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ni concurrence ni prévention, à cet égard, entre les tribunaux et le liquidateur général des Dettes de l'Etat ; et que le liquidateur général des Dettes de l'État une fois supposé compétent décider si une Dette prétendue nationale est effectivement telle, il doit l'être seul et exclusivement au pouvoir judiciaire. Cela résulte du principe établi par l'art. 13 du tit. 2 de la loi du 24 août 1790, et confirmé par la loi du 16 fructidor an 3, que les tribunaux ne peuvent, en aucun cas, connaître des objets dont la connaissance appartient à l'autorité administrative.

» Or, que le liquidateur général des Dettes de l'Etat soit compétent pour décider si telle Dette d'une commune est ou non à la charge du trésor public, c'est ce qui résulte de la combinaison de deux lois très-précises.

» La première est celle du 16-22 décembre 1790, portant création d'une direction générale la liquidation des différentes parties pour de la Dette publique: L'objet de la direction générale de liquidation (y est-il dit, art. 2) sera de reconnaître, déterminer et liquider l'arriéré de chaque département, les finances des offices de judicature....., et tous autres objets dont l'assemblée aurait déjà décrété la liquidation OU LA DÉCRÉTERAIT Par la suite.

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Par cette seconde loi, la convention natio

nale a bien évidemment décrété la liquidation des Dettes des communes, devenues Dettes de l'État. C'est donc au directeur général de la liquidation qu'il appartient de reconnaitre et de déterminer ces Dettes; et non seulement cette conséqueuce dérive des termes de la loi du 22 décembre 1790, ou la décréterait par la suite, mais elle est encore écrite en caractères formels dans la loi du 24 août 1793 ellemême, puisqu'obliger les créanciers des communes de remettre tous leurs titres de créance au directeur général de la liquidation, c'est nécessairement investir le directeur général de la liquidation, du pouvoir de décider si telle Dette d'une commune est ou n'est pas

nationale.

» Il est donc évident que les tribunaux civils, des départemens de l'Ourthe et de Sambre-etMeuse ont entrepris sur les attributions de l'autorité administrative, en statuant sur la question de savoir si la rente réclamée par Ferdi

nand Goër sur la commune de Theux, est ou non à la charge de la république.

>> Et par ces considérations, nous estimons qu'il y a lieu de casser et annuler, pour excès de pouvoir, les jugemens rendus entre les parties, tant en première instance qu'en cause d'appel, ainsi que les procédures antérieures à la loi du 7 prairial an 6, sur lesquelles ils sont intervenus».

Sur ces conclusions, arrêt du 4 fructidor an au rapport de M. Basire, par lequel,

II,

« Vu les art. 1 et 2 de la loi du 22 désembre 1790, l'art. 85 de la loi du 24 août 1793, les art. 2 et 7 de la loi du 5 prairial an 6, et l'art. 13 du tit. 2 de la loi du 24 août 1790;

» Attendu qu'aux termes des art. 1 et 2 de la loi du 22 décembre 1790, tous les objets dont la liquidation est décrétée, doivent être liquidés par voie administrative;

» Attendu qu'aux termes de l'art. 85 de la loi du 24 août 1793, la liquidation des Dettes des communes, sans distinction de celles exigibles et de celles constituées, fait partie des attributions administratives;

la loi du 5 prairial an 6, les Dettes des com

>> Attendu qu'aux termes des art. 2 et 7 de

munes de la Belgique doivent être liquidées de la même manière que celles des communes de l'ancien territoire français ;

» Attendu enfin, qu'aux termes de l'art. 13 du tit. 2 de la loi du 24 août 1790, les autorités judiciaires ne peuvent s'immiscer dans l'exercice des fonctions administratives;

de l' Ourthe et de Sambre-et-Meuse, en pro» D'où il suit que les deux tribunaux civils nonçant définitivement sur le mérite de l'op

position formée par la commune de Theux, depuis la loi du 5 prairial an 6, au jugement du 5 floréal an 6, ont contrevenu audit art. 13 du tit. 2 de la loi du 24 août 1790;

>> Par ces motifs...., casse et annulle tant le jugement rendu par le tribunal civil de l'Ourthe, le 3 fructidor an 6, que celui rendu par le tribunal civil de Sambre-et-Meuse, le 22 prairial an 7... ».

