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auraient été une trahison à la cause nationale. Le patriotisme des Chambres et du pays a déjoué ce calcul. Au Corps législatif. la droite et la gauche ont rivalisé d'ardeur pour pousser jusqu'à leur dernière limite la vigueur et l'esprit de dévouement de la France.

Le nouveau ministère a trouvé dans les représentants du pays le concours le plus actif et le plus loyal.

La séance du 10 août marquera parmi les plus nobles journées de nos annales parlementaires. Jamais nation n'a obéi à des sentiments plus élevés. Cette attitude des Chambres a été pour nos troupes un encouragement et une récompense. Nos soldats sentent qu'ils ont derrière eux la nation tout entière, et que l'heure approche où l'ennemi sera chassé de nos foyers!

Sous le rapport diplomatique, l'ensemble de la situation témoigne des efforts efficaces qui ont été faits pour mettre sur un bon pied nos relations avec les puissances en ce qui touche la crise actuelle. Au début de la lutte, le comte de Bismarck poursuivait les combinaisons suivantes :

1° Eveiller contre nous les susceptibilités de l'Angleterre, sous prétexte des affaires de Belgique;

2o Cimenter une alliance entre la Prusse et la Russie;

3° Nous brouiller avec l'Espagne à propos de l'incident Hohenzollern;

4o Nous aliéner l'Italie au sujet de la question romaine. L'ensemble de ce plan a complétement échoué.

L'Angleterre, pleinement rassurée par nos déclarations si nettes et si loyales, vient de signer avec nous un traité qui nous est aussi utile qu'à la Belgique elle-même, et qui assure notre frontière du Nord.

La Russie non-seulement n'a pas signé de traité avec la Prusse, ainsi que M. de Bismarck l'espérait, mais l'opinion publique, dans toute l'étendue de l'empire du czar, a montré une attitude de plus en plus défavorable à l'extension exagérée de la monarchie prussienne.

Bien loin de nous être hostile, l'Espagne ne nous a témoigné que des dispositions empreintes de la cordialité la plus parfaite.

Il en a été de même de l'Italie. D'accord avec le cabinet de Florence, nous nous sommes replacés sur le terrain de la convention du 15 septembre, et la solution intervenue s'est accomplie à la satisfaction commune, sans soulever la moindre difficulté,

Ainsi donc, ni à Londres, ni à Saint-Pétersbourg, ni à Madrid, ni à Florence M. de Bismarck n'a réussi dans le programme qu'il s'était tracé:

Les sympathies du Danemark à notre égard continuent à être aussi vives qu'avant la guerre; notre escadre est devant le port de Kiel, et de grands événements auront lieu de ce côté.

Les armements de l'Autriche et de l'Italie se complètent.

Il ne saurait être question un instant de négociations pacifiques. Au moment où la guerre ne fait que commencer, où le sentiment national se prononce avec une énergie admirable, l'idée d'une défaillance ne peut venir à aucun Français.

Nos relations avec l'étranger sont ce qu'elles doivent être, et le nouveau ministre des Affaires étrangères trouvera le terrain bien préparé pour poursuivre l'œuvre commencée par son prédécesseur.

N° 334.

LE COMTE DE GRANVILLE A LORD LYONS, A PARIS.

Foreign-Office, le 16 août 1870.

Mylord, M. de La Valette m'a dit aujourd'hui que le Gouvernement français avait des raisons pour supposer que le prince Gortschakoff avait informé le chargé d'affaires de Russie à Paris que l'Angleterre était convenue avec l'Italie qu'aucune d'elles ne renoncerait à la neutralité sans avoir prévenu l'autre, et que le Gouvernement britannique avait proposé de faire un semblable arrangement avec les grandes puissances neutres et les puissances de second ordre. L'empereur de Russie, ajouterait le télégramme, aurait donné son entière approbation à cette proposition.

M. de La Valette me demanda si le fait constaté par le prince Gortschakoff était exact, quelle était la nature de l'engagement auquel il se référait; s'il était conclu ; et si l'on se proposait de le rendre général. Je répondis que la chose était vraie en elle-même ; que la nature de l'engagement n'avait pas d'autre portée que celle représentée; qu'il n'y aurait ni traité, ni protocole, mais simplement un échange de dépêches qui, néanmoins, n'avait pas encore eu lieu, et qu'on examinait en ce moment la question de rendre un pareil arrangement général.

