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N° 528.

LE COMTE DE CHAUDORDY A M. JULES FAVRE, A PARIS.

(Extrait.)

Tours, le 25 septembre 1870.

J'agis avec ardeur pour pousser ici le Gouvernement à soulever les provinces et à jeter toutes les forces régulières ou irrégulières sur les derrières des Prussiens, afin qu'ils soient pris entre deux feux; il paraît certain qu'ils ont beaucoup souffert devant Issy (1), qu'ils ne s'attendaient pas à la défense de Paris et qu'ils en sont troublés.

(Extrait.)

N° 529.

LORD LYONS AU COMTE DE GRANVILLE.

Tours, le 25 septembre 1870.

J'ai eu l'honneur d'informer hier votre Seigneurie par télégraphe, qu'il ressort d'une dépêche que M. Jules Favre a trouvé moyen de faire savoir de Paris aux membres du Gouvernement ici que le comte de Bismarck avait insisté sur la cession à l'Allemagne de toute la Lorraine et de l'Alsace jusqu'à Metz; qu'il avait refusé de consentir à un armistice, à moins que les troupes allemandes ne fussent mises en possession de Metz, de Strasbourg et du Mont-Valérien, fort détaché, le plus important de ceux qui défendent et commandent Paris, et enfin que le Gouvernement de Tours, d'accord en cela avec celui de Paris, considérait que les conditions de M. de Bismarck étaient totalement inadmissibles, et qu'il ne restait plus à la France que de résister jusqu'à la dernière extrémité.

J'ai donné communication par télégraphe ce matin à votre Seigneurie d'une proclamation qui a été publiée ici à cet effet par le Gouvernement, et d'un décret ajournant sine die les élections municipales qui devaient avoir lieu aujourd'hui et les élections à l'Assemblée constituante qui devaient se faire d'aujourd'hui en huit. J'envoie cijoint copies de ces deux documents (2).

J'ai causé ce matin avec M. Crémieux sur l'état de choses qui

1. Combat de Châtillon.

2. N° 524.

résulte du complet insuccès de M. Jules Favre dans ses efforts pour en venir à un arrangement avec le comte de Bismarck.

M. Crémieux m'a dit que le langage du comte de Bismarck paraissait même avoir été plus fort que dans le récit que le Gouvernement d'ici en avait fait dans sa proclamation, qu'il avait dit distinctement à M. Favre que la Prusse était déterminée à ce que la France, qui n'avait cessé d'attaquer l'Allemagne depuis le temps de Louis XIV, fut maintenant réduite à l'état de puissance de second ordre. Aucune mention, m'a dit M. Crémieux autant qu'il le savait, n'avait été faite d'une indemnité pécuniaire, ni de toute autre condition de paix à l'exception de la cession de l'Alsace et de la Lorraine. Il n'était pas supposable, en effet, que, après la demande de ces conditions et la volonté bien exprimée du comte de Bismarck de les exiger, M. Jules Favre ait continué la conversation. Le comte de Bismarck a également rendu impossible toute discussion d'un armistice en réclamant la livraison non-seulement de Metz, Toul et de Strasbourg, mais encore celle du Mont-Valérien, ce qui équivalait à la reddition de Paris lui-même.

M. Crémieux ajouta que les exigences de la Prusse avaient produit une violente explosion d'indignation à Paris, que toutes les classes s'étaient ralliées autour du Gouvernement, que la détermination de résister jusqu'au bout était universelle, et que l'esprit des troupes, de la garde nationale et de la population entière de Paris était excellent. Les nouvelles qui étaient parvenues au Gouvernement des diverses parties de la France étaient également satisfaisantes. Dans le fait, tout Français devait sentir qu'il était maintenant appelé à combattre pour l'existence même de la France. D'autres nations avaient succombé devant une invasion irrésistible, la France pourra peutêtre succomber maintenant, mais elle ne se laissera pas réduire sans combattre jusqu'au dernier moment pour son honneur et pour la place qu'elle occupe parmi les nations. La guerre jusqu'à la dernière extrémité était tout ce qui lui restait à faire.

Passant aux détails, je demandai à M. Crémieux, si, en envisageant la question au point de vue diplomatique, il était convaincu qu'il était sage d'ajourner les élections à l'Assemblée constituante? La difficulté d'entrer plus tard en négociation avec la Prusse ne se trouverait-elle pas augmentée par l'absence d'un gouvernement régulièrement établi ?

M. Crémieux me répondit qu'en ajournant les élections, le Gouvernement d'ici avait suivi les instructions qu'il avait reçues de ses collègues de Paris. Il paraissait que la garde nationale de Paris avait demandé que non-seulement les élections à l'Assemblée constituante,

mais même les élections municipales fussent ajournées ; et cela était d'autant plus remarquable que, comme je le savais, les autorités municipales de Paris avaient, sous le système impérial, été nommées par le Gouvernement et non choisies par les habitants. On avait senti que toute l'énergie devait en ce moment être consacrée à la défense du pays et que toute autre considération, quelqu'importante qu'elle fût, devait être mise de côté.