DETTE PUBLIQUE. §. I. Quelles sont les formalités à remplir par un débiteur, pour inscription sur le grand livre de la Dette donner en paiement à son créancier une objet sur lequel le créancier avait une hypopublique, provenant de la liquidation d'un thèque spéciale et privilégiée ?

V. l'article Inscription sur le grand-livre.

§. II. Les créanciers et ayant droit des émigrés ont-ils été déchus, pour n'avoir pas représenté leurs titres dans le

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Ces deux questions se sont présentées à la cour de cassation, dans l'espèce suivante.

Le 24 septembre 1793, testament par lequel Antoine Bonnemort institue pour son héritière universelle, Marie-Anne Lafon, son épouse.

Le 2 octobre suivant, décès du testateur. Dix mois et cinq jours après, sa veuve épouse en secondes noces, un autre Antoine Bonnemort, dit Jacques.

Jeanne Bonnemort, femme Robert, sœur et héritière ab intestat du premier mari de MarieAnne Lafon, la fait assigner pour voir dire qu'elle sera déclarée déchue de son institution, par l'effet de son remariage dans l'an du Deuil, et en conséquence condamnée au délaissement de l'hérédité.

Le 14 fructidor an 6, jugement du tribunal civil du département du Lot, conforme à ces conclusions.

Appel par Marie-Anne Lafon.

La cause portée au tribunal civil de Lot-etGaronne, voici comment on cherchait à établir le mal jugé :

<< Plus de dix mois s'étaient écoulés depuis le décès de son premier mari, lorsque l'appelante s'est présentée devant l'officier public de son arrondissement pour y déclarer, dans les formes légales, qu'elle en prenait un second.

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Or, ce seul fait devrait la mettre à l'abri de toutes les peines de secondes noces, quand même elles auraient encore existé à l'époque de son convol.

» Quel a été le but des anciennes lois, en infligeant des peines à la femme qui passe, dans un trop court délai, à de nouveaux noeuds ? Les anciennes lois s'en sont expliquées elles-mêmes: elles ont voulu empêcher l'atteinte que devaient éprouver les mœurs par l'incertitude de l'état d'un enfant, dont l'existence formait un problème insoluble entre un père décédé et un père vivant. Elles ont voulu prévenir ce qu'elles ont appelé turbationem sanguinis, incertitudinem filiationis. Il leur a donc fallu détermi

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ner un intervalle dont le laps fût exclusif de cette incertitude; et la loi 2 du tit. 8, au Code, de secundis nuptiis, atteste que cet intervalle fut fixé à dix mois, decem menses, et que cette fixation fut maintenue pendant plus de neuf cents ans, depuis Romulus jusqu'au règne de

Gratien et de Théodose.

» La même loi atteste, à la vérité, que ces deux derniers législateurs ajoutèrent deux mois à l'intervalle fixé par Romulus, et qu'ils réglèrent que la veuve s'abstiendrait du convol pendant une année, intra anni spatium. Mais cette différence entre ces deux intervalles est si peu de chose, qu'en renchérissant sur l'antique loi de Romulus, neuf cents ans après, les auteurs de cette innovation ne se dissimulerent point que le supplément des deux mois n'était d'aucune conséquence, puisque, dans la loi citée, ils s'expriment ainsi : parvum enim tempus post decem menses servandum adjicimus, tametsi idipsum exiguum putemus. Il résulte donc évidemment de l'analyse de cette loi du droit romain qu'on veut opposer à l'appelante, que, dans la rigueur même de ce droit, les peines de secondes noces ne peuvent point l'atteindre, du moment qu'elle a observé, entre le décès de son premier mari et son second hyménée, l'intervalle de dix mois, decem menses, prescrit par le droit antique.

