu'il n'est pas reconnu ou légalement tenu pour tel; qu'ainsi, il ne fait pas foi par lui-même; qu'en un mot, il ne peut acquérir la foi de l'acte authentique, qu'au moyen d'une reconnaissance qui doit intervenir devant les officiers publics; et que, jusque-là conséquemment, celui à qui on l'oppose, peut se borner à le méconnaître, sans inscription de faux?

» L'art. 1328 du même Code déclare que les actes sous seing-privé n'ont de Date contre les tiers, que du jour où ils ont été enregistrés, du jour de la mort de celui ou de l'un de ceux qui les ont souscrits, ou du jour où leur substance est constatée dans des actes dressés des officiers publics, tels que procès-verbaux de scellé ou d'inventaire.

par

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autre entre elles-mêmes, et qu'ainsi, la Date de sa décision doit faire foi entre elles, comme le ferait un acte privé qu'elles auraient elles-` mêmes signé;

» Nous répondrons: Alors même qu'il s'agirait d'un acte privé qu'on opposerait à une partie, comme l'ayant elle-même souscrit, cet acte ne ferait pas foi par lui-même contre cette partie; ce n'est qu'après qu'elle l'aurait reconnu, ou que la reconnaissance en aurait été légalement tenue pour faite, qu'il ferait foi contre elle, puisque, jusqu'alors, elle pourrait se borner à méconnaître l'acte sans inscription de faux.

» Et si l'on réplique qu'ici la signature de l'arbitre Chagot n'est pas méconnue ou désavouée,

» Nous répondrons qu'elle est désavouée, en ce que nous avons toujours soutenu qu'il n'était plus arbitre lorsqu'il signa sa décision;

» Nous répondrons qu'en supposant qu'un arbitre puisse être assimilé aux parties qui l'ont nommé, cette hypothèse ne peut du moins être admise que dans le cas où sa qualité d'arbitre subsiste incontestablement au moment où sa décision est mise au jour ; mais que, s'il ne fait paraître sa décision qu'après la révocation de sa qualité ou de ses pouvoirs, les parties ne peuvent véritablement plus être considérées que comme des tiers, à l'égard desquels cette décision ne pourrait, par elle-même, faire foi d'une Date antérieure, qu'autant que les arbitres seraient investis d'un caractère de nature à imprimer à leurs actes le sceau de la foi publique.

» Tout se réduit donc à savoir si les arbitres sont ou ne sont pas revêtus d'un caractère public.

» S'ils ont un caractère public, la cour d'appel se sera conformée à la loi, en déclarant que la Date apposée par un arbitre à sa décision (alors que la décision n'a paru qu'après la révo cation de l'arbitrage), est certaine et fait foi entre les parties contractantes, jusqu'à inscription de faux.

Si, au contraire, ils ne sont que de simples particuliers, que des personnes privées, elle aura évidemment étendu et violé la loi, en attribuant à une décision arbitrale, le caractère de certitude et de foi que la loi n'accorde qu'aux actes authentiques, et qu'elle refuse aux actes privés non reconnus.

» Et assurément, la dernière de ces propositions ne peut pas être révoquée en doute.

» Le droit romain distinguait plusieurs espèces d'arbitres, et notamment, 10 les arbitres qui étaient nommés, soit par le magistrat, soit par les parties elles-mêmes, mais avec l'inter3

vention ou sous l'autorité du magistrat; 2o les arbitres auxquels les parties soumettaient extrajudiciairement leurs différends

» Ceux-là étaient sans juridiction, de même que ceux-ci; mais du moins, ils avaient une mission légale, une mission judiciaire, pour connaître de l'objet de leur nomination: Qui ́notionem habent, non jurisdictionem, dit Cujas (sur la loi 14, de judiciis, tome 9 de l'édition de Naples, pages 144 et suivantes; et sur la loi 2, D. de judiciis, page 128 et suivantes).

>> Quant aux arbitres compromissaires, ou extrajudiciairement nommés par les parties, ils n'avaient, ni juridiction, ni mission du magistrat, ni conséquemment aucun caractère public pour connaître de l'objet qui leur était soumis.

