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la justice des demandes adressées par la France au Gouvernement prussien, ajoutant que c'était pour cela qu'elle désirait que les Cabinets qui avaient employé leurs « bons offices » à obtenir du Gouvernement prussien la renonciation du prince Léopold, exprimassent également, par quelque manifestation publique, leur sentiment sur ces dispositions conciliantes et pacifiques montrées par le roi de Prusse. >>

Le comte de Bismarck observa alors que, par une voie non officielle et en dehors du baron de Werther, il avait reçu de Paris l'avis que la solution de la difficulté espagnole ne suffirait pas pour désintéresser le Gouvernement français, et que d'autres réclamations seraient présentées. Si tel était le cas, ajoute-t-il, il serait évident que la question de succession au trône espagnol n'a été qu'un prétexte, et que le véritable but de la France n'est que de chercher la revanche de Königsgraetz.

L'opinion de la nation allemande, a dit le comte, est qu'elle est pleinement de force à se mesurer avec la France, et elle n'a pas moins de foi dans la victoire que n'en peuvent avoir les Français. Le sentiment de la Prusse et de l'Allemagne est donc qu'elles ne doivent subir aucune humiliation ou insulte de la part de la France, et que si elle s sont injustement provoquées, elles doivent accepter le combat.

Mais, a poursuivi Son Excellence, nous ne désirons pas la guerre, et nous avons montré, nous continuerons à montrer nos pacifiques dispositions; en même temps, cependant, nous ne pourrons laisser les Français nous devancer dans la voie des armements. Je sais positivement que des préparatifs militaires ont été faits, et se font encore en France. On y concentre des masses de munitions, on y achète en grand du foin et d'autres provisions de guerre ; on y rassemble des chevaux. Si ces préparatifs continuaient, nous serions obligés de demander au Gouvernement français des explications sur leur objet et sur leur signification.

Après ce qui vient de se passer, nous devons demander quelque assurance, quelque garantie que nous ne serons pas exposés à une attaque soudaine; il faut que nous sachions que cette difficulté espagnole une fois écartée, il ne reste pas d'autres desseins secrets qui puissent éclater sur nous comme un coup de tonnerre.

Le comte de Bismarck déclara ensuite qu'à moins que quelque assurance, quelque garantie ne soit donnée par la France, soit aux Puissances européennes, soit dans une forme officielle quelconque, que la présente solution de la question espagnole était considérée par elle comme un arrangement définitif et satisfaisant, et qu'elle ne mettrait pas en avant d'autres griefs, et qu'en outre le Gouvernement français ne retirât ou n'expliquât d'une manière satisfaisante

le menaçant langage tenu par M. le duc de Gramont, le Gouvernement prussien serait obligé de demander des éclaircissements à la France. Il est impossible, ajouta Son Excellence, que la Prusse puisse tranquillement et avec soumission rester sous le coup de l'affront fait au Roi et à la nation par le menaçant langage du Gouvernement français; je ne pourrais, dit-il, entretenir de communications avec l'ambassadeur de France après le langage tenu à la Prusse par le Ministre des Affaires étrangères en face de l'Europe.

Votre Seigneurie peut voir, par les observations ci-dessus du comte de Bismarck, que si quelque conseil opportun, quelque main amie n'intervient pas pour apaiser l'irritation qui existe entre les deux gouvernements, la brèche, au lieu d'être fermée par la solution de la difficulté espagnole, ne fera probablement que s'élargir.

Il est évident pour moi que le comte de Bismarck et le ministère prussien regrettent l'attitude prise et les dispositions montrées par le roi de Prusse à M. Benedetti, et qu'en regard de l'opinion publique en Allemagne, ils sentent la nécessité de quelques mesures fermes pour sauvegarder l'honneur de la nation.