» Ce n'est pas tout. Les lois nouvelles, qui, comme celles de l'antiquité, ont montré pour les mœurs publiques ce respect qui est de l'essence de toute saine législation, se sont occupées de prévenir ce désordre moral, turbationem sanguinis, incertitudinem filiationis, qui fut l'objet des précautions des lois qui prononcèrent des peines contrà fœminas quæ, perdito marito, alteri festinabant nubere. Les nouvelles lois ont voulu, dans les cas de divorce, que la femme divorcée, ainsi que la femme veuve, ne pût remplacer son premier époux, qu'après un laps de temps suffisant pour que nulle équivoque ne pût avoir lieu sur l'état de l'enfant qui serait le fruit du mariage subséquent. Or, ce laps de temps, elles l'ont fixé, comme le droit romain, à dix mois, decem menses. L'art. 7 de la loi des 4 et 5 floréal an 2 est ainsi conçu: La femme divorcée peut se remarier aussitôt qu'il sera prouvé par un acte de notoriété publique, qu'il y a DIX MOIS qu'elle est séparée de fait de son mari; et ce qui démontre sans réplique que le motif du législateur, dans cette loi, a été d'empêcher l'énigme de la paternité, incertitudinem filiationis, c'est la disposition qui termine ce même article: Celle qui accouche après son divorce, est dispensée d'attendre ce délai.

» Ajoutons que, dans l'art. 4 de la loi du 8

nivôse an 2, qui attribuait aux tribunaux de famille la connaissance des contestations relatives aux droits des époux divorcés, et qui est antérieure à celle des 4 et 5 floréal que nous venons de citer, le législateur avait prescrit le même délai de dix mois dans la même vue. Voici l'article: S'il est constaté que le mari ait abandonné depuis DIX MOIS son domicile et sa femme, celle-ci pourra contracter un nouveau mariage aussitôt après le divorce.

» L'ancienne et la nouvelle législation s'accordent donc pour fixer à dix mois l'intervalle requis pour l'intérêt des mœurs et de l'état civil des citoyens, pour prévenir toute équivoque de paternité, toute ambiguité d'origine. Au-delà de cet invervalle, l'épouse qui a survécu à son mari, comme celle qui a rompu les nœuds qui l'attachaient au sien, peut impunément contracter un nouveau mariage.

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L'appelante, qui a religieusement respecté cet intervalle de dix mois, avant de former un nouveau lien, a rempli ce que les lois anciennes et modernes lui prescrivaient. Elle n'a donc pas dû, elle ne doit donc pas être atteinte par des peines qu'elle n'a point encourues. Elle est donc exempte de tout reproche, aux termes mêmes du droit romain.

>> La contravention aux lois est donc péremptoirement démontrée, sous ce premier point de vue.

>> Démontrons actuellement avec le même succès, que les nouvelles lois, en matière de succession, et notamment celle du 17 nivôse

an 2,

ont entièrement abrogé tout ce que le droit ancien avait de contraire aux dispositions que renferme cette dernière loi sur cette matière, la plus importante du droit civil; et que, sous ce second point de vue, Marie-Anne Lafon doit non moins péremptoirement obtenir la réformation du jugement rendu contre elle.

>> Posons d'abord, pour constant en fait, que la loi du 17 nivôse an 2 était en pleine vigueur dès le mois de pluviôse suivant, et par conséquent en fructidor même année, à l'époque où Marie-Anne Lafon, plus de dix mois après le décès de son premier mari, en prit légalement un second; et que par conséquent encore, Marie-Anne Lafon n'a point à craindre ici qu'on lui reproche de se retrancher derrière l'effet rétroactif de cette célèbre loi.

» Or, quelles sont les dispositions de cette loi du 17 nivôse, relatives à la question qui nous occupe? On a cru, ou peut-être on a eu l'air de croire, que l'art. 12 était le seul qui abrogeât explicitement les peines des secondes noces. Après avoir tiré de cet art. 12 tout le parti dont a besoin Marie-Anne Lafon l'intérêt pour

de sa cause, elle en fera remarquer un autre

TOME V.

qui, dans son universalité, exclusive de toute exception, abroge, en matière de succession, toute autre loi que celle dont il fait partie.

