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application de l'art. 691 C. C., en ce que ce jugement avait déclaré l'action possessoire non recevable contre une servitude discontinue.

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Le 6 juillet 1812, la Cour de cassation, section civile, a rendu, au rapport de M. Reuwens, un arrêt par lequel: « LA COUR..., vu l'art. 10 du tit. 3 de la loi du 24 août 1790, sur l'organisation judiciaire, l'art. 691 C. C. et l'art. 454 C. P. C.; Considérant, d'un côté, que, suivant l'article précité de la loi du 24 août 1790, les juges de paix connaissent sans appel, jusqu'à la valeur de50 fr., de toutes actions possessoires; Considérant, d'un autre côté, que si, par l'effet du principe établi dans l'art. 691 C. C., la possession annale d'une servitude discontinue ne peut donner le droit de former l'action possessoire, c'est parce que la possession dans cette matière, ne pouvant jamais conférer aucun droit à la propriété de la chose réclamée, est toujours censée précaire, et qu'elle manque, par conséquent, du caractère exigé par la loi, mais qu'il n'en est pas de même lorsque cette possession est accompagnée de titres ; qu'alors elle ne peut plus être l'effet d'une simple tolérance, ni être ragardée comme précaire; — Considérant que, si le juge de paix, chargé uniquement de statuer sur la possession, ne peut pas juger définitivement sur la validité du titre, il peut néanmoins en ordonner provisoirement l'exécution sous le rapport de la possession, s'en servir pour juger du ca. ractère de la possession, et accorder la jouissance provisoire à celui qui a une possession annale accompagnée d'un titre, sur la réserve du droit des parties au fond ;

- Considérant que cet effet du titre ne peut être détruit par la seule contestation sur sa validité, et qu'il appartient au juge de paix de juger le mérite de cette contestation, quant au fait de la possession ; - Considérant que, dans l'espèce, la possession, dont les frère et sœur

Herblin excipaient, était accompagnée d'un titre; que le juge de paix l'a envisagé comme un titre apparent; qu'il a donc pu regarder la possession comme n'étant pas précaire, ni l'effet d'une simple tolérance; que, par conséquent, il y a lieu à l'action possessoire, et que le juge de paix a été compétent; Considérant, enfin, que les frère et sœur Herblin n'ayant conclu qu'en 50 fr. de dommages-intérêts, le jugement du juge de paix a été rendu en dernier ressort; d'où il suit que le tribunal de première instance séant à Pont-Lévêque, en annulant, par son jugement du 20 juin 1810, celui du juge de paix du canton de Honfleur, du 3 février précédent, sous le prétexte que la possession, accompagnée d'un titre, ne pouvait fonder l'action possessoire, ni la compétence du juge de paix, a violé l'art. 10 du tit. 3 de la loi du 24. août 1790, et faussement appliqué l'art. 691 C. C., et l'art. 454 C. P. C.; Casse, etc.

TROISIÈME ESPÈCE. En 1664, le sieur de Gantès possédait, à titre de propriétaire, un domaine situé sur le territoire de Brignolles.

Ce domaine était contigu à un autre domaine appartenant au sieur Debruny, conseiller au siége de Brignolles.

Sur la ligne qui séparait les deux propriétés, se trouvait un rocher du sein duquel jaillissait une source d'eau vive, connue dans la contrée sous le nom de la Font-Amand.

Le sieur Degantès avait fait établir une enceinte autour de la source, pour en réunir les eaux, et se les approprier. Le sieur Debruny soutint que, de temps immémoria!, il était en possession d'y faire abreuver ses bestiaux, et qu'on ne pouvait, dès lors, le priver de ce droit.

Le 1 août 1665, les parties terminèrent leurs difficultés, au moyen d'une transaction dans laquelle il fut stipulé que la propriété de la source demeurerait irrévocablement au sieur de Gantès, mais que le sieur Debruny con

serverait désormais, pour lui et les siens, le droit d'y faire boire ses bestiaux, à la charge par lui d'y construire un abreuvoir dont les eaux retourneraient dans les terres du sieur de Gantès.

En exécution de la transaction, l'abreuvoir fut construit par le sieur Debruny.

Les choses demeurèrent long-temps en cet état.

Le sieur de Gantès fils vendit son domaine à la dame Gontard.

Le sieur Clavier acquit, de son côté, le domaine qui avait appartenu au sieur Debruny.

La dame Gontard, en juillet 1816, fit percer la voûte, primitivement construite par son auteur, afin de répartir une grande partie de l'eau sur ses propriétés.

Cette opération occasionait un préjudice notable au sieur Clavier, en ce que, d'une part, il diminuait le volume d'eau consacré à l'usage de l'abreuvoir, et en ce que, d'autre part, il diminuait également le volume des eaux qui, avant de gagner le territoire de la dame Gontard, arrosaient une petite pièce de terre dépendante de ses biens.

