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Aussi bien l'amendement que nous combattons semble inspiré par des craintes confessionnelles qui n'ont rien de fondé.

La neutralité de l'école, au point de vue religieux, est assurée, en Suisse, par la constitution fédérale elle-mème, qui dispose dans son article 27: Les écoles publiques doivent pouvoir être fréquentées par les adhérents de toutes les confessions, sans qu'ils aient à souffrir d'aucune façon dans leur liberté de conscience ou de croyance ». L'article 49 est plus formel encore: « La liberté de conscience est inviolable. Nul ne peut être contraint de faire partie d'une association religieuse, de suivre un enseignement religieux, d'accomplir un acte religieux, ni encourir des peines, de quelque nature qu'elles soient, pour cause d'opinion religieuse. » Les lois cantonales relatives à l'instruction primaire, aussi bien dans les cantons protestants que dans les cantons catholiques, ne se sont point écartées de ce principe: elles contiennent des dispositions qui sauvegardent d'une façon complète la liberté de penser et de croire.

C'est ainsi que la loi vaudoise du 31 janvier 1863, sur l'instruction primaire obligatoire, après avoir réglementé l'enseignement religieux, s'empresse d'ajouter que «sur la demande expresse des pères de famille, la commission d'école peut dispenser des écoliers d'assister à l'enseignement de la religion. » (Art. 20.) L'article 12 de la loi du 17 mai 1884 sur l'instruction primaire dans le canton de Fribourg contient une disposition analogue.

Dans le canton de Neuchâtel, l'enseignement religieux est facultatif. Il se donne suivant le libre choix et la volonté des familles. Les commissions d'éducation n'ont à intervenir ni pour le choix des personnes chargées de l'enseignement religieux, ni pour le caractère et le programme de cet enseignement (loi du 17 mai 1872, art. 18 et 21). Il en est de même dans le canton de Genève (loi du 5 juin 1886, art. 22). Enfin la loi bernoise du 11 mai 1870 sur les écoles primaires publiques décide, dans son article 11, que les élèves réformés dans les écoles catholiques et les élèves catholiques dans les écoles réformées, sont dispensés de frequenter l'enseignement religieux. Il en est de même des enfants qui n'appartiennent à aucune des deux confessions nationales.

Quant aux pénalités qui frappent les contraventions aux lois scolaires suisses, elles ne sont ni plus ni moins sévères que celles qui ont été édictées par notre loi du 28 mars 1882 sur l'instruction primaire.

A ce double point de vue, la convention du 14 décembre 1887 n'offre done aucun des dangers qu'un membre de votre commission a semble redouter. En résumé, l'arrangement diplomatique soumis à votre ratification constitue un véritable progrès. Il fait cesser le débat théorique qui existait entre les deux hautes parties contractantes sur le point de savoir si le traité d'établissement de 1882 a ou n'a pas assimilé aux nationaux les Français résidant en Suisse, et réciproquement, quant à l'obligation scolaire en vigueur dans l'un ou l'autre pays. Il assure, sans contestation possible, les bienfaits de l'instruction à deux colonies étrangères d'une importance numérique à peu près égale. Enfin, il permettra de lutter avec avantage contre les habitudes de vagabondage, de paresse ou de contrebande, de toute une partie de la jeunesse des régions situées des deux côtés du Jura.

Cet arrangement qui fait honneur à l'esprit démocratique des deux nations contractantes, est un nouveau service rendu à la cause de l'instruction populaire dont vous vous êtes toujours montrés les défenseurs convaincus. "Aussi le soumettons-nous avec confiance à votre approbation.

NOMBRE DE FRANÇAIS

D'après le Recensement de la population en Suisse au for Novembre 1880.

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La Convention a été l'objet d'une vive discussion au Sénat dans la séance du 12 juin; nous reproduisons les débats où ont été soulevées plusieurs questions intéressantes de droit international.

