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No 187.

LE COMTE DE GRANVILLE A LORD BLOOMFIELD, A VIENNE.

Foreign-Office, le 19 juillet 1870.

Mylord, le comte Apponyi est venu me voir le 15 courant et m'a annoncé que le comte de Beust avait adressé une dépêche à l'ambassadeur d'Autriche, à Berlin, pour lui donner ordre de faire tous ses efforts en vue du maintien de la paix. Son Excellence a bien voulu me lire la dépêche en question, dont voici la substance:

Le comte de Beust fait observer que lorsque le Gouvernement austro-hongrois fut informé, il y a quelque temps, qu'il était question d'offrir la couronne d'Espagne au prince de Hohenzollern, il ne crut pas qu'il y avait lieu d'exprimer son opinion à ce sujet, mais que, ayant appris aujourd'hui que la candidature du prince était un fait accompli, il se croyait tenu d'exprimer ses sentiments, et, jusqu'à un certain point, ses craintes. Son seul objet était le maintien de la paix en Europe. Il n'a aucun intérêt spécial avec l'Espagne; il a évité de se mêler de la question de succession au trône vacant, et a surtout pris soin d'éviter de réveiller le souvenir qu'une branche de rois de la race des Hapsbourg avait régné en Espagne. La question espagnole n'intéressait l'Autriche qu'au même point de vue que le reste du monde, simplement à cause de la crainte qu'elle n'amenât le trouble dans la paix européenne.

Il y avait néanmoins de bonnes raisons de croire que ce danger pouvait sortir de la candidature du prince, de Hohenzollern. La nation française qui, jusqu'alors, avait comprimé les susceptibilités qu'avait éveillées chez elle l'agrandissement de la Prusse, serait sérieusement inquiétée par toute tentative de gagner l'Espagne à l'influence de la Prusse en plaçant sur le trône un roi lié en ligne collatérale avec la famille royale de Prusse. Des renseignements venus de France ne laissent aucun doute sur l'opposition bien décidée que rencontrera une pareille tentative, opposition qui pourrait soulever une guerre civile en Espagne et un dangereux désaccord entre deux des principales puissances de l'Europe.

En présence de semblables éventualités, le comte de Beust exprime sa satisfaction toute particulière d'apprendre que l'Empereur avait donné ordre que des représentations fussent faites à ce sujet, sous une forme toute amicale, au roi de Prusse, en exprimant sa conviction qu'il dépendait de la sagesse de Sa Majesté et de son influence comme chef de la famille des Hohenzollern de prévenir une compli

cation si sérieuse. Si fort est, de la part du Gouvernement austrohongrois, le désir de la paix, et si sérieuses sont ses craintes des conséquences de l'acceptation du trône d'Espagne par le prince de Hohenzollern, qu'il se sent obligé d'exercer tous ses efforts dans ce but Le baron de Münch a été, en conséquence, chargé, d'une part, de ne pas cacher aux hommes d'État de la Prusse l'opinion du Gouvernement austro-hongrois que la candidature du prince de Hohenzollern entraînait un grand danger, et d'autre part, d'exprimer la ferme confiance que l'amour du roi de Prusse pour la paix, son jugement sain préviendraient l'introduction dans la politique d'un nouveau et puissant élément de discorde.

J'ai fait part au comte Apponyi de la manière de voir du Gouvernement de Sa Majesté et des démarches que nous faisons pour engager le Gouvernement français à ne pas agir précipitamment, et pour persuader aux Gouvernements de la Prusse et de l'Espagne, sans pour cela chercher à leur imposer quoi que ce soit, d'envisager sérieusement toutes les phases importantes de cette grave question.

Le comte Apponyi a approuvé cette politique, et m'a assuré qu'aucuns efforts ne seraient négligés par le Gouvernement autrichien pour maintenir la paix de l'Europe.

Je suis, etc.

No 188.

Signé GRANVIlle.

LE COMTE DE GRANVILLE A LORD BLOOMFIELD, A VIENNE.

Foreign-Office, le 19 juillet 1870.

Mylord, à l'égard de ma précédente dépêche de ce jour, je dois vous dire que le comte Apponyi, en même temps qu'il me donnait lecture de la dépêche au baron de Münch, m'a également lu un télégramme que le comte de Beust a adressé au comte Dubsky, à Madrid, et une note au prince de Metternich, à Paris.

Au comte Dubsky, le comte de Beust dit que le ministre espagnol lui a fait part du désir du Gouvernement de Madrid de proposer aux Cortès la candidature du prince de Hohenzollern, ajoutant que cette candidature ne devait donner aucune inquiétude, et que le Gouvernement ne faisait que se conformer à la volonté du pays. Le comte de Beust a répondu que l'idée pouvait être excellente, mais que l'effet en serait déplorable, qu'il n'avait pas jusqu'ici connaissance qu'aucune

manifestation populaire ait eu lieu en faveur d'une combinaison qui était compromettante pour la paix de l'Europe; qu'il espérait que la nation et le Gouvernement espagnols pèseraient sérieusement l'appel que faisait le Gouvernement français à leur sagesse et à leur amitié; et qu'enfin aucun soupçon ne saurait être attaché à une opinion exprimée par le Gouvernement austro-hongrois, qui avait convenablement fait preuve du plus complet désintéressement et de sa non-intervention dans les affaires d'Espagne.