>> Mais commençons par analyser l'art. 12, et voyons si Marie-Anne Lafon ne trouve pas, comme elle le soutient, dans sa contexture, de quoi démontrer l'explicite abolition des peines des secondes noces.

>> Cet article est ainsi conçu: Est réputée non écrite toute clause impérative ou prohibitive insérée dans les actes passés, même avant le décret du 5 septembre 1791, lorsqu'elle est contraire aux lois et aux mœurs, lorsqu'elle porte atteinte à la liberté religieuse du donataire, de l'héritier ou du légataire, LORSQU'ELLE GÊNE LA LIBERTÉ QU'IL A, SOIT DE SE MARIER, OU DE SE REMARIER, même avec des personneS DÉSIGNÉES, soit d'embrasser tel état, emploi ou profession; ou lorsqu'elle tend à le détourner de remplir les devoirs imposés et d'exercer les fonctions déférées par les lois aux citoyens. » Le résultat que présente ce texte dans son ensemble et dans ses détails, est aussi clair et aussi précis qu'on puisse le désirer: Est réputée non écrite, toute clause prohibitive, lorsqu'elle gêne la liberté qu'on a de se remarier.

» Ces dernières expressions sont, si l'on peut ainsi dire, sacramentelles. La liberté qu'on a de se remarier! Ces mots tombent évidemment à-plomb sur les secondes noces. Si on a la liberté de se remarier, ou, ce qui en est le synonyme, de passer à de secondes noces, on le peut donc impunément; les peines que l'ancien droit avait attachées aux secondes noces, sont donc abolies, par voie de conséquence aussi nécessaire qu'irré. sistible; car il impliquerait de faire concourir sur le même objet, et la liberté d'action, et la pénalité de cette action. Ce sont deux choses incompatibles, qui se détruisent réciproquement. Qui est-ce qui ignore, en effet, que deux contraires ne peuvent point co-exister dans le même sujet? Or, si deux choses sont contraires, c'est bien évidemment qu'un fait soit permis,

et que néanmoins une peine y soit attachée. Id omne licitum est, disent les auteurs, quod non legibus prohibitum ; quamobrem quod lege permittente fit, pœnam non meretur. Il serait donc absurde que le moderne législateur eût permis et rendu licites les secondes noces, et qu'il eût laissé subsister les peines de ce nom. Il est donc démontré que le législateur moderne, en consignant dans sa nouvelle loi, qu'on a la liberté de se remarier, a, par cela même, fait cesser les peines antérieurement attachées

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se remarier sans attendre aucun de ces délais qui avaient été commandés par les lois romaines. Qu'il soit plus ou moins dans l'intérêt des mœurs, de laisser subsister ce que les anciennes lois ont appelé la religion du Deuil, luctus religionem, c'est une question de morale qui n'est pas à juger en ce moment, où il ne s'agit que du sens de la loi, et de la latitude d'expression dans laquelle elle a été rédigée. On a la liberté de se remarier, sans restriction, sans limitation quelconque ; et par conséquent nulle peine ne saurait être attachée à l'inobservation d'un dé. lai qui n'est plus exigé par la loi.

» C'est ici le lieu de répondre à une objection spécieuse au premier aspect, et qui, quoiqu'elle n'ait rien de solide, n'a pas laissé de réussir au tribunal de première instance.

» Cette objection consiste à s'accrocher minutieusement au mot clause, qui se trouve dans la première ligne de l'art. 12 de la loi du 17 nivôse; à dénaturer ce mot, à la faveur de l'autorité de Ferrière, l'auteur du Dictionnaire de pratique, et à en conclure qu'il résulte de cette définition, que le mot CLAUSE suppose une stipulation de la part de l'homme, et ne peut comprendre dans sa valeur la disposition d'une

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Or, il est évident que, dans l'art. 12 de la loi du 17 nivôse, le législateur a voulu abolir les clauses prohibitives qui gênaient la liberté de se marier ou de se remarier, lesquelles clauses ne sont pas du nombre de celles qui supposent une stipulation.