M. Lucien Brun. Messieurs, je viens demander au Sénat de vouloir bien entendre quelques observations très sommaires, trés courtes, et qui tendent à obtenir de lui de ne pas accepter dans les termes où elle lui est présentée, la convention qui doit régler entre la France et la Suisse leurs rapports à propos de l'exécution de la loi scolaire. Je parle de la convention dans les termes où elle vous est présentée. Je ne crois pas, en effet, et je ne veux pas dire que nous devions nous refuser à faire une convention avec la Suisse. Il ne m'est pas démontré qu'elle soit absolument nécessaire. Je crois cependant qu'elle peut être utile. Il n'est personne ici je ne crois pas m'engager trop en le disant qui ne voie avec satisfaction, toutes les fois que l'occasion nous en sera donnée, un témoignage de confiance réciproque donné à ce pays véritablement ami.

L'honorable M. Foucher de Careil a parlé, hier, des souvenirs anciens de

notre amitié avec la Suisse. Je suis, pour ma part, heureux de rappeler ici un souvenir plus récent, avant d'entrer dans cette discussion. Je ne crains pas de m'engager trop en disant que la France n'oubliera jamais l'accueil fraternel que la Suisse a fait aux soldats victimes de nos désastres et la charité généreuse avec laquelle ils ont été reçus par elle. (Très bien ! très bien! Vive approbation sur tous les bancs.) Je crois donc que tout ce qui nous viendra de la Suisse, toutes les demandes d'échange de confiance réciproque, tout ce qui pourra nous lier davantage sera bien accueilli. je le dis tout de suite, et là encore je suis certain que je n'ai à attendre aucune contradiction que si la convention qui nous est soumise se bornait à l'échange officiel de la gratuité scolaire et s'il était dit que les nationaux pourront, dans le pays voisin, fréquenter les écoles, et que cette fréquentation ne pourra pas leur être refusée, personne ne le contesterait.

Je suis convaincu

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Je vais même plus loin, et je pense qu'il n'y aurait aucun inconvénient, qu'il y aurait même utilité à dire que, si les parents le demandaient, la fréquentation de l'école chez l'une des deux nations équivaudra au certificat d'assiduité pour les écoles de l'autre nation.

Je crois que sur ce point je ne rencontrerai aucune objection dans l'esprit de personne; mais lorsque, ne s'en tenant pas là, on me parle d'obligation internationale, mais lorsque je vois le père de famille français soumis à la loi suisse et soumis aux pénalités suisses prononcées par des tribunaux autres que ceux de son pays, eh bien, là, messieurs, pardonnez-moi le mot, je me révolte, parlementairement, mais enfin je me révolte.

Je me suis demandé pourquoi le gouvernement fédéral ne se contente pas de ce qui est légitime, raisonnable, je veux dire la concession réciproque de la gratuité scolaire; pourquoi il ne se contente pas de demander que les certificats donnés par les autorités scolaires d'un pays soient acceptés dans l'autre.

Il va plus loin; il demande l'obligation réciproque de rendre obligatoire l'école pour tous les enfants de chaque nationalité chez la nation voisine. Pourquoi ?

Messieurs, je crois que cela est facile à comprendre.

L'honorable M. Foucher de Careil vous en parlait hier, et vous savez tous qu'il y a en Suisse une lutte assez vive entre ce que j'appellerai la concentration d'un côté et l'autonomie cantonale de l'autre. Berne, je veux dire l'autorité centrale appuyée par un parti puissant, tend à accroître le pouvoir fédéral aux dépens des autorités locales, et les cantons résistent.

Or, un des terrains sur lesquels la lutte a été la plus vive a été et a dû être le terrain de l'enseignement. La convention qu'on vous propose de faire et qui rend obligatoire pour tout enfant français en Suisse la fréquentation des écoles cantonales, va permettre au pouvoir central une intervention quotidienne dans les écoles communales; puis l'autorité fédérale y trouve un avantage de plus elle résout une question fort discutée: celle de l'obligation pour les cantons de recevoir dans leurs écoles même les étrangers.

Voilà, messieurs, ce que j'avais à dire d'abord. Nous refusons l'obligation, mais nous accepterions la gratuité et l'équivalence du certificat d'assiduité. Voyons maintenant quel est le but et quelles seraient les conséquences de cette convention.

