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Ciaramelli et Gaëtani, qui se sont associés pour donner une traduction italienne du Traité des Preuves1. En propageant nos idées au delà des Alpes, nos honorables traducteurs ont ajouté à l'ouvrage original des notes pleines d'intérêt, dont nous avons plusieurs fois profité dans l'édition actuelle : dans les cas rares où leurs théories ne nous ont point paru conformes aux saines doctrines de la matière, nous avons indiqué notre dissentiment avec les annotateurs italiens.

L'accueil fait à notre première édition était pour nous un motif de plus de travailler à rendre notre œuvre plus digne de l'estime des savants, en faisant profiter nos lecteurs de l'expérience que nous avons acquise depuis 1843, et par la pratique de l'enseignement, et par l'étude de la jurisprudence, si essentielle à consulter dans une matière aussi usuelle. Pour répondre à la bienveillance des membres de la magistrature et du barreau qui ont considéré ce livre comme pouvant être de quelque utilité même pour les praticiens, nous nous sommes fait un devoir de vérifier tous les arrêts que nous avons cités : d'une part, nous avons rectifié quelques inexactitudes qui nous avaient échappé dans les citations; et d'autre part, nous avons enregistré avec soin les décisions les plus importantes rendues depuis notre premier travail, heureux souvent de voir les doctrines auxquelles nous sommes le plus attaché, consacrées par la jurisprudence de la cour de

cassation 1.

1 Bonnier. Trattato teorico e pratico delle pruove in dritto civile ed in dritto penale, tradotto ed annotato da V. E. Lanza, A. Ciaramelli, E. V. Gaetani. Napoli, 1846.

2 Nous citerons notamment l'arrêt de cassation du 46 août 1848, qui

En même temps que nous suivions le mouvement des idées et des faits dans le domaine de la pratique, nous ne perdions pas de vue les données philosophiques sur lesquelles repose la base de la théorie des preuves. Le Traité de la Certitude de M. Javary, couronné par l'Institut en 1846, ainsi que le Rapport fait par M. Franck sur les Mémoires relatifs à cette importante question, nous ont fourni des documents précieux dont nous avons profité pour compléter notre Introduction.

Nous avons aussi tenu compte de la critique que nous avait adressée M. Giraud dans le Rapport qu'il a fait sur notre livre à l'Académie des sciences morales et politiques', lorsqu'il nous reprochait de trop nous attacher à la raison métaphysique, de ne pas assez tenir compte des diverses époques et des divers systèmes d'organisation judiciaire. Sans doute, nous ne partageons pas l'opinion de ceux qui considèrent la doctrine des preuves légales comme un correctif nécessaire du système qui confie à la magistrature seule, en toute matière, la connaissance des procès; en d'autres termes, nous ne pensons pas que le bon sens soit l'apanage exclusif du jury: mais dans l'appréciation historique des doctrines judiciaires, nous avons fait une part plus large à l'influence qu'ont exercée sur la théorie des preuves les institutions en vigueur dans telle ou telle contrée, dans tel état de civilisation plus ou moins avancé. Nous avons suivi avec intérêt cette étude comparative, quant à une matière d'une haute importance,

donne gain de cause à notre théorie sur la partie à qui incombe le fardeau de la preuve et sur la preuve des faits négatifs.

'Séance du 15 novembre 1843. (Voy. le Rapport dans la Revue de législation, t. X, p. 444 et suiv.)

négligée dans notre première édition, et traitée ici avec les développements qu'elle comporte: nous voulons parler de la preuve des faits diffamatoires. On y trouve un des exemples les plus curieux de la réaction qu'ont exercée les mœurs publiques ou privées sur la faculté légale de prouver certains faits, depuis la loi de Solon, qui autorisait la preuve des faits injurieux de toute nature, jusqu'au décret du 17 février 1852, qui, à l'égard même des fonctionnaires publics, entoure de graves restrictions la preuve des faits diffamatoires.