» Le compromis leur donnait bien le pouvoir de statuer sur cet objet; mais, comme ils ne tenaient ce pouvoir que des parties, sans l'intervention de l'autorité judiciaire, ils demeuraient réduits à la qualité de personnes purement privées. C'est ce que remarque très-bien Cujas (sur la loi 2, D. de judiciis, tome 7, vers le commencement de la page 129), en ces termes: Et ii qui nec notionem, nec jurisdictionem habent, ut compromissarii, qui privati

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» Aussi n'est-ce qu'improprement qu'on donne à leur décision le nom de jugement: Horum propriè judicium non est, dit encore Cujas (sur la loi 1, D. de receptis qui arbitrium, tome 10, page 395).

» Et en effet, la loi 13, §. 5, D. de his qui notantur infamia, déclare que la décision d'un arbitre n'est pas un véritable jugement: Non per omnia sententia est. Godefroi, sur cette loi, se demande pourquoi la décision arbitrale n'a

ni la force ni l'effet d'une sentence? La raison

en est, répond-il, que la fonction de l'arbitre n'est pas une fonction publique, comme l'est celle de juge: Vim sententiæ et effectum non habet, cur? Arbitri munus non est publicum, ut judicis.

Le caractère public ou judiciaire que la loi romaine refusait aux arbitres compromissaires, ne leur a jamais été accordé par la loi française; il n'aurait pas même pu leur être attribué, sans choquer la nature des choses, puisqu'un compromis passé entre particuliers, est leur seul et unique titre... (1).

>> Le Code de procédure civile a fixé, avec

(1) V. Particle Hypotheque, §. 2.

la plus grande précision, les principes sur l'arbitrage volontaire.

» Mais il n'a donné ni pu donner un caractère public aux arbitres, qui, de cela seul qu'ils ne tiennent leur existence et leurs pouvoirs que de la libre volonté des parties compromettantes, n'ont et ne peuvent avoir qu'un caractère purement privé.

» Et ceci a été spécialement remarqué par les rédacteurs da Code, d'après son texte même, ainsi que d'après les anciennes lois. S'il est exigé, à peine de nullité (disait l'orateur du tribunat, dans son rapport fait au corps législatif sur le titre des arbitrages), que le compromis précise l'objet en litige et contienne les noms des arbitres, c'est que ceux-ci n'étant pas des juges, n'ayant aucun caractère public, il faut bien que le compromis leur donne un titre, et aux parties une garantie contre tout excès de pouvoir.

» Ainsi démontré que les arbitres compromissaires n'ont aucun caractère public, et que leur sentence n'est en soi qu'un acte privé, comme les personnes qui l'ont rendue, il demeure nécessairement établi que la cour d'appel, en jugeant qu'un tel acte a, par lui-même, la vertu de faire foi de sa Date entre les parties, jusqu'à inscription de faux, a contrevenu aux lois citées, qui n'accordent cette vertu qu'aux actes authentiques, ou aux actes privés re

connus.

>> Et à cette contravention se joint uue violation non moins formelle de l'art. 3 du tit. 2 de la loi du 24 août 1790, qui porte: Les compromis qui ne fixeront aucun delai dans lequel les arbitres devront prononcer, et ceux dont le délai sera expiré, seront néanmoins valables, et auront leur exécution jusqu'à ce qu'une des parties ait fait signifier aux arbitres qu'elle ne veut plus tenir à l'arbitrage,

» Pour bien apprécier cette seconde branche de notre moyen, que nous avons effleurée avec la première, et qui, en effet, a une grande analogie avec celle-ci, il faut rappeler quelques principes ultérieurs.

» Les lois romaines prescrivaient, à peine de nullité, la nécessité de prononcer la sentence arbitrale en présence de toutes les parties, à moins qu'il n'en eut été autrement stipulé dans le compromis. Sententia quidem dicta non coram litigatoribus, non valebit, nisi in compromissis hoc specialiter expressum sit, ut, vel uno, vel utroque absente, sententia promatur. (Loi 27, §. 4, D. de receptis qui arbitrium). Arbitri nulla sententia est quam scriptam edidit litigatoribus, si non ipse recitavit. (Loi re, C. de sententiis ex periculo recitandis).