Le but de la convention, je le demande à l'exposé des motifs fait par le Gouvernement. C'était alors, non pas l'honorable M. Goblet, mais l'honorable M. Flourens qui était ministre des affaires étrangères. Je demande à cet exposé le but de la convention. Le voici en quelques lignes :

«Dans les deux pays, l'instruction primaire étant obligatoire pour ces enfants, les personnes qui en sont responsables seraient, en France, lorsque l'enfant est de nationalité suisse, tenues à l'observation de la loi française et passibles des pénalités qu'elle édicte.

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<«< Réciproquement, en Suisse, les personnes responsables d'un enfant de

nationalité française seraient soumises aux mêmes lois et passibles des mèmes peines que si l'enfant était de nationalité suisse.

«Dans le cas où la personne responsable de l'enfant résiderait sur le territoire de l'autre Etat, les autorités scolaires seraient réciproquement tenues de se signaler les enfants qui n'observent pas les lois sur l'obligation de l'enseignement primaire, et les autorités du lieu de la résidence de la personne responsable auraient compétence pour sévir contre elle de la même manière et en appliquant les mêmes pénalités que si l'infraction avait été commise sur le territoire national.

« A cet effet, les rapports des autorités scolaires de l'un des deux pays feraient foi, jusqu'à preuve contraire, devant les autorités de l'autre pays. » En moins de mots, cela signifie que les familles françaises résidant en Suisse sont soumises à la loi suisse pour l'obligation d'envoyer leurs enfants à l'école primaire, et les pères de famille français pourront être condamnés par les tribunaux suisses à l'amende et à l'emprisonnement dans les prisons suisses, dans le cas où les tribunaux de ce pays saisis par l'autorité suisse considéreraient que la loi suisse a été violée par un Français. (C'est vrai ! très bien à droite.)

Voilà le traité que l'on vous propose de conclure avec nos voisins.

Eh bien, ici, les objections se pressent. Et, d'abord, est-ce que l'Etat a le droit de soumettre un de ses nationaux à une législation étrangère pour tout ce qui n'est pas loi de police et de sûreté ?

Comment! vous allez me naturaliser étranger pour partie, si je puis ainsi parler, en me soumettant à une loi étrangère, loi personnelle, loi civile, qui ne rentre pas dans la catégorie des lois de police et de sûreté?

Jamais le droit international n'a connu ni admis quelque chose de comparable à ce que vous nous proposez.

Vous allez soumettre nos nationaux à l'étranger à une loi qui n'est pas une loi de police et de sûreté !

Ah! je connais bien les traités d'extradition. Si un Français a violé la loi scolaire, et en admettant que cette violation constitue un délit, si vous avez obtenu un traité d'extradition, usez-en; mais me soumettre, moi, Français, à des tribunaux qui ne sont pas les miens parce que j'aurai violé une loi qui n'est pas la mienne, non, je le répète, cela dépasse votre droit.

Votre droit d'Etat français s'arrête à la frontière; et quand je dépasse la frontière, je vous échappe absolument, à moins que vous n'ayez un droit d'extradition conquis par un traité; mais en fait de droit civil et d'obligations personnelles, vous n'avez rien à voir quand la frontière est franchie. (Nouvelles marques d'approbation sur les mêmes bancs.)

Et si vous me disiez mais vous n'oserez pas me le dire que par le vote du Parlement vous aurez fait vôtre, vous aurez fait française la loi suisse, je vous répondrais d'abord que, même dans ce cas, vous ne pourriez pas me soumettre à la juridiction d'un tribunal étranger contre lequel je n'ai pas les garanties que m'offre la loi de mon pays.

Mais quant à faire ainsi vôtre une loi que dis-je une loi? - vingt-deux lois, car il y a vingt-deux lois différentes, quelques-unes contradictoires, dont les articles ne nous sont pas soumis, sur lesquels nous ne pouvons pas délibérer; quant à accepter en bloc toutes ces lois sans les connaître; quant à accepter d'avance les changements qu'elles peuvent subir; quant à faire juger par des tribunaux étrangers les contraventions à ces lois commises par des Français, vous ne l'oserez pas !

Il y aurait dans le monde des jurisconsultes une stupéfaction universelle, et je supplie le Sénat de ne pas faire à mon pays l'injure d'introduire dans le droit international un précédent qui ne serait pas à notre honneur. (Vive approbation à droite.)