» Mais, dit-on, la prohibition des secondes noces avait deux manières d'être dans l'ancien droit: 1o elle existait dans la loi 2, C. de secundis nuptiis; 2o elle pouvait exister dans les clauses des actes de dernière volonté. Or, ce n'est que ce dernier mode d'existence que la loi a voulu abolir, et qu'elle a aboli en effet. Le premier, la prohibition écrite dans la loi du Code romain, a été maintenu. Donc l'art. 12 de la loi du 17 nivôse n'a pas atteint la loi 2, C. de secundis nuptiis.

» Nous accordons que, dans l'ancien droit, la loi prohibait d'elle-même les secondes noces avant la fin du Deuil, et que souvent, dans les

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» La loi avait pourvu à la prohibition des secondes noces pendant le Deuil; à quoi bon les prohiber de nouveau dans les actes? C'est qu'on faisait, dans cette circonstance, ce que le cœur humain fait toujours, lorsqu'il veut fortement quelque chose on corroborait la volonté de la loi, de sa volonté personnelle. C'est comme si l'on eût dit : La loi prohibe les secondes noces, à la bonne heure; mais mon intention est si bien qu'on ne puisse se remarier dans la durée de son Deuil, que, quand même la loi n'y aurait pas pourvu, j'y pourvoirais par une volonté dernière que je manifeste dans la présente disposition.

» Il en était de ces prohibitions écrites dans les actes, comme il en est tous les jours des clauses de garantie stipulées dans les actes de vente. Ces clauses, sans doute, sont assez oiseuses, puisque indépendamment de toute stipulation écrite de garantie, la loi a pourvu aux intérêts de l'acquéreur, en cas d'éviction. Or, supposons qu'il plût aujourd'hui à nos législateurs d'abolir les clauses de garantie en matière de contrats de vente; quel est l'homme de bon sens qui ne vouerait pas au mépris et au ridicule une distinction pareille à celle que nous combattons, et qui n'aurait pas pitié de celui qui prétrendrait que le législateur n'aurait aboli que la garantie résultante de la stipulation, et non la garantie résultante de la loi?

>> La stipulation de garantie, comme la prohibition écrite des secondes noces, sont purement oiseuses: on ne pourra pas le nier, puisqu'elles ne font que répéter la volonté de la loi. Et l'on pourrait soutenir de bonne foi qu'en abolissant la volonté répétée et corroborée, le législateur n'a pas aboli la volonté muette; que lorsqu'il a fait cesser la volonté double, il a maintenu la volonté simple; que, lorsqu'il a abrogé le plus, il a laissé subsister le moins! Ce serait faire insulte à la pensée du législateur, qui, d'ailleurs, n'a rien laissé à désirer dans l'énoncé de son intention, en proclamant, après les termes dont nous venons de pulvériser l'équivoque factice, ce principe de la loi naturelle, que rien ne doit gêner la liberté qu'on a de se remarier.

>> En voilà sans doute plus qu'il n'en faut pour ruiner de fond en comble la seule objection spécieuse que la question qui nous occupe puisse présenter. Nous ne pensons pas qu'il puisse rester, après cette analyse, le moindre doute sur

l'abolition complète des peines des secondes noces, résultantes de l'art. 12 de la la loi du 17 nivôse an 2 ; mais s'il en restait encore, il serait contraint de céder à la force de la disposition de l'art. 61 de cette même loi, ainsi conçu Toutes lois, coutumes, usages et statuts relatifs à la transmission par succession ou donation, sont également déclarés abolis.

>> Qu'on remarque bien, qu'on pèse bien cette énonciation, toutes les lois relatives à la transmission des biens par succession. Qui dit tout, n'excepte rien. La loi romaine, C. de secundis nuptiis, qu'on ne contestera pas être relative à la transmission des biens par succession, est donc comprise dans l'universalité de cette expression, toutes lois.

» Pour oser prétendre, après une énonciation aussi générale, que la loi romaine dont il s'agit, n'est pas comprise dans l'abrogation, toutes les Lois, il faudrait pouvoir produire une exception spéciale et nominative en sa faveur, soit dans la loi du 17 nivôse, soit dans une loi postérieure; et l'on en défie.