Nous avons aussi satisfait à un désir généralement exprimé, en exposant avec plus d'étendue les principes sur l'effet rétroactif et sur le droit international.

:

Enfin nous avons fait à notre classification quelques modifications, qu'il est facile de saisir du premier coup d'œil la principale consiste à avoir élagué de notre plan les délits commis à l'audience et la reconnaissance de l'identité des condamnés, matières qui nous ont paru rentrer dans la procédure criminelle proprement dite, plutôt que dans la théorie des preuves. Cette suppression a été bien plus que compensée par les additions nombreuses et importantes que renferme cette nouvelle édition.

DES PREUVES

EN DROIT CIVIL

ET EN DROIT CRIMINEL.

INTRODUCTION.

1. Si la science du droit tend à satisfaire la conscience humaine par son objet, qui n'est autre que la consécration des règles de la justice, en tant que le maintien en intéresse la societé', cette science répond également à un besoin de l'humanité lorsqu'elle se propose pour but, dans la sphère qui lui est assignée, la découverte de la vérité, aussi nécessaire à l'intelligence de l'homme que la justice l'est à sa conscience. Nous découvrons la vérité, lorsqu'il y a conformité entre nos idées et les faits de l'ordre physique ou de l'ordre moral que nous désirons connaître. Prouver, c'est établir l'existence de cette conformité. Les preuves dont fait usage l'intelligence, sont les divers moyens par lesquels elle arrive à la connaissance de la vérité.

2. Dans les questions soumises aux tribunaux, le débat peut rouler sur un point de fait ou sur un point de droit. Prouver le fait, c'est constater certaines ac

Dante, dans son traité de Monarchia, définit le droit «< realis et per«sonalis hominis ad hominem proportio, quæ, servala, servat societatem. >>

tions de l'homme ou certains événements de l'ordre de la nature, qui sont de nature à provoquer l'exercice de la justice sociale. Prouver le droit, c'est établir que, tels faits étant constatés, telle ou telle prescription de la loi y est applicable. Mais lorsqu'on parle de la théorie des preuves, on n'entend pas s'occuper de la preuve du droit. Le but qu'on se propose, c'est la recherche des meilleurs moyens à employer pour vérifier les faits qui sont l'objet des débats judiciaires. Ce n'est pas que la preuve du droit doive être étrangère à ces débats. Nous ne résoudrions pas, comme Vinnius, par l'affirmative la question qu'il se pose dans ses Quæstiones selectæ « An solæ quæstiones facti sint objectum pro<< bationis? >> Le fameux avertissement, qui a trop souvent interrompu les plaidoiries autrefois et de nos jours : Avocat, passez au fait; la cour sait le droit, fait peu d'honneur aux lumières des magistrats qui se sont permis pareille interpellation. Il est du devoir de l'avocat de plaider le droit, comme le fait, sinon pour enseigner la loi aux juges, du moins pour rechercher l'application, souvent fort délicate, des principes généraux de la législation à l'espèce qui leur est soumise. Mais cette preuve rentre dans une théorie toute spéciale, source à elle seule de nombreux développements, celle de l'interprétation des lois. Cette théorie, du reste, n'est pas régie à tous égards par les mêmes règles que celle qui nous occupe. L'interprétation n'est pas, en effet, un travail purement historique, où l'on se demande simplement en fait ce qu'a dit le législateur. C'est une œuvre d'art, dans laquelle il faut coordonner les résultats pour obtenir un tout homogène, harmonique. Le jurisconsulte, qui doit faire prévaloir l'esprit sur la lettre, a mission de combler certaines lacunes, de redresser certains écarts, ou plutôt certaines apparences d'écarts. Il ne lui est, sans doute, pas permis de refaire le mécanisme légal; mais il doit veiller à ce que le jeu des rouages, dans les détails, obéisse, autant qu'il est possible, à

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