» Mais aussi, du moment que l'arbitre avait prononcé sa sentence aux parties, il ne pouvait plus la rétracter, ni y faire aucun changement, aucune modification. Cæterùm si condemnavit vel absolvit mutare (se) sententiam non posse (loi 19, §. 2, D. de receptis qui arbitrium); et pourquoi? C'est que, dès ce moment, il a cessé d'être arbitre : Dùm arbiter esse desierit, dit

la même loi.

» Et c'est précisément la prononciation faite aux parties, qui constatait la Date, l'existence et l'irrévocabilité des sentences arbitrales.

» Les dispositions et l'objet de ces lois devinrent une maxime du droit francais, consacrée par nos anciennes ordonnances, et par la jurisprudence des cours souveraines.

» Hoc servamus, dit Mornac, sur la loi 27, §. 4, D. de receptis qui arbitrium.

» Et dans son Recueil d'arrêts (tome 4, page 167) il rapporte un arrêt conforme, rendu par le parlement de Paris, le 20 mars 1601.

Charondas (Résolutions, part. 1, tit. 24.) a recueilli un arrêt du même parlement, du 19 juillet 1603, qui ne considéra pas comme une nullité, que la sentence qui avait été dressée par les arbitres, remise au greffe, et signée par le greffier dans le délai du compromis, n'eut été prononcée qu'après. Mais puisque la sentence avait été remise au greffe et signée par le greffier dans le délai du compromis, et que, dès-là, elle avait acquis une Date certaine, peu importait qu'elle eût été prononcée après ou auparavant. Cet arrêt confirme donc le principe, bien loin de le contrarier.

» On peut voir aussi dans Bouvot (tome 1, part. 3, à l'article Sentence nulle, quest. 1) un arrêt du parlement de Dijon, du 14 mars 1576, qui déclara, dit cet auteur, la sentence nulle, pour avoir été prononcée après le temps

du compromis expiré, nonobstant que les ar

bitres eussent déclaré avoir dressé la scntence dans le temps du compromis, d'autant que la sentence n'a effet que du jour de la pronon

ciation.

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D'après les ordonnances antérieures à celle de 1667, les tribunaux prononçaient aussi aux parties les jugemens et arrêts rendus sur productions, lesquels avaient pour Date le jour de leur prononciation; et cette dernière ordonnance en décida autrement par l'art. 7 du tit. 26, qui porte: Abrogeons en nos cours et dans toutes juridictions, les formalités des prononciations des arrêts et jugemens, et des significations pour raison de ce, sans que les frais puissent entrer en taxe..... ;

» Mais, puisque l'abrogation ne portait que sur les arrêts et jugemens des cours et juridictions et par conséquent ne comprenait pas les

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décisions arbitrales, ces décisions durent continuer d'être prononcées.

>> Ajoutons qu'en abrogeant la formalité de la prononciation, à l'égard des jugemens rendus par de véritables juges, l'ordonnance voulut, art. 8 du même titre, qu'ils fussent datés du jour qu'ils auraient été arrêtés, sans qu'ils pussent avoir d'autre Date; et que le jour du jugement fút, avant sa remise au greffe, écrit de la main du rapporteur au bas du dispositif : de sorte qu'indépendamment de la remise au greffe, la Date et l'irrévocabilité du jugement se trouvaient assurées par la signature de l'un des officiers publics qui l'avaient arrêté.

» Or, ceci ne pouvait pas s'appliquer aux décisions arbitrales rendues par des hommes privés. Il est donc évident, sous tous les rapports, qu'à l'égard de ces décisions, l'ordonnance maintint la formalité de la prononciation pour la garantie de leur Date.

