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N° 59.

Télégramme.)

LE COMTE BENEDETTI AU DUC DE GRAMONT.

Ems, le 10 juillet 1870, 8 heures du soir.

J'avais déjà expédié mon dernier télégramme quand j'ai reçu ceux que vous m'avez adressés aujourd'hui à une heure vingt-cinq. J'ai d'avance satisfait à vos ordres en vous envoyant le rapport que je vous ai annoncé, et qui arrivera demain à Paris, par la poste, avec le train de dix heures un quart du matin. Vous jugerez sans doute que ce rapport, rendant compte d'un entretien avec un souverain, ne peut être lu en entier devant la Chambre et qu'il est préférable d'en communiquer le sens ou des extraits. Je n'ai, du reste, pas un mot à y retrancher, surtout en ce qui concerne la connaissance que le Roi a eue des propositions faites par le Gouvernement espagnol au prince de Hohenzollern, et l'assentiment qu'il a donné à son acceptation, en lui déclarant qu'il ne croyait pas devoir y mettre obstacle.

M. de Werther vient de me faire espérer que le Roi pourrait me demander demain de reprendre notre entretien. Sa Majesté a reçu aujourd'hui des dépêches du prince Antoine de Hohenzollern; le prince Léopold n'étant pas auprès de son père, les informations parvenues à Sa Majesté sont encore incomplètes ou insuffisantes. Vous me permettrez d'ajouter qu'à mon sens la guerre deviendrait inévitablesi nous commencions ostensiblement des préparatifs militaires.

No 60.

(Télégramme.)

LE COMTE BENEDETTI AU DUC DE GRAMONT.

Ems, le 10 juillet 1870, 4 heures du soir.

Je vous ai expédié en toute sûreté mon rapport sur l'audience que le Roi m'a accordée hier: il vous parviendra demain matin. Je n'ai pas revu Sa Majesté aujourd'hui ni reçu aucune communication de sa part; mais je lui ai fait savoir que tout me commande de satisfaire sans trop de retard la légitime impatience du Gouvernement de l'Empereur. Je garde les tables nos 1 et 2 de Berlin, et je continuerai à m'en servir.

N® 61.

LE COMTE BENEDETTI AU DUC DE GRAMONT.

(Télégramme.)

Ems, le 10 juillet 1870, 14 heures 30 minutes du soir.

Je viens de rencontrer le Roi. Sa Majesté m'a arrêté pour me dire qu'elle n'avait aucune réponse du prince Léopold, qui n'a pas encore rejoint son père. Je lui ai répondu que nous touchions au moment où le Gouvernement de l'Empereur ne pourrait plus ajourner les explications qu'il doit aux Chambres et au pays. Je lui ai demandé la permission de lui exposer les nécessités de notre situation. Il me recevra demain matin. J'avais, un moment auparavant, développé à M. de Werther les considérations qui nous obligent à rompre le silence et les dangers d'un plus long retard; il m'a promis de rendre compte au Roi de notre entretien.

Si vous prenez la parole à la Chambre, veuillez dire en quelques mots que j'ai plusieurs fois signalé les démarches faites pour assurer le succès de la candidature du prince de Hohenzollern, candidature qui avait été abandonnée, et à laquelle on est subitement revenu en dernier lieu. Le Constitutionnel se réunissant aux journaux de l'opposition pour m'attaquer, vous ne trouverez pas, j'espère, ma suggestion déplacée.

N° 62. .

LE DUC DE GRAMONT AU COMTE BENEDETTI, A EMS.

(Télégramme.)

Paris, le 10 juillet 1870, 5 heures 50 du soir.

Je vous préviens que votre dernier télégramme chiffré d'hier soir a été tronqué et dénaturé, et que, bien qu'expédié à neuf heures, il n'est arrivé que ce matin à dix heures.

N° 63.

(Télégramme.)

LE COMTE BENEDETTI AU DUC DE GRAMONT.

Ems, le 10 juillet 1870, 14 heures et demie du soir.

Il a éclaté la nuit dernière un violent orage dans la vallée du Rhin. Le directeur du télégraphe attribue à cette circonstance le retard et les erreurs que vous me signalez dans mon télégramme de samedi soir.

A la même date, M. le duc de Gramont m'avait en outre adressé la lettre particulière suivante :

N° 64.

M. MERCIER DE LOSTENDE AU DUC DE GRAMONT.

(Très-confidentielle.)

Madrid, le 10 juillet 1870, 2 heures 30 minutes du soir.

Le régent a eu la conférence promise. Il consent à envoyer au prince un agent qui sera autorisé à voir aussi le Roi et M. de Bismarck. Il devra exposer dans les formes les plus courtoises toutes les considérations qui rendent désirable le retrait de la candidature. Ou le général Dominguez, ou M. Silvela recevra cette mission, et partira aujourd'hui même, si c'est possible. Le régent demande que Votre Excellence veuille bien s'engager, à saisir une occasion favorable pour déclarer que le mot souffrir ne s'adressait pas à l'Espagne, qui a le droit de se constituer comme elle veut. Il demande aussi le secret le plus absolu, même envers Olozaga. Bartholdi est arrivé ce matin.

