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l'aveu, pas plus que l'aveu même, ne peuvent contrarier les prohibitions de la loi : ainsi, une personne que la loi présume interposée au profit d'un incapable, reconnaît avoir reçu une donation; vainement ajouterat-elle qu'elle l'a reçue pour son compte, et que son aveu doit être considéré comme indivisible, la seconde partie de la déclaration sera rejetée comme illégale, mais la première sera maintenue. De plus, indépendamment des présomptions légales, on a toujours pensé que, lorsqu'il y avait dans la cause des indices de dol, l'indivisibilité de l'aveu pouvait être écartée en connaissance de cause. C'est probablement pour ce motif que l'art. 1961 du Code hollandais s'en rapporte, sur l'indivisibilité de l'aveu, aux lumières du juge. Notre Code sans doute ne va pas aussi loin, nos tribunaux ne peuvent, sans motif apparent, s'écarter de la règle tracée; mais les cas de fraude sont, ici comme partout ailleurs, exceptés. Si donc l'addition faite à l'aveu est gravement suspecte, et notamment, si les circonstances alléguées pour le modifier sont d'une invraisemblance grossière, le tribunal pourra écarter cette addition, pour s'en tenir purement et simplement à l'aveu, mais en ayant soin de mentionner les indices de dol que présente la cause (Agen, 16 décembre 1823). Enfin, à part cette circonstance, la règle de l'indivisibilité ne reçoit d'application que là où la partie adverse, ne pouvant alléguer d'autre preuve que l'aveu, est obligée d'accepter ou de rejeter en entier la déclaration sur laquelle elle se fonde. Il en est autrement si cette partie a d'autres moyens légaux de prouver son droit : alors l'aveu qualifié, et surtout l'aveu connexe, n'ont plus qu'une importance accessoire dans le système contraire, il serait par trop facile de paralyser les moyens de la partie adverse, au moyen d'un aveu partiel, dont elle ne pourrait modifier la teneur (rej. · 18 et 26 février 1851 ).

§ 2. Aveu extrajudiciaire.

294. L'aveu extrajudiciaire est celui qui n'a pas lieu en face de la justice dans le cours d'un procès. Le législateur ne s'est occupé de cet aveu qu'en ce qui touche la manière de le prouver. Habituellement, s'il ne rentre pas dans la classe des preuves préconstituées, dont nous n'avons pas à nous occuper ici, c'est-à-dire s'il est purement verbal, il ne peut évidemment se prouver que par témoins, à moins que l'aveu ne soit luimême avoué en justice. Le Code civil nous rappelle (art. 1355) que, pour une dette au-dessus de cent cinquante francs, il n'est pas plus permis de prouver par témoins l'aveu, qu'il ne le serait de prouver la dette elle-même.

Quelquefois cependant l'aveu extrajudiciaire a un caractère particulier, c'est lorsqu'il n'a pas lieu à proprement parler en justice, mais seulement devant une autorité qui peut en dresser acte, par exemple, devant le juge de paix siégeant en qualité de conciliateur des parties. Cet aveu n'est pas un aveu judiciaire, ainsi que l'a décidé, mal à propos suivant nous, un arrêt de Limoges du 17 juillet 1849, puisque le fonctionnaire devant lequel il est articulé ne siége pas comme juge, et n'aurait pas qualité pour le provoquer par un interrogatoire en forme. La confession ainsi faite n'aura donc pas la même force que si elle était intervenue dans le cours d'un procès. Mais elle pourra évidemment être alléguée, quelle que soit l'importance du litige; car, bien que verbale, elle a eu lieu devant une autorité investie du pouvoir de la constater (C. de proc. art. 54 et 55).

295. L'aveu extrajudiciaire, en le supposant légalement prouvé, n'est pas au fond d'une autre nature que l'aveu judiciaire. S'il est positif et précis, en quelque lieu qu'il ait été fait, il doit être décisif contre la partie qui s'est condamnée par sa propre bouche. Cependant

la loi n'a pas cru devoir répéter pour cet aveu, ce qu'elle dit pour l'aveu judiciaire, qu'il fait pleine foi contre celui qui l'a fait. C'est qu'elle a craint qu'on n'abusât de cette règle. L'aveu extrajudiciaire, en effet, est rarement bien complet et bien net. Les paroles qui échappent dans une conversation, ne sont pas pesées par celui qui les prononce, comme celles qui sont proférées en justice dans un interrogatoire solennel. Il faudra donc examiner avec soin dans quelles circonstances une partie aura fait cette reconnaissance, dont on cherche à se prévaloir contre elle. Ainsi, on ne devra jamais manquer de s'enquérir si elle a eu lieu ou non en présence du créancier (n° 292). De même on attachera plus de force à l'aveu extrajudiciaire dont nous parlions tout à l'heure, à celui qui aurait été recueilli par le juge de paix siégeant comme conciliateur, qu'à celui qui ne se rattacherait qu'à une conversation particulière; et en général l'aveu constaté par écrit aura plus de poids que l'aveu verbal. Nous pourrons donc dire avec l'article 1965 du Code hollandais : « Il est laissé à la prudence du juge de déterminer l'effet de l'aveu extrajudiciaire. » Nul doute d'ailleurs que l'aveu extrajudiciaire, comme l'aveu judiciaire, n'exige un pouvoir spécial du mandataire qui le fait pour autrui, et ne puisse être révoqué pour erreur de droit. Quant à l'acceptation, elle est nécessaire en ce sens que des paroles proférées légèrement peuvent toujours être immédiatement rétractées, mais il n'est pas besoin que l'on prenne acte expressément de l'aveu, ainsi qu'on le ferait en justice; la partie qui l'a recueilli, est censée l'avoir tacitement accepté.