» Aussi Brillon ( à l'article Arbitre, no 16 ), en rapportant un arrêt conforme du parlement de Paris, du 18 juin 1698, observe-t-il que la sentence arbitrale doit étre, non seulement datée, mais prononcée dans le temps du compromis, sinon, elle est nulle; car, ajoutet-il, c'est la prononciation qui en assure la. Date, et non pas la Date qui est donnée par les arbitres.

» Il faut donc tenir pour constant que la Date donnée par les arbitres à leurs décisions, ne faisait aucune foi isolément, et qu'elle ne devenait certaine que par la prononciation qui en était faite aux parties.

» La loi du 24 août 1790 ne déclara pas précisément que la prononciation continuerait d'avoir lieu; mais elle ne l'abrogea ni ne la prohiba.

» La fixité de Date que la loi antérieure refusait aux arbitres, la loi de 1790 ne la leur accorda point.

» L'une et l'autre n'ont vu dans les arbitres que des hommes privés; et l'authenticité de leurs décisions, ou la certitude de leurs Dates, ont toujours dépendu de quelque acte postérieur ; et il en est de même encore sous l'empire du Code de procédure civile.

» La loi de 1790 statue simplement que les pouvoirs des arbitres se prolongeront au-delà du délai du compromis, tant que la révocation n'en est pas signifiée.

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Ainsi, d'après cette loi, c'est la révocation, et non pas la fin du délai, qui fait cesser les pouvoirs.

» Mais comme les principes qui ont existé de tous temps, refusaient toute idée de fixité à la Date d'une sentence arbitrale qui ne se trouvait pas constatée avant l'expiration du délai porté

par le compromis; de même la loi de 1790, qui se borne à prolonger les pouvoirs des arbitres au-delà de ce délai, s'ils ne sont pas révoqués, ne peut voir de Date certaine dans une sentence arbitrale, qu'autant que cette Date se trouve assurée par quelque acte antérieur à la révocation.

» La loi de 1790 veut qu'après l'expiration du délai compromissoire, chacune des parties ait la faculté de révoquer l'arbitrage: elle veut donc que cette faculté puisse être exercée, tant qu'il n'est pas légalement constaté que l'arbitre a rendu son jugement : elle veut donc que cette faculté ne puisse pas être rendue vaine par la représentation d'un jugement qui ne paraîtrait qu'après la révocation.

» Peu importerait même qu'avant la révocation, l'arbitre eût rédigé un jugement resté en ses mains; car, tant que ce jugement n'avait pas été mis au jour, ce n'était qu'un projet que l'arbitre pouvait réaliser, abandonner ou modifier; tant que ce jugement n'avait pas été mis au jour, l'arbitre pouvait le changer, ou même en rédiger un second totalement contraire au premier; et il est dans la nature des choses, comme dant les élémens de la matière, qu'un arbitre, ainsi qu'un juge proprement dit, ne puisse être censé avoir rendu son jugement, qu'au moment où il ne peut plus varier.

» Or, n'oublions pas que la loi de 1790 autorise chacune des parties à révoquer l'arbitrage après le délai du compromis.

» Elle entend donc nécessairement que la révocation soit un obstacle à toute idée de jugement arbitral à rendre, et qu'elle ne puisse être écartée, qu'autant que déjà l'arbitre aurait définitivement et invariablement rempli sa mission; ce qui ne pourrait se justifier que par un jugement dont la Date antérieure se trouverait constatée, soit par une prononciation faite, parties présentes ou légalement appelées, soit par tout autre acte ou formalité de nature à imprimer une certitude de Date: sans quoi, la loi aurait voulu pouvoir être impunément éludée dans la disposition qui autorise la révocation de l'arbitrage; et cette absurdité ne peut pas être supposée dans la loi.

» Donc, la cour d'appel a violé ici cette loi, en jugeant que la Date du 17 février, donnée par l'arbitre à sa décision, était certaine et faisait foi, nonobstant la révocation de ses pouvoirs a lui signifiée le 24; tandis que cette décision, en supposant même, contre la vérité, qu'elle eût été réellement datée et signée le 17, n'aurait existé avant la révocation que dans son cabinet, où il pouvait la changer ou la corriger à son gré, et ne serait devenue invariable, ou, ce qui est la même chose, n'aurait acquis un

caractère de décision arbitrale, par une certitude de Date et de rédaction définitive, qu'à l'époque où elle fut déposée au greffe, ou enregistrée, si, à cette époque, la révocation authentique des pouvoirs de l'arbitre n'avait pas été un obstacle à ce qu'il pût mettre utilement au jour une décision dont la fixité n'était garantie par aucune formalité antérieure....