Messieurs, voilà le droit. Mais voyons quelle est la convention et quelles en seraient les conséquences? Je le ferai en quelques mots, rassurez-vous ! Quelle est la loi française? La loi française, la voici: L'enseignement est

gratuit; l'enseignement est laïque; l'enseignement est obligatoire. L'obligation dure de six à treize ans.

Voilà la loi française.

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La loi suisse, quelle est-elle ? Il y en a plusieurs. Il n'a d'abord la loi commune, la loi fédérale. Elle ne dit qu'une chose: L'enseignement est obliga. - c'est l'article 27; l'enseignement est gratuit. Voilà la loi générale. Pour tout le reste, les cantons sont libres, et si vous voulez juger de la variété des lois que chaque canton, usant de sa liberté, édicte, jetez un coup d'œil sur le très incomplet document annexé au rapport, et vous verrez la multiplicité des divergences que je vous signale.

Quant à la durée de l'obligation, elle va partout en Suisse jusqu'à quinze ans, habituellement jusqu'à seize ans, et, dans quelques cantons, jusqu'à dix-huit ans.

Voilà les différences. Il y en a aussi quant aux pénalités. Ne parlons pas de l'amende, si vous voulez; elle varie, mais ce n'est qu'une amende. En France, le maximum de la prison, après toutes les récidives, ne dépasse pas cinq jours; en Suisse, dans presque tous les cantons, il s'élève jusqu'à huit jours, dans quelques-uns jusqu'à dix, et dans le canton de Neuchâtel va jusqu'à trente.

Voilà la loi suisse.

Quant à l'enseignement - je parle de l'enseignement religieux quant à l'enseignement, voici la règle: la plupart des cantons mettent l'enseignement religieux en tête du programme comme enseignement obligatoire. Dans tous, sans exception, l'enseignement religieux est donné par les ministres du culte. Dans trois cantons, que je cite: Argovie, Neuchâtel et Genève, l'enseignement religieux est facultatif.

Dans la plupart des cantons, dis-je, l'enseignement religieux est obligatoire; il est facultatif dans trois ou quatre cantons. Mais même dans ceux-là l'enseignement est donné aprés les heures de classe par le ministre du culte, et la loi fédérale je m'empresse de le dire dispose que les écoles devront ètre tenues de telle façon que la liberté de conscience de personne ne soit offensée. Le père de famille aura donc le droit d'avertir les autorités scolaires que son fils, mème dans les cantons où l'enseignement est obligatoire, ne suivra pas le cours d'enseignement religieux. Fort bien ! Mais voulez-vous me dire quelle garantie le père aura contre l'instituteur?

Je sais bien que l'enfant protestant n'entendra pas le ministre du culte catholique; je sais que l'enfant catholique ne suivrà pas le cours de religion fait par le ministre protestant; mais, encore une fois, quelle garantie le père étranger aura-t-il contre l'instituteur? Et je vous le demande, monsieur le ministre, s'il a une plainte à faire, comment la recevrez-vous? Comment voulez-vous que le père de famille qui aura à se plaindre d'une violation de la liberté de conscience s'y prenne pour obtenir satisfaction?

Il ne peut pas s'adresser aux autorités suisses. A qui recourra-t-il? A l'ambassadeur? Alors on engagera pour chaque plainte de cette nature une action diplomatique ?

Non, vous ne me donnez pas une garantie suffisante en me laissant la faculté de dispenser mon enfant de suivre les cours de religion. La vérité est que dans le milieu où sera placé l'enfant, sous la direction d'un instituteur contre lequel aucune garantie n'est donnée, il y a un danger que je signale et que nous ne voulons pas courir (Très bien! à droite).

Et puis, Messieurs, on n'enseigne pas seulement la réligion dans les écoles, on y enseigne aussi l'histoire; on y enseigne les rapports des nations entre elles; on y enseigne leurs souvenirs, et permettez-moi d'ajouter, leurs espé

rances.

Eh bien, est-ce que vous voyez sans inquiétude 56,000 enfants français apprenant l'histoire dans des écoles étrangères? Est-ce que vous n'avez pas quelque souci de ce qu'ils vont y entendre? Et je vous le demande encore : Si le père de famille se trouve blessé dans sa conscience religieuse ou dans

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