Le 13 octobre 1816, le sieur Clavier fit assigner la dame Gontard devant le juge de paix de Brignolles, pour se voir condamner à rétablir les eaux dans leur état naturel, en réparant la brêche pratiquée dans la muraille, et, en outre, à cesser désormais toute construction qui pourrait le troubler dans la jouissance de l'abreuvoir.

La dame Gontard répondit que le sieur Clavier n'avait jamais eu la possession de la voûte construite sur la FontAmand; en conséquence, elle déclina la compétence du juge de paix.

Le sieur Clavier lui opposa alors la transaction de 1665, et la possession immémoriale de la servitude.

Par jugement rendu le 8 juillet 1817, le juge de paix se déclara incompétent, attendu que la loi ne reconnaissant

que la possession annale, le juge de paix ne pouvait connaître d'une servitude discontinue, qui ne peut jamais s'acquérir par la possession.

Appel de la part du sicur Clavier; et le 13 mars 1818, jugement confirmatif du tribunal de Brignolles.

Pourvoi en cassation, 1° pour contravention à l'art. 1o, titre 18, de l'ordonnance de 1667, à l'art. 10, titre 3, de la loi du 24 août 1790, et à l'art. 23 C. P. C.; 2o fausse application et violation des art. 688 et 691 C. C.; 3° violation des art. 2281 et 2282 du même Code.

Le 17 mai 1820, arrêt de la Cour de cassation, section civile, au rapport de M. Porriquet, par lequel: — « LA COUR...., sur les conclusions conformes de M. Cahier, avocat général; vu l'art 10 du titre 3 de la loi du 24 août 1790, et l'art. 23 C. P. C.; Attendu que, de ces articles, il résulte, que le possesseur d'une servitude discontinue, apparente ou non apparente, est recevable à intenter, devant le juge de paix, l'action possessoire, pourvu qu'il la forme dans l'année du trouble, et qu'il prouve qu'il possède à titre non précaire; que cette preuve ne pouvant être faite que par la représentation du titre, le juge de paix doit en prendre conniassance, sur le rapport de la possession, c'est-à-dire pour juger si ce titre a pu autorier le demandeur à posséder, animo domini, comme lorsque la possession de trente ans et plus est la seule base de la demande en maintenue dans la possession d'an et jour, le juge de paix doit examiner si le droit réclamé peut s'acquérir par la possession ; qu'à l'égard du cas où le titre est contesté, de même que dans celui où la possession immémoriale est déniée, le juge de paix peut, sous le rapport, renvoyer les parties au pétitoire ; mais que, de la contestation sur le titre, ou de la dénégation de la possession immémoriale, il ne résulte pas que le juge de paix cesse d'être le seul juge compétent pour

statuer sur l'action possessoire, déclarée recevable par la loi, et dont il a été régulièrement saisi;

» Attendu, enfin, que de ces principes appliqués à la cause, il suit qu'en confirmant le jugement par lequel le juge de paix s'est déclaré incompétent pour statuer sur l'action possessoire, formée par Clavier relativement aux droits de puisage et d'abreuvage qu'il réclamait en vertu de la transaction de 1665, et prétendait, ainsi, posséder à titre non précaire, le tribunal civil de Brignolles a expressément violé l'art. 10 du titre 3 de la loi du 24 août 1790 et l'art. 23 C. P. C.; Casse, etc. »

QUATRIÈME ESPÈCE. En 1817, les frères Jourdan ont fait citer le sieur Cabasse devant le juge de paix du canton de Marseille, à l'effet d'être maintenus dans la possession 'd'un droit de pacage et de lignerage sur la propriété du sieur Cabasse, dont ils prétendaient avoir la jouissance de temps immémorial, et notamment depuis an et jour, en vertu de titres authentiques.

Par jugement du 16 juin 1817, le juge de paix les déclara non recevables dans leur action.

Sur l'appel, cette sentence fut confirmée par un jugement du tribunal civil de Marseille, du 15 décembre 1817, ainsi motivé: «Attendu que le droit d'usage en compascuité et lignerage constitue une servitude discontinue qui, d'après le Code civil, ne peut être établie que par titres et non par la possession immémoriale; que la preuve de la possession annale ou séculaire, offerte par les frères Jourdan, doit donc être rejetée; que les titres produits ou invoqués par les frères Jourdan, pour leurs droits de compascuité et de lignerage étant contestés par le sieur Cabasse, sont insuffisans pour légitimer une action possessoire, à raison d'une servitude discontinue, et que l'examen de tous ces titres ne pourra être fait que lorsque l'affaire sera plaidée au pétitoire. »

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