Le seul moyen de guérir la blessure faite à l'orgueil allemand et de rétablir la confiance au maintien de la paix, serait une déclaration du Gouvernement français, constatant que l'incident espagnol est réglé d'une manière satisfaisante, rendant justice aux dispositions modérées et pacifiques du roi de Prusse et de son Gouvernement, et ajoutant qu'il y a tout lieu d'espérer qu'aucune influence perturbatrice ne viendra plus altérer les bonnes relations existant entre les deux gouvernements. Je crains beaucoup que si des influences médiatrices ne peuvent être victorieusement mises en œuvre auprès du Gouvernement français pour apaiser l'irritation contre la Prusse ct pour conseiller la modération, la guerre ne devienne inévitable.

Extrait.)

N° 119.

LORD BLOOMFIELD AU COMTE DE GRANVILLE.

Vienne, le 13 juillet 1870.

J'ai vu le comte de Beust aujourd'hui. Son Excellence ne croit pas que le retrait de la candidature suffise pour arrêter le Gouvernement français. Il me répéta ce qu'il m'avait dit en différentes occasions, à savoir qu'il avait fait son possible pour dissuader la France de pousser les choses à l'extrême; mais il doutait du succès de ses efforts. Son Excellence ajouta que peut-être personne mieux que lui n'était en mesure de juger l'état de l'opinion dans les Etats du Sud, et qu'il était convaincu que si la France comptait sur les sympathies de ces Etats, elle commettrait une grande erreur.

Aussi, dans le but de la détourner de chercher quelque appui de ce côté, il avait jugé bon, dans l'intérêt de la paix, de porter cette conversation à la connaissance du Gouvernement français.

(Télégramme.)

N° 120.

LE COMTE BENEDETTI AU DUC DE GRAMONT.

Ems, le 14 juillet 1870, 12 heures 30 minutes soir.

J'ai reçu dans la nuit votre télégramme d'hier soir neuf heures quarante-cinq minutes. Après la déclaration que le Roi m'a faite hier par un de ses aides de camp, je ne pouvais m'adresser de nouveau à S. M. J'ai profité ce matin d'un entretien que j'ai eu avec le ministre de l'intérieur pour bien préciser, en m'inspirant de vos dernières déclarations, comment nous entendions l'assurance que nous demandons au Roi et les formes diverses dans lesquelles elle pourrait nous être donnée. Le ministre m'a exprimé l'intention de soumettre mes observations à S. M., et il m'a même promis de me revoir. Il vient cependant de me faire uniquement savoir qu'il n'a rien à m'apprendre.

Afin de ne pas manquer aux convenances, j'ai prié l'aide de camp de service d'annoncer au Roi que je partais ce soir, et j'ai exprimé le désir de prendre congé de S. M. Le Roi m'a fait répondre qu'il me verra, dans le salon qui lui est réservé à la gare, quelques instants avant son départ. S. M. part, en effet, à trois heures pour aller, dit-on, à Coblence faire une visite à la Reine. Reviendra-t-il dans la soirée, comme on l'annonce, ou bien quitte-t-il définitivement Ems pour rentrer à Berlin? Je ne saurais vous le dire.

Un télégramme daté d'ici, publié par la Gazette de Cologne et que la télégraphie privée nous apporte ce matin, raconte que le Roi a chargé hier un de ses aides de camp de me déclarer qu'il ne prendrait aucun engagement pour l'avenir, et qu'il avait refusé de me recevoir pour continuer avec moi la discussion à ce sujet. Comni je n'en avais fait la confidence absolument à personne, je suis autorisé à croire que ce télégramme est parti du cabinet du Roi. Il me revient que, depuis hier, on tient dans son entourage un langage regrettable.

Je serai à Paris demain matin, à dix heures quinze minutes, et je me rendrai directement au ministère. Je ne pourrais pas arriver plus tôt en prenant un train spécial.

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N° 121.

(Télégramme.)

LE COMTE BENEDETTI AU DUC DE GRAMONT.

Ems, le 14 juillet 1870, 2 heures soir.

