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Apprenez donc de l'art quel foin et quelle, De Lite.

adreffe

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Prête aux arbres divers la grace ou la richeffe.

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Par fès fruits, par fes fleurs, par fon beau vê

tement,

L'arbre eft de nos jardins le plus bel ornement.
Pour mieux plaire à nos yeux combien il prend de
formes!

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Là, f'étendent les bras pompeufement informes;
Sa tige ailleurs l'élance avec légéreté.
Ici j'aime fa grace, et là, fa majesté.

Il tremble au moindre fouffle, ou contre la tem

pête

Roidit fon tronc noueux et fa robufte tête.
Rude où poli, baissant ou dressant ses rameaux,
Véritable Protée entre les végétaux.

Il change inceffainment, pour orner la nature,
Sa taille, fa couleur, fes fruits et la verdure.

Ces effets variés font les tréfors de l'art,
Que le goût lui defend d'employer au hazard.
Des divers plants encor la forme et l'étendue
Sous des afpects divers fe préfente à la vue.
Tantôt un bois profond, fauvage, ténébreux,
Epanche une ombre immenfe; et tantôt moins

nombreux,

Un plant d'arbres choifis forme un riant bo

cage:

Plus loin, diftribués dans un frais paysage,
Des groupes élégans fixent l'oeil enchanté:
Ailleurs, fe confiant à fa propre beauté,

Un arbre feul fe montre, et feul orne la terre.
Tels, fi la paix des champs peut rappeller la
guerre,

Une nombreuse armée étale à nos regards
Des bataillons épais, des pélétons épars;
Et là, fier de fa force, et de fa renommée,
Un héros feul avance, et vaut feul une armée.
Tous ces plans différens fuivent diverfes loix.

Dans

De Lille.

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Dans les jardins de l'art, notre luxe autrefois

Des arbres ifolés dédaignoit la parure:

Ils plaifent aujourd'hui dans ceux de la nature.
Par un caprice heureux, par de favans ha
fards,

Leur plants defordonnés charmeront nos re

gards.

Qu'ils different d'afpect, de forme, de diftance;
Que toujours la grandeur, ou du moins l'élé
gance,

Diftingue chaque tige, ou que l'arbre honteux
Se cache dans la foule et difparoiffe aux yeux.
Mais lorsqu'un chêne antique, ou lorsqu'un vieil
érable,

Patriarche des bois, leve un front vénérable,
Que toute fa tribu, fe rangeant à l'entour,
S'écarte avec refpect, et compose sa cour;
Ainfi l'arbre ifolé plait aux champs qu'il décore.

Avec bien plus de choix et plus de goût en

core,

Les groupes formeront mille tableaux heureux, D'arbres plus ou moins forts, et plus ou moins nombreux.

Formez leur maffe épaifle, ou leurs touffes lége

res:

De loin l'oeil aime à voir tout ce peuple de fre

res.

C'est par eux que l'on peut varier les deffins,
Rapprocher et tantôt repoufler les lointains,
Réunir, féparer, et fur les paylages

Etendre ou replier le rideau des ombrages..

Vos groupes font formés: il eft tems que ma voix

A connoître un peu d'art accoutume les bois.

Bois auguftes, falut! Vos voûtes poetiques N'entendent plus le barde et fes affreux cantiques;

Mais un plus doux délire habite vos déferts,
Et vos antres encore nous inftruifent en vers;
Vous infpirez les miens, ombres majestueufes!
Souffrez donc qu'aujourd'hui mes mains refpe&ueu-
fes

Viennent vous embellir, mais fans vous profaner!
C'eft de vous que je veux apprendre à vous orner.

Le bois peut f'offrir fous des afpects fans

nombre:

Ici, des troncs preffés rembruniront leur ombre;
Là, de quelques rayons égayant ce féjour,
Formez un doux combat de la nuit et du jour.
Plus loin, marquant le fol de leurs feuilles légeres,
Quelques arbres épars toûjours dans les clairie.

res,

Et flottant l'un vers l'autre, et n'ofant fe toucher,
Parroîtront à la fois se fuir et le chercher.
Ainfi le bois par vous perd fa rudesse austere:
Mais n'en détruifez pas le grave caractere,
De détails trop fréquens, d'objets minutieux.
Nallez pas découper fon enfemble à nos yeux,
Qu'il foit un, fimple et grand, et que votre art lui
laiffe,

Avec toute la pompe, un peu de fa rudeffe.
Montrez ces troncs brifés; je veux de noirs tor.

rens

Dans le creux des ravins fuivre les flots errans.
Du tems, des eaux, de l'air n'effacez point

trace;

De ces rochers pendans refpectez la menace,
Et qu'enfin dans ces lieux empreints de majefté
Tout relpire une mâle et fauvage beauté.
Telle on aime d'un bois la ruftique nobleffe.

Le bocage moins fier, avec plus de molleffe
Déploie à nos regards des tableaux plus rians,
Veut un fite agréable et des contours lians,
Fuit, revient, et f'égare en routes finueufes,
Promène entre des fleurs des eaux voluptueuses;

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De Lille.

De Lille.

Et j'y crois voir encore, ivre d'un doux loifir,
Epicure dicter les leçons du plaisir.

Mais c'eft peu qu'en leur fein le bois ou le bo
cage

Renferment leur richeffe élégante ou fauvage;
Il en faut avec foin embellir les dehors.

Avant tout, n'allez point, fymmétrifant leurs bords,
Par vos murs de verdure et vos triftes charmilles
Nous cacher des forêts les nombreuses familles :
Je veux les voir; je veux perçant au fond des
bois,

Voir ces arbres divers qui croiffent à la fois;
Les uns tout vigoureux et tout frais de jeuneffe,
D'autres tout décrépits, tout noueux de vieil
leffe;

Ceux-ci rampans, ceux-là fiers tyrans des fo-
rêts,

Des tributs de fa feve epuifant leurs fujets:
Vafte fcene, où des moeurs, de la vie et des
âges,

L'efprit avec plaifir reconnoît les images!

Près de ces grands effets, que font ces verds
rempards,

Dont la forme importune attrifte les regards,
Forme toujours la même, et jamais imprévue?
Riche variété, délices de la vue!

Accours, viens rompre enfin l'infipide niveau,
Brife la trifte équerre et l'ennuyeux cordeau:
Par un mêlange heureux de golfes, de faillies,
'Les lifières des bois veulent être embellies.
L'oeil, qui des plants tracés par l'uniformité
Se dégoûte, et f'élance à leur extrêmité,
Se plait à parcourir, dans fa vaste étendue,
De cas bords variés la forme inattendue;
Il f'égare, il fe joue en ces replis nombreux;
Tour-à-tour il f'enfonce, il reflort avec eux;
Sur les tableaux divers que leur chaîne compofe
De distance en diftance avec plaifir repose:

Le

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Le bois f'en agrandit, et dans fes longs retours
Varie à chaque pas fon charme et fes détours.

Deffinez donc fa forme, et d'abord qu'on choi-
fiffe

Les arbres dont le goût préfcrit le facrifice.
Mais ne vous hâtez point; condamnez à regret;
Avant d'exécuter un rigoureux arrêt,

Ah! fongez que du tems ils font le lent ou
vrage,

Que tout votre or ne peut racheter leur ombrage,
Que de leur frais abri vous goûtiez la douceur.

De Lille.

$ 2

Pope.

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