Mais, objecte le sieur Seguin, qu'on supprime de l'arrêt l'opinion de la cour d'appel, que la Date d'un jugement arbitral est authentique, et ne peut être attaquée qu'en faux, ou qu'elle doit ou peut être attaquée par cette voie, que restera-t-il ? Le texte matériel, non susceptible d'interprétation, c'est-à-dire, l'adoption d'un principe incontestable, qu'une décision arbitrale est certaine et fait foi entre les parties, qu'elle est légale pour elles. La loi de 1790 et le Code civil ne disent pas que des compromettans ne sont que des tiers vis-à-vis de l'arbitre. Ne serait-il pas ridicule que des parties compromettantes, qui ont témoigné à un homme de leur choix assez de confiance pour le prendre pour leur juge unique et souverain..., fussent recevables à contester la Date donnée par cet arbitre à sa décision?

» Vous convenez donc qu'en retranchant du principe adopté par la cour d'appel, qu'il est nécessaire ou possible d'attaquer en faux la Date d'une décision arbitrale, il y reste le principe, que cette Date fait foi entre les parties, qu'elle est légale pour elles. Mais dire qu'elle fait foi entre les parties, n'est-ce pas dire qu'elle ne peut être attaquée ou emportée que par l'action en faux ?

» Poursuivons néanmoins votre raisonnement, quoiqu'il ne soit pas fort intelligible. Voulez-vous dire qu'abstraction faite de toute idée d'authenticité, qu'abstraction faite du point de savoir si l'action en faux est, ou non, nécessaire pour attaquer la Date d'une décision arbitrale, cette Date fait foi, ou est certaine entre les parties, en ce qu'elles ne seraient pas des tiers dans le compromis ou à l'égard de l'arbitre ? Eh bien! Raisonnons dans ce sens.

» Que, pendant la durée du compromis, les parties qui l'ont souscrit, n'y soient pas des tiers, cela se conçoit.

>> Mais quand le compromis est révoqué, elles sont évidemment des tiers dans une prétendue décision arbitrale, qui n'a paru qu'après la révocation, et dont la Date antérieure ne pourrait conséquemment être certaine à leur égard, qu'autant qu'elle tiendrait cette qualité d'un caractère public dans la personne de l'arbitre.

» Ainsi, nous pourrions admettre que là Date d'une décision qui aurait été mise au jour pendant la durée de l'arbitrage, ou avant sa

révocation, est certaine, ou fait foi entre les parties; mais, dans un tel cas, toute question sur la Date est inutile et sans objet.

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Que, si, au contraire, et comme dans l'espèce de la cause, il existait un acte authentique de révocation, lors duquel la décision arbitrale n'existait pas, ou, ce qui est la même chose, n'avait pas d'existence constatée; comment une date que l'arbitre a pu apposer après coup, pourrait-elle l'emporter sur cet acte authentique? Comment pourrait-elle faire foi ou être certaine entre les parties à l'égard desquelles il n'y avait plus ni arbitre ni arbitrage au moment où la décision a paru?

» Vous argumentez de la confiance et des pouvoirs que les parties avaient respectivement donnés par le compromis à un homme de leur choix ; mais cette confiance et ces pouvoirs, les sieurs Vanlerberghie et Ouvrard les lui avaient retirés par leur acte de révocation; le sieur Chagot n'était plus arbitre, lorsqu'il a produit sa prétendue sentence.

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Que répondez-vous à ce raisonnement décisif? Vous y répondez, avec la cour d'appel, par la plus étrange pétition de principe ; et en effet, voici à quoi se réduit votre système.