» En effet, cette expression, toutes lois, embrasse tout, comprend tout, enveloppe tout, englobe tout, sans rien exclure, sans rien excepter; à compter de la promulgation de la loi du 17 nivôse, les dispositions de cette loi sont devenues la règle unique de la transmission des biens par succession, à l'exclusion de toutes autres lois ».

Tels étaient les moyens employés par MarieAnne Lafon, pour faire réformer le jugement qui la déclarait déchue de l'institution contenue dans le testament de son premier mari. Mais le tribunal civil du département de Lot-et-Garonne a considéré,

9,

io Qu'aux termes de la loi 2, liv. 5. tit. du Code, la femme qui se remarie dans l'espace d'un an après la mort de son mari, est privée de tous les avantages qu'elle a reçus de lui ; qu'on ne pouvait pas dire que cette loi fût abrogée par les lois relatives au divorce, qui ont fixé à dix mois l'époque où la femme divorcée peut se remarier; que ces lois n'ont pu avoir en vue que l'ordre des familles, et non le devoir des époux l'un envers l'autre ;

» 2o Qu'on ne pouvait voir l'abrogation de la loi romaine qui prive la femme des avantages que son marilui a faits, lorsqu'elle convole dans l'an du Deuil, dans les lois des 5 septembre 1791, 3 brumaire et 17 nivôse an 2, puisque ces lois ne parlent que de clauses prohibitives de se marier ou remarier, ne s'agissant pas ici d'une clause d'un acte, ni même d'une loi qui prohibe de se remarier, mais seulement d'un délai prescrit pour se remarier, délai qui n'a

pour base que les bonnes mœurs et l'honnêteté publique ;

>>30 Que ces lois ne portant point une abrogation expresse des peines des secondes noces dans l'an du Deuil, et l'art. 61 de celle du 17 nivôse ne parlant que de l'ordre de succession établi par cette loi, on ne pouvait pas dire que l'institution d'héritière faite au profit de l'appelante par son mari, devait être maintenue, puisqu'il ne s'agissait pas ici d'un ordre de suc cession, mais seulement de la qualité de la personne qui succède et de son aptitude à succéder ».

En conséquence, par jugement du 7 ventôse an 7, ce tribunal a confirmé celui de première instance,

Marie-Anne Lafon s'est pourvue en cassation contre ce jugement; et elle a répété devant la cour de casssation les trois moyens qu'elle avait inutilement fait valoir devant le tribunal d'appel.

Après une instruction et une plaidoirie contradictoires, la section civile, a rendu, le 3 brumaire an 9, au rapport de M. Babille et sur les conclusions de M. Arnaud, un arrêt ainsi

conçu :

་ Attendu que le jugement attaqué, loin de violer la loi 2, au Code, de secundis nuptiis, en a, au contraire, littéralement appliqué la disposition, en annulant l'institution d'héritière universelle faite en faveur de la demanderesse par son premier mari, pour s'être remariée avant l'expiration de l'an du Deuil; et que les lois de nivôse et de floréal an 2, sur le divorce, ne sont pas applicables hors de leur cas;

» Attendu qu'en annulant ainsi cette institution universelle d'héritier, le jugement attaqué n'a pas violé l'art. 12 de la loi du 17 nivôse an 2 relatif seulement aux dispositions de l'homme, et non à celles de la loi dont il s'agit uniquement dans l'espèce ; et qu'il n'y a pas de violation formelle de l'art. 61 de la même loi; » Par tous ces motifs, le tribunal rejette le pourvoi de Marie-Anne Lafon, veuve Bonne

mort.....

V. l'article Secondes noces, §. 2.

§. II. Quelle est aujourd'hui l'autorité des lois romaines dont il est parlé dans le §. précédent.

Ces lois sont abrogées par le Code civil. V. le Répertoire de jurisprudence, au mot Deuil, §. 1.

DEVOLUTION COUTUMIÈRE. §. I. Quels étaient, dans le pays de Liège, avant la publication de la loi du 8-13 avril 1791, sur les

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