M. Crémieux ajouta que les plus récentes nouvelles reçues de Paris étaient de l'avant-veille. Elles avaient été apportées par une personne qui avait quitté Paris en ballon. L'esprit de la population y était décrit comme étant excellent, mais il y avait peu de détails. Entre autres documents, l'adresse suivante avait été envoyée par ce ballon.

Hôtel de Ville de Paris.

« La Mairie de Paris veille. Deux cents quinze bataillons de gardes nationaux sont armés et occupent les remparts.

« L'esprit public est excellent.

<< Toute la population est déterminée à se défendre jusqu'à la dernière extrémité.

a Que la France réponde!

«Ordre à toutes les administrations entre les mains desquelles cette déclaration arrivera de la faire publier et afficher.»

En terminant, M. Crémieux m'a dit que la ville de Toul avait été obligée de capituler, qu'elle s'était rendue le 23 aux mêmes conditions que la capitulation de Sedan.

N° 530.

LORD LYONS AU COMTE DE GRANVILLE.

Tours, le 25 septembre 1870.

Mylord, j'étais sur le point de vous expédier le courrier, lorsque le comte de Chaudordy est venu me dire que le temps était venu pour l'Angleterre de reconnaître officiellement le présent Gouvernement de la France.

Il me représenta que le Gouvernement était actuellement universellement reconnu et obéi par toute la France; qu'il avait montré qu'il avait le vouloir et le pouvoir de maintenir l'ordre et de diriger l'administration d'une manière modérée et raisonnable à l'intérieur, aussi

bien que de maintenir des rapports amicaux et corrects avec les puissances étrangères. Il ne pouvait y avoir de doute, fit-il observer, que c'était le seul gouvernement possible en France pour le moment, et que, quoiqu'il ne fût pas responsable de la guerre, il s'efforçait honnêtement de défendre l'intégrité du territoire de la France, après avoir en vain usé des plus grands efforts pour obtenir des conditions acceptables de paix. Le reconnaître en ce moment, pensait-il, serait permettre au Gouvernement de la Reine, sans pour cela qu'il se départît le moindrement de sa neutralité, d'établir un titre à la sympathie et à la reconnaissance de la nation française tout entière.

Je lui répondis que la question avait été si récemment discutée par votre Seigneurie avec M. Thiers, qu'il y aurait de la présomption de ma part à faire autre chose que de lui rappeler ce que votre Seigneurie avait dit à cette occasion. Je vais employer, ajoutai-je, les quelques minutes que j'ai à ma disposition avant d'expédier mon courrier pour rapporter brièvement les représentations qu'il m'avait faites de la part du Gouvernement d'ici.

J'ai, etc.

Signé : LYONS.

N° 531.

M. JULES FAVRE A M. WASHBURNE.

Paris, le 26 septembre 1870.

Monsieur, vous m'avez fait l'honneur de m'écrire le 24 de ce mois pour m'informer du désir que vous ont exprimé les consuls généraux et consuls des républiques, savoir: dominicaine, d'Uruguay, de CostaRica, de l'Équateur, du Chili, du Paraguay et du Vénézuéla, de prendre sous votre protection et de confier à vos bons offices les armes, drapeaux et résidences des consulats, ainsi que leurs nationaux résidant à Paris.

Je m'empresse de vous informer que le Gouvernement de la défense nationale auquel j'ai soumis cette demande, m'a autorisé à lui faire un accueil favorable. Les consuls étrangers ne pouvaient certainement pas faire un choix qui pût être plus acceptable pour nous que celui du représentant des États-Unis. Cependant comme certains d'entre eux sont français, il doit être entendu que (conformément aussi à ce qui est stipulé dans leurs exéquaturs) la faveur qu'ils solli

citent n'aura pas pour effet de les dégager personnellement des obligations et devoirs qui leur sont imposés en leur qualité de Français. La position en France des citoyens des Républiques de l'Amérique du Sud, en temps de guerre comme en temps de paix, est réglée par les traités. En ce qui concerne celles de ces républiques qui ont fait choix de Français pour leurs consuls, l'application des mesures de faveur stipulées dans ces traités ne peut seulement s'étendre qu'aux archives des consulats et aux étrangers qui en dépendent, et cela seulement pour ce qui dépend de la compétence ou des pouvoirs de l'administration française.

Recevez, etc.

Signé: JULES FAVRE.

No 532.

LE COMTE DE BISMARCK A M. JULES FAVRE.

Ferrières, le 26 septembre 1870.

Monsieur le ministre, en réponse à la lettre que j'ai eu l'honneur de recevoir de votre Excellence, je regrette que des égards militaires m'empêchent de faire des communications sur l'époque et la nature de l'attaque prochaine contre la forteresse de Paris.

En général, les usages de la guerre s'opposent à une correspondance sortant de ou destinée à une forteresse assiégée, et si nous admettons volontiers l'envoi de lettres ouvertes, émanant d'agents diplomatiques, autant que leur contenu ne soulève d'objections militaires, je ne saurais pourtant considérer comme fondée et traiter comme telle l'opinion de ceux qui regardent l'intérieur des fortifications de Paris, durant un siège, comme un centre apte à des communications diplomatiques.

Cette manière de voir paraît d'ailleurs avoir été partagée par ceux des gouvernements neutres dont les représentants ont transféré leur siége à Tours.

Recevez, etc.

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Signé: BISMARCK.

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