296. On s'est souvent demandé si l'aveu extrajudiciaire est indivisible. En raison, il est également vrai dans tous les cas que, quand je n'ai en ma faveur que la déclaration de la partie adverse, je dois la prendre ou la rejeter dans son entier. C'est ainsi que l'indivisibilité est consacrée pour l'aveu littéral qui résulte des

registres des marchands (C. civ. art. 1330). Cependant tout ce qu'on peut conclure de là, c'est que la doctrine de l'indivisibilité n'est pas étrangère à l'aveu extrajudiciaire, et que ce serait souvent mal juger que de diviser un aveu de cette nature. Mais y aurait-il lieu de casser un jugement qui opérerait cette division? Il est difficile de le croire, quand, avant la promulgation du Code civil, il était constant que la cassation n'eût pu avoir lieu, même pour la violation du principe de l'indivisibilité de l'aveu judiciaire, principe qui n'était alors qu'une règle doctrinale, contestée par certains auteurs (voy. Merlin, Question de droit, vo Confession, § 11, no 1). Ce qui était vrai pour l'aveu judiciaire même, l'est encore aujourd'hui, dans le silence de la loi, pour l'aveu extrajudiciaire. La division de cet aveu mal à propos opérée peut donner lieu à un appel, mais non à un recours en cassation (rej. 10 décembre 1839).

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Mais, si l'on est d'accord pour connaître qu'un aveu purement extrajudiciaire n'est point soumis au principe de l'indivisibilité, en tant que règle légale, on se demande ce qu'il faut décider si un aveu extrajudiciaire a été réitéré dans le cours d'une instance. Pour soutenir, avec la cour d'Orléans (arr. du 7 mars 1818), que l'aveu ainsi réitéré ne se transforme pas en aveu judiciaire et demeure par conséquent divisible, on invoque cette considération, qu'il ne peut dépendre du libre arbitre d'un plaideur de modifier le caractère d'un des documents de la cause, en changeant après coup la nature de l'aveu. Nous reconnaissons volontiers qu'une déclaration purement spontanée ne saurait avoir les effets d'un aveu judiciaire, parce qu'elle aurait été faite précédemment en dehors de l'instance. Mais si la décla

• Il faut remarquer toutefois que la cour d'Orléans constate dans son arrêt des indices de dol et qu'au cas de dol, il y a exception au principe de l'indivisibilité (n° 293). On cite mal à propos, comme ayant jugé dans le même sens, l'arrêt de rejet du 10 décembre 1839, qui ne s'explique point sur la réitération de l'aveu.

ration faite en justice constitue un aveu caractérisé (n° 291 et 292), nous dirons avec Merlin (loc. cit. § 1, n° 2): « Comment un aveu fait en justice pourrait-il cesser d'être considéré comme judiciaire et en perdre le privilége, par la seule raison qu'il aurait été précédé d'un aveu extrajudiciaire dont il ne serait que l'écho? Cela répugne au bon sens naturel. »

DEUXIÈME DIVISION.

Force de l'aveu en matière criminelle.

297. L'aveu, au criminel comme au civil, peut être judiciaire ou extrajudiciaire.

298. L'aveu extrajudiciaire, lorsqu'il n'est pas réitéré par l'accusé en justice, et qu'il n'est pas constaté par un écrit spécial, ce que nous supposons toujours dans cette partie de notre ouvrage, ne peut être établi que par témoins. La preuve testimoniale tendant à constater cet aveu sera soumise aux mêmes règles que si elle tendait directement à constater le point en litige. Elle sera par conséquent admissible, à moins que l'on ne rentre dans les cas où elle est prohibée devant toute juridiction; par exemple, si l'on voulait faire entendre des témoins pour établir la reconnaissance d'un prétendu dépôt, dont on alléguerait la violation, on serait non recevable, attendu qu'il fallait se procurer un écrit. Dans tous les cas, le juge doit examiner, comme pour l'aveu extrajudiciaire civil, quand et comment on dit que l'accusé a avoué. Ainsi, on aura bien plus d'égard à une déclaration recueillie par un commissaire de police, quoiqu'il n'ait pas qualité pour procéder à un interrogatoire régulier, qu'à celle qui n'aurait eu lieu qu'en présence de simples particuliers. L'aveu extrajudiciaire n'était considéré jadis que comme un indice;

• En traitant de la preuve littérale, nous examinerons quelle est la foi d'un procès-verbal constatant un aveu, dressé par un officier compétent (n° 503).

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