N° 65.

LE DUC DE GRAMONT AU COMTE BENEDETTI.

Paris, le 10 juillet 1870.

Mon cher comte, j'ai reçu à dix heures et demie du matin votre télégramme d'hier soir. Il a été arrêté en route, et tellement tronqué

dans la partie la plus importante qu'il est presque impossible d'en établir le sens. Je vous envoie le comte Daru, en vous priant de le faire repartir immédiatement, car nous ne pouvons plus attendre. Pendant que le Roi vous remet d'heure en heure, sous prétexte de se concerter avec le prince de Hohenzollern, on rappelle en Prusse les hommes en congé, et on gagne sur nous un temps précieux. A aucun prix nous ne pouvons donner à nos adversaires aujourd'hui ces mêmes avantages qui ont été en 1866 si funestes à l'Autriche. Et d'ailleurs, je vous le dis nettement, l'opinion publique s'enflamme et va nous devancer. Il nous faut commencer; nous n'attendons plus que votre dépêche pour appeler les 300,000 hommes qui sont à appeler. Je vous en prie instamment, écrivez-nous, télégraphiez-nous quelque chose de bien clair. Si le Roi ne veut pas conseiller au prince de Hohenzollern de renoncer, eh bien! c'est la guerre tout de suite, et dans quelques jours nous sommes au Rhin. Le Roi est désormais en cause. Après l'aveu qu'il a fait d'avoir autorisé l'acceptation, il faut qu'il la défende, ou du moins qu'il conseille et obtienne la renonciation; mais ce qui est pour nous plus important que la renonciation elle-même, c'est de savoir promptement à quoi nous en tenir.

Ainsi done, mon cher comte, je vous prie de m'écrire par la poste en chiffres pour me confirmer vos télégrammes, et surtout le plus tôt possible par le retour du comte Daru et du comte de Bourqueney.

Pour vous mettre bien au courant de la situation, je vous envoie les derniers télégrammes que j'ai reçus de Madrid et de Pétersbourg. Celui de Madrid vous servira pour mettre à l'aise la conscience du Roi, s'il se croit lié par les avances espagnoles, auxquelles il s'est rendu avec si peu d'égards pour nous. Mille amitiés et tout à vous.

Signé: GRAMONT.

N° 66.

LE COMTE DE GRANVILLE A LORD LYONS.

Foreign-Office, le 10 juillet 1870.

Mylord, dans un entretien que j'ai eu aujourd'hui avec le marquis de La Valette, je lui ai dit confidentiellement que j'avais appris de M. Layard, que le général Prim, d'une façon toute officieuse, s'occu

pait avec M. Layard de rechercher le moyen de terminer la question de la succession espagnole sans atteinte à l'honneur de l'Espagne.

Le gouvernement de la Reine à la complète persuasion que le gouvernement français ne désire pas la guerre et n'envisage seulement cette extrémité que dans le but d'empêcher la réalisation d'une éventualité qu'il considérerait comme attentatoire à l'honneur et aux intérêts de la France. En exprimant cette conviction au marquis de La Valette, j'ajoutai que les nouvelles de Madrid, dont je vonais justement de lui faire part, donnaient lieu d'éviter pour le moment toute décision précipitée.

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J'ai eu ce matin l'honneur de recevoir les dépêches de Votre Seigneurie, relatives à la question de Hohenzollern, des 6 et 8 courant, ainsi que celle d'hier.

J'ai parlé cette après-midi au duc de Gramont dans le sens des deux premières dépêches d'hier. J'ai remercié Son Excellence au nom de Votre Seigneurie pour la franchise des communications qu'il m'a faites, et pour la confiance amicale qu'il a témoignée au gouvernement de Sa Majesté. J'ai fait observer que le gouvernement de Sa Majesté pouvait difficilement comprendre que le choix du prince de Hohenzollern pour roi d'Espagne fût une affaire d'une assez grande importance pour une grande nation comme la France pour justifier des mesures extrêmes.

Faisant toute concession pour le ressentiment que le secret av ec lequel ce choix avait été mûri était de nature à produire en France, toujours est-il, ai-je dit, que le gouvernement de Sa Majesté a la confiance que le gouvernement de l'Empereur agira avec calme et modération dans la direction future de la discussion. Il ne peut que regretter le langage altier (strong language) dont ont usé le gouvernement et la presse française. Il est plus inquiet encore des préparatifs milïtaires qui sont en voie d'exécution, et doit se demander si dans cet état de choses il serait judicieux de persévérer dans ses efforts pour amener une solution amiable. Le gouvernement de Sa Majesté a, M. de Gramont le sait, usé de tous ses efforts pour arriver à une sem

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