En écrivant au prince de Metternich, le comte de Beust exprime ses craintes sur la situation des affaires, et tout en repoussant aucune prétention de juger les intérêts engagés, justifie par son zèle, pour le maintien de la paix de l'Europe, la part active qu'il a prise en s'associant aux efforts qui ont été faits pour détourner des résultats déplorables. Il ajoute que, aussitôt qu'il a été informé du désir du duc de Gramont qu'il fasse des démarches conciliatrices à Berlin, il a adressé des instructions dans ce sens au baron de Münch, et qu'il avait, en même temps, signalé au Gouvernement espagnol le danger du but qu'il poursuivait.

Le Gouvernement austro-hongrois avait donc ainsi, sans hésitation, plaidé la cause de la paix en s'efforçant d'écarter la cause qui, non sans raison, avait inquiété le Gouvernement français, et il avait pu informer le chargé d'affaires de France, qui, par ordre de son Gouvernement, avait suggéré quelque action diplomatique d'accord avec les désirs du Gouvernement français, que la chose avait été déjà faite. Le Gouvernement britannique a tenu à Berlin un langage presque identique au sien, et il était persuadé que les autres Cabinets, s'ils n'avaient pas déjà imité cet exemple, le feraient sans retard.

La voix de l'Europe s'élèverait sans doute avec unanimité en faveur de la paix, et il paraît évident que la solution simple de la question consisterait dans le retrait de la candidature du prince de Hohenzollern, qui n'avait pas été accueillie avec enthousiasme en Espagne, et ne satisfaisait à aucune des principales exigences de la situation.

La solution proposée ne compromettrait aucun intérêt, n'impliquerait aucun sacrifice, pas même celui de dignité personnelle de la part du prince, dont la renonciation serait universellement interprêtée en sa faveur. Ces considérations auraient incontestablement un grand poids à Berlin et à Madrid, et le Gouvernement austro-hongrois avait assez de confiance dans la sagesse du Gouvernement de Berlin, pour croire qu'il n'hésiterait pas à donner une preuve concluante de ses dispositions conciliantes, en déclarant simplement qu'il est étranger à ce qui se passe en Espagne, et en usant de toute son influence pour amener le retrait de la candidature mise à Madrid en avant d'une façon aussi inattendue qu'inopportune. D'un autre

côté, le Gouvernement austro-hongrois est convaincu que la France, tout en étant soucieuse de sa propre dignité, s'abstiendra d'augmenter, par son attitude, les dangers de la situation.

Il est facile de comprendre que le Gouvernement français insiste pour que l'on ait égard aux intérêts manifestes qu'il est tenu de défendre dans cette circonstance, mais sa modération ne dérogerait en rien à la fermeté de son langage, et lui gagnerait de nouveaux droits aux sympathies des puissances qui sont d'avis que la paix publique ne soit pas troublée par des combinaisons imprévues.

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Le duc de Gramont m'a dit cette après-midi que le comte de Bray, ministre des Affaires étrangères de Bavière, avait proposé l'idée que le roi de Prusse donnât une assurance générale que, dans le cas de la couronne d'Espagne, il observerait le même principe que celui qui avait été adopté par la France, lorsque la couronne de Belgique fut offerte au duc de Nemours, et par l'Angleterre, lorsque le prince Alfred fut élu roi de Grèce. Cette proposition avait été approuvée par le ministre de Prusse à Munich, et avait, M. de Gramont le croyait, été recommandée au roi de Prusse par le Gouvernement de Sa Majesté. Le Roi l'aurait néanmoins péremptoirement repoussée. Tel était, dit M. de Gramont, le résumé des renseignements qu'il avait reçus de Munich.

Je lui répondis que le ministre de la Reine, à Munich, avait annoncé à Votre Seigneurie que le comte Bray avait suggéré quelque assurance générale de ce genre de la part de la Prusse comme solution de la question, mais qu'il ne connaissait rien d'autre que le simple fait d'une pareille proposition faite par le comte Bray.

No 190.

LORD LYONS AU COMTE DE GRANVILLE.

Paris, le 19 juillet 1870.

Mylord, depuis que la guerre a paru devoir être imminente entre la France et la Prusse, je n'ai pas manqué de signaler au Gouvernment l'importance pour lui d'agir libéralement à l'égard du commerce des Neutres. J'ai parlé particulièrement cette après-midi sur ce sujet avec M. de Gramont, afin d'avoir une parfaite assurance que tout égard convenable sera montré pour les intérêts des Neutres.

M. de Gramont me dit que le droit des gens serait scrupuleusement observé par la France, et que je pouvais être assuré que tous les égards seraient pris en ce qui concerne les intérêts des Neutres.

Il n'était pas encore en mesure d'entrer dans les détails, mais il mentionna qu'on avait eu d'abord l'intention d'accorder trois semaines aux bâtiments marchands pour quitter les ports français, mais que probablement ce délai serait porté à quatre semaines.

Je lui répondis que j'avais toute raison de croire qu'il était probable qu'un plus long délai, de six semaines peut-être, serait accordé par la Prusse. M. de Gramont me dit que, dans les circonstances actuelles, il était naturellement impossible d'en venir à une entente avec la Prusse, mais qu'il était possible que le délai proposé maintenant par la France fut étendu. Il ne pouvait, pour le moment, me donner aucun renseignement positif, mais il enverrait une réponse satisfaisante à ma note d'avant-hier, et m'informerait au plus tôt des intentions du Gouvernement. Dans le fait, une déclaration publique paraîtrait bientôt à cet égard. J'ai, etc.

No 191.

Signé: LYONS.

(Extrait.)

SIR H. HOWARD AU COMTE DE GRANVILLE.

Munich, le 49 juillet 1870.

Le ministre de la guerre de Bavière a présenté. hier, à la Chambre des députés, une demande de subsides extraordinaires pour

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