>> Pour prouver que la Date du 17 février, donnée à la décision, est certaine, quoique la décision n'ait été rendue constante par son enregistrement que le 1er mars, vous dites que le sieur Chagot, qui a écrit cette Date, lui a imprimé un caractère irréfragable de certitude par sa qualité d'arbitre exerçant les pouvoirs dont les parties l'avaient investi.

» Et lorsque vous vous sentez pressé par l'acte de révocation du 24, qui constate authentiquement que le sieur Chagot n'était plus arbitre, lorsque sa décision a paru, vous dites que la Date du 17 février, étant antérieure à la révocation, et faisant foi ou étant certaine entre les parties, prouve invinciblement que le sieur Chagot a rempli sa mission avant que sa qualité d'arbitre eut été révoquée.

» En un mot, dans chaque partie de votre raisonnement, vous donnez pour réponse précisément ce qui est en question; et ce cercle vicieux démontre de plus en plus l'illégalité du système que vous avez fait adopter par la cour d'appel.

» Nous avons établi plus haut que la loi de 1790, accordant à chacune des parties la faculté de révoquer le compromis dont le délai se trouve expiré, résiste à l'idée que cette faculté puisse être rendue illusoire par une décision qui ne paraît qu'après la révocation, par une décision qui, dès-lors, est suspecte d'antidate, et qui, au surplus, si elle avait antérieurement existé dans le cabinet de l'arbitre,

n'y aurait existé que dans un état de projet variable à son gré.

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Mais, dit encore le sieur Seguin, suivant la loi de 1790, le dépôt est nécessaire pour rendre exécuto re un jugement arbitral. Le jugement arbitral existe donc avant le dépôt. De plus, le président est tenu de mettre son ordonnance au bas de l'expédition. La minute doit donc exister avant cette expédition. Il y a donc, d'après la volonté de la loi, avant le dépôt et l'ordonnance d'exequatur, un jugement réel, et non un simple projet.

» Sans doute, la loi de 1790, en voulant que le président du tribunal donnât l'ordonnance d'exécution au bas de l'expédition qui lui serait présentée, supposait la préexistence d'une minute; mais où la supposait-elle ? Elle ne la supposait pas dans les mains de l'arbitre; car, pour cela, il eut fallu que les arbitres eussent été revêtus d'un caractère public, avec pouvoir d'expédier ou de faire expédier leur sentence; et le sieur Seguin ne portera pas jusquelà son système.

>> La loi supposait que la minute préexistait dans un dépôt public. Fersonne n'ignore en effet qu'un édit de 1673 avait créé des greffiers des arbitrages, chargés de recevoir en dépôt les minutes des jugemens arbitraux, et d'en délivrer des expéditions; et que, dans la suite, les notaires avaient acquis le droit de réunir à leurs fonctions celles de ces greffiers.

Aussi, depuis la publication de la loi du 29 septembre 1791, portant suppression et réorganisation du notariat, fallut-il présenter au président du tribunal, non plus une expédition, mais la minute même du jugement arbitral à homologuer.

» Aussi, l'ordonnance d'exécution du 3 mars 1806 a-t-elle été donnée sur la minute de la décision dont il s'agit, et non pas sur une expédition.

» Aussi est-ce la minute qui, aux termes de la nouvelle loi, doit être déposée au greffe pour faire rendre le jugement exécutoire.

>> Mais du moins, dit le sieur Seguin, il résulte de là que le jugement existe avant le dépôt. >> Eh! Sans doute, la minute, l'original du jugement existe avant son dépôt au greffe; mais toujours est-il que cette minute, sortie des mains de l'arbitre qui, jusqu'alors, a pu s'en jouer, ne devient stable et susceptible d'expé-.. dition, qu'après son dépôt effectué. Toujours est-il que, jusqu'au moment du dépôt, et tant que le jugement est dans les mains de l'arbitre, celui-ci peut, à son gré, le changer. Toujours est-il que ce n'est qu'après qu'il s'est légalement dessaisi de sa décision, qu'il ne lui est plus permis de varier, et qu'alors donc seulement elle

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