Je dis à M. de La Valette que je répondais à ses questions, malgré que je ne pusse admettre, d'aucun des belligérants qui ne m'avait point tenu informé des propositions qu'il aurait faites aux puissances neutres, le droit de me demander des explications sur les rap

ports que j'avais eus avec elles; mais dans mon désir de conserver les sentiments d'amitié qui existaient entre l'Angleterre et la France, j'allais lui dire comment cette proposition avait surgi.

Plusieurs puissances, lui dis-je, depuis le commencement de la guerre avaient proposé de former une neutralité combinée de toutes les puissances neutres. Le Gouvernement de la Reine s'est toujours opposé à un pacte formel, tout en exprimant son désir d'échanger librement des idées sur les moyens de circonscrire la guerre ou qui pourrait tendre à une perspective quelconque de paix.

Le Gouvernement italien m'a informé la semaine dernière qu'il désirait toujours conserver la neutralité. Je répondis que j'étais toujours opposé à un engagement formel, mais que si le Gouvernement italien désirait échanger une assurance que la Grande-Bretagne et l'Italie ne se départiraient pas de leur neutralité sans s'en prévenir réciproquement, j'étais disposé à le faire.

Je dis encore à M. de La Valette que j'avais informé le Gouvernement russe de ce qui s'était passé entre les Gouvernements de la Reine et de l'Italie, et lui avais demandé si quelque arrangement de ce genre entre les gouvernements neutres ne pourrait pas être utile aux plus petits États qui désiraient garder la neutralité; et que le Gouvernement avait été de cet avis, sans toutefois qu'il y ait eu le temps de faire d'autres démarches.

J'ajoutai que j'avais invité M. de La Valette à venir me voir aujourd'hui dans le but de lui faire part de ce qui avait été fait. Je suis, etc.

(Extrait.)

N° 335.

Signé GRANVILLE,

LORD LYONS AU COMTE DE GRANVILLE.

Paris, le 16 août 1870.

Le prince de la Tour d'Auvergne est arrivé l'avant-dernière nuit de Vienne. Je l'ai vu ce matin pour la première fois depuis son arrivée.

Il m'a dit qu'il avait appris par une dépêche du marquis de La Valette que le Gouvernement de la Reine avait pris part à l'établissement d'une ligue ou arrangement entre les puissances neutres à l'effet qu'aucune d'elles ne renonçât à sa neutralité, sans s'être entendu

préalablement avec les autres. Le Gouvernement français, dit-il, n'avait à faire aucune objection à une entente entre les puissances neutres. La France, il en était certain, pouvait compter sur l'amitié de la Grande-Bretagne; car jamais les rapports entre les deux nations n'avaient été certainement aussi intimes et aussi cordiales que sous le règne du présent Empereur. Il a toute raison de croire que l'empereur de Russie a des sentiments d'amitié à l'égard de la France et un vif désir de maintenir l'équilibre de l'Europe. L'Autriche n'a pas été pressée par lui lors de son séjour à Vienne dont il venait d'arriver, de prendre cause pour l'un ou l'autre des belligérants dans la présente guerre; mais il y avait rencontré une sympathie bien décidée pour la France. Il pouvait compter sur le bon vouloir de l'Italie. La France n'avait donc aucun motif d'alarme d'une entente entre ces puissances quant au but qu'elles poursuivraient.

En même temps, continua le prince, il est évident que dans les circonstances actuelles, la France ne peut accepter d'offre de médiation d'aucun côté. Elle a éprouvé des revers au commencement de la campagne, mais elle n'a aucune raison de désespérer de les réparer. Elle ne pourrait traiter tant qu'elle avait les moyens de continuer la guerre sur un pied d'égalité et de chasser les Prussiens de France. Si la fortune de la guerre devait se déclarer encore contre elle, elle résistera encore pied à pied, quand ce ne serait que pour laisser à ses amis une occasion de l'aider à obtenir des termes équitables de paix. Il y a deux conditions qu'il regarde comme indispensables en toute circonstance, l'intégrité du territoire de la France et le maintien de la dynastie.

Il n'avait jamais entendu sans impatience, ajouta-t-il, ces Français qui avaient parlé d'aller à Berlin et d'anéantir la monarchie prussienne. Il avait toujours été convaincu que les autres puissances interviendraient pour empêcher, soit la France soit la Prusse, de devenir le maître absolu de l'Europe.

FIN DU PREMIER VOLUME DES ONZIÈME ET DOUZIÈME ANNÉES

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