Il paraît certain que le Roi reviendra ce soir de Coblentz et qu'il partira demain matin pour Berlin, avançant son retour dans sa capitale de quelques jours.

N° 122.

LE COMTE BENEDETTI AU DUC DE GRAMONT.

(Télégramme.)

Ems, le 14 juillet 1870, 3 heures 45 minutes soir.

Je viens de voir le Roi à la gare. Il s'est borné à me dire qu'il n'avait plus rien à me communiquer, et que les négociations qui pourraient encore être poursuivies seraient continuées par son gouvernement. Sa Majesté m'a confirmé que son départ pour Berlin aura lieu demain matin.

No 123.

LE COMTE DE GRANVILLE A LORD LYONS, A PARIS.

Foreign-Office, le 14 juillet 1870.

Mylord, j'ai reçu votre dépêche, en date du 13 (1), au sujet du télégramme reçu par M. de Gramont, de Stuttgard.

Vous avez très-à-propos déclaré que vous pouviez tout d'abord contredire ce fait sur le compte même de son improbabilité; néanmoins, je vous ai télégraphié tout aussitôt et je répète encore dans la présente dépêche que je n'ai jamais rien dit de semblable, et que vous êtes autorisé à contredire cette assertion de la manière la plus formelle.

J'écris dans le même sens à lord Loftus et à M. Gordon.

J'ai, etc.

(1) N° 117.°

ARCH. DIPL. 1871-1872-I.

Signé: GRANVville.

9

N° 124.

LE COMTE DE GRANVILLE A LORD LYONS, A PARIS.

Foreign-Office, le 14 juillet 1870.

Votre conversation avec le duc de Gramont, rapportée dans votre dépêche du 13 courant (1), a causé beaucoup d'inquiétude au Gouvernement de la Reine. Le duc de Gramont, paraît-il, dans le cours de cette conversation, après votre question si, dans le cas où le roi de Prusse défendrait au prince Léopold de Hohenzollern de revenir sur sa résolution de retirer sa candidature, l'accident serait entièrement terminé, le duc de Gramont, dis-je, aurait mis entre vos mains un mémorandum conçu en ces termes : « Nous demandons au roi de Prusse de défendre au prince de Hohenzollern de revenir sur sa résolution. S'il le fait, tout l'incident est terminé. »

Le duc de Gramont, paraît-il, demanda alors à Votre Excellence si la France pouvait compter sur les bons offices de l'Angleterre pour l'aider à obtenir du Roi cette défense.

Le Gouvernement de Sa Majesté approuve entièrement la réserve que vous avez gardée en refusant de répondre à cette question avant d'en avoir référé au Foreign-Office, et, en général, le langage que vous avez tenu dans cette conversation.

J'ai déjà informé Votre Excellence par télégraphe, et je répète maintenant que dans l'opinion du Gouvernement de Sa Majesté, une demande à la Prusse pour un engagement couvrant l'avenir ne peut être justement faite par la France. Néanmoins, et quoique, dans l'opinion du Gouvernement de Sa Majesté, la France, ayant obtenu la substance de ce qu'elle réclamait, ne devrait dans aucun cas insister jusqu'à l'extrême sur la forme dans laquelle cela a été obtenu, le Gouvernement de la Reine, a immédiatement et avec insistance recommandé au roi de Prusse que si la demande de la France (concernant l'avenir) est abandonnée, il veuille bien communiquer à la France son adhésion à la renonciation de la candidature du prince Léopold.

Cette recommandation a été mise sous les yeux du Roi, de la part du Gouvernement de la Reine, dans les termes suivants, savoir que comme Sa Majesté avait consenti à l'acceptation par le prince Léopold de la couronne d'Espagne et ait ainsi, en quelque sorte, pris part à cet arrangement, Elle pourrait ainsi, sans blesser sa propre dignité, faire connaître au Gouvernement